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la nuit, tous les ratons sont fleuris (Hana)
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Dax Tcherkassov
Dax Tcherkassov
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
Neuf enterrements, cette semaine. Six étalés sur les jours de boulot de l’autre fossoyeur, trois sur mes heures de week-end. J’ai donné plusieurs heures auparavant le dernier coup de pelle sur la terre tassée, cette terre humide et peu naturelle qui n’est pas vouée à faire naître la vie. En théorie. Je suis peut-être un rustre, mais j’aime les belles choses. J’aime les marbres ciselés des pierres tombales, les architectures des tombeaux, les gris veineux des vieux monuments. Mais ce que j’aime par-dessus, c’est la verdure, les fleurs qui s’aventurent là où elles ne seraient pas supposées être, les plantes qui poussent les morts pour se faire une place au soleil. Rien ne me semble plus magnifique qu’une jacinthe qui orne une plaque funéraire ou un lys qui salue une sépulture.  Les familles ne se préoccupent pas toujours de fleurir la dernière demeure de leurs disparus ; je le fais pour eux. Je me soucie peu des défunts en eux-mêmes, qui ne sont que des noms et des boîtes. Je me préoccupe toutefois de leur ultime habitacle.

J’ai donc fleuri les emplacements des enterrements de cette semaine, où aucune pierre tombale ne s’élève encore. J’y ai mis des chrysanthèmes, des œillets, des glaïeuls. Seul le lot 26 a eu droit à un traitement de faveur : je connaissais la petite décédée. Je lui ai constitué un bouquet plus conséquent, composé d’orchidées et de roses immaculées. Elle aurait probablement apprécié cette amoncellement de blancheur, même s’il est voué à être éparpillé par le vent.

Je suis satisfait du travail effectué. J’ai rangé ma baguette pour placer le dernier gerbe, qui ne survivra assurément pas aux froides températures du mois. Ma fylgia fouine joyeusement autour des pierres tombales et je la laisse faire, sans lui adresser la parole. Ce soir, je ne suis ni triste ni joyeux ; je suis neutre, incroyablement neutre, et je me demande si je devrais rentrer immédiatement chez moi ou plutôt profiter encore pour quelques minutes de ce lieu silencieux. J’opte pour la seconde option et je décide de refaire mon chemin en sens inverse, pour jeter un œil au chemin fleuri que j’ai établi.

Il n’y a qu’un problème : toutes les fleurs que j’ai placées sont disparues.

Je fronce les sourcils, tout en jetant un coup d’œil autour de moi. Soit les morts sont venus rechercher les bouquets, soit un vivant manque décidément d’argent et a décidé de les garder pour lui. Je fais quelques pas, attentif, jusqu’à ce que je remarque une silhouette et, non loin, un raton avec…des fleurs? Un léger sourire s’étire sur mes lèvres, où un rire risque de briser mon masque. Je m’approche lentement, en tâchant d’identifier l’individu qui accompagne le kleptomane. Vainement. À mes côtés, le panda roux vient fixer l’autre petite être. J’affirme, moqueur : « Je crois que ta fylgia veut devenir fleuriste. » Il n’y aucune animosité dans ma voix. La situation a le potentiel de m’amuser, sauf si ces intrus se montrent hostiles. Je poursuis, désinvolte : « Vous êtes venu ici tous les deux pour voler mes tombes ou vous aviez d’autres intentions? » Et que compte-t-il faire de son butin?
Hana Detlefsen
Hana Detlefsen
STYRKE I fara, behov och elände kräver det mod i bröstet
raton fleuri, cerveau endormi
vendredi 4 novembre 2022, 22h22 King est surexcité.
C'est lui qui m'a guidé depuis les portes de l'école, à travers l'île de Durmstrang, jusqu'au bateau, parmi les ruelles pavées de la ville, et au cœur du cimetière. Moi, j'ai les yeux rivés sur ce que je tiens entre les mains, sauf quand je me perds dans mon intériorité, à réfléchir, à calculer. Ce projet ne devrait pas être si difficile, il ne nécessite pas de faire appel à des forces que je ne maîtrise pas. Il faut juste que j'arrive à imbriquer les éléments dans le bon ordre, avec les mots de liaison qu'il faut - et ce sont ces derniers qui m'échappent, j'en suis persuadée. L'action en elle-même est trop simple pour qu'elle soit le nœud du problème. Je continue à marcher à l'aveugle, rassurée par le cadre parfaitement perpendiculaire des ruelles dans lesquelles je me balade, encadrées de part et d'autre par des murs en forme de pierre tombale, des lieux de recueillement pour lesquels je n'ai peut-être pas la déférence qu'il faudrait.
À presque cinq mètres derrière moi, je sens King gambader, à droite, à gauche - il a encore moins de respect que moi. Je lui jette un regard : on dirait le chiot de Cecily quand on était petites, il émane de lui une énergie enfantine. Je souris et me détourne de lui pour me reconcentrer sur le projet que je tiens en main. Je me contente de tourner et de retourner l'objet entre mes mains : il s'agit d'une simple pierre gravée de runes de protections. Mes yeux clairs en scrutent chaque relief, mes doigts caresse la matière granuleuse. Elle passe d'une main à l'autre jusqu'à ce que je manque la laisser tomber. Alors je m'assois sur une tombe, les deux fesses sur le rebord froid, et je pose l'objet de mon enquête au milieu avant de sortir ma baguette du sac à dos à mille poches accrochés à mes épaules. Je la brandis vers le caillou et me concentre sur le geste que je pratique depuis des années. « Protego. » Immédiatement, les filaments de magie jaillissent et forment un petit dôme. Je déplace ma baguette, la source du sortilège, et l'observe sous tous les angles. Si je desserre ma prise, le filament ne cille pas. Mais dès que je n'ai plus qu'un contact superficiel avec le bois, peu importe l'intensité de mon intention, de ma concentration sur le sort de protection, le bouclier se troue, ramollit, s'affine, se dilue. Il faut que je continue mes recherches. Malgré tout, dans une dernière tentative en l'état, je me saisis de l'extrémité de ma baguette comme d'un crayon, je murmure l'incantation apprise dans les tréfonds des rayons de la bibliothèque de Durmstrang, et je me mets à graver la formule magique sur la pierre, de l'autre côté par rapport aux runes. La comptabilité des deux magies dépend de tant de critères que je choisis quasi systématiquement de tester avant d'émettre la moindre hypothèse.
Tout à mon ouvrage, je ne remarque ni les allées et venues enthousiastes de King, ni le petit tas de pétales qui se forme pas si lentement que ça à mes pieds, ni l'individu qui travaille de l'autre côté du cimetière. J'ai choisi ce lieu pour son calme : la sérénité des morts m'aide à réfléchir sans distraction. Ici, j'évolue en mode automatique, persuadée d'être toujours seule sauf lorsque je sens l'énergie particulière des groupes en deuil ; alors je fuis. Mais je ne ressens rien de tel aujourd'hui alors je continue mon travail, malgré le froid qui s'insinue à travers mes mains découvertes, malgré les crampes dans mes doigts. Je creuse la pierre, et malgré l'aide du sortilège j'ai l'impression de devoir heurter la surface dure à la seule force de mes muscles. Autant dire que ce n'est pas de tout repos. Je sursaute donc brutalement quand une voix moqueuse parvient à mes oreilles. « Je crois que ta fylgia veut devenir fleuriste. » La pierre m'échappe des mains et roule jusqu'aux pieds de l'intrus. Le sortilège ricoche et me crame la chair des doigts. « Merdmerdmerde. » J'en lâche ma baguette, qui échoue sur la pierre tombale - heureusement sans faire le moindre accro sur ce que je comprends être le fruit du travail de la personne qui se tient devant moi.
D'ailleurs, le brun continue : « Vous êtes venu ici tous les deux pour voler mes tombes ou vous aviez d’autres intentions ? » « Hein ? » Ah bah vraiment, bravo, Hana. Quelle répartie. Quel trait d'esprit. T'as l'air maline, maintenant. Je secoue la tête, quelques mèches rousses entrent dans mon champ de vision. Je fronce les sourcils et me gratte le côté du visage, l'image même de l'humain stupide en pleine réflexion d'un niveau intellectuel trop élevé pour ses capacités. « Hehehehe......... » C'est le rire de Trash King qui attire mon attention. Le raton-laveur se tient à quelques mètres de nous : entre ses mains, il tient des dizaines de fleurs, de tailles, de formes et de couleurs différentes. Et sur son visage se dessine l'expression de la malice dans sa plus pure forme. Ses petites dents blanches brillent dans sa fourrure grise et noire et dessinent un sourire... un peu gênant alors qu'il nous observe fixement. Je soupire lourdement et laisse tomber ma tête dans mes mains. Et c'est là que je le vois : l'énorme tas de pétales à mes pieds. « Ah non ! » Et sans beaucoup plus d'égard pour la personne, que je bouscule au passage, je me mets à courir après ma fylgia en hurlant : « Ah non Trash ! Trash King, reviens ici tout de suite ! Ça suffit les conneries ! » Et par moments d'ajouter : « Je suis désolée, monsieur ! Je n'avais pas fait attention. Trash King !! Reviens et arrête tes conneries ! »

@Dax Tcherkassov  la nuit, tous les ratons sont fleuris (Hana)  1249504063


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Dax Tcherkassov
Dax Tcherkassov
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
Il y a un tas de pétales au pied de la silhouette inconnue, tas de pétales qui ne peut que m’arracher un sourire. Je prends la parole et l’étrangère sursaute ; je vois la pierre qu’elle tenait entre ses mains tomber sur le sol et rouler jusqu’à moi, tandis qu’un sortilège…ricoche? Elle faisait quoi? « Merdmerdmerde. » Je fronce les sourcils, alors que la baguette tombe sur la pierre tombale, terminant de vider les mains de celle dont je ne connais pas l’identité. Décidemment, cette personne laisse tout tomber. J’émets un énième commentaire moqueur, qui ne semble pas faire beaucoup de sens pour l’intruse : « Hein ? » J’ai presque l’impression de parler une autre langue. Elle secoue la tête et se gratte le côté du visage, ce qui me donne presque l'impression que c'est plutôt moi, l'intrus dans ce cimetière, et que je viens de déballer une théorie particulièrement absurde. Le raton-laveur rit quant à lui à quelques mètres de nous, les mains pleines des fleurs que j'ai précédemment déposé sur les pierres tombales. Une sacrée récolte. Ses traits prennent une expression de malice que je n’avais jamais vu auparavant sur une fylgia et qui me fait froncer davantage les sourcils, tandis que ses dents dessinent un sourire…Indescriptible. Mon front se plisse, alors que je l’observe d’un air perplexe, partagé entre le rire et la confusion. La scène atteint son apogée alors que l’étrangère laisse tomber sa tête entre ses mains ; j’ai limite l’impression de me retrouver à l’hôpital avec l’une de mes gosses de pédiatrie, et je ne peux pas m’empêcher de trouver la scène extrêmement cocasse, déjà attiédi malgré moi dans ma froideur habituelle.

« Ah non ! » Elle se lève et me bouscule, m’obligeant à faire un pas vers l’arrière pour conserver mon équilibre. « Ah non Trash ! Trash King, reviens ici tout de suite ! Ça suffit les conneries ! » Mon sourire s’élargit, alors que je la vois courir après la petite créature, qui semble tout aussi divertissante que chapardeuse. Je sais déjà que je suis foutu, alors que j’observe les deux êtres : je suis trop amusé par ce qui se déroule devant moi. « Je suis désolée, monsieur ! Je n'avais pas fait attention. Trash King !! Reviens et arrête tes conneries ! » Monsieur. J’ai l’impression d’avoir pris dix ans d’un coup et d’être soudainement devenu un quadragénaire. Quand ai-je vieilli au point de mériter le qualificatif de monsieur? Je n’ai même pas de barbe, soir. Je jette un coup d’œil à ma fylgia, qui est…absente. Mes sourcils se soulèvent, et je constate que’une chose inatendue s’est produite : ma propre fylgia s’est jointe à la ronde. Elle gambade derrière celle qui court derrière le raton, probablement pour le simple plaisir de s’amuser, sans vouloir rattraper quiconque. La situation est si improbable que je ne peux retenir davantage mon rire, qui éclate avec douceur dans la nuit du cimetière :   « C’est très certainement l’une des choses les plus divertissantes que j’ai vu dans les dernières semaines. » Sans aucun doute. Ça me change des drames, des armes, des larmes, des morts, des maladies, de tout le reste. C’est de la vie, simplement de la vie à l’état pur. Je rajoute sans bien savoir à quel point elle peut m’entendre dans sa course :   « Tu peux lui laisser les fleurs, il semble tenir à son bouquet. » Et il le mérite, pour cette distraction offerte. Je n’irai toutefois pas jusqu’à dire que ces végétaux sont mieux avec les vivants qu’avec les morts. Les vivants ont un cœur qui bat, une respiration qui colore doucement leur peau, leurs veines, leurs joues ; les morts n’ont que les pierres tombales, la terre et, lorsqu’on songe à eux, ces pétales colorés. Mais je peux déposer des roses et des chrysanthèmes un autre soir et dans la mesure où le voleur ne semble ni très menaçant, ni très vil, je ne vois pas d’inconvénient à ce qu’il se barre avec mon travail de cette soirée - pas les morts, les fleurs. Je me penche pour ramasser la pierre, fronçant légèrement les sourcils, sans bien voir sa forme dans l’obscurité. Pupilles penchées vers l’objet, je rajoute sans perdre mon sourire :   « Même si le monsieur me donne envie d’être un peu sévère. » Le monsieur trahit probablement son âge. Je ne lui demanderai pas, mais elle ne semble certainement pas aussi âgée que moi. Je me penche de nouveau pour ramasser également sa baguette, et je tends les deux objets en face de moi, dans l’attente qu’elle les récupère :   « Par contre, je serais curieux de savoir ce que tu étais en train de faire. Tu t’es fait mal? » J’ai vu le sort ricocher, mais je ne sais pas exactement ce qu’elle trafiquait ; pas un bouquet, assurément.
Hana Detlefsen
Hana Detlefsen
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raton fleuri, cerveau endormi
vendredi 4 novembre 2022, 22h22 Je cours, et rapidement j'ai le souffle court. C'est qu'à part dans ce genre de course-poursuite, je suis pas la personne la plus sportive qui soit. Peut-être que c'est pour ça que Trash King est ma fylgia, un bout de mon âme pour me contraindre à faire de l'exercice, de temps en temps, à lever la tête de mes notes et de mes projets pour exister dans mon enveloppe corporelle. Le raton-laveur, lui, est constamment actif - physiquement, parce que mentalement c'est moi qui fait tout le taff - et il n'a donc pas les mêmes problèmes. Je le vois bien, déjà qu'il a de l'avance parce qu'il avait pris soin de ne pas trop s'approcher, sachant ce qui allait suivre, il me distance. C'est ridicule, je m'en rends compte au bout de quelques dizaines de secondes. Ses minuscules pattes ne devraient pas lui permettre de me distancer.
« C’est très certainement l’une des choses les plus divertissantes que j’ai vu dans les dernières semaines. » Je ralentis davantage, puis je m'arrête, les mains sur les genoux, essoufflée. Un rire sardonique m'échappe. « Au moins ses bêtises auront servi à quelque chose ? » Je tente une blague ; dans le fond, je pense que mes bêtises auront servi à distraire quelqu'an, et c'est mieux que rien. Je devrais peut-être arrêter de me prendre pour lea MacGyver de la magie et commencer par maîtrise la bête poilue que l'univers m'a imposé comme compagnon éternel. « Tu peux lui laisser les fleurs, il semble tenir à son bouquet. » Je relève la tête vers l'homme et le dévisage réellement pour la première fois. « C'est très généreux d'votre part, m'sieur, » soufflé-je en me faisant la réflexion que... il est bien moins âgé que ce à quoi je m'attendais.
D'ailleurs, il relève la chose : « Même si le monsieur me donne envie d’être un peu sévère. » Cette fois, j'ai de quoi répondre, je suis sortie de mes réflexions runiques et j'ai atterri sur Terre. « Menacer de sévérité joue pas en vot' faveur, cependant. » Mais je souris désormais, et je m'approche même de lui. Trash King, de son côté, a fini de courir entre les tombes en voyant que je me suis arrêtée. Il revient vers moi par petits bonds mal assurés ; je sens qu'il tire sur le lien, qu'il fait durer autant que possible le rapprochement, mais j'ignore la douleur lancinante qu'il réveille dans mes côtes ce faisant. J'ai l'habitude, et je sais qu'il ne fera jamais durer la chose. C'est sa manière de me faire comprendre qu'il n'a pas abandonné, que je n'ai pas gagné, et qu'il aurait pu me perdre dans la forêt s'il l'avait voulu - ce dont je ne doute par ailleurs absolument pas.
« Par contre, je serais curieux de savoir ce que tu étais en train de faire. Tu t’es fait mal ? » Je récupère ma baguette et ma pierre et les observe un instant avant de les glisser toutes les deux dans mon sac, que j'avais aussi abandonné aux pieds des morts. Je soupire. « Rien de très grave, » dis-je en lui montrant mes doigts, rougis par le dérapage incontrôlé du sortilège interrompu. « J'essayais de graver le caillou d'un Protego. Vous avez déjà tenté d'faire ça, incruster un objet d'un sortilège pour l'avoir à disposition sans baguette, sans magie, sans vous ? » Je rougis brusquement. Encore une fois, je me suis laissée emporter, j'ai divagué. « Pardon. Je... Pardon. Merci de votre compréhension, hein, pour lui, » ajouté-je en montrant Trash King, rejoint par la fylgia de l'homme - probablement. Iels se reniflent, font connaissance, et j'observe la scène avec appréhension. Trash peut se montrer... agressif, quand il le veut. Pour éviter tout débordement, je m'empresse de bredouiller : « Euh, pardon encore. On va pas vous embêter dans votre, euh, votre travail ? Enfin, pas plus longtemps. » Je glisse l'une des bretelles de mon sac sur mon épaule, incertaine quant à l'attitude à adopter.
Le monsieur n'a pas l'air méchant, mais je n'sais décidément pas interagir avec les gens.

@Dax Tcherkassov  la nuit, tous les ratons sont fleuris (Hana)  1249504063


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Dax Tcherkassov
Dax Tcherkassov
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
« Au moins ses bêtises auront servi à quelque chose ? »  Je la regarde s’arrêter, les mains sur les genoux. Une course trop mouvementée, peut-être. De fait, oui, ces bêtises auront bien servi. J’aime bien ce genre d’événement de la vie, stupide, banal, pur, de ceux qui ne s’inventent pas, mais qui se vivent. Je lui propose de laisser les fleurs à sa fylgia, l’observant un peu plus alors qu’elle relève la tête vers moi : « C'est très généreux d'votre part, m'sieur, » Encore un monsieur. Je rétorque aussitôt, tout en ramassant sa pierre : « Menacer de sévérité joue pas en vot' faveur, cependant. »  Un large sourire s’étire sur mes lèvres, sincère, tandis que je ramasse aussi sa baguette. J’ignore son âge, mais j’estime que l’âge adulte n’a pas encore été atteint. Son langage, son comportement, me font penser à ceux des individus qui sont entre les deux, à mi-chemin entre les difficultés d’un âge avancé et celles qu’on affronte à l’adolescente. Elle a peut-être quinze, seize ou dix-sept ans ? Je ne parierais pas pour plus, mais je ne suis pas non plus un expert, en estimation d’âge. Je lui tends ses affaires, tout en m’informant de ce qu’elle était en train de faire. Le raton laveur, de son côté, revient par petits bonds. Marrant, comme fylgia. Et dangereux, pour la discrétion.

L’étrangère récupère sa baguette et sa pierre, et je l’observe les ranger dans son sac. La situation ne m’agace pas. Je supporte plus facilement les gens de cet âge que les adultes ; cette rencontre m’amuse et ne m’inspire aucune animosité. « Rien de très grave. »  J'observe les doigts rougis, opinant de la tête. Rien de grave, en effet, même si c'est probablement inconfortable. « J'essayais de graver le caillou d'un Protego. Vous avez déjà tenté d'faire ça, incruster un objet d'un sortilège pour l'avoir à disposition sans baguette, sans magie, sans vous ? »   J’hausse un sourcil, intéressé par ses paroles. Non, je n’ai jamais tenté de le faire. Mes compétences en magie sont bonnes en défense, mais elles sont sommaires pour le reste. Je maîtrise à la perfection les potions et les mélanges, mais je n’ai jamais manifesté le moindre don en runes ou en enchantement. Qu’elle tente de créer un tel objet me semble donc fascinant – et intelligent. J’aime tout ce qui est intelligent. Même si cette intelligence se manifeste dans un cimetière, à la nuit tombée, avec un raton chapardeur de fleurs. Je la vois vaguement rougir, sans comprendre pourquoi : « Pardon. Je... Pardon. Merci de votre compréhension, hein, pour lui, » Pourquoi pardon ? Perplexe, j’attends la suite. Je ne comprends pas certaines réactions humaines. Cette manie que certains ont de s’excuser à tout moment, pour n’importe quoi, en fait partie. Le pardon, ici, me semble bien flou. Pardon pour les fleurs ? Elle a déjà dit désolée un peu plus tôt, le répéter ne sert à rien. Pardon pour l’enthousiasme à proposer du caillou ? L’enthousiasme fait partie de ces choses qui sont belles, au même titre que le soleil. Il n’y a rien à pardonner. Du loin de l’œil, je vois Styx qui s’est approchée de l’autre fylgia, d’un air beaucoup trop jovial. Le panda roux, sans vouloir prendre la parole, indique les pétals sur le sol et semble proposer de…quoi, d’en foutre partout sur les pierres tombales ? Je retiens un rire moqueur, en me disant que décidemment, passer trop de temps en pédiatrie lui donne de drôles d’habitudes. « Euh, pardon encore. On va pas vous embêter dans votre, euh, votre travail ? Enfin, pas plus longtemps. » Je secoue la tête dans un signe de négation, sans avoir besoin de réfléchir : « Tu ne m’embête pas. Et ça ne les embête pas non plus si tu restes, c’est plutôt difficile de déranger un mort. » Du menton, je pointe l’une des pierres tombales. Je trouve ma blague plutôt drôle, mais c’est peut-être une blague de monsieur. Ou de croque-mort. Un mélange des deux. Quoiqu’il en soit, il n’y a réellement personne qui peut être dérangé, dans un cimetière. Pas ce soir, alors qu’aucune famille ne vient pleurer son défunt. Et même dans une situation, elle ne dérangerait pas. Les cimetières sont des lieux ouverts à tous ; du moins, sauf aux vandales et aux connards. Je reprends : « Incruster un objet d’un sortilège, ce n’est pas trop dans mes compétences. Moi je ferais probablement exploser le caillou. » Un léger sourire s’est peint sur mes lèvres, alors que je rajoute : « Mais c’est génial, comme idée. » J’en vois l’utilité. Et les dérives, aussi, pour ceux qui pratiquent des sortilèges semblables, dans des buts peu glorieux. Je croise les bras contre mon torse, sans me départir de mon air plus amical qu’hostile – une attitude qui aurait été sûrement différente, si j’avais été en présente d’une personne plus âgée : « Tu vas souvent dans les cimetières pour graver des trucs ? J’ai peut-être lu trop de bouquins, mais j’croyais que les inventeurs opéraient plutôt dans un bureaux secret, des trucs dans le genre. » Même si personnellement je trouve qu’un cimetière c’est le lieu idéal pour tout. Ou presque tout. Il paraît qu’il y a certaines choses qu’on ne peut pas faire, dans un cimetière.

@Hana Detlefsen  
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