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Under the stars (Sol)
2 participants
Markus Falkenberg
Markus Falkenberg
LÆRERTEAM Den som talar mycket säger sällan vad som är bra
La plume grince sur le parchemin comme un coup d’archet qui sonne atrocement faux.

Il glisse sa main libre contre ses tempes, sans parvenir à calmer l’agitation qui roule sous son crâne. Les mots défilent et s’assemblent, mais ne forment rien de neutres. Chaque phrase est trop imprégnée de tous ces sentiments qui ne devraient pas encore contracter son cœur à ce point.

Magni, je suis allé à la cascade, dans la forêt. Le parchemin n’y était plus. Est-ce que c’est toi qui l’a pris ?

Trop revendicateur. Trop clair, sur ses émotions. Trop peu amical. Quel foutu meilleur ami se soucierait d’un détail aussi trivial ? Il biffe chaque mot, avant de tenter une autre formulation :

Je voulais aller me baigner, l’autre jour. J’ai retrouvé la cascade par hasard, c’est drôle, le parchemin avait disparu.

Si loin de la réalité.  Et tellement con, comme prétexte, maintenant qu’il n'ignore pas qu'il ne sait pas nager. Il y est allé ce matin, après sa nuit avec Nyx. Il a escaladé la falaise avec l’énergie désespérée de quelqu’un qui ne sait ni ce qu’il cherche, ni ce qu’il espère trouver. Les rochers écorchaient ses mains, ce dont il se foutait entièrement. Là-bas, il a cherché son souvenir dans le paysage, il a cherché son rire derrière la cascade, il a cherché sa voix dans le son de l’eau qui coulait paisiblement. Son meilleur ami n’était pas là, il était seul avec ses regrets, ses fantômes, son désir, et cette frustration qui se mue parfois en colère, selon l’heure du jour. Frustration de ne pas avoir pu accepter ce qu’il lui offrait. Colère de voir cette amitié qui continue sa route dans les apparences, mais pas dans la réalité. Il a cherché ce vieux dessin de montagne qu'il avait déjà griffonné, lors d’une de ces magnifiques journées où ils étaient inconscients de la valeur qu’elles avaient. Et il ne l'a pas trouvé.

Est-ce que tu l’as amené là-bas?

La phrase suspendue sur le papier le nargue, trahissant la pensée qui virevolte avec le plus de clarté. Les dents se serrent contre l’intérieur de sa joue et il rature furieusement les mots écrits, avant de laisser tomber sa plume sur son bureau. Son dos s’appuie contre sa chaise et Drøm, sous sa forme de siamois, vient brièvement appuyer sa tête contre son cou. Foutu Hammarskjöld. Foutu cœur qui bat trop vite. Sur le mur de son appartement, l’horloge le nargue. Les aiguilles avancent à un rythme régulier, comme si le temps ne s’était pas arrêté. Il sait qu'il devra bientôt partir ; il a donné rendez-vous à Sol à la porte de son immeuble à vingt-trois heures. L’idée lui avait semblé très bonne, trois jours plus tôt, lorsqu'il l’avait impulsivement invitée au détour d’un couloir à Durmstrang. Le ciel s’annonçait clair ce week-end et il avait besoin de sortir de l’école pour s’aérer un peu. Avec quelqu’un d’autre, de préférence, pour éviter de ruminer. Sauf que l’énergie et l’envie lui manque, maintenant que l’heure approche. Son corps semble aspirer au repos facile, à l’oubli tout aussi aisé, qu'il ne peut trouver qu’en posant sa tête sur l’oreiller…avec l’usage de quelques potions de sommeil, parfois.

Il pousse un nouveau grognement, avant de se lever pour se diriger vers sa chambre. Il enfile ses chaussures et sa veste, en évitant de se regarder dans le miroir. Il sait que ses iris sont encore verts et il espère que Sol n’a jamais remarqué qu’ils sont habituellement bleu. Probablement pas…Elle était sûrement plus occupée à noter ses gaffes que la couleur de ses iris. Un sourire lui échappe à cette pensée, et il glisse avec davantage d’enthousiasme sa baguette à sa ceinture. La soirée peut être sympathique, s'il relaie tout le reste à l’arrière-plan. Il en est capable, il l'a trop souvent fait, déjà.

Il claque les portes derrière lui : celle de son cœur, de son appartement et de l’immeuble. Ses sorts de protection sont rapidement lancés, alors qu'il salue Sol d’un sourire enjoué : « Prête? » Il a vaguement hésité à lui montrer cet endroit, lorsqu'il lui a proposé. Il est plutôt possessif envers ses lieux préférés. Mais ça aurait été con, de la priver d’un si bel endroit, simplement par égocentrisme. Sa main attrape doucement la sienne et il les fait transplaner, visualisant les arbres, le haut de la montagne, le petit champ parfait pour s’étendre et le paysage, magnifique, étendu, visible à des kilomètres à la ronde. Lorsque leurs pieds touchent l’herbe drue, il relâche sa main, pointant aussitôt le ciel d’un signe du menton : « Pas mal, non ? » Il n'est pas un amateur d’astronomie, mais il sait reconnaître la beauté des étoiles dans un lieu comme celui-ci, où elles semblent briller pour eux.
Sol Yoonir
Sol Yoonir
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Under the stars

Le 12 mai 2023 - nuit  
@Markus Falkenberg


Les talons claquent sur les pavés. Son pas droit et ferme est plein de cet entrain qui la caractérise. Avancer devant avec la détermination de savoir où elle va. Même quand sa véritable destination lui est inconnue. L'appartement du professeur Falkenberg se situe dans le même quartier que le celui qu'elle loue ici, en partage avec une autre sorcière plus modeste. Il est vrai que ses habitudes moldues se font lentement moins présentes et que Sol a réappris à transplaner plus souvent, mais rien n'efface ses longues années de discipline physique et ses courses matinales sur le terrain gelé du centre d'entraînement spatial. Le sport est essentiel pour maintenir un esprit vif et discipliné, ses routines ce sont malheureusement assouplies avec son entrée dans l'équipe pédagogique de Durmstrang, à son grand regret. Ainsi, la professeure ne manque que rarement une occasion de marcher, comme pour économiser l'énergie magique qu'elle devrait dépenser en exerçant un saut dans l'espace-temps. Un soucis trop prononcé de préservation des ressources naturelles. Si l'on tend à penser, que la magie, est l'une d'être elles.

Son pantalon de tailleur aux couleurs chaudes d'un sable roux bouge en vague fluide sur des chevilles dénudées. Ses petites chaussures s'arrêtent au niveau de la maléole, des bottines basses, élégantes, peut-être peu adaptée à une sortie en forêt, mais Sol représente une certaine éducation qui ne se permet pas de vêtir de survêtement lors d'un rendez-vous avec un confrère. Quand bien même ce dernier ne soit que professeur à mis temps, et non docteur émérite. De lui à elle, si l'un doit trébucher sur une racine, elle sait de connivence évidente, que ce sera lui. Ainsi, la sorcière n'a pas hésité à saisir cette carte chance qui joue en sa faveur et à tester les biais du hasard et des probabilités. Un plaisir entièrement personnel, un trait d'humour destiné à elle seule, et à ceux qui pourraient le saisir, mais elle suppose qu'ils sont peu nombreux.

La montre d'argent, lune pleine sur un poignet sombre, tique vingt-deux heures et cinquante neuf minutes quand Sol s'arrête face à l'immeuble donné. Ses yeux, dans un regard calme, se posent sur la façade chaotiquement allumée de fenêtres et un sourire patient se dessine sur ses lèvres à peine maquillées. Un délicat et discret rouge-brun mat à peine plus foncé que sa couleur naturelle. Ses cheveux tressés de ce matin sont remontés en un assemblement rond de fines tresses sombres. Impeccable et distinguée. Même en week-end, même loin de la rigueur irréprochable qu'elle se donne à Durmstrang, Sol ne se défait pas de ses habitudes. Elle a toujours été une étrangère parmi les autres. Une sorcière parmi les moldus, une née-modue parmi les sorciers. Une française parmi les russes. Une femme parmi les hommes. Une noire parmi les blancs. Habituée à prendre les places qui lui sont dues, elle n'a rien d'autre à montrer aux autres que cette façade calme.

La porte claque et la silhouette de l'homme s'avance, enjoué. Sourire et attitude débordante tout en prise d'espace floue et superflue. Une expression vivante d'un être qui déborde souvent, elle a l'air de juger cela souvent d'un mauvais œil. En réalité cela l'enchante, même si la couleur verte de ses yeux d'ordinaire bleu la laisse songeuse. Le professeur la salue d'un signe de tête auquel Sol répond d'un sobre « Bonsoir ». Son accent écorche largement les sonorités norvégienne. Elle hésite, d'ailleurs entre les deux seules langues qu'elle maîtrise du royaume. A l'institut elle s'aligne sur celle parlé de façon officielle, mais à Göteborg elle hésite toujours, trébuche sur l'une ou l'autre, mélange les mots légèrement différents et finis souvent ses phrases en russe. « Prête? » Son collègue n'attend pas de réponse, prend en main la sienne et la situation, avant de transplaner sous un signe positif de sa part.

La sensation de transplanage ne lui fait même pas bouger l'estomac qui a subi trop de tour en centrifugeuse pour s'indigner d'une légère dépression du genre. Un vague éclat de ferveur enflammé ses iris quand elle songe au poid des jets qui avaient comprimés son corps au décollage de la fusée. Une sensation unique, terrible et belle à la fois. Rien ne pourra jamais lui faire revivre cette expérience. Entre peur de mourir de cent cinquante façons différentes, et incroyable euphorie de se sentir décoller dans l'espace sous un corps devenu étranger et si présent à la fois. Une émotion sincère brille dans ses iris quand la femme lève les yeux vers une voûte céleste magnifiquement lumineuse. « Pas mal, non ? » Le professeur Falkenberg a lâché sa main et regarde également, le nez en l'air, le ciel incroyablement dégagé entre la cime des arbres. L'éclat du sourire de Sol reprend un degré plus adapté à une discussion. Elle n'est pas seule, et même si elle côtoie l'homme depuis deux années, ils ne sont pas suffisamment proche pour qu'elle se laisse aller à plus de débordements. Peut-être qu'elle pourrait se laisser tenter à une ouverture un peu plus large de sa fenêtre d'observation ce soir ceci-dit. Après tout, le sorcier l'a invitée dans un lieu singulier, qui lui tient possiblement à cœur, et qui est, en effet, pas mal. Si sa traduction est correcte. Son regard repart à la contemplation des constellations, suit la courbe de la voie lactée, se tourne vers la courbe de la lune qui, analyse sa position et le degré des planètes. Son esprit cartographie les emplacements, identifie rapidement les points de repère et hoche la tête après quelques instants, satisfaite. Elle devine dans quelle partie du royaume ils sont. Cela lui suffit pour une première et rapide analyse.  « L'endroit est magnifique cher collègue. Je ne vous saviez pas amateur de contemplation céleste. Vous m'êtes plutôt l'air de celui qui a la tête sur les épaules que le nez dans les étoiles. Même si vos pieds ont tendance à être moins terre à terre. » Sol entend que ses phrases ne sont pas d'un suédois parfait. Elle a noté la langue de son interlocuteur, du moins elle le croit, et tente de s'adapter. Elle s'entend se tromper mais ne se corrige pas. Avoir l'assurance de tenir ses phrases suffit à faire oublier ses défauts de langage. « On est juste près de la ceinture d'Orion, depuis Durmstrang on l'aperçois moins bien. Vous permettez que je prenne des mesures ? » La question est rhétorique, Sol a déjà sorti sa baguette dont elle fait rouler doucement la pointe contre la pulpe de son pouce. Une habitude prise adolescente, dans une vaine tentative d'en nettoyer le bout qui semblait désespérément obstrué à la magie tant elle ne laissait filtrer qu'un mince filet de sortilèges. Avec des mouvements précis et net, au millimètre près d'un enseignement théorique, Sol trace des points lumineux dans le ciel qui viennent se superposer en hauteur aux points lumineux des étoiles formant la constellation choisie. De son sac en tissu elle sort son habituel carnet de note et un instrument d'argent qui se met immédiatement à répandre un son de cliquetis entre ses doigts. Ce ne sont que des mesures sans grande valeur scientifique, mais Sol ne peut s'empêcher de cartographier ainsi les lieux intéressants qu'elle visite. Cela lui permettra plus tard de l'enregistrer dans sa banque de données et peut-être qu'un jour il sera le meilleur endroit envisagé pour observer un objet céleste quelconque. « Vous savez professeur Falkenberg, les étoiles changent de couleur selon leurs états et leurs températures. Dernièrement, la deuxième étoile de la ceinture d'Orion, là, de la gauche, est plus chaude. C'est Alnilam, une des trois grandes bleues. Les vapeurs acides libérées par son réchauffement la donne des lueurs d'un bleu qui tourne au jaune-vert. Invisible pour ceux qui ne prêtent pas attention, en réalité l'étoile est passée en amorce de son dernier stade de supernova. » Sa baguette qui pointait l'étoile en question redescend le long de son corps tandis que son regard droit se plante dans les yeux de son interlocuteur. « Fascinant n'est-ce pas ? » Ses pupilles fixent les iris vertes de l'homme sans monter le moindre signe de volonté de faire des liens entre son discours et une autre réalité. Sol ne posera aucune question, mais elle espère tout de même que son collègue n'est pas en train de passer, lui aussi, dans une phase de réchauffement trop intense menant à l'explosion finale.



A cette nébuleuse une autre nébuleuse
Succède, puis une autre en la mère onduleuse.
De l'impalpable éther, océan sans milieu
Dont blanchissent au loin les archipels en feu...
Markus Falkenberg
Markus Falkenberg
LÆRERTEAM Den som talar mycket säger sällan vad som är bra
Du plus loin qu’il se souvienne, il a toujours aimé être en forêt. Petit, son père l’avait amené camper dans un lieu qu’il avait découvert grâce à son travail. L’enfant de sept ans avait été impressionné par tout ce qu’il voyait et entendait. Les grands arbres, le mugissement du vent sur les feuilles d’un vert tendre, le crépitement des branches sous les chaussures neuves, l’odeur de l’écorce humide, le grésillement des insectes, l’orchestre des oiseaux, les sons que nul ne peut identifier, et toutes les couleurs, éclatantes, multiples, vivantes. Dans cette harmonie naturelle et authentique, il s’était senti bien et en paix. Lui-même, enfin. On essayait déjà, à cette époque, de lui apprendre à réfréner son enthousiasme et sa jovialité. Il avait couru entre les conifères, comme s’il pouvait être libre, sans chaînes, sans convenances, sans obligations. Son père, exceptionnellement, ne s’était pas interposé ; il avait respecté son besoin enfantin d’échapper à toutes les contraintes qu’on lui imposait.

L’amour de la nature lui est resté, tout comme cette sensation de paix et de légèreté qu’il ressent inévitablement, dès qu’il se retrouve en forêt. Pour son propre équilibre et pour tenir le rôle qu’on lui a toujours demandé de jouer, il a pris rapidement l’habitude de s’isoler dans de tels lieux, dès qu’il le pouvait. Adolescent, il a tenté – avec succès- de soudoyer le garde-chasse pour pouvoir errer en paix. Adulte, il n’a pas rompu avec sa bonne habitude. Ses vendredis sont nécessaires à son existence au même titre que l’oxygène ; il a besoin de ces instants de quiétude, où il n’a plus à feindre malhabilement de correspondre à un moule dans lequel il n’est jamais parvenu à s’insérer.

Il amène rarement des gens dans les endroits qu’il préfère. Il y a bien quelques exceptions, mais elles sont rares. Sauf qu’il ne pouvait pas priver Sol d’une telle vue ; il a rapidement pensé à sa collègue, dès qu’il a remarqué la beauté de la voûte céleste lors d’une promenade nocturne. Et après avoir jeté un coup d’œil au ciel, il observe la réaction de la dite collègue : celle-ci contemple la même chose que lui, avec des réflexions très certainement différente, puis hoche la tête.   « L'endroit est magnifique cher collègue. Je ne vous saviez pas amateur de contemplation céleste. Vous m'êtes plutôt l'air de celui qui a la tête sur les épaules que le nez dans les étoiles. Même si vos pieds ont tendance à être moins terre à terre. » Un sourire s’étire sur ses lèvres, bien que le cher collègue le fait tiquer pour sa connotation très officielle, sans l’étonner complètement. Sol lui a toujours semblé respecter un décorum qu’il ne parvient à suivre que partiellement ; malgré la volonté de ses parents et ses tentatives pour devenir un meuble, il a toujours trouvé que le respect des conventions est excessivement emmerdant. C’est probablement pour cette raison qu’il préfère nettement le bureau des aurors aux réceptions mondaines des Falkenberg. Sauf que la situation de l’enseignante n’est certainement pas la même que lui. Ni son passé, d’ailleurs. Dont il ne sait pas grand-chose : il évite de faire des recherches sur ses collègues. « On est juste près de la ceinture d'Orion, depuis Durmstrang on l'aperçois moins bien. Vous permettez que je prenne des mesures ? » Elle n’a pas besoin de sa permission et il ne se donne même pas la peine de répondre officiellement à sa question rhétorique, hochant simplement la tête. Curieux, il l’observe sortir sa baguette puis tracer des points lumineux dans le ciel, avec une précision digne des plus grands duellistes. Sait-elle qu’elle possède une capacité que certains combattants n'acquièrent qu’après bien des années d’efforts essoufflants ? Il écarte ses pensées d’enseignant habitué à repérer les talents, faisant glisser de son épaule le sac qu’il a amené avant de partir. Il a rapetissé au préalable les objets qui pouvaient être utiles et il farfouille à l’intérieur, tandis que sa collègue sort un carnet de notes et un instrument d’argent. C’est plutôt marrant, qu’on puisse sortir un professeur de l’établissement où il enseigne, mais qu’on ne puisse sortir le domaine d’études dudit professeur. « Vous savez professeur Falkenberg, les étoiles changent de couleur selon leurs états et leurs températures. Dernièrement, la deuxième étoile de la ceinture d'Orion, là, de la gauche, est plus chaude. C'est Alnilam, une des trois grandes bleues. Les vapeurs acides libérées par son réchauffement la donne des lueurs d'un bleu qui tourne au jaune-vert. Invisible pour ceux qui ne prêtent pas attention, en réalité l'étoile est passée en amorce de son dernier stade de supernova. » Ses doigts qui s’étaient refermés sur la chaise qu’il cherchait se serrent brutalement devant l’affirmation et le regard de son interlocutrice. Bleu, vert, variation selon l’état…Ses propos sont-ils délibérés ou s'agit-il d'une simple coïncidence ? Il croit Sol suffisamment intelligente pour avoir remarqué le changement de couleur de ses iris, même s’il espère qu’elle ne se soit pas suffisamment soucié de lui pour l’avoir relevé. En final, ça n’a probablement pas d’importance. Ce n’est pas comme s’il lui devait la moindre explication sur le sujet, mais le phénomène l’emmerde suffisamment pour que la simple idée que quelqu’un l’ait potentiellement noté l’agace. « Fascinant n'est-ce pas ? » Fascinant, oui. Et dérangeant. Il extirpe finalement la chaise de son sac, celle-ci reprenant sa forme normale aussitôt qu’elle apparaît à l’air libre. Il la dépose nonchalamment sur le sol herbeux, avant de reporter son attention sur Sol d’un air volontairement inculte : « Je ne suis pas très doué en astronomie. Je dois admettre que vos phrases sonnent à mes oreilles comme une rude leçon d’arithmancie. » Ou comme une leçon de vie. Soit elle ne parlait que d’étoiles et aucun lien ne doit être fait ; soit le sujet dérivait, et il préfère faire semblant de n’avoir rien remarqué. Il plonge de nouveau sa main dans le sac, en retirant cette fois une épaisse couverture molletonnée.  De jour, il adore se balader partout où il le peut. Ses escapades se terminent toujours de la même façon ; un moment tranquille, dans l’obscurité, sous un ciel bien plus vivant que le plafond de sa chambre. Il pointe du menton le ciel, rajoutant d’un ton volontairement léger : « Mais même un idiot est capable de reconnaître ce qui est beau. Et les étoiles le sont, ça me suffit, lorsque je veux me détendre. » Il ne se considère pas comme un amateur de contemplation céleste, non. Mais il apprécie les paysages, les beaux tableaux, les choses à la fois infiniment grandes et petites. Il n’a pas menti : il n’est pas doué en astronomie, même s’il n’est pas totalement ignare sur le sujet. Sauf qu’il n’est pas insensible à ce qui échappe à des yeux qui ne voient que d’une façon infime ce qui est bien plus grandiose. Il étend la longue couverture sur le sol, là où l’absence d’arbres le permet, rajoutant avec un sourire moqueur :   « J’espère que mon affirmation n’est pas un sacrilège. Je suis généralement aussi maladroit avec mes mots qu’avec mes pieds. » Tout, de la tenue de sa collègue, jusqu’à ses chaussures et son attitude, incite à ce qu’il reste sérieux. Sauf que c’est plus fort que lui, dans cet endroit où il a l’habitude d’être lui-même. Il rajoute d’un air bien plus espiègle : « Peut-être encore plus avec mes pieds. » Et il ne s’attend pas à ce qu’elle le contredise. Il extirpe finalement de son sac, qu’il dépose sur le sol, un thermos et une boîte en bois, qu’il place à proximité : « Chaise ou couverture ? J’ai les deux. Et un thermos plein d’eau chaude, aussi, avec une sélection de mes thés favoris. Je ne savais pas quel serait votre préféré. » Il n’a pas envisagé d’amener de l’alcool, pas même une seconde. Il est en mission demain et une infusion, lors d’une soirée paisible d’observation, lui semblait bien plus appropriée.
Sol Yoonir
Sol Yoonir
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Le 12 mai 2023 - nuit  
@Markus Falkenberg


Pendant son observation, son collègue a entrepris de sortir diverses objets de son sac, et s'il marque une infime hésitation lorsque Sol pose directement ses yeux sombres dans les siens, elle fait le choix de ne pas la remarquer. Si elle note le gonflement rapide des veines sur le dos de la main agrippée à la chaise, la sorcière se retient de tirer la moindre conclusion. Dans un mécanisme précis, elle ferme la porte aux pensées invasives, peut-être s'autorisera-t-elle à revenir dessus plus tard dans la solitude de son lit avant de sombrer dans le sommeil. Non pas par curiosité mal placée, mais par soucis d'analyse et de besoin d'établir des connexions logiques entre différents éléments portés à sa connaissance. Elle ne fera rien de ce qu'elle pourrait en tirer, chercher à percer les mystères des personnes qui l'entourent ne l'intéresse pas. Elle a déjà assez à faire avec les mystères des éléments physiques et astral qui parcourent la terre pour s'occuper. L'homme dépose la chaise dans l'herbe avant de se retourner vers elle. Rien dans l'attitude du professeur laisse supposer que ses phrases aient été mal prises, ni que son intervention ait été jugées inconvenantes. La scientifique a trop de respect pour son collègue pour avoir même envie de se tenter d'autres allusions beaucoup plus subtiles et imperceptibles sur le sujet. Pas même pour elle-même. « Je ne suis pas très doué en astronomie. Je dois admettre que vos phrases sonnent à mes oreilles comme une rude leçon d’arithmancie. » Sa joue se creuse d'une marque d'un sourire retenu et Sol se détourne du visage de Markus pour se lever vers la voûte piquée d'étoile. Une visibilité exemplaire pour une contemplation nocturne. Un choix d'endroit parfaitement choisi, et un jour tout aussi bien trouvé. Même si quelques fins lambeaux de nuages étirés voilent l'éclat des étoiles, l'absence de pollution lumineuse suffit à faire oublier leur présence. Sol perçoit les sons feutrés des mouvements de son collègue qui continue de s'affairer autour de la chaise, elle doit reconnaître qu'elle ne savait pas à quoi elle devait s'attendre quand il lui a proposé devenir découvrir avec lui un endroit intéressant. Elle ne sait d'ailleurs toujours pas à quoi elle doit s'attendre. Peut-être que si la femme avait pris le temps de s'intéresser aux relations sociales dès son adolescence, elle aurait pu s'inquiéter que ce soit le genre de rendez-vous que deux adultes pourraient se faire, à l'abri des regards indiscrets, sous la coupole romantique de millions d'étoiles illuminant une cartographie aux mouvements imperceptibles. Une légère brise bruisse dans les arbres alentours, apportant un mélange d'essences boisées, soulevant d'une caresse le tissu léger de son pantalon contre ses chevilles. Un contact délicat qu'elle aime sentir tout particulièrement depuis quelques années. Depuis un nombre infime d'année. Depuis que la boite de métal s'est ouverte sur son visage livide d'avoir traversé l'atmosphère. Un léger tressaillement de narine suffit à indiquer l'agacement que cette pensée cyclique provoque en elle. Cette fracture dans sa vie est trop nette et elle a conscience de rapporter trop de choses à celle-ci. Comme le gouffre d'un trou noir, la lumière qu'il renvie de l'autre côté est devenu éblouissante, compact et impossible à contourner. Cette vérité l'agace, malgré tous les exercices qu'elle s'impose depuis qu'elle a pris conscience du poids de cette fracture dans son quotidien, la professeur ne parvient pas à discipliner son esprit suffisamment pour se détacher de cette considération fataliste. Et pourtant elle se doit de constater que cet amour nouveau pour la moindre brise d'air contre sa peau joue en grande partie au contraste de l'oppression de l'air recyclé de la station spatiale dans laquelle elle a vécu plusieurs mois. Que ce besoin humain lui est devenu conscient et agréable. Et que l'odeur de la nature est sans doute une des plus grandes richesses de la terre. Chargé de tout un volume de particules diverses et nécessaire à la prolifération des plantes, insectes, et animaux. A l'orientation du vivant, son déplacement, ses cycles. La vie. Ce souffle de vie. Ses yeux rivés sur les points lumineux qu'elle a tracé précédemment, elle note quelques données supplémentaires sur son carnet de note tout en écoutant l'auror-professeur reprendre la parole. « Mais même un idiot est capable de reconnaître ce qui est beau. Et les étoiles le sont, ça me suffit, lorsque je veux me détendre. » Un léger froncement de sourcils tire Sol de sa contemplation active, mais elle ne détourne toujours pas le regard du ciel. Au contraire, elle relève sa baguette pour faire disparaître les points lumineux et en lancer d'autres et sortir de son sac un petit télescope que plusieurs sortilèges ont rendu aussi performant qu'un homologue de plusieurs kilos. Habile utilisation de la magie, qui a ravit l'astronome qu'elle est. Pouvoir déplacer des outils aussi performants dans le creux de sa main et aller d'endroit en endroit sans avoir à construire un observatoire entier de plusieurs milliers de dollars représente un atout qu'elle savoure chaque jour depuis qu'elle a fermé la porte au monde industriel moldu. Sa stature droite est d'une rigidité exemplaire, aucun de ses gestes n'est superflu et quand elle appose la lunette contre son œil gauche, le bras qui le maintient est d'une fermeté remarquable. Ses doigts font rouler les bagues métalliques autour des diverses lentilles pour ajuster la netteté et d'un geste elle défait tous les points lumineux pour ne conserver que la chaude lumière naturelle des astres solaires. Mais cette fois ce n'est pas une étoile qu'elle observe, mais l'éclat rond et légèrement bleuté de Jupiter. « J’espère que mon affirmation n’est pas un sacrilège. Je suis généralement aussi maladroit avec mes mots qu’avec mes pieds. » Elle entend le ton moqueur mais ne réagit pas immédiatement, ce n'est que lorsqu'il reprend : « Peut-être encore plus avec mes pieds. » Que Sol laisse son rire rouler dans sa gorge et secouer ses épaules. L'instrument est rapidement rangé dans son sac après quelques chiffres supplémentaire inscrits dans le carnet. D'un fluide mouvement d'épaule, la femme se tourne à nouveau vers l'espiègle professeur, un éclat amusé dans son regard. C'est alors qu'elle remarque l'installation prévue par son collègue, la couverture qui a l'air aussi épaisse qu'un édredon, la chaise posée tout contre et le thermos qu'il vient poser à côté d'une boite en bois. De douces attentions qui interpellent la sorcière et qui ne peut s'empêcher de poser un regard perçant sur l'homme qui se trouve en face d'elle. L'idée la percute, enfin, que les piques-niques dans les bois à la belle étoile peuvent être de parfait prétexte pour lancer des idées de rapprochement intimes. Un court instant elle détaille le visage du Falkenberg, espérant y trouver les signes qui pourraient l'aider à mettre immédiatement de côté ce genre d'intention dans l'invitation de son collègue, mais son inspection est interrompue par une nouvelle phrase qui vient chasser toute appréhension sur la question. Après tout, Sol n'est pas le genre de personne à se laisser impressionner par un homme, encore moins par l'idée de devoir le débouter gentiment si nécessaire. Et elle déteste l'idée de devoir trop souvent penser à songer à ses relations avec d'autres personnes par le prisme d'une intimité recherchée. Ce sont des codes qui ne l'intéressent pas. « Chaise ou couverture ? J’ai les deux. Et un thermos plein d’eau chaude, aussi, avec une sélection de mes thés favoris. Je ne savais pas quel serait votre préféré. » Sa main dépose son sac sur le bord de la couverture avant qu'elle ne se baisse pour trouver place sur la couverture. Comme toujours ses gestes sont calculés pour ne pas effleurer le thermos ni la boite de thé, ses bottines restent obstinément du côté de l'herbe sans jamais toucher le tissus, et lorsqu'elle repli enfin ses pieds sous ses jambes, elle prend soin de faire en sorte de laisser les semelles droites afin de limiter les points de contact entre ces dernières et son pantalon. Son maintien, même assise en tailleur, est toujours aussi droit et précis. Elle a la rigidité de ses heures d'études passées à décortiquer des lignes de calculs écrites sur des tableaux blancs. « Un thé rouge, russe de préférence, sera parfait. Si vous avez dans vos thés favoris. » Elle ne maitrise pas le dernier mot employé, suppose sa traduction, l'utilise avec la même intonation possible que son collègue, mais une fois de plus, elle entend nettement la différence de prononciation. Dans son palais mental, elle inscrit sur le mur droit, ce nouveau mot de vocabulaire qu'elle doit perfectionner. Favoris. « Il n'y a rien de sacré dans l'astronomie, vous ne risquez pas de faire le moindre sacrilège. D'ordinaire, c'est plutôt moi qui commet ce type de bavure en présence de personnes croyantes. Vous avez une culture riche et imprégnée de beaucoup de mythes ici. » Plus d'une fois, certaines collègues ont montré leur agacements face à ses prises de position trop scientifique concernant certaines allégations et fêtes mythologiques en salle des professeurs. A Yule l'année dernière par exemple, elle n'a pas manqué de se faire assez vertement insultée par un homme qui, elle le sait désormais, appartient à ces grandes familles, et qui n'a pas hésité à se montrer explicite sur ce qu'il considérait de sa condition à elle par rapport à lui. Et au blasphème qu'elle avait osé faire. Il lui avait fallut déployer beaucoup d'effort pour ne pas insinuer trop clairement que de lui et elle, elle avait été la seule à monter là-haut. Et que, de lui à elle, elle n'avait jamais trouver l'ombre d'une quelconque maison divine. « Ceci étant dit, je doute que vous soyez aussi idiot que vous le comptez cher collègue. Au contraire. Nous n'avons peut-être pas la même façon de fonctionner, je vous dirais moins centré sur la logique et plus porté sur l'inattendu. Ce qui est sans aucun doute une qualité qui me fait défaut et qui convient à votre intelligence de duelliste. Mais je conçois qu'il n'est pas forcé de comprendre le théorème d'Alembert-Gauss pour savoir apprécier la beauté d'un ciel étoilé. Peut-être même, peut-on en apprécier d'autant plus son éclat sans la connaissance des vérités qu'elles racontent. » Son regard file un instant vers le ciel, avant de redescendre, rêveur, vers le paysage boisé qui les entourent. « Mais loin de moi l'envie de vous assommer avec mes cours arithmancie. Cette clairière à elle seule est belle. Ce doit être agréable de pouvoir s'accorder le temps de venir chercher la détente. » Une chose que Sol n'a jamais appris à faire totalement. Ou jamais trouvé le temps. Sauf peut-être quand elle se trouvait seule, à pincer les cordes de son violoncelle. Une autre habitude laissée derrière. Une autre qui lui manque en vérité bien plus qu'elle ne l'avait pensé. Délaissée de musique, son quotidien s'est légèrement terni. Peut-être bien, qu'elle aurait dû penser à trouver une solution pour l'emporter avec elle. Mais non, la sorcière sait que ça lettre n'aurait pas eu le même poids si son instrument avait disparu en même temps qu'elle. Et elle n'aurait pu supporter de laisser Artiome dans le doute de sa survie. Morte, pour lui, elle le fait moins souffrir. Elle les fait moins souffrir.




A cette nébuleuse une autre nébuleuse
Succède, puis une autre en la mère onduleuse.
De l'impalpable éther, océan sans milieu
Dont blanchissent au loin les archipels en feu...
Markus Falkenberg
Markus Falkenberg
LÆRERTEAM Den som talar mycket säger sällan vad som är bra
Il l’observe s’installer sur la couverture, sans l’imiter immédiatement. Il s’assure au préalable de ne rien avoir oublié, alors que Sol achève de prendre place, le maintien droit. Il a eu une bonne éducation, mais il a souvent l’impression qu’ils ne viennent pas du même monde, elle et lui – et il ne fait pas référence au côté magique. Ses gestes sont plus précis que les siens et elle lui inspire la rigueur ; une rigueur qui s’oppose totalement à sa nonchalance, à laquelle il tient. « Un thé rouge, russe de préférence, sera parfait. Si vous avez dans vos thés favoris. » Il ne relève pas la faute, hochant simplement la tête avec un léger sourire. L’accent de Sol lui plaît. Il a toujours aimé tout ce qui lui rappelle les autres pays et le dépayse un peu de Göteborg. Même si dans l’immédiat, ça lui fait aussi penser à son meilleur ami et à ses mots colombiens qui se glissent parfois dans leur conversation. Ou glissaient. Les conversations, ce n’est pas ce qui abondent le plus entre eux actuellement.

Il repousse la lame de fer qui menace de s’installer au creux de son ventre, reportant son attention sur sa collègue : « Il n'y a rien de sacré dans l'astronomie, vous ne risquez pas de faire le moindre sacrilège. D'ordinaire, c'est plutôt moi qui commet ce type de bavure en présence de personnes croyantes. Vous avez une culture riche et imprégnée de beaucoup de mythes ici. » Ses épaules se haussent : il n’est pas particulièrement croyant. Devant ses parents, il a toujours dit ce qu’il devait dire et feint de paraître reconnaissant pour son don. Dans la réalité, il se fout pas mal des Dieux. Ils ne gouvernent pas sa vie et n’empêchent pas la mort. Il s’installe à son tour sur la large couverture, de l’autre côté du sac. Il est moins précautionneux que Sol ; ses gestes sont plus lourds, plus gauches, de ceux qui ne font pas attention à comment ils se positionnent. Il prend place, c’est tout, sans réfléchir à autre chose que de ne pas renverser la boîte de thé et ne pas toucher sa collègue par inadvertance. Il replie ses jambes sous lui, tout en sachant pertinemment que ses pantalons en seront probablement tachés. Désinvolte. « Ceci étant dit, je doute que vous soyez aussi idiot que vous le comptez cher collègue. Au contraire. Nous n'avons peut-être pas la même façon de fonctionner, je vous dirais moins centré sur la logique et plus porté sur l'inattendu. Ce qui est sans aucun doute une qualité qui me fait défaut et qui convient à votre intelligence de duelliste. Mais je conçois qu'il n'est pas forcé de comprendre le théorème d'Alembert-Gauss pour savoir apprécier la beauté d'un ciel étoilé. Peut-être même, peut-on en apprécier d'autant plus son éclat sans la connaissance des vérités qu'elles racontent. » Que Sol soit plus centré sur la logique que lui, il n’en doute pas. Mais s’il met davantage l’inattendu au centre de sa vie, en-dehors des combats, est-ce vraiment le cas dans son travail ? Une opération bien rôdée demande autant de logique que de réactions vives ; une planification adéquate rendra les secondes plus ciblées et efficaces. Il passe d’ailleurs ces journées à enseigner à ses étudiants que la base d’un bon combat, c’est de se servir de sa tête d’abord. Même si, dans les faits, la plupart des duels sont ensuite menés avec cet instinct propre aux duellistes, développé au fil du temps.

Il fouille de nouveau dans son sac pour en sortir deux tasses avec des dessins d’ours, tandis que le regard de sa collègue file vers le ciel. « Mais loin de moi l'envie de vous assommer avec mes cours arithmancie. Cette clairière à elle seule est belle. Ce doit être agréable de pouvoir s'accorder le temps de venir chercher la détente. » Il n’est pas assommé. Même s’il ne connaît pas le théorème d’Alembert-Gauss et que les étoiles sont pour lui des énigmes, il adore voir la passion dans les yeux des gens qui l’entourent. Quelqu’un qui parle de ce qu’il aime devient toujours intéressant, peu importe le sujet. Il prend la boîte en bois, qu’il pose sur ses genoux, affirmant d’un ton doux :   « Agréable et nécessaire. J’ai besoin de ce genre de moments, pour mon équilibre. » Surtout actuellement, où cet équilibre est menacé depuis trop longtemps, bien avant que tout dérape avec son meilleur ami. Il ne le précise pas. Ses yeux verts brillent avec un peu trop d’intensité, alors qu’il précise : « Sinon, je ne penserais qu’aux combats en permanence. » Sinon, il ne penserait qu’à lui en permanence. Même si c’est quand même le cas, clairière ou non. L’endroit où il est ne change rien et ses promenades en forêt, même si elles sont indispensables, lui donnent trop de temps pour réfléchir.

Dans la boîte à thé, de petites étiquettes indiquent le contenu de chacune des neuf sections. Les sachets sont pré-remplies ; il n’a pas la patience de les remplir lui-même à chaque fois, et ses expériences avec du thé en vrac se sont soldées par davantage de thé sur le sol que dans le sachet. Il prend un premier sachet de thé rouge d’Afrique, qu’il laisse tomber dans la première tasse, avant de déposer un sachet de thé noir dans la seconde. Ses paroles résonnent en même temps, alors qu’il entreprend d’ouvrir le thermos : « Je suis porté sur les réactions immédiates, mais il y a aussi de la logique, dans les duels. Elle s’applique de façon plus simple que lorsqu’il est question d’étoiles mais…Un bon duelliste ne peut pas agir en se fiant uniquement à son instinct et à ses réactions immédiates. Il doit prendre en compte son environnement, les faiblesses de l’autre et les siennes, avant d’appliquer la meilleure des stratégies. » Même si ça foire, parfois. Un léger ricanement glisse entre ses lèvres, tandis qu’il remplit d’eau chaude les deux tasses : « Enfin, en théorie. Il m’arrive aussi de juste balancer des sorts, sans qu’il y ait beaucoup de raisonnements derrière. » Et ça se passe généralement bien, quand il ne se prend pas les pieds quelque part. Il remet le bouchon sur le thermos et ferme la boîte à thé, redéposant les deux sur la couverture, avant de relever ses yeux vers Sol : « Et vous ne risquez pas de faire le moindre sacrilège en ma présence. Je ne suis pas très croyant. Faut pas le dire à ma famille, par contre. » Son sourire ne disparaît pas. La quantité de choses qu’il ne faut pas dire à sa famille…D’une main, il prend la tasse destinée à Sol et lui tend, tout en jetant un coup d’œil à Drøm qui est allé se rouler un peu plus loin sous un arbre, visiblement désintéressé : « Tenez. Thé rouge, mais d’Afrique, désolé je n’en ai pas qui provient de la Russie. Je vous laisse gérer le temps d’infusion. » Lui a l’indécence de ne jamais retirer son sachet de sa tasse.
Sol Yoonir
Sol Yoonir
LÆRERTEAM Den som talar mycket säger sällan vad som är bra
Under the stars

Le 12 mai 2023 - nuit  
@Markus Falkenberg


Elle le regarde s'installer avec une attention douce et non insistante. Il n'est pas question d'étudier ses gestes ni de les commenter, quand bien même elle aurait des choses à dire. Elle ne se permet des réflexions et des regards clairvoyants qu'envers ceux qui posent les mêmes types de jugement sur sa propre personne. Et la professeure sait que son collègue est de ceux qui considèrent les conventions sociales comme un poids plus qu'un tremplin. Cela lui convient bien, après de trop nombreuses années à contrôler le moindre de ses battements de cils, elle apprécie ces moments plus légers qui lui permettent de laisser plus facilement sa personnalité s'exprimer. Et si elle le trouve légèrement gauche et se permet quelques petites blagues sans méchanceté sur le sujet de temps en temps, Sol ne lui fera jamais sentie qu'elle trouve sa fylgia d'ours très parlante envers ses manières. Elle préfère garder ces remarques pour elle, son objectif est opposé à celui de blesser son sympathique collègue ou de mettre de la distance courtoise et froide entre deux compétiteurs. Ici ses collègues n'ont plus ce genre de rôles ni de comportements. « Agréable et nécessaire. J’ai besoin de ce genre de moments, pour mon équilibre. » Ce sont des choses qu'elle conçoit et qu'elle conceptualise facilement sans pour autant le mettre en pratique souvent. Surtout ces dernières années. A quand remonte le dernier moment de pause qu'elle s'accorde pour elle ? Depuis sa dernière partition de violoncelle, et encore. Était-ce un vrai moment agréable ? Son cœur trop lourd hurlait contre les croches pointues des accords, les crissements des cordes frottées et frappées par l'archet cognaient comme les marteaux qui frappaient sa poitrine. Non, ce n'avait pas été un moment doux et agréable du genre de ceux soir. C'était un moment de déchirement et de regrets. Une prise de décision terrible menant à sa propre mort, à sa disparition silencieuse, complète, et irrémédiable. Ses cils frémissent et les yeux cherchent le vide spatial pour se plonger dans la contemplation passive de ces forces invisibles. Ce serait se mentir à elle-même de ne pas reconnaître cette-là comme un changement complet de trajectoire, comme un caillou qui avait fragilisé sa détermination à toute épreuve. Et que la possibilité qu'elle ne s'accorde plus de temps libre se cristallise autour de cette sensibilité impossible à faire disparaitre : le risque de tourner en boucle sur ses regrets est trop élevé. « Sinon, je ne penserais qu’aux combats en permanence. » L'idée l'a fait sourire et Sol revient fixer son attention sur Markus dont les yeux brillent avec un peu plus d'intensité. Elle ne peut qu'imaginer la difficulté de son travail en dehors de Durmstrang. L'intensité de son engagement au quotidien pour protéger la population magique et empêcher la montée en puissance de sorciers trop avides de pouvoir et de contrôle. La professeure qui a connu les répercussions du Lord Voldemort anglais n'a pas oublié les dangers qui rôdent autour d'eux et le travail inlassable des aurors qui en découle. Probablement qu'elle connait mal l'entièreté de ses missions au quotidien, les métiers de la défense nationale ne l'avaient pas intéressés à l'époque des orientations professionnelles de Beauxbâtons. Sa curiosité n'avait jamais poussé au-delà des lieux communs sur leur sujet : se battre en duel contre des pratiquants et trafiquants de magie noire en tout genre. Et de la protection des lieux importants, comme les écoles de magie en cas de tension. Sol imagine cependant que le tout dot être entre-coupé d'enquêtes et des rapports d'observations. Peut-être qu'elle serait tentée de poser plus de questions au Falkenberg si l'occasion se présente. Mais elle aurait peur de paraître déplacée, il doit déjà passer beaucoup de temps à expliquer son métier à ses nombreux étudiants chaque année.

Avec une certaine fascination rendre, Sol suit les mouvements des doigts qui cherchent des sachets de thé dans sa boîte en bois qui embaume d'odeurs épicées dans l'air du soir. « Je suis porté sur les réactions immédiates, mais il y a aussi de la logique, dans les duels. Elle s’applique de façon plus simple que lorsqu’il est question d’étoiles mais…Un bon duelliste ne peut pas agir en se fiant uniquement à son instinct et à ses réactions immédiates. Il doit prendre en compte son environnement, les faiblesses de l’autre et les siennes, avant d’appliquer la meilleure des stratégies. » La professeure regarde son collègue avec un intérêt plus vif. Les duels sont un domaine qu'elle est loin de maîtriser, elle admet facilement néanmoins que ce soit une affaire plus complexe qu'un enchaînement de sorts d'attaques et de défense lancés au petit bonheur la chance et que les compétences de duellistes se distinguent également par leurs capacités d'analyse de situations. Pourtant elle doit reconnaître que ne connaissant principalement de son collègue que le côté blagueur, à la limite de l'enfant espiègle, et maladroit, Sol a un peu de mal à m'imaginer dans un contexte plus sérieux d'analyses. Non pas qu'elle doute de ses capacités à l'être, mais son imagination n'est pas des plus prolifique quand il s'agit de se faire des peintures mentales de situations qu'elle n'a pas vu de ses propres yeux. Concevoir des suites de chiffres et d'équations mentalement est d'une facilité déconcertante pour son cerveau sur-entrainé à l'exercice, mais imaginer des personnes et des situations autres lui sont bien moins naturels, voire impossible.  [color:b106=corn-flakes]« Enfin, en théorie. Il m’arrive aussi de juste balancer des sorts, sans qu’il y ait beaucoup de raisonnements derrière. » Un léger rire glisse sur sa langue avec douceur. Une façon de faire toute aussi valide que celle précédente au vu du hasard des instants et des rencontres qui obligent parfois les hypothèses les plus simples à se succéder les unes aux autres en espérant trouver une concordance efficace. Toutes les avancées scientifiques ne sont pas que le fruit d'une étude savante et sciemment émises. La part du hasard des prospections lancées à tout va est tout aussi importante c'est pourquoi la chercheuse est loin de remettre cette pratique en question. En revanche ma façon de présenter les choses l'amuse fortement. Le Falkenberg reprend la parole après avoir empli les deux tasses d'eau fumante issue de son thermos et Sol qui observe toujours ses gestes avec une tendre attention se laisse happer par les volutes de condensation qui dansent au-dessus d'elles. « Et vous ne risquez pas de faire le moindre sacrilège en ma présence. Je ne suis pas très croyant. Faut pas le dire à ma famille, par contre. » La mention de sa famille lui fait relever les yeux vers son interlocuteur. La française est très loin de connaître toutes les spécificités des familles qui composent la haute société magique scandinave, par manque d'intérêt pour les rivalités qu'elle juge triviales entre ses membres. En revanche, elle baigne depuis suffisamment longtemps dans les récentes agitations politiques pour savoir que Markus porte le nom de l'actuelle Première Ministre et qu'en ce sens, sa dernière phrase est plus lourde que le ton léger qu'il a employé. Elle ne l'a jamais questionné sur son degré de relation familiale avec celle-ci, ni de celui du Järl. Sol a néanmoins jugé au vu de la façon qu'ont les autres de s'adresser à lui qu'il ne devait pas figurer dans leurs lignées directes. Un cousin ou un neveu tout au plus, mais certainement pas un frère, ni un fils. Il n'en reste qu'il doit probablement porter sur ses épaules des attentes liées à ces prestiges que nombreux semblent avoir été qu'elle-même ne connait que trop bien. La seule chose certaine c'est qu'il peut compter sur elle pour ne pas chercher à parler de son manque de croyance aux autres Falkenberg qu'elle ne connait pas. Et même si elle les connaissait, sa retenue stricte légendaire la garderait d'une telle inconvenance. Sol se saisit de la tasse qu'il tend vers elle dans un sourire qui remercie sans un mot celui qui l'a lui offre. « Tenez. Thé rouge, mais d’Afrique, désolé je n’en ai pas qui provient de la Russie. Je vous laisse gérer le temps d’infusion. » Un temps qu'elle oublie toujours de maîtriser, pus adeptes des nombreuses tasses de thés et cafés froids délaissés sur un coin de bureau et retrouvé des heures plus tard, que des délicats moments de silence à siroter une boisson chaude au coin d'une fenêtre à regarder la neige tomber en silence. A force, elle en est même venue à apprécier ces breuvages froid. Ou par s'y résoudre. La sorcière n'en n'est pas réellement fixée sur le fond de cette constatation. Même si Neb trouve toujours un malin plaisir à se moquer de sa sorcière quand cette dernière oublie qu'elle pourrait simplement faire réchauffer ses tasses en bonne sorcière qu'elle est. Mais ses habitudes moldues sont difficiles à gommer même dans un environnement entièrement magique. « Thé rouge d'Afrique, cela convient tout à fait. Cela me rappelera des lointains souvenirs. A dire vrai je ne m'y connais pas tellement en différentes essences de thé, j'ai tendance à me satisfaire de ce que j'ai à disposition sans chercher à faire la bouche fine. » Elle a traduit l'expression française sans même savoir si celle-ci à un équivalent suédois ou non. D'un geste doux sa main lisse la couverture avant de poser sa tasse dessus. En relevant les yeux vers la clairière qui les entoure elle aperçoit les deux billes jaunes des yeux du chien noir dans l'ombre des arbres. Neb regarde, assise et immobile, la scène des deux sorciers sur leur couverture à la belle étoile, sans dire un mot. De temps en temps elle tourne sa truffe sombre vers l'ours allongé en boule à quelques pas d'elle sans tenter la moindre interaction pour le moment, hésitant néanmoins à laisser l'ursidé dans sa solitude pour tenter une distraction de type recherche d'odeurs intéressantes à suivre. « Je ne peux qu'imaginer l'intensité que doit être les combats dans votre quotidien. Je n'ai jamais été particulièrement douée avec ma baguette ce qui me concerne. Cependant je suis sûre que vos duels qu'ils soient préparés selon une stratégie soigneusement choisie, ou le fruit d'un hasard provoqué, que vous excellez dans le domaine. Le fait tes factuel que vous êtes encore en vie pour en discuter avec moi suffit à me convaincre que mon raisonnement, bien que raccourci, n'est pas entièrement erroné. » Son sourire se fait plus amusé et moins factice alors qu'elle s'amuse de sa propre inconvenance à oser exprimer ainsi une admiration. « J'oserais même ajouter que la capacité mobile incroyablement hasardeuse que vous montrez à l'institut appuie doublement cette hypothèse. Ceci-dit beaucoup de grands événements sont les conséquences de hasards maladroits. Ne vous méprenez pas, je suis sincèrement impressionnée par vos capacités, et curieuse de pouvoir vous voir à l'œuvre en réalité. » Peut-être bien qu'elle pourrait prendre le temps d'aller assister à un de ses cours un jour, c'était une chose qu'elle avait l'habitude de faire à l'époque où elle donnait des conférences, d'aller assister à celles de ses collègues. Tant par curiosité scientifique que par nécessité de les étudier et mesurer les risques de les voir prendre sa place et ses subventions. Là, les objectifs seraient bien différents. Elle n'estime plus être en concurrence avec n'importe qui. Elle n'a plus d'objectifs autres que des projets de recherches personnels et défaits de toute importance de carrière. Elle a accepté que celle-ci soit finie en fermant la porte au monde moldu. « Après tout cela pourrait me permettre de prendre du temps libre. Chose que je ne m'accorde pas aussi facilement que vous. » Sol se fait la réflexion qu'elle est restée trop longtemps seule avec ses pensées quand elle était en orbite autour de la terre, et que l'expérience n'a pas été que concluante. Dans le sous-bois, un léger grognement canin résonne. Neb désapprouve, et sa colère est telle qu'elle s'est mise à trottiner en silence tout autour de la carrière. « Voyez, une clairière en pleine nuit, et je ne peux me résoudre à ne pas songer aux étoiles et aux mouvements invisibles des particules qui nous entourent. Une croissant de lune et je sors un instrument pour mesurer les taux de photons perçus dans l'atmosphère et compléter mes données sur l'influence de cette lumière détournée sur les particules de magie. Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres, mais il m'est difficile d'apprécier le silence de la nature sans l'observer par le prisme de la science et des questionnements. Cela dit j'aime cette vision qui m'est propre, je vous remercie encore une fois pour cette invitation Markus. Et pour le thé, cela va en soi. Je n'ai encore que peu de connaissances avec qui partager des moments agréables, j'apprécie énormément l'attention. Quant à vos croyances, vous pouvez compter sur moi pour n'en rien laisser sortir auprès de votre famille. Je ne crois pas avoir croisé d'autres membres de celle-ci par ailleurs, mais mes connaissances des ramifications de vos arbres généalogiques sont aussi infimes que les croyances associées. J'espère que vous n'en prendrez pas ombre si je vous dis que vos Douze Familles m'indiffèrent légèrement. » Les courbes d'un rictus poli mais foncièrement espiègle s'étale sur les lèvres de la chercheuse qui saisit une nouvelle fois sa tasse fumante pour la lever vers son visage jaugeant à la chaleur de la condensation la température de l'eau. Estimant que cette dernière n'est pas adaptée à être avalée, elle repose la tasse après avoir lissé la couverture du même geste que précédemment.






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