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Impar-frères (Nayir)
2 participants
Idriss Forslöf
Idriss Forslöf
GÖTEBORG Livet är en kamp, ​​du måste förbereda dig för striden
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14 mars 2024 - Résidence principale des Forslöf - 27e anniversaire d'Idriss

Le jeune homme savait se comporter en société mondaine, quand bien même il n'y avait jamais pris grand plaisir. Enfant du milieu étrangement conciliant avec les exigences parentales, il avait acquis sa liberté dans d'autres domaines, menant une négociation aussi patiemment qu'elle était officieuse avec ses aînés. Si bien qu'aujourd'hui, l'on se rendait à peine compte d'à quel point il pouvait avoir les mains libres lorsqu'il le voulait. De l'extérieur, il avait pourtant l'air du parfait homme d'affaires qu'avait voulu faire de lui sa mère, à la fois affable et efficace. Mais qui connaissait un peu son parcours et surtout le connaissait lui en privé, savait à quel point ce costume était à la fois trop grand et trop petit pour le garçon, à qui la toge de l'universitaire aurait bien mieux convenu.

Mais comme disait un philosophe moustachu et allemand, à qui Idriss avait voué un culte durant sa pré-adolescence, "amor fati", aime donc ton destin quel qu'il soit. Idriss se contentait donc de sacrifier ses ambitions de thésard refoulé sur l'autel d'une carrière plus conventionnelle, quitte à profiter sans honte du népotisme familial qui le mettait à l'abri de toute concurrence. Ainsi, il faisait beaucoup moins d'heures que ce qu'un autre que lui, aux dents beaucoup plus longues, auraient accomplies et en profitait pour lire plusieurs heures par jour dans la quiétude de son bureau, des ouvrages qui n'avaient strictement rien à voir avec le commerce des voitures volantes. Du temps que sa mère ne le surprenait pas trop souvent, il était tranquille.

Mais il avait conscience des limites de ses parents lorsqu'il s'agissait de défendre l'honneur des Forslöf lorsqu'ils étaient en "représentation" ; et oui, même son anniversaire était l'occasion d'une représentation. Hors de question de le fêter en comité réduit, il fallait au moins une petite centaine d'invités et en profiter pour mettre en avant les progrès de celui qui reprendrait un jour l'entreprise familiale. Il fallait serrer des mains, avoir des conversations de businessman, en profiter pour glisser un mot sur un contrat non signé, un avenant à rédiger... Idriss accomplissait sa tâche depuis deux heures de l'après-midi sans faillir, et il était bientôt dix-neuf heures.

Mais lui aussi, il avait ses limites, surtout lorsqu'il s'agissait de se concentrer trop longtemps sur la même tâche. Il était temps de souffler un coup. Lâchant sans l'air de rien son dernier interlocuteur sur l'un de ses cousins qui travaillait lui aussi à la Sleipnir, il en profita pour s'éclipser. Direction le fond du jardin, près des fontaines. Un livre sous le bras, Tingis perchée sur son épaule, il avait hâte de se plonger dans cet essai qu'il épluchait depuis quelques semaines, bien loin des questions juridiques qui l'avaient accaparé toute l'après-midi. Un peu de solitude, enfin.

Mais Idriss n'était pas jeune homme à se contrarier facilement, même lorsque ses projets tombaient à l'eau. Aussi, lorsqu'il constata la présence de son frère sur le banc dont il rêvait, il se contenta de pencher la tête de côté et de sourire paisiblement :

- Je me disais bien que je ne t'avais pas beaucoup vu aujourd'hui. Tu as quand même pu prendre du gâteau ?
Nayir Forslöf
Nayir Forslöf
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
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impar-frères
14 mars 2024 ft. @Idriss Forslöf

tw dissociation

Le col de la chemise est parfaitement repassé. Deux serpents dorés reliés par deux fines chaînes l'orne. Les doigts de Nayir jouent dans le bijou. Il observe son reflet avec précision mais son visage ne témoigne d'aucun enthousiasme pour cette tâche qui a habituellement son intérêt, sinon son appréciation. Aujourd'hui et comme depuis déjà deux semaines, il peaufine le tableau avec automatisme, sans aucune joie, aucun délice. C'est peut-être pour cela qu'en dépit des traits d'or qui soulignent ses yeux, en dépit du plissé de qualité de son pantalon en soie mordoré, en dépit des bagues qui ornent ses phalanges, sa tenue manque du piquant et de l'extravagance qu'on lui connaît généralement quand il se présente en société.

Il descend l'escalier de la demeure familiale, Nur sinuant sur la rambarde à la poursuite de la main nonchalante de son humain qui caresse le bois poli et laqué. Les invités ont déjà commencé à arriver, à envahir les espaces de sociabilité. Leur brouhaha parvient déjà au garçon, qui ne peut s'empêcher de siffler un juron, protégé des remontrances familiales par sa seule maîtrise du fourchelangue. La grossièreté n'a pas sa place entre les lèvres d'un Forslöf. Pas quand l'on reçoit. Pas quand l'on entre en scène. Pas quand la représentation est en cours. Face à cet écart, la fylgia de Nayir change de trajectoire, elle bondit, brièvement brume, pluie de magie qui atterrit sur l'épaule du jeun homme, et le serpent se matérialise parfaitement enroulé sur lui-même, poids rassurant. Le bout de la queue de la vipère frappe l'omoplate en rythme avec le pouls, l'incitant à ralentir, à se calmer, à reprendre le contrôle.

Nayir fige ses lèvres en un sourire parfait et se mêle à la foule. Salamalecs et discussions de surface s'ensuivent, auxquelles il participe avec talent et aisance. Il charme, aguiche, rit, séduit. Mais il se sent être de plus en plus loin de lui-même et peu à peu la musique de ses paroles se dérègle, la mélodie devient sordide, les temps faibles surplombent les temps forts. Il aperçoit Aaliya du coin de l’œil, elle a choisit le même métal que lui aujourd'hui, sa robe entière est d'or, elle brille comme un soleil ; le soleil qui prend le pas sur la lune ; éclipse totale. Nayir se précipite vers le buffet et la vue du gâteau lui rappelle la raison de ce cérémoniel. Pour la première fois, ça lui fend le cœur, de constater leurs rôles respectifs, même celui de l'aînée. Pour la première fois, ça lui fend le cœur, de n'être pas là pour fêter l'anniversaire de son frère, mais pour paraître à ses côtés.

Pour la première fois, Nayir s'extirpe d'une rencontre mondaine, la tête lourde, l'esprit embrumé. Il vole une dernière coupe de pétillant et s'enfuit au fond du jardin, dans les recoins les plus sombres du lumineux domaine des Forslöf. A la lueur froide de l'illumination de la fontaine, il sirote son verre et laisse ses pensées vagabonder. A-t-il seulement souhaité l'anniversaire d'Idriss à ce dernier ? L'a-t-il seulement vu, ce matin, avant de s'enfermer dans sa chambre pour commencer à peindre le portrait sublime qu'il doit toujours offrir aux yeux extérieurs ? Sait-il ce que renferme le paquet cadeau signé de son nom ? Il n'arrive pas à se souvenir ; il prend conscience soudain d'avoir vécu comme dans un rêve ces derniers jours, ces dernières semaines. Comme dans un cauchemar, plutôt.

Je me disais bien que je ne t'avais pas beaucoup vu aujourd'hui. Tu as quand même pu prendre du gâteau ?

Nayir sourit, un vrai sourire, un rare sourire du cœur, tandis que Nur trottine vers les nouveaux arrivants. Elle a la queue haute, le regard curieux ; pour un peu, elle ronronnerait, si elle s'abaissait à ce genre de démonstration. Elle tourne, tourne, tourne autour des pieds d'Idriss comme à la recherche de réconfort, ne se résout pas à franchir l'interdit du contact entre humains et fylgjur, et s'installe dans l'herbe, forme un petit cercle de chair rose dans l'obscurité. Ses grandes oreilles levées démontrent l'attention qu'elle porte à l'échange entre les frères. Qui eut cru que de tous, c'est Idriss qui sortirait Nayir du rêve désenchanté ?

J'étais en train de me faire la même réflexion. T'ai-je seulement souhaité bon anniversaire, mon frère ?

Joignant le geste à la parole, il se lève de son siège d'infortune, y abandonne sa coupe et attrape Idriss par les épaules. Un geste maladroit, entre solennel et ridicule, une embrassade rare, un contact inhabituel. Il pose même son front contre celui de son aîné avant de se reculer, mal à l'aise. Ses yeux fuient et il tire sur les manches de sa chemise comme pour s'y cacher. Il aimerait s'être enroulé dans une cape ou un châle, s'être pelotonné derrière des couches de tissu ; ses vêtements ont toujours constitué une armure solide en dépit de leur fragilité matérielle, de leur délicatesse. Il lève les yeux vers le ciel, où les étoiles commencent à briller, et sourit de nouveau, presque malgré lui.

Joyeux anniversaire, Idriss. Le gâteau était presque aussi délicieux que le champagne.