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Cómo decir que me parte en mil cuando desvanecerse | Dax (FB)
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Magni Hammarskjöld
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Cómo decir que me parte en mil cuando desvanecerse

@Dax Tcherkassov  | 16 juillet 2023 - Petit matin



Dax Tcherkassov laisse passer un sourire sur ses lèvres lorsque j'évoque les combats de boxe. Une réaction sincère observée avec soin par un cerveau qui cherche des réponses. Est-ce que ma dernière impression se dirigeait vers le bon souvenir ? Était-ce dans un couloir d'un combat clandestin que j'avais entendu ce nom. Connard de Tcherkassov. Les mots résonnent dans ma mémoire en même temps que son ricanement face à ma dernière réponse. Je sens que les rouages de mon cerveau parviennent petit à petit à remonter la piste tout en gardant la sensation inconfortable d'oublier le plus important.
Mes yeux suivent toujours ses gestes avec intérêt, entre curiosité et supervision. J'ai retenu un frisson quand il a levé le haut d'Aren dévoilant sa peau mat piquée, là aussi, de quelques pétéchies sombres. Intrigué par la magie de soins que j'ai rarement vu de l'extérieur, je reconnais la précision de ses tracés magiques et si la confiance envers l'homme est loin d'être gagnée, celle envers le professionnel augmente un peu plus. Le filament qui s'échappe du corps d'Aren est limpide, presque de la même couleur que les souvenirs que l'on extrait de nos tempes et cette comparaison m'arrache un deuxième frisson de malaise. Je resserre mon poing pour endiguer les sentiments d'angoisse qui parviennent à se refaire un chemin jusqu'au centre nerveux. « Je cherche dans sa moelle osseuse l’assurance qu’il n’y a rien d’autre que ce dont nous avons parlé. C’est une précaution, rien de plus.  Quant au suivi, vous aurez plus d’informations sur le sujet quand le diagnostic sera confirmé. Mais il s’agira principalement d’un bilan sanguin mensuel et de quelques rendez-vous avec un pédiatre. » Mon hochement de tête est à peine perceptible tellement ma nuque est devenue raide au fur et à mesure de ses explications. Les bilans sanguins tous les mois et les rendez-vous avec un pédiatre sont des choses que l'on pourra gérer facilement, loin d'être envahissant et contraignant. Rien qui aura de trop grosse implication dans sa vie de tous les jours. « Les moldus sont plus lents dans tout. Ils souffrent plus, inutilement, ils crèvent plus et ont bien moins d’outils à leur disposition. Ils peuvent détecter ce type de maladie, mais je ne sais pas en combien de temps. Je n’ai pas travaillé dans leurs hôpitaux. » Je savais que poser la question était une mauvaise idée. Une infime lueur triste s'infiltre dans mes iris avant d'être chassée par de nouveaux nuages sombres. Il a raison, ils crèvent plus, et ces morts ne sont pas de leur faute. Les regrets et les remords ne servent à rien dans un futur qui sépare un potentiel diagnostic manqué de dix-sept années révolues. Perdu dans mes pensées je ne prête pas attention au ton acide de mon interlocuteur alors qu'il évoque les hôpitaux moldus. Et plus distraitement que précédemment je continue de suivre les gestes de Tcherkassov. Une fatigue latente commence à me piquer sérieusement les paupières malgré mes nombreux efforts pour rester éveillé. Et si j'espère que Markus viendra dans les prochaines heures m'apporter un café de la maison, je ne suis pas certain que demander à ce Dax de m'apporter un gobelet de leur jus de chaussette servi ici soit productif. Ce dernier relève soudain la tête vers moi après avoir recouvert le buste d'Aren sous son haut et la couverture. Une lueur moqueuse perce dans l'océan neutre de ses yeux bleus et un de mes sourcils se dresse sensiblement en signe de surprise face à une telle démonstration de sympathie. « Un amoureux alors ? Vous êtes peut-être moins cons que ce que je croyais. Mais votre vie privée m’intéresse pas, tant qu’elle n’implique pas mon crayon. Par contre, vaut mieux ne pas me parler de combat de boxe, c’est pas un très bon moyen pour que je me mêle de mes affaires. Je suis toujours trop intéressé, dès qu’il s’agit de quelqu’un qui pourrait avoir envie de me remettre à ma place. » Sa première phrase accentue l'arrondi de mon sourcil dans une teinte plus perplexe qu'amusée. C'est bien la première fois que j'entends quelqu'un me dire que j'ai l'air moins con en fréquentant des hommes. D'ordinaire c'est plutôt le discours inverse qu'on me sort. Dans tous les cas, les jugements sur ma vie privée dans un sens comme dans l'autre sont loin d'être ma tasse de thé et ils se finissent en général par quelques échanges de coups quand les critiques deviennent trop directes. Heureusement pour le médicomage, le reste de sa tirade détend légèrement mon humeur. S'il veut que je le remette à sa place dans un ring, qu'il n'hésite pas. Je connais quelques bonnes adresses...

Je m'apprête à lui répondre quand la porte s'ouvre derrière moi me forçant à me tourner d'un mouvement rapide de bassin vers la nouvelle venue. Une infirmière qui s'adresse directement à Tcherkassov pour lui parler d'un autre patient. Le jeune homme acquiesce et je jette un regard vers Aren dont la respiration calme témoigne d'un état relativement stable. Il réagit bien au traitement, ce serait égoïste de ma part de vouloir accaparer toute l'attention du personnel soignant autour de son unique cas. Je sais que l'hôpital regorge probablement d'autres enfants malades, d'autres parents plongés dans les eaux froides de l'angoisse. Je n'ai rien à dire. D'ordinaire je suis même le premier à les envoyer voir ailleurs que dans ma chambre. D'un nouveau signe de tête je réponds à sa phrase de convenance et ne prend même pas la peine de le regarder sortir. Ce n'est que lorsque je j'entends la porte se refermer derrière lui que je reviens me placer de l'autre côté du lit. Assis sur la chaise où j'étais avant l'entrée du nouveau médicomage de l'équipe du matin. Face à la porte, dans la position d'attente faussement calme.

Dans le silence revenu, dans notre solitude d'attente, les pensées se font plus fluides. Je ferme les yeux sous la pression de mes doigts qui viennent frotter mes paupières épuisées dans une vague tentative d'en chasser l'irritation. Sous l'obscurité, il m'est plus facile de recomposer les informations et de ressasser tout ce que je viens d'apprendre. Un virus qui a déclenché une réaction agressive de son système immunitaire. Des plaquettes trop basses et une fatigue normale qui devrait se résorber petit à petit. Une réaction non génétique mais qui pourrait être plus grave si les résultats de sa moelle osseuse ne sont pas bons. Encore des résultats complémentaires à attendre et des angoisses à gérer d'ici-là. Et ce nom, Tcherkassov, qui palpite de plus en plus nettement dans mon crâne. Je fronce les sourcils sous le souvenir qui cherche à se dévoiler mais qui lutte pour remonter des limbes d'une discussion anodine. J'ai l'impression de voir un couloir sombre, un mauvais éclairage sciemment installé pour offrir des zones d'ombres aux visages baissés. Et ce murmure craché par une voix au milieu des autres. Il a engagé un de ces connards de Tcherkassov. La scène me revient avec son lot de souvenirs physiques : le froid de l'hiver qui faisait craqueler les pierres sous nos pieds, le grattement sec d'une gorge irritée, la douleur lancinante d'une épaule blessée lors d'un combat, l'odeur âcre de la cigarette consumée entre mes doigts, celle piquante de la transpiration des corps. Le sous-terrain qui menait à l'arrière salle d'un salon de thé. Commerce de façade pour une petite organisation qui trafiquait quelques maléfices de magie noire. Des adorateurs d'un mage anglais encore trop connu, qui cherchaient à reproduire l'exploit de son immortalité. Une mission sous couverture, une infiltration rapide qui remonte à plus d'un an. Un souvenir lointain qui suffit à électriser mes fibres. Mes paupières s'ouvrent sur un océan de dangers.

Les minutes s'égrènent lentement mais la chaleur douce qui commence à revenir petit à petit dans les veines d'Aren suffit à leur donner des tintements d'espoirs. Le soulagement est perceptible, tangible. Le traitement semble faire effet, du moins pour ce qui est de faire baisser sa fièvre. Comme précédemment mes yeux suivent le balai, plus important, des ombres qui passent sous la porte de la chambre. Leur fréquence m'indique que la mâtinée doit désormais s'étirer sur des heures plus raisonnables et un coup d'œil à mon poignet confirme cette impression. L'hôpital qui ne dort pourtant jamais s'éveille de sa léthargie nocturne. Bientôt les pas se feront moins ténus sous les allées et venues des visiteurs moins précautionneux que les soignants. Une longue journée qui commence, avec son lot d'attentes interminables et ses phases de sommeil trop courtes, incomplètes, nerveuses, et toujours interrompues par des coups rapides avant l'ouverture du battant. Les mêmes que ceux qui attirent mon attention à cet instant précis et me font lever les yeux vers l'infirmière qui entre, potions et parchemin en main.

A nouveaux seuls, mon regard croise celui d'Aren momentanément réveillé par la prise de ses constantes par l'infirmière. Un sourire doux effleure mes lèvres tandis que je murmure quelques paroles rassurantes sur ma discussion avec son médicomage et ses yeux s'autorisent à se fermer à nouveau. « La lettre c'était pour Markus ? » « Oui, il va venir toute à l'heure. » « C'est bien. » Un murmure avant un dernier bâillement qui l'emporte vers les voiles du sommeil trouble. Autour de ma main, ses doigts se sont serrés avec force, m'arrachant une cascade d'amour pour cet être qui ne cesse de m'éblouir par sa force de résilience. Son visage me semble légèrement moins blanc que lors de notre arrivée il y a quelques heure. Le sommeil et les potions semblent vraiment avoir un effet positif et je m'accroche à cette éventualité avec la force du grimpeur qui manque de glisser à chaque prise. Je le regarde et déjà la culpabilité revient me ronger avec des feux d'alarmes. Tcherkassov. Pourquoi faut-il que son médicomage porte un nom nimbé de mystères et de zones d'ombres. Markus évoque un étudiant en club de combat et un nom qui revient parfois dans nos interrogatoires. Et il est vrai, qu'après cette remise en contexte, ma mémoire s'est réactivée plus efficacement. Il a foutrement raison. C'est un nom discret, souvent marmonné entre des dents serrées, parfois une lueur de peur, souvent de rage. Je m'en veux de n'avoir pas fait le lien plus vite. D'avoir été trop centré sur Aren et mes angoisses de le perdre. C'est débile, mais je suis qu'un con qui cherche pas à avoir l'air d'autre chose. Je rumine toutes ces pensées, incapable de rester assis plus longtemps à attendre le retour de celui qui pourrait avoir ou être de la famille d'un qui aurait un pied dans la petite criminalité locale. La pression des doigts de l'enfant s'est atténuée contre ma peau, signe qu'il s'endort bien, et j'en profite pour me relever et contourner le lit. Face à la porte d'entrée je fais le ms cents pas en attendant le retour de l'homme. Un retour qui ne tarde pas et qui m'apporte une nouvelle vague d'information qui font exploser mes compteurs de nervosité rouge.

Il sort sa baguette et la mienne roule dans ma main. Trois tours secs qui laissent le sort d'insonorisation sans réponse. Tcherkassov à la bonne idée de la ranger juste après, ce qui me garde de lui flanquer le bout de mon arme contre la jugulaire. A sa démarche droite et assurée je réponds par une tension visible des muscles finement contractés qui roulent sous la peau nue des bras.   « Parlons franc-jeu. Pour sa sécurité…vaut-il mieux qu’aucun lien ne puisse être établi entre lui et vous ? J’insiste sur le pour sa sécurité. La sienne, pas la vôtre. La vôtre, j’en ai rien à foutre. » Seuls des éclairs sombres dans mon regard répondent à sa question. Le cœur palpite et le cerveau débloque les mécanismes de défense trop souvent utilisés. Ce n'est plus Magni le père d'Aren, mais Magni Hammarskjöld l'auror sous tension qui prend le relai. « Les médicomages, les infirmiers, les préposés, tous ceux que vous côtoyez ici doivent noter dans le dossier d’Aren les informations pertinentes, ou potentiellement pertinentes, qu’ils ont apprises. Ça inclus votre adresse, votre comportement, votre nom. Le vôtre ne passe pas inaperçu. Et nous voyons rarement des représentants légaux, ça capte l’attention. » Il a donc fait des liens entre toutes les informations. Cette idée, il y a trente minutes, ne m'inquiétais pas plus que cela, à présent elle me serre les entrailles avec force. J'ai été négligeant, et cela a mis directement Aren en première ligne du danger. Douze années d'effort pour en arriver là...Les plis qui creusent mes traits sont chargés d'une menace que Mjöll vient sublimer d'un lourd grognement. Lui qui était resté en retrait préférant protéger la Fylgia endormie contre lui que de ce mêler de l'examen médical, voilà que lui aussi reprend son rôle d'ours protecteur avec la même rage que moi. Lui aussi s'en veut de s'être laissé endormir sous le couvert de la confiance tacite accordée aux soignants. « Rønning a demandé à revoir le dossier, en prétextant avoir mal noté certains éléments. C’est inhabituel. Je le soupçonne d’avoir voulu vérifier mes interventions, pour trouver un manquement déontologique. Je n’y avait rien inscrit encore, mais il m’a signalé que j’avais intérêt à ne pas merder, vu que vous êtes auror.  J’sais pas comment il a fait le lien pour votre profession, mais il est pas con. Il peut faire le lien pour le reste, selon ce que je note dans ce dossier. Et les types comme lui ont la main trop longue, quand il s’agit de protéger leurs arrières. Il prend la fuite tant qu’il le peut, mais il attaque s’il se sent en danger. Que vous agissiez pour qu’il ne croise plus votre route ou celle d’Aren peut être problématique, comme vous avez quelque chose à cacher. »
Il n'a pas besoin d'en dire plus pour que je comprenne le double danger exposé ici. Au dire de Tcherkassov, Rønning n'aurait que faire du secret médical en cas de besoin. Soit. Mais est-ce que la parole du jeune médicomage est encore là même valeur qu'avant ? Pas totalement. Je ne peux pas exclure qu'ils soient plusieurs à porter le même nom de famille ici, à Göteborg, mais le doute ne peut être évincé sous prétexte qu'il avait l'air compétent, jusque-là. Baguette toujours en main, regard dardé dans celui de mon interlocuteur, je resserre les mâchoires comme il m'a souvent vu faire ce matin. « Je ferais effectivement un manquement déontologique en camouflant volontairement des informations potentiellement pertinentes ou des doutes. Mais ce qui m’importe est de veiller sur mes patients, pas de satisfaire l’institution. Dois-je omettre d’inscrire certaines informations, telles que votre complicité évidente avec l’enfant et cette allusion à vos dispositions mentales ? Et avez-vous eu l’intelligence de mettre une fausse adresse ? » Le silence comme arme pour ne pas exploser immédiatement et lui coller mon poing sous le menton. La rage palpite dans mes veines, mêlée de culpabilité et d'angoisse elle est terrible, cette rage. Je me contiens derrière un regard brûlant et un infime et rapide coup d'œil en coin vers Aren qui dort, fort heureusement. La baguette fend l'air dans un chuintement et je ferme la porte à clé d'une voix sèche. Il est hors de question qu'un ou une infirmière entre dans cette chambre dans l'immédiat et assiste à cette scène qui ne regarde que lui et moi. Et Aren par extension. Au pied du lit, Mjöll s'est redressé, dominant de sa haute taille la pièce soudain trop petite pour sa masse. La Fylgia d'Aren entre les pattes, plaquée contre son torse, il dévisage l'homme avec un calme toujours grondant. « Rønning c'est un problème, il est intelligent ou il a des collègues dans le service des blessures par maléfices où mon amabilité me précède largement. Qu'importe. Vous l'avez dit, entre de mauvaises mains certaines informations confidentielles placeront cet enfant en danger. Que ce soit de part le fait de Rønning. Ou d'un autre. » La dernière phrase tombe dans une voix où roule une menace de plus en plus présente et je lève ma baguette vers lui, d'un geste vif. « Qu'est-ce que vous risquez de faire de ces questions d'hérédité Tcherkassov ? Si j'en crois certains de mes suspects,  votre nom pourrait être de ceux capables de lui créer des ennuis. Que ce soit vous, un frère, un cousin ou que sais-je, pourquoi je prendrais le risque de vous faire confiance ? »    Je pourrais vérifier par moi-même, mais ma propre déontologie personnelle me retient. Pour le moment. Si je juge qu'Aren court un risque réel il se pourrait que cette même déontologie devienne légèrement poreuse. Pourquoi faut-il que même les médicomages soient susceptibles d'être corrompus...Une désagréable sensation d'être revenu en Colombie coule, acide, contre mon palais. A croire que l'intégrité est en train de se faire la mal de tous les côtés dans ce foutu royaume. « En temps normal les petites mains de la pègre c'est pas mon problème. Mais je vous retourne la question Tcherkassov, est-ce que j'ai intérêt de fouiller du côté de votre adresse ou votre déontologie vous a fait omettre d'en indiquer une valide ? » Traquer les exécutants ce n'est pas mon cœur de métier, c'est plutôt des outils pour remonter jusqu'au commendataires et démenteler des réseaux de criminalité plus vastes. Ces fameuses petites mains sous contrats sont d'ailleurs souvent des sources utiles d'informations que j'ai plutôt intérêt à garder en place tant qu'ils ne s'en prennent qu'à leurs semblables. Je ne sais rien en théorie de ce Tcherkassov dont on crache le nom comme un poison. Ce n'est peut-être pas une si petite main, peut-être même que c'est un connard de première recherché à l'international. Toute la question est de savoir si je dois commencer à m'intéresser ou non à ce nom d'un peu plus près. Ma baguette descend légèrement pour venir pointer vers son bas ventre, avant de soulever l'un des pans de la blouse blanche dévoilant l'étui aperçu précédemment. Trop pointu pour être un rangement à potion. Trop large pour contenir une paire de ciseaux. Un autre détail qui mis en perspective avait éveillé des soupçons plus précis pendant son absence. Mes yeux sautent dessus avant de remonter se ficher dans les siens. Je croise les bras, la baguette glissée sous mon coude, avant de reprendre la parole d'une voix grave : « Rønning a peut-être le bras long, mais le mien est aussi très bien placé. Vous avez peut-être des informations, mais je sais où trouver les miennes pour rééquilibrer la balance, et je pourrais le faire maintenant. J'ai peut-être l'air d'un con, mais je suis pas inconscient. Tant qu'on sera sur la même longueur d'onde des priorités, la sécurité et la santé de cet enfant, on devrait pouvoir trouver un terrain d'entente. » Les froissements des draps derrière moi m'indique qu'Aren bouge, je l'entends gémir doucement avant que le silence ne réveille. Défait des lourdeurs de la fièvre son sommeil se fait plus agité. Mais avant de retrouver ma place près de lui et de rouvrir la porte j'attends les réponses du Tcherkassov pour savoir si je dois d'abord le faire sortir de cette pièce d'un coup de poing dans la mâchoire. « Si vous aimez la boxe je vous recommande le ring du Bukken. Le pourcentage gain est pas dégueulasse comparé à d'autres. » Une simple phrase gorgée d'informations non dites. Un nom qui peut témoigner d'une certaine connaissance du milieu sous-terrain, une supposition claire de ma propre expérience du dit ring, un demi-avertissement sur ma capacité à lui décoller le palais en cas de besoin, et une véritable bonne adresse de partagée en signe d'effort pour trouver un statut quo. Je ne sais pas ce qu'il peut capter de tout ce sous-texte ni même s'il captera quelque chose. J'en ai foutrement rien à faire s'il est con comme son crayon.





Although I felt like giving up It's not the road I chose
Dax Tcherkassov
Dax Tcherkassov
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
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Le grognement de sa fylgia et le regard chargé de mon interlocuteur m'indiquent que l'ambiance vient de devenir infiniment chaleureuse. La conversation à venir m'exaspère d'avance. Les gens n'aiment pas quand on fouille leurs secrets ; leurs réactions n'est intéressante que lorsque j'ai véritablement un plan en tête, un but à atteindre. Ce n’est pas le cas, dans cette situation. Et il m’est plus difficile de tolérer sans lassitude une discussion dans laquelle je n’ai aucun intérêt personnel. Ce n’est ni stimulant ni enthousiasmant. Seulement un peu chiant, parce que vouloir aider quelqu’un, en dehors du médical, c’est pas trop mon truc. Et être aidé n'est visiblement pas le truc de l'homme, dont la baguette fend l'air. J'entends la porte se verrouiller et je me demande, très brièvement, s'il ne va pas tenter de me foutre son poing à la figure. Ça, ce serait marrant. Sa fylgia se redresse, atteignant une taille considérable ; je jette un coup d'oeil à la mienne, qui observe avec envie l'autre fylgia plaquée contre le torse de l'ours. Styx aime un peu trop la chaleur et le confort et a un sens de la survie plutôt proche du zéro. « Rønning c'est un problème, il est intelligent ou il a des collègues dans le service des blessures par maléfices où mon amabilité me précède largement. Qu'importe. Vous l'avez dit, entre de mauvaises mains certaines informations confidentielles placeront cet enfant en danger. Que ce soit de part le fait de Rønning. Ou d'un autre. » Ou d’un autre ? Je retiens qu’il concède que certaines informations pourraient placer l’enfant en danger, mais je suis surtout intéressé par la dernière partie de sa phrase. Il lève sa baguette vers moi et une lueur d’appréciation vient glisser dans mes iris, alors que je retiens un sourire. La discussion sera peut-être moins chiante que prévu. « Qu'est-ce que vous risquez de faire de ces questions d'hérédité Tcherkassov ? Si j'en crois certains de mes suspects,  votre nom pourrait être de ceux capables de lui créer des ennuis. Que ce soit vous, un frère, un cousin ou que sais-je, pourquoi je prendrais le risque de vous faire confiance ? » Cette confrontation est en train de devenir infiniment plus captivante que ce que je croyais. Il a donc connaissance de mon nom, du milieu à lequel je suis potentiellement associé. Inquiétant ? Non. J’opère depuis longtemps, j’ai mes précautions, mon réseau. Je vois le monde comme un immense jeu d’échecs ; je suis stimulé lorsqu’on avance vers moi une pièce qui m’oblige à élaborer de nouvelles stratégies.  Une infime lueur d’intérêt éclaire néanmoins mon regard, à la mention de ses suspects. Qui sont ces personnes qui ont lâché mon nom devant lui ? Qu’ont-ils dit précisément ? « En temps normal les petites mains de la pègre c'est pas mon problème. Mais je vous retourne la question Tcherkassov, est-ce que j'ai intérêt de fouiller du côté de votre adresse ou votre déontologie vous a fait omettre d'en indiquer une valide ? » Les petites mains de la pègre…C’est presque mignon, comme appellation. Plus mignon que ce qu’ils font déjà. Je ne considère pas appartenir vraiment à ce milieu. Je n’ai pas d’affiliations, pas de bandes, peu d’amis. Je nage vers le haut comme vers le bas, en me laissant porter là où j’y trouve mon intérêt. Mais beaucoup de gens sont malencontreusement rattachés à moi ; je les tiens par la menace, le chantage et la crainte, sans remords, sans plaisir. Le boulot, c’est le boulot. Deux ont peut-être lâché mon nom, mais ils le paieront, quand je saurai de qui il s’agit.

Je n'aime pas qu'on me touche. Ma machoîre se contracte, alors que sa baguette soulève l'un des pans de ma blouse. J'envisage deux options : lui tordre le poignet ou attendre. La première option serait satisfaisante, mais inadaptée à la situation. Trop impulsive, maladroite, pleine de conséquences. J’opte donc pour la seconde, suivant son regard jusqu’à l’étui à ma ceinture. Un signe clair, additionné à ses autres informations, que je fais peut-être autre chose en soirée que d’écrire dans des dossiers. Un léger sourire s’épanouit sur mes lèvres, alors que la curiosité prend le relais de l’agacement. Que fera-t-il de tous ces éléments ? Ses yeux retrouvent les miens et je les soutiens sans gêne, tandis qu'il croise les bras, sa baguette sous son coude:   « Rønning a peut-être le bras long, mais le mien est aussi très bien placé. Vous avez peut-être des informations, mais je sais où trouver les miennes pour rééquilibrer la balance, et je pourrais le faire maintenant. J'ai peut-être l'air d'un con, mais je suis pas inconscient. Tant qu'on sera sur la même longueur d'onde des priorités, la sécurité et la santé de cet enfant, on devrait pouvoir trouver un terrain d'entente. » Et ce terrain d’entente commence par des menaces à mon égard et une demande d’explications sur pourquoi il devrait me faire confiance ? Intéressant. Je ne peux qu’apprécier le premier élément ; j’ai du respect pour ceux qui réagissent, font des liens et ont une forte tête. Le second aspect, toutefois, me semble absurde. Quant à sa mention de rééquilibrer la balance, je me demande s’il fait encore allusion aux informations qu’il peut trouver sur Rønning, ou sur moi. Dans les deux cas, c’est prétentieux. Les gens aiment bien se vanter d’avoir le bras long, mais leurs certitudes leur font trop souvent dévaluer leurs adversaires. L’un aura toujours plus d’avance que l’autre, c’est inévitable, et ne pas envisager qu’on puisse être la personne du mauvais côté de la balance est un risque.

L'enfant bouge, gémissant doucement. J'y jette un coup d'oeil, sourcil froncé, alors que l'autre retourne se placer auprès de lui. L'infirmière m'a dit, avant que je ne vienne ici, qu'il semble bien répondre au traitement et n'a pas de réactions allergiques. C'est bon signe. « Si vous aimez la boxe je vous recommande le ring du Bukken. Le pourcentage gain est pas dégueulasse comparé à d'autres. » Mes yeux se plissent légèrement, tant par intérêt que par amusement, alors que j’analyse tout ce qui se trouve dans le sous-texte. Le partage du nom d’une véritable bonne adresse. La mention sous-jacente qu’il sait se battre. L’envie de connaître ses capacités fait briller brièvement mes iris, dont le masque neutre s’est détendu : « Je connais, mais je combats jamais sur un ring. » Une phrase simple, lâchée nonchalamment. Mes bras se dénouent et ma main glisse avec désinvolture à la fin de ma phrase sur l’étui encore découvert. Je replace ma blouse par-dessus, camouflant ce dont je ne me sépare jamais. Ma voix se fait moqueuse, mon regard ne démontre ni anxiété ni agressivité : « J’espère que ça vous soulage, les menaces voilées, celles avec la baguette, tout ça. Vous êtes impressionnant, vraiment. Ça doit fonctionner sur des tas de gens.» Ça m’a toujours fait rire, ceux qui sortent aussi rapidement les gros bras et leur baguette. J’imagine que c’est le côté auror et père protecteur ? Je n’y connais pas grand-chose. Le mien n’intervenait que si c’était nécessaire, pour la crédibilité de son propre nom. Et encore…Vais-je dévoiler à cet homme ce côté plus louche de ma vie ? Probablement. Admettre ce qui est à la surface ne camoufle pas toujours ce qui est caché en-dessous, mais les risques me semblent plus excessifs dans le déni complet. Je reprends, neutre : « Fouillez sur moi autant que vous le voulez, si ça vous fait plaisir. Vous trouverez sans difficulté des Tcherkassov intégrés dans la pègre en Angleterre, on choisit pas sa famille. Mais je vous déconseille de venir vérifier si mon adresse est la vraie : vous risqueriez de tomber sur un type en caleçon un peu trop bavard. Même moi, je réussis pas à le faire taire. »   Un sourire m’échappe, mélange d’exaspération et d’autre chose. De l’affection, peut-être ? Mon nouveau colocataire m’insupporte parfois pour la simple raison que je ne suis pas habitué à avoir quelqu’un chez moi – mais une part de moi l’aime bien, ce type. Je ne l’admettrais simplement pas à voix haute. Je croise de nouveau les bras contre mon torse, détaché. Je ne cherche pas à attraper ma baguette, à enchainer moi aussi les menaces ou à défendre mon orgueil. Mon objectif est ailleurs et ce dialogue ne me le fait pas quitter des yeux. Je me balance des informations sur lui en ma possession. Elles n'ont aucune influence sur l’état d'Aren, son traitement, sa santé. Le seul intérêt, c’est que ça me révèle que ce type veille vraiment sur lui. Et c'est un bon point. Ce que je compte faire de cette énigme partiellement résolue s’arrête à ce que j’ai déjà fait, plus ou moins à contrecoeur : proposer à l’auror de ne pas noter tous les renseignements dans le dossier. Parce que ce qui m’importe dans cette histoire, ce n’est pas l’humeur de cet homme, ses inquiétudes ou sa connaissance probable de mon nom. Ce qui m’importe, c’est l’enfant étendu dans un lit. Le reste, c’est secondaire. Mes yeux retournent se fixer à ceux d’Hammarskjõld, paisibles. Ils ne reflètent rien, aucune secousse, comme un lac trop noir et trop tranquille : « Comptez pas sur moi pour vous dire de me faire confiance. J’crois pas en ces conneries, accorder sa confiance une fois, c’est toujours se faire poignarder dans le dos ensuite. Et franchement, j’en ai rien à foutre, que vous me fassiez confiance ou non. Je cherche pas à la gagner. La seule certitude que je peux vous donner, c’est que ma seule préoccupation, c’est lui. Et je ne ménage pas forces, quand il s’agit de la sécurité et de la santé d’un de mes patients. » Je ne vais pas essayer de le convaincre. Je ne vais pas lui donner des arguments bidons du style de j’suis un brave type dès que je mets les pieds dans l’hôpital. Je ne nie rien, mais je n’approuve rien. Et si je suis un sacré menteur, je le suis bien moins, dès que je rentre dans une chambre. J’ai le soucis étrange d’être honnête dans mes gestes, dans ce que je dis aux parents et aux patients. L’auror ne devrait pas me faire confiance, non. Surtout pas à moi. Mais il peut avoir confiance en mes compétences. Je reprends calmement, comme si on discutait du goût du café hospitalier: « Je peux tolérer votre humeur charmante, vos doux commentaires et votre tendance à soulever ma blouse sans y avoir été invité. Mais si vous doutez trop de moi ou de mon intégrité professionnelle dans l’hôpital, et que ça vous pousse à refuser mes interventions, il en pâtira. Et ça, je peux pas le tolérer.  Soit vous me voulez dans cette chambre, soit vous voulez quelqu’un d’autre. Je peux demander que le dossier soit transféré à Andersen, l’autre médicomage de garde, en invoquant le fait que ma tronche vous revient pas. C’est pas le meilleur, mais c’est pas un pourri. » Ce n’est pas l’option que je préfère, mais ce serait peut-être la plus raisonnable. J’ai côtoyé des parents qui avaient bien moins de raisons de me briguer dans mon travail – outre mon absence de chaleur à leur égard – et qui m’empêchaient de faire correctement mon boulot. C’est une erreur de s’acharner à rester, dans certaines occasions ; le patient devrait toujours primer sur l’orgueil.
Magni Hammarskjöld
Magni Hammarskjöld
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Cómo decir que me parte en mil cuando desvanecerse

@Dax Tcherkassov  | 16 et 17 juillet 2023 - Petit matin



Ma dernière phrase semble avoir touché son intérêt au vu des mouvements inhabituels qui éclairent un instant ses traits. « Je connais, mais je combats jamais sur un ring. »  Il connaît, donc, mais qu'en surface. Ou alors il se garde d'avouer qu'il connaît les autres types de combats que Bukken organise. Qu'est-ce que Markus avait écrit à son sujet ? pas le plus costaux mais doué malgré tout. Quelque chose comme ça. Intéressant, le type de petit gabarit vif et rapide qui ne laisse rien au hasard. Peut-être bien de ceux qui préfèrent les rues sales et mal éclairées aux salles conventionnelles. Je comprends mieux en filigrane son contrôle émotionnel et la fraîcheur de ses attentions. Peut-être un professionnel compétent, mais un manque latent de compassion. Sauf pour ses jeunes patients, d'après ses dires. Si tant soit peu qu'on puisse parler de compassion ou de conscience médicale. Il sourit tout en replaçant sa blouse sur l'étui de ce que j'imagine être un lame aussi froide que l'avertissement qu'il avait glissé à mon oreille précédemment. Les informations s'accumulent, les liens se tendent entre les points et quelques suppositions s'ajoutent aux certitudes. Peut-être qu'il faudra aller toquer du côté des moldus aussi pour soulever quelques questions. Ce sera moins facile que ça ne l'était en Colombie, ici je n'ai que peu de contacts avec nos collègues non magiques. « J’espère que ça vous soulage, les menaces voilées, celles avec la baguette, tout ça. Vous êtes impressionnant, vraiment. Ça doit fonctionner sur des tas de gens. » Le ton moqueur ne m'échappe, la légèreté presque supérieure avec laquelle il fait ses remarques m'agace. Je ne cherche pas spécialement à l'impressionner, c'est ma façon d'être, lui trop neutre et moi trop démonstratif. Un volcan qui entre en éruption à la moindre secousse. Un Hammarskjöld trop bruyant. Rien ne soulage ces colères et ces rages qui me font bander les muscles et menacer d'orages mes interlocuteurs. Rien à part la dépense physique nécessaire à relâcher les tensions nerveuses et épuiser le corps. Qu'il trouve cela risible me passe largement au-dessus de la cime des cheveux. Je n'ai rien à lui prouver, encore moins besoin de lui plaire ou de répondre à ses standards. Et sa fâcheuse tendance à donner son avis non sollicité sur moi achève de noircir un tableau déjà peu enclin à lui passer ses moqueries. « Fouillez sur moi autant que vous le voulez, si ça vous fait plaisir. Vous trouverez sans difficulté des Tcherkassov intégrés dans la pègre en Angleterre, on choisit pas sa famille. Mais je vous déconseille de venir vérifier si mon adresse est la vraie : vous risqueriez de tomber sur un type en caleçon un peu trop bavard. Même moi, je réussis pas à le faire taire. » La pègre anglaise ? La belle affaire. J'ai encore moins de contact dans cette partie de l'Europe qu'en Scandinavie. Ce qui n'est pas le cas de Blumenthal, sans aucune doute. Au besoin, je pourrais toujours solliciter l'aide de ce dernier pour me dénicher quelques informations supplémentaires en toute discrétion. Les plans s'étirent, les notes mentales s'effacent, rapidement remplacées par d'autres. Une cartographie précise qui sera mise par écrit plus tard et consignée dans un dossier avant d'être rangé dans la longue liste des autres dans ma bibliothèque personnelle. Quand bien même ce dossier serait voué à rester à l'état d'ébauche, et fermé dans un placard. Je ne peux empêcher mes mécanismes d'enquêteurs de se mettre en route, surtout pas après un tel aveu de pratiques flirtant avec des connards de mafieux. Dans n'importe qu'elle autre situation j'aurais pu m'en foutre de son propre rôle dans les méandres de ces organisations peu scrupuleuses. Ma propre expérience de la Mano Mara a laissé des traces trop profondes dans ma mémoire pour que je puisse avoir un avis tranché sur les bonnes et les mauvaises pratiques. Les bons et les mauvais côtés de la barrière de la légalité. Je suis pas naïf, encore moins exemplaire, et ce genre de conneries ne m'intéresse pas. Tant que ça reste entre eux, encore une fois. Sauf que le problème reste le même. Aren. ce dénominateur commun qui nous a réunit aussi et qui menace de créer un séisme plus destructeur autour de lui. Tout réside dans ce flou, cet inconnu autour de Tcherkassov. Si jamais la situation était différente, et que lieu de Rønning ce soit lui-même qui ait soudain besoin de protéger ses arrières. Serait-il capable de mettre à profit ce qu'il a découvert dans cette chambre ? Le risque est trop grand pour être pris. Avec un simple médicomage, je peux gérer les conséquences. Directement dans les mains d'un potentiel criminel, c'est au-dessus de mes possibilités. « Comptez pas sur moi pour vous dire de me faire confiance. J’crois pas en ces conneries, accorder sa confiance une fois, c’est toujours se faire poignarder dans le dos ensuite. Et franchement, j’en ai rien à foutre, que vous me fassiez confiance ou non. Je cherche pas à la gagner. La seule certitude que je peux vous donner, c’est que ma seule préoccupation, c’est lui. Et je ne ménage pas forces, quand il s’agit de la sécurité et de la santé d’un de mes patients. » Au moins nous sommes d'accord sur un point. Je ne peux pas lui faire confiance. En tant qu'homme, assurément, sa pratique professionnelle à l'air en revanche plutôt honnête et qualitative. Si c'était moi allongé dans ce lit, ce serait largement suffisant pour le laisser poursuivre ses examens en toute impunité. Mais ce n'est pas lui. Les questions et les faits tournent en boucle dans mon crâne sans trouver d'échappatoire convenable. Mes dents serrées me font mal à nouveau sous la pression des muscles qui rongent le feu de rage qui consume mes nerfs. J'ai détesté cette journée aux premiers signes alarmants d'Aren, je la haïs encore plus à présent que je dois faire face à un médicomage incompétent et dangereux, et un autre compétent, intelligent et malfrat. Qu'est-ce qui s'est passé dans ce hijueputa d'hôpital pour qu'ils recrutent des soignants avec des critères de sélection aussi bas ? Dans le service de pédiatrie qui plus est ? Mjöll ne grogne plus, mais il maintient sa position verticale, posant un regard lourd sur l'autre fylgia qui semble le regarder avec une pointe de jalousie que je ne cherche pas à analyser. Mjöll lui y est totalement indifférent, il n'a pas oublié la familiarité déplacée de l'ursidé précédemment. « Je peux tolérer votre humeur charmante, vos doux commentaires et votre tendance à soulever ma blouse sans y avoir été invité. Mais si vous doutez trop de moi ou de mon intégrité professionnelle dans l’hôpital, et que ça vous pousse à refuser mes interventions, il en pâtira. Et ça, je peux pas le tolérer.  Soit vous me voulez dans cette chambre, soit vous voulez quelqu’un d’autre. Je peux demander que le dossier soit transféré à Andersen, l’autre médicomage de garde, en invoquant le fait que ma tronche vous revient pas. C’est pas le meilleur, mais c’est pas un pourri. » J'analyse sa proposition avec un regard sombre. Chaque seconde perdue à discuter de la suite de notre collaboration sont des secondes gâchées pour l'enfant. Je n'oublie pas le temps qui s'écoule derrière mes avertissements et mes questions. Mais je ne suis pas certain de la bonne décision à prendre. Je suis même certain qu'il n'y en a pas, de bonne décision. Les deux options sont merdiques et m'apportent que des potentiels sources d'angoisses supplémentaires. Rester avec Tcherkassov et risquer de compromettre encore plus les secrets autour d'Aren auprès de tout un pan de la population scandinave qui doit rester dans l'ignorance. Ou changer de médicomage au risque de tomber sur un autre incompétent qui retardera les prises de traitement d'Aren par égo personnel. Les options se déroulent et je sais déjà laquelle mon cœur choisit sans parvenir à écouter l'avis du cerveau qui voudrait encore mettre quelques éléments en perspective. « J'en aurais rien à foutre de te faire confiance si tu étais pas susceptible de vendre ces informations pour sauver tes propres fesses quand cet enfant aura quitté le statut de patient à tes yeux. C'est là tout mon problème. T'as l'air compétent en tant que professionnel. Ici en tout cas. Mais je ne peux pas te laisser l'occasion de prendre plus d'informations sur lui. » Mes bras se décroisent pour agiter une nouvelle fois ma baguette vers la porte. Le cliquetis suffit à parler de lui-même et je m'autorise même un léger sort supplémentaire pour en ouvrir le battant dans un appel clair et définitif.
« Dites ce que vous voulez à Andersen. Même que je vous ai proposé de régler nos différents un mercredi soir chez Bukken, pour ses sessions en extérieur. » L'ébauche du rictus narquois disparait avant même de s'être concrétisé tandis que je me cale les jambes contre le lit d'Aren, épaule contre Mjöll, le regard droit dans celui du jeune médicomage dans l'attitude de celui qui n'attend plus que son départ.

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Malgré l'épuisement du corps et du mental, le sommeil se fait capricieux. Oscillant entre veille et sommeil depuis qu'Aren s'est rendormi, je ne parviens pas à chasser la montagne d'événements qui a composé ces dernières vingt-quatre heures. Et si l'arrivée de Markus et la venue d'Ozymandias avait été deux souffles frais dans cet air asphyxié, leurs départs avaient refermé la chape de plomb au-dessus de mon crâne. Ma montre indique trois heures du matin lorsque mes paupières tentent vainement de se refermer pour la cinquième fois depuis que les lumières de la chambre se sont éteintes. Mon cerveau ne cesse de rejouer chaque scène de la journée. Notre arrivée, l'attente des résultats, le premier diagnostique posé par Tcherkassov, l'espoir d'une guérison et d'une bonne prise en charge, avant la douche froide. Andersen qui avait suivit s'était fait aussi absent que le jeune médicomage avait été présent. Peu loquace, évasif, réfractaire à mes interrogations et prompt à fuir en silence et évincer mes interrogations quand aux changements d'état d'Aren tout au long de la journée. Car si son état était resté stable, les résultats demandés par Tcherkassov ne m'avaient pas été communiqué, et ce léger détail n'avait cessé de tinter en arrière plan. Ne pas savoir est la plus amère des sensations, et quand l'enfant avait commencer à se plaindre d'un mal de ventre poignant, Andersen n'avait donné aucune réponse concluante si ce n'est un effet secondaire du traitement. Une potion supplémentaire et Aren avait finit par s'apaiser à nouveau, sans que cela ne parvienne entièrement à calmer mes doutes. Depuis cette fameuse potion, personne n'était venu et Markus avait dû repartir lui aussi. Nous laissant seuls en définitive. Me laissant seul avec ce monstre d'angoisses qui avait repris le dessus. J'ai conscience que l'absence du médicomage est probablement dû en grande partie à cause de ma façon de lui parler, de cette attitude intimidante que je n'ai pas cherché à atténué le moins du monde et qui n'avait que légèrement baissé sous l'afflux d'une bonne dose de caféine ramené de la maison. Dans l'obscurité de la pièce, mes yeux cherchent la silhouette de mon fils, sa respiration n'est pas aussi lourde qu'elle devrait l'être dans un sommeil profond et je me demande si lui aussi à dû mal à trouver ce dernier. Les émotions ont été fortes pour lui aussi, et s'il a tenté de faire bonne figue auprès des autres, il n'a réellement leurré personne. Sa fatigue et sa faiblesse lui ont à peine permis de trouver l'énergie pour griffonner quelques lignes sur la feuille de dessin. Mes yeux tombent sur l'une des peluches qui cohabitent désormais avec le jeune adolescent dans le lit et une esquisse de sourire tendre étire mes lèvres tandis que je me laisse retomber sur mon oreiller dans un soupire. Les avoir eu tous les deux auprès de nous m'a fait plus de bien que je n'osais l'imaginer. Et même si j'aurais eu envie de me blottir contre chacun d'entre eux sans parvenir à le faire, leurs simples présences ont été un soutien plus solide que n'importe quel roc de montagne. Mes paupières se ferment sous l'image de leurs visages et je me laisse glisser vers ce demi-sommeil qui ne parvient pas à me couper entièrement des sons de la pièce.

Au premier signe d'éveil désordonné mon cœur manque un battement. Alerte, je me redresse sur mon lit, fichant un regard affolé sur le corps d'Aren qui se tord sous les draps. «Aren ? » L'inquiétude gronde et seul un gémissement de douleur rapidement suivis d'une accélération notoire de sa respiration suffisent à me faire bondir hors du lit, baguette allumée à la main. «Aren parle-moi. Décris-moi ¿Te duele? » Je vois ses yeux qui implorent, sa bouche tordu et les gouttes de sueurs qui perlent sur ses tempes. Les braises à peine éteintes s'enflamment dans un brasier magnifique et je ne prends pas le temps de me poser plus de question, ni de remettre un haut sur mon torse nu. En quelques enjambées j'ai atteint la porte, lancé le sortilège d'alerte à destination des infirmiers de garde et ouvert la chambre sur le faux silence nocturne du couloir. Trois secondes et toujours aucune réaction. Mierda. « Andersen ! » Réveiller tout l'hôpital m'indiffère au plus haut point et ma voix amplifiée d'un sonorus roule vers les autres portes dans un bruit de tempête. A l'autre bout du tunnel une première lumière s'accentue et les prémices d'une agitation me parviennent. C'est suffisant pour que je retourne auprès de l'adolescent dont les larmes de douleur qui coulent sur ses joues se perdent dans le pelage de Mjöll qui a blottit sa tête contre son torse en dépit de toute gêne que cette proximité impose à son sorcier. Sorcier qui est de toute façon trop occupé à gérer l'urgence qui se presse devant ses yeux inutiles pour s'arrêter à ce détail. « Papá, mi vientre...» Un effet secondaire est-il sensé être aussi envahissant et alarmant ? Je ne suis pas médicomage, mais je suis sûr que non. Des pas précipités arrivent jusqu'à nous, enfin. Trop lentement si je devais écouter mon avis personnel tronqué. Et des mains me poussent légèrement sur le côté tandis que la lumière de la chambre est largement rallumée révélant le teint livide d'Aren qui s'est soudain laissé retomber en arrière sur son oreiller. Il ne me faut pas longtemps pour saisir qu'il ne s'agit pas là d'effets secondaires attendus, et que quelque chose ne va pas. Mjöll qui s'est également reculé a commencé à grogné doucement, sous le regard paniqué d'un infirmier qui s'empresse d'envoyer sa collègue chercher le fameux Andersen qui doit avoir repris sa garde de nuit. Je sais pas comment fonctionnent leurs quarts ici, j'en ai évidemment rien à foutre. Tout ce qui compte c'est qu'ils se permettent pas de faire venir Rønning dans cette pièce.

Debout derrière Andersen heureusement rapidement arrivé sur place, je fais les cent pas en attendant qu'il termine son examen de l'abdomen particulièrement tendu d'Aren. Je ne peux que me rappeler le froncement de sourcils du Tcherkassov tôt ce matin quand il avait lancé son sortilège copie des organes. Encore un examen fait sans résultat apporté par la suite. Ni contrôle. Je peux me tromper, mais de mémoire, personne d'autre ne s'était penché sur la question de ces organes. Cette perspective me fait serrer les poings contre ce Andersen, contre les infirmières, contre le personnel soignant dans son ensemble. Contre l'hôpital tout entier. Cela fait trop longtemps que le médicomage garde le silence, et qu'Aren souffre en serrant les dents, laissant seulement couler des trainées salées sur son oreiller. « Alors ? » Je serre les dents, ce qui donne cet accent grinçant à ma question auquel répond immédiatement un éclat affolé dans les yeux de mon interlocuteur avant qu'il ne tente de se reprendre, sans y parvenir entièrement. « Hum, je crois que sa rate a peut-être mal réagit au traitement mais peut-être que cela peut venir d'autre chose je...» La colère mêlée de peur, gangrénée par un épuisement latent, achève de faire sauter le dernier verrou de mes limites et mes doigts empoignent le col de sa veste avec une force qui lui fait légèrement lever les pieds. « Callate. Agis au lieu de raconter de la merde ou va chercher quelqu'un de moins con. » Les éclairs qui éclatent dans mes yeux sont presque tangibles tant ils parcourent chaque fibre de mon être. Sa voix bredouille quelques sons qui ressemble à des mots, mais il n'a pas le temps de se reprendre qu'Aren se tord à nouveau de douleur dans un spasme plus fort que les précédents avant de s'écrouler à nouveau sur le dos dans une succession de convulsions qui arrachent une longue plainte de panique à Mjöll. Je lâche l'homme d'un mouvement brusque, qui s'empresse de tenter un premier sort pour tenter, j'imagine, d'endiguer la réaction nerveuse, sans obtenir le moindre résultat. Et il ne faut pas avoir fait dix années de médicomagie pour voir qu'Andersen est complètement démuni face à ces symptômes qui ne collent peut-être pas avec le diagnostic qu'on lui avait communiqué. Il ne mesure pas encore la chance qu'il a d'être le seul compétent en magie de soin, sans quoi il se serrait déjà retrouvé avec sa silhouette imprégnée dans le mur en guise de décoration.





Although I felt like giving up It's not the road I chose
Dax Tcherkassov
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J'attends le verdict sans impatience, le front lisse, le regard franc. Celui de mon interlocuteur est sombre ; je devine le pour et le contre qui doivent s'agiter sous son crâne. J'ai côtoyé trop de gens des forces de l'ordre, dans le monde moldu, pour ignorer ce qu'ils pensent généralement des gens comme moi. L'auror n'a peut-être obtenu aucune confirmation et ne sait pas la nature réelle de mes activités, mais ces éléments ne sont pas nécessaires, pour rendre ma présence indésirable. « J'en aurais rien à foutre de te faire confiance si tu étais pas susceptible de vendre ces informations pour sauver tes propres fesses quand cet enfant aura quitté le statut de patient à tes yeux. C'est là tout mon problème. T'as l'air compétent en tant que professionnel. Ici en tout cas. Mais je ne peux pas te laisser l'occasion de prendre plus d'informations sur lui. » Vendre ces informations pour sauver mes fesses. Les commissures de mes lèvres s’étirent en un léger rictus de mépris, sans que mes yeux ne trahissent l’impact du coup porté. Il ne sait rien de moi. Il n’a que mon nom, prononcé par des truands, et qui pourrait être celui de mon frère. Il a cette information sur ma famille, cette connaissance de la potentielle arme à ma ceinture. Soit je suis un criminel, soit je ne le suis pas. Il a visiblement choisi – avec raison – la première option : une option qui vient, selon lui, avec la lâcheté suprême de sacrifier le bien-être d’un gosse pour me sauver moi. Le ferais-je ? Jamais. Mais je ne peux blâmer sa méfiance ; c’est l’option la plus sécuritaire et la moins débile. Ses bras se décroisent et sa baguette s'agite. Un cliquetis m'indique sa décision, tandis qu'il ouvre le battant d'un dernier sort. « Dites ce que vous voulez à Andersen. Même que je vous ai proposé de régler nos différents un mercredi soir chez Bukken, pour ses sessions en extérieur. » Véritable proposition ou non ? Il se cale contre le lit de l'enfant, son regard dans le mien. Je le soutiens calmement, conscient du battant ouvert et de mon départ qui est attendu : « Je ne vends aucune information. Chacun ses défauts : j’en ai des tonnes, mais abuser de ma position de médicomage et trahir d’anciens patients n’en fait pas partie. Je ne laisserai jamais tomber ces gosses. » Je ne vends jamais d’informations acquises dans l’hôpital ; ailleurs, c’est autre chose. Ma voix ne laisse passer aucune émotion. Cette précision était-elle nécessaire ? Non. Mais l’idée qu’on puisse m’associer à de tels actes me répugne. Est-ce ma limite ? Ai-je vraiment des limites ? Si oui, elles ne sont pas tracées par les convenances, la société et les notions manichéennes de bien ou de mal. Je suis un sale type, je ne le nie pas. Je ne cherche pas à me construire une morale bidon, à faire semblant d’avoir une conscience. Criminels. On l’est du premier coup de couteau donné entre les omoplates jusqu’au premier œillet déposé sur la pierre d’un confrère. Viciés. On le devient dès qu’on hume l’air des bas-fonds et des mensonges, dès qu’on raconte notre premier bobards pour faire mettre en taule quelqu’un à notre place. Pourris jusqu’à la moelle. Aux premières gouttes de sang qui coulent sans nous appartenir, aux premières larmes retenues dans les coups, aux premières lueurs d’effroi dans nos iris candides, qui ne le seront plus jamais. Je suis une charogne, une pourriture, un égoïste, un inutile. Un type qui ne sait que survivre, parce que c’est la seule chose qu’on m’a appris, qui ne prend son plaisir que dans l’action, parce que c’est la seule chose qu’on m’a légué, et qui n’aspire à rien, non rien, si ce n’est vivre un jour de plus que ce qu’ils avaient prévu et veiller sur ma sœur. Je ne serai jamais un bon type. Mais je ne tolérerai probablement jamais la souffrance d’un enfant ou l’inconscience des adultes supposés veiller sur eux. J’adresse un signe du menton à Styx, qui se faufile jusqu’à la porte, avant de jeter un dernier regard à la silhouette étendue dans le lit. L’infirmière m’a dit qu’il n’y avait aucune réaction indésirable au traitement, mais j’aurais voulu vérifier moi-même. Tant pis. Mon collègue s’en chargera assurément. Je m’avance vers la porte, levant mon sort d’insonorisation d’un geste bref, avant de conclure : « Il n'y a aucun différent à régler. Je respecte ceux qui placent l’enfant au cœur de leurs priorités. Je vous envoie Andersen. » Pas d’animosité, dans ma voix. Aucune rancune ou d’orgueil blessé dans mes yeux clairs, fixés une dernière fois dans ceux de mon interlocuteur. Rien de visible, pas même un tressaillement de mâchoire. Mais au fond de moi, très loin derrière une barrière que je ne lèverai pas, il y a peut-être une pierre d’amertume. Je quitte la pièce, en refermant la porte, prêt à passer le relais à quelqu’un de plus recommandable que moi.
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L’esprit ne peut pas s’empêcher de faire des liens qu’il ne devrait pas faire. Les yeux se posent machinalement sur le dossier, aux notes trop succinctes, sur lequel le médicomage est en train d’écrire. Mon écriture aux lettres droites se détache dans le haut de la feuille : un résumé des interventions, des traitements amorcés, des hypothèses invalidées. Celles en attente, aussi, et pour lesquels les résultats sont arrivés. Andersen les a consultés distraitement ce matin, en vitesse. Il est persuadé que j’ai exagéré en cherchant trop loin, alors que le diagnostic était simple ; c’est selon lui l’explication au fait que l’homme s’est agacé de ma présence. Je ne l’ai pas contredit. Je ne cherche pas à obtenir la moindre prestance auprès de mes collègues et je me fous de ma réputation dans cet hôpital. Je fais mon job ; et mon job, c’est veiller sur ces êtres qui sont trop jeunes pour connaître déjà la souffrance.

Les notes qu’il rajoute aux miennes et qui résument la journée sont courtes.  Constantes stables, aucun changement majeur. Mal de ventre ; effets secondaires des potions. Anti-douleur de type 3 administré. Et la surveillance d’une potentielle allergie ? Les investigations pour s’assurer que la douleur n'est pas plutôt dû à autre chose…? Mon dédain est plus long que ses phrases. Son regard croise le mien, provocateur : je le soutiens avec froideur, sans chercher à camoufler que j’étais en train de lire. « Il n’a rien dit sur toi, si c’est que tu te demandes. » Ce n’est pas ce que je me demande. « Tu vas investiguer, pour la douleur au ventre ? « Effet secondaire. On perdrait un temps monumental, s’il fallait investiguer chaque fois. Et rien n'est inquiétant dans son état actuellement. Il répond bien au traitement. » Je veux croire qu’il a raison et qu’il n’a rien négligé. Mais je n’ai pas cette naïveté. J’envisage toujours le pire plutôt que le meilleur, le compliqué à la place du simple. C’est un défaut, parfois. J’ai trop l’habitude de vouloir avoir un coup d’avance en permanence, même en médecine. Je me fais fréquemment des scénarios sur ce qui pourrait arriver à un patient, je prévois des plans C et D, juste au cas où. Je suis un joueur d’échecs, qui anticipe. Peut-être que je vois trop loin, cette fois encore. Peut-être que ce mal de ventre n’est rien d’autre qu’un effet secondaire :  Andersen n’est pas débile et il bosse normalement d’une façon convenable. Il a dû vérifier les autres symptômes et j’imagine qu’il a accru sa surveillance en conséquence. J’hoche la tête sans rien rajouter, détachant mes yeux du dossier avant de me lever, bien décidé à ne plus me soucier de ce patient, qui n’est pas le mien. C’est l’heure de ma sieste, de toute façon. Et j’en ai foutrement besoin, si je veux bosser efficacement cette nuit.  

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« Andersen ! » Le prénom résonne trop fortement pour être naturel. Elle m’arrache à un demi-sommeil, de ceux où la conscience se mélange désagréablement au monde des rêves. Je reconnais la voix : mon cœur bat un peu plus vite, sous une intuition exécrable. Derrière la porte de la salle de repos du personnel, des pas résonnent précipitamment. Andersen, probablement, a répondu à l’appel du père et doit gérer l’urgence. Car seule une urgence peut expliquer ce sortilège d’alerte et cet appel ; mais une urgence de quel type ? Si l’état du gosse était stable, comme l’affirmait mon collègue, alors le traitement aurait dû logiquement continuer de faire effet sans problème, sans complications. À moins que…? Ma machoîre se contracte, alors que j’attrape ma blouse, accrochée au mur. Je sors de la pièce tout en boutonnant les premiers boutons, pressé d’infirmer mon inquiétude. Andersen doit être en train de gérer la situation ; je le trouverai en train de tenter de rassurer le père, et je pourrai me casser rapidement pour retourner dormir. « Hum, je crois que sa rate a peut-être mal réagit au traitement mais peut-être que cela peut venir d'autre chose je...» Andersen n’est pas en train de maîtriser la situation. Ni de rassurer la père. Il est plutôt occupé à souhaiter être ailleurs, si je me fie au ton paniqué de sa voix. Je grimace, entrebâillant la porte au moment où Hammarsklöld l'invite à agir. Je ne cherche pas à analyser leur conversation. Mes iris s'arrêtent sur Aren qui se tord de douleur dans un spasme, puis s'écroule sur le dos. Andersen est relâché après une succession de convulsions, qui me font ouvrir carrément la porte. Il tente un sort, vain, qui m’informe sur la situation : il n’a aucune idée de ce qui provoque cette réaction chez l’enfant. Bordel. Je n’ai aucune hésitation. Être le bienvenu ou non est secondaire, dans une telle situation. Je sors ma baguette de ma poche, sans même réaliser que je n’ai pas achevé de remettre en place tous les boutons de ma blouse. Secondaire, ça aussi. Tout est secondaire, en situation d’urgence. Je m’approche à pas vifs vers le patient, les lèvres serrées, mais le cœur calme. La panique fait perdre toute lucidité.  Je note en un regard l’absence d’un monitoring. Pourquoi Andersen est-il soudainement aussi inefficace ? « J’ai besoin de ces constantes en permanence. Ouvrez une ligne aussi, on ne peut plus passer par la voie orale. » L’un des infirmiers s’empresse d’acquiescer à ma demande : il prend dans le chariot de soins un bracelet rose, qu’il glisse autour du poignet d’Aren. Des chiffres lumineux apparaissent aussitôt en suspension au-dessus de sa tête, ne m’arrachant qu’un très léger froncement de sourcils. T’as foutu quoi Andersen? Ce dernier me jette un coup d’œil paniqué, avant de regarder le père ; la peur a-t-elle suffit à enrayer ses capacités ou s’est-il trop reposé sur la facilité, lui aussi ? Je me fous pas mal de ses raisons. Seul compte le résultat. Je ne songe pas à demander une quelconque permission, ni à demander à l’auror son avis. Ma baguette s’agite au-dessus du corp qui convulse, répétant le sort de ce matin, mais de façon plus précise. Les organes s’affichent de nouveau devant mes yeux et mes sourcils se froncent plus franchement, tandis qu’une autre infirmière installe une voie intraveineuse sur l’autre poignet de l’enfant. J’interrompt le sort et mes iris se fixent froidement dans ceux de l’autre médicomage : « Vous avez remplacé le traitement à large spectre par quelle potion? » « Je n’ai pas remplacé le traitement. » Réalise-t-il son erreur à ce moment ? Peut-être. Il pâlit, alors que mes traits habituellement neutres se crispent sous une colère contrôlée. Je n’ai même pas besoin de lui demander pour savoir ce que je devine : il n’a fait aucune surveillance supplémentaire, après notre courte conversation au poste. Trop sûr de son diagnostic, de mon exagération, de la suite. Je ne m’attarde pas sur lui, soulevant la couverture pour exposer le ventre de l’enfant. L’abdomen est plus gonflé, les convulsions ne s’arrêtent pas et si mon hypothèse est exacte… Proche d’une marque bleutée, des minces lignes noires semblent vouloir relier les points entre eux. « Kardefan, 15 ml en iv, stat. Je vais avoir besoin d’une deuxième ligne. Préparez aussi l'ensemble de potions n˚ 4. » J’aperçois les traînées de douleur sur l’oreiller ;  je hais les larmes. Mais ce que je hais encore plus, ce sont les incompétents qui ne font rien pour les empêcher de couler. Je me penche légèrement, pour être entendu de l’adolescent, m’efforçant de prendre une voix chaleureuse, calme :   « Salut Aren, c’est Dax, le type un peu grognon de ce matin. Je vais devoir t’endormir pour prendre soin de toi, mais t’en fait pas, ça va aller. Ceux que t’aime sont près de toi, et quand tu te réveilleras, t’auras plus mal. » Ça va aller. Les trois mots les plus vides de sens, les plus menteurs, les plus hypocrites que je connaisse. Qui peut les prononcer avec certitude ? Personne. Mais je ne peux pas faire mieux, actuellement. Je jette un coup d’œil au père tandis que l’infirmier approche une seringue du cathéter, afin d’injecter la potion que j’ai demandé : « Vous me foutrez à la porte quand il sera tiré d’affaire Hammarsklöld. D’ici là, tenez sa main. » Pour qu’il ne soit pas seul, en sombrant dans le sommeil. La potion fait rapidement effet ; les convulsions s’apaisent alors que je lance un nouveau sort. Dans les airs, les chiffres qui indiquent sa tension s’abaissent enfin. « Il avait mal depuis combien de temps ?  Et quelqu’un est revenu vous voir, après la dernière potion ? Mes machoîres sont contractées, mais mes gestes ne trahissent aucune nervosité. Je pressens déjà la réponse. L’homme supposément plus convenable que moi s’est éclipsé, sûrement pour ne plus payer sa fiabilité avec le col de sa veste.
Magni Hammarskjöld
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Cómo decir que me parte en mil cuando desvanecerse

@Dax Tcherkassov  | 17 juillet 2023 - Nuit



Je ne perds involontairement la perméabilité magique de mon don que très rarement depuis que j'ai appris à le maîtriser. Voire quasiment jamais. La dernière fois notoire, c'était un jour de pluie sous la canopée colombienne, au pied d'un précipice boueux. Au pied de sa vie brisée qui ne me renvoyait aucune accroche mentale. Pourtant cette nuit, je sens vibrer la tétanie de l'homme qui me jette un regard en coin après que la voix de son collègue se soit superposée aux bruits secs et cacophoniques de la pièce en effervescence. L'urgence pulse de tous les côtés avec la même intensité que le sang dans mes veines. Même si je déteste cette sensation, je peux aisément en comprendre la cause. La présence de Tcherkassov, le sort qu'il lance au dessus d'Aren, les gestes précis des infirmiers présents, les tuyaux installés dans son bras. Tout prend des allures de la bascule tant redoutée. Comment voir cette perfusion sans apercevoir le gouffre de la perte passée. Les roches mentales se fissurent. Loin, derrière le crâne, la fracture est un éclair blanc dans la glace. J'ai beau essayer d'ignorer la migraine qui tape dans mes tempes, je ne peux faire abstraction des effluves de l'émotion qui court-circuite les synapses du médicomage. « Vous avez remplacé le traitement à large spectre par quelle potion? » « Je n’ai pas remplacé le traitement. » L'émotion est si forte que je lutte immédiatement contre elle, refusant d'accepter d'écouter ses échos qui emplissent la pièce. Mes propres pensées sont elles-mêmes surchargées de sentiments trop forts pour avoir la place d'en recevoir d'autres. Surtout quand il ne s'agit pas des miens. Mes yeux écorchent le regard d'Andersen avant de rebondir sur les chiffres brillants des constantes d'Aren qui affichent des hauteurs trop élevées. Je me concentre sur ces données pour oublier le reste. Oublier mon envie cruelle de briser les doigts de l'homme qui s'efface sous les ordres plus ordonnés de son jeune collègue. Sa terreur gratte contre les barrières de mes pensées et un tic nerveux fait frémir ma paupière. L'esprit est trop occupé à gérer l'afflux des informations nouvelles pour parvenir à garder la perméabilité complètes. Tant pis pour le mal de crâne. Tant pis pour les pensées volées. Tant pis pour la culpabilité latente qui s'installe, attendant son tour patiemment. L'urgence c'est Aren. Aren et son corps qui convulse dans le lit, sous mes yeux impuissants. Aren qui ne sort plus le moindre son de douleur. Aren et la spirale des drames qui me clouent au sol. « Kardefan, 15 ml en iv, stat. Je vais avoir besoin d’une deuxième ligne. Préparez aussi l'ensemble de potions n˚ 4. » Ses ordres m'arrachent un frisson. Une deuxième ligne. Je reporte mes yeux vers ses bras - incroyablement fin pour recevoir de tels soins non ? - sur lesquels le personne s'active avec la précision et la rapidité nécessaire à l'urgence. Je vois tout, son ventre gonflé, les lignes noires qui veulent s'étendre comme un poison entre les points, et chaque nouveau symptômes ainsi pointé du doigts me plonge un peu plus dans les abysses. J'étais volcan, orages, éclairs. Je deviens fumées, cendres et rocaille. Sous la courbe gelée des cils, le regard est aussi écharpé qu'une crevasse sans fond. Ce ne sont plus des menaces qui grondent dans mes entrailles, le mal est déjà là, et il étouffe toute lumière dans ses voiles sombres. Le corps se tend quand Tcherkassov se penche vers Aren, non par crainte de ce qu'il pourrait faire mais par peur de ce qu'il va lui annoncer.  « Salut Aren, c’est Dax, le type un peu grognon de ce matin. Je vais devoir t’endormir pour prendre soin de toi, mais t’en fait pas, ça va aller. Ceux que t’aime sont près de toi, et quand tu te réveilleras, t’auras plus mal. » Ceux que t'aime sont près de toi. Je tique sur le pluriel employé, il devrait avoir en effet d'autres mains autour de lui pour le soutenir. Mais il n'a que les miennes, roulées en poing nerveux contre le tissu de flanelle du pyjama de Markus. Ridicule pyjama aux dessins d'avocats qui dénote avec la situation actuelle. Et pourtant pyjama qui suffit à me sentir moi, un peu moins seul. C'est pas grand chose, mais c'est déjà un peu lui. Sa force pour affronter la perspective de voir Aren sédaté volontairement pour mieux le soigner. Mes traits se ferment un peu plus avant de croiser les yeux du médicomage qui s'est imposé face à l'autre. Je capte non seulement son regard mais aussi une colère contenue qui n'est pas la mienne, encore une fois, et mes yeux se plissent légèrement sous la migraine qui reprend de plus belle. Comme éblouis par toutes ces informations. J'ai l'impression d'avoir quinze ans à nouveau, et c'est tout sauf agréable. « Vous me foutrez à la porte quand il sera tiré d’affaire Hammarskjöld. D’ici là, tenez sa main. » Je n'ai aucune envie de le foutre dehors. Dans l'immédiat. Sans lui accorder le moindre signe de tête je contourne une infirmière pour venir me placer du côté opposé à l'équipe médicale pour lui attraper la main le plus rapidement possible. Mjöll qui s'est allongé en retrait pour ne pas gêner les allées et venues, souffle un air chaud contre mes chevilles. Je n'ai pas besoin de le voir pour savoir qu'il tient le plus délicatement possible la fylgia de l'enfant contre lui. Victime des mêmes symptômes, il doit faire son possible pour la garder en sécurité sur son immense ventre.
La potion administrée fait rapidement effet et les convulsions s'arrêtent enfin dans un pincement de cœur. Ses doigts se desserrent sous les miens, plongeant un peu plus dans la profondeur des abysses, une âme qui se laisse gagner par la lourdeur de l'océan au-dessus d'elle. Je ne me noie pas, pourtant. Je plonge volontairement en apnée pour gagner l'immobilité de l'attente sans remous. « Il avait mal depuis combien de temps ?  Et quelqu’un est revenu vous voir, après la dernière potion ? » Je fouille mes notes mentales afin de trouver l'information précise avant de poser un regard d'une dureté tranchante sur mon interlocuteur. « Il a commencé à se plaindre de son ventre à 15h43. Andersen est venu l'ausculter à 16h50 et il a reçu la potion contre la douleur à 17h22. C'est la dernière fois qu'on a vu quelqu'un. Autre que pour lui apporter son repas et son courrier. » Ma voix aussi a perdu ses accents d'orage pour trouver la fermeté concise d'un lame de roche. « Votre diagnostic ? » Je ne cherche pas à faire dans les fioritures langagières. Nous n'avons pas le temps pour les longues phrases ni les discours. Mais je tiens à être au courant, toujours et encore, et je le crois suffisamment intelligent pour ne pas avoir oublié ce détail. « Il risque de rester longtemps sous sédatif ? » A ma propre question je tourne la tête vers lui. L'immobilité de ses traits livides est un poignard dans mon être qui s'amuse à en tourner les fibres dans une lente agonie. D'un geste rapide je frotte mon visage dans ma main libre, celle qui n'est pas serrée autour des doigts d'Aren. Les miens pressent les paupières dans une tentative inutile d'endiguer les maux de tête. Je sens toujours vibrer autour de mois les impulsions électriques des autres esprits présents dans la pièce et ces interférences finissent par m'agacer plus que de raison. Je tourne mon attention vers mon fils, focalisant les vapeurs de ce don qui cherche à capter tout ce qui traine autour de lui. J'ai senti sa détresse juste avant que la potion ne gomme l'adrénaline dans son cerveau et l'idée qu'il puisse dormir prisonnier d'angoisses me tord le ventre. Je sais pourtant que les sommeils médicamenteux sont différents de ceux naturels, mais je ne peux m'empêcher de refuser de le laisser potentiellement en proie à des terreurs dont il ne pourrait se soustraire. Sans l'entrée de ses yeux, l'effort à faire est plus sensible, mais la porosité déjà active facilite l'arrimage. Je ne m'attarde pas sur les pensées primaires mais descend rapidement les fils des idées, appuyant mentalement sur une image qui déroule automatiquement une succession de pensées dans lesquelles je cherche rapidement l'image intéressante suivante jusqu'à trouver un souvenir suffisamment fort pour qu'il puisse servir de support au subconscient pour étirer des filaments d'un rêve tout autour. Une maîtrise de la legilimancie peu connue des non-initiés. Une action qui demande une connaissance approfondie des schémas de pensée de la personne et une confiance totale de celle-ci. Un acte doux, qu'on avait l'habitude de faire quand les cauchemars lui ravissaient trop de nuits de sommeil après la mort d'Ocean. De la même façon qu'il suffit de faire parler quelqu'un pour déverrouiller toute une piste de pensées annexes auquel le cerveau n'a même pas conscience de réfléchir, un legilimens suffisamment entraîné peu appeler un souvenir en particulier pendant une phase de réflexion. Comme un rêve dirigé. Ce n'est pas grand chose, mais c'est tout ce que je peux faire pour tenter d'apaiser Aren. Lui donner un souvenir heureux à penser depuis les lointaines limbes de l'inconscience.

Le procédé rapide n'a duré que quelques secondes, je ne suis pas allé chercher bien loin, et quand je romps la connexion je profite de ma concentration pour refermer plus efficacement les bords de mon don. Le visage fermé se lisse un peu plus tandis que ma respiration s'espace. M'inspirant de mes exercices de plongée en apnée, je cherche le rythme cardiaque lent nécessaire à faire redescendre la pression sanguine qui dilate mes veines. Une minute pour stabiliser les décharges d'énergie. Une minute pendant lesquelles les gestes des autres ne cessent pas. Une minute pour digérer les trois dernières qui ont fait basculer une nuit de repos et une nuit de tourments. Quand je rouvre les yeux je cherche Tcherkassov du regard : « Vous sortirez pas de cette chambre tant qu'il sera pas hors de danger. C'est tout ce que je vous demande. Inutile d'aller me chercher un autre de vos collègues défaillants sauf si c'est pour leur demander des cafés. » Retrouver la force de dire des douceurs sur le personnel soignant et des conneries amères c'est déjà remettre un pied sur l'immense montagne qui me sert de carapace. Après tout on sait jamais, le visage fatigué du médicomage qui semble enchaîner les heures de garde pourrait être sensible à mon propre besoin de caféine.



Although I felt like giving up It's not the road I chose
Dax Tcherkassov
Dax Tcherkassov
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
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L’équipe s’anime. En action, ils ressemblent à des danseurs coordonnés, habitués à faire leur boulot. Du coin de l’œil, je vois une infirmière qui termine de faire ce que j’ai demandé. « Il a commencé à se plaindre de son ventre à 15h43. Andersen est venu l'ausculter à 16h50 et il a reçu la potion contre la douleur à 17h22. C'est la dernière fois qu'on a vu quelqu'un. Autre que pour lui apporter son repas et son courrier. » Je calcule en vitesse : environ 1h entre les premières plaintes et l’auscultation, puis 32 minutes avant la potion. C’est sûrement à ce moment que j’ai lu le dossier d’Aren. Mon collègue n’était nullement inquiet. Un rictus de mépris s’étire sur mes lèvres, sans que je ne cherche à camoufler mon animosité. Mon cœur bat un peu plus vite, quelques battements plus vifs par seconde, alors que je songe à ce qui aurait pu être évité si le médicomage avait mieux fait son job. Qu’il n’ait pas changé le traitement, c’est une lacune, mais qu’il ait en plus tardé autant avant de venir…Il est pourtant compétent, habituellement. L’explication de l’inexplicable, c’est probablement la lâcheté. Rien qui n’est pas commun. Il devait craindre les réactions de l’homme qui se trouve dans cette pièce, et qui tient désormais la main de son fils. « Votre diagnostic ? » Je suis normalement prudent avant d’en poser un, mais celui-là est trop évident. Tous les signes cliniques pointent dans la même direction. Je ne réponds pas immédiatement, tendant la main pour prendre l'ensemble de potions n˚ 4 que me donne l’infirmier. Ceux-ci s’activent autour de lui, accomplissant leur tâche en silence, l’œil vif, les traits concentrés. « Il risque de rester longtemps sous sédatif ? » La phrase trouve des échos qui ne devraient pas exister. Elle s’infiltre sous mon crâne, y résonne en sourdine, en changeant de tonalité. « Elle va rester longtemps sous sédatif ? » C’est presque marrant, comment la reproduction d’ambiance similaire à un autre drame peut faire émerger des souvenirs supposés être enfouis. Presque.  J’ai la vision vague et rapide de ma sœur, étendue dans un lit d’hôpital. Je fuis le son de ma propre voix enfantine, lorsque j’ai questionné un médecin, bien des années plus tôt. La réminiscence est bâillonnée, alors que je m’ancre dans le présent. J’ai à peine remarqué les gestes de l’homme et son visage qui se lisse. Je n’ai pas le temps de me préoccuper de lui, pour l’instant ; je déroule la trousse n˚ 4, qui contient tout ce dont j’ai besoin pour ce genre de cas.  Je lève très brièvement les yeux vers l’homme, qui rouvre les siens au même moment ; une impulsion, à mi-chemin entre la compassion et un autre sentiment, passe peut-être dans mes nerfs entraînés dans l’action. « Vous sortirez pas de cette chambre tant qu'il sera pas hors de danger. C'est tout ce que je vous demande. Inutile d'aller me chercher un autre de vos collègues défaillants sauf si c'est pour leur demander des cafés. » J’hoche la tête dans un signe d’assentiment, sans rien ajouter. Je ne serais pas sorti, même s’il me l’avait pas demandé. Pas tant que l’état de cet adolescent n’est pas stabilisé, et qu’un autre médicomage qu’Andersen n’est pas présent sur le département. Ou Rønning. Une équipe très efficace, ces jours-ci. Quant au café, il me semble actuellement une excellente idée : si mes gestes sont précis, les cernes sous mes yeux le sont aussi. Je suis habitué aux quarts de nuit, mais les enchaîner fatiguerait n’importe qui, même moi.

J’extirpe de la trousse une aiguille à prélèvement, sur laquelle on peut greffer des fioles.  J’en enfonce une dans le barillet et je pose les autres à proximité du corps étendu, tout en répondant à retardement aux questions de l’adulte : « Svart hevelse localisé, c’est une surinfection magique. Laissez-moi cinq minutes pour maîtriser d’abord la situation. Après, je vous explique le diagnostic et je réponds à vos questions. » Ma voix est calme, sans agitation. Ma baguette s’appuie sur la peau de l’enfant, là où commence l’entrelacement noir ; un premier sort désinfecte l’endroit, tandis qu’un second agit directement sur les marques magiques. Elles ondulent doucement sous la peau, comme des serpents noircis par les braises. La vision peut être désagréable et je lève un coup d’œil vers l’adulte, lui indiquant du menton l’aiguille, comme pour lui demander son approbation. J’agirais quand même s’il refusait, mais je n’ai pas oublié à quel point le consentement lui tenait à cœur, ce matin. Et si je me fous généralement de ce à quoi les gens tiennent, je respecte, un peu, ce type. Suffisamment pour me dire que ce dérapage doit être douloureux pour lui. Un infime signe positif répond à ma question muette et je dépose ma baguette sur le lit, pour avoir une meilleure prise. L’aiguille s’enfonce sous la peau, à la base des ondulations. La machoîre contractée, j’aspire la substance noirâtre, qui continue de serpenter dans la fiole pleine. J’en rempli quatre autres, les unes après les autres, concentré. La cinquième se fait plus résistante ; une seule ligne noirâtre subsiste entre les marques et s’agite faiblement, sans pénétrer dans la fiole malgré la succion. Au-dessus d’Aren, les chiffres recommencent à grimper légèrement. Saloperie d’Andersen. Il a trop tardé et si la situation est gérable, elle aurait pu ne pas l’être. Je sens la mince sympathie que j’éprouvais pour lui s’évaporer totalement, alors que j’attrape ma baguette de ma main libre, sans dégager ma seconde. Le sort résonne avec sécheresse, faisant apparaître la rate transparente de l’adolescent. Enroulée autour d’elle, sous une forme de filets grisâtre, l’infection magique est nettement visible. Et persistante.  Mes yeux ne se détachent pas de la forme qui flotte au-dessus du torse dénudé de l’enfant. Ma main gauche tient toujours l’aiguille, tandis que la droite positionne la baguette à l’endroit où se trouve la rate. Un nouveau sortilège claque froidement, alors que je manipule délicatement ma baguette. Sur la projection translucide, le fil noirâtre se dénoue doucement, comme si je le déroulais manuellement. C’est presque le cas. Mon bras s’engourdit dans la manœuvre, sans que je ne change ma position. Seconde par seconde, filament par filament, je libère l’organe. Lorsque je termine enfin, la substance restante se fait aspirer, remplissant un dernier contenant.  Le son d’un appel résonne et je fais signe à deux infirmiers qu’ils peuvent y aller : la situation est maintenant sous contrôle.

Je lève les yeux vers les chiffres ; les constantes sont redevenues stables. Je lance un énième sort pour aider la coagulation avant de retirer l’aiguille, vu l’état des plaquettes. Je mets un infime pansement sur la peau, maintenant débarrassée des marques noirâtres, avant de lever les yeux vers l’infirmière restante : « J’ai besoin d’une fiole de trifaxine et d’une perfusion d’odaxyl sur la ligne périphérique, 100 ml à l’heure. Et mettez-le en 536 pour la surveillance de la sédation et des constantes. » Autant qu’elle commence la préparation de la fiole tout de suite : elle doit être récente et certains ingrédients doivent mijoter pendant une vingtaine de minutes. Elle hoche la tête et je rajoute avec froideur : « Si le médicomage qui prendra ma place vous dit qu’une surveillance aussi accrue est pas nécessaire, bottez-lui le cul pour moi. » Médicomage qui sera difficile à trouver, vu que Hammarskøld en est déjà à son troisième du service. Mais ce n’est pas important, pour le moment. Je pousse un bref soupir, de ceux qu’on pousse après une activité physique intense, alors qu’elle quitte la pièce. Mes yeux se relèvent brièvement vers le père, alors que j’explique enfin ce que je n’avais pas le temps de préciser : « C’est une surinfection. C’est rare, mais certains corps s’adaptent très rapidement au traitement à large spectre et développe une…J’sais pas comment vous le traduire sans utiliser le jargon médical. Disons comme une résistance, qui donne à l’infection une dimension magique ? » Comme si c’était nécessaire de rajouter quelque chose à ces gosses. Je poursuis : « Ce n’est pas fréquent. Mais c’est pour cette raison qu’on préfère normalement changer pour un traitement plus ciblé, plus tard. S’il avait changé de traitement comme prévu… » Je n’achève pas ma phrase. Mon agacement, mon mépris sourd pour ceux qui ne font que la moitié de leur boulot, résonnent dans mon silence. J’attrape les fioles remplies, que je glisse dans la trousse pour une analyse ultérieure. L’aiguille reprend aussi sa place, tandis que j’en sors une seconde, stérile, que j’installe sur une seringue tout en parlant : « Sa rate était déjà gonflée ce matin et son foie présentait des signes de faiblesse. Ça allait de pair avec la mononucléose, mais j’avais noté qu’une surveillance serait nécessaire, j’ai cru qu’il l’avait fait. Visiblement non. Le Svart hevelse est facile à détecter, il trace des chemins sous la peau jusqu’aux organes déjà sensibles. Andersen n’a raté son évolution que parce qu’il se fiait trop sur la stabilité d’Aren. Je le soupçonne d’avoir voulu évité au maximum de rentrer dans cette pièce. » Un rictus à moitié moqueur étire très brièvement mes lèvres. Ce n’est pas drôle. Mais que cet auror angoisse à ce point mes collègues l’est un peu. J’aspire le contenu d’un flacon au liquide bleuté, que j’injecte ensuite via le cathéter. Mes yeux cherchent de l’homme, alors que je précise ce que je suis en train de faire : « Ça empêchera l’infection de revenir en force, d’ici à ce que le reste des potions agissent. La sédation durera quelques heures. Je sais que voir quelqu’un sous sédatif n’est pas agréable. Mais pour le moment, son corps a besoin de se reposer. » Je le sais trop bien, même. Exceptionnellement, mes yeux se détournent, alors que le souvenir repoussé tout à l’heure se fait plus oppressant, maintenant que l’urgence est écartée. « Elle va rester longtemps sous sédatif ? »  Un gosse d’une dizaine d’année, auprès de sa sœur allongée. Un gosse qui ne comprend pas, ou qui comprend trop, et qui voudrait protéger sa sœur contre le monde entier. Un gosse qui n’a pas de main à tenir, pas de bras à serrer, pas de conversations pour le distraire, pas de peluches pour le consoler. Un gosse qui attend, ses longs doigts froids serrés autour de ceux d’une gamine, et qui redoute qu’elle ne s’éveille jamais.
Magni Hammarskjöld
Magni Hammarskjöld
GÖTEBORG Livet är en kamp, ​​du måste förbereda dig för striden
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Cómo decir que me parte en mil cuando desvanecerse

@Dax Tcherkassov  | 17 juillet 2023 - Nuit



Il ne prend pas le temps de répondre immédiatement, trop occupé à sortir des fioles et du matériel médical supplémentaire. Si le calme d'Aren est salvateur en comparaison des convulsions précédentes, ce n'est qu'une illusion. Le mal qui a provoqué cette réaction en chaîne est toujours là, visible sous la peau diaphane de son ventre. Le noir qui s'étire ne peut être que négatif et même si je n'ai pas encore les noms ni les confirmations, je devine que l'urgence n'est pas encore derrière nous. Aussi je n'insiste pas, comme j'aurais pu le faire dans une autre circonstance, observant simplement ses gestes avec une ténacité accrue. Tout me fait mal, mon crâne qui bourdonne encore légèrement, mes yeux secs de fatigue éblouis par les lumières vives de la chambre, mes mâchoires d'avoir passées vingt-quatre heures contractées, mon cœur de le voir au bord d'un principe duquel mes bras ne me servent à rien, mon âme qui ravive des souvenirs et des sensations que je pensais enfermées dans l'oubli. « Svart hevelse localisé, c’est une surinfection magique. Laissez-moi cinq minutes pour maîtriser d’abord la situation. Après, je vous explique le diagnostic et je réponds à vos questions. » La voix calme et posée de Tcherkassov me tire de mon état des lieux mental. Sa réponse, que j'étais prêt à attendre un peu plus longtemps, me fait froncer les sourcils. J'ai déjà entendu ce nom, quelque part, probablement ici. Ou dans la bouche d'Andres ? Sans jamais avoir eu à faire directement au mal concerné par cette appellation. Pas de mon éveil en tout cas. Pas de mes souvenirs ? Ou alors enfant ? J'essaie de balayer mes souvenirs dans un large spectre sans trouver de point de concordance adéquat. Dans la liste - trop longue - de mes propres diagnostiques, les informations se perdent et se mélangent. J'acquiesce d'un signe rapide et sec du menton avant de reporter mon attention ses les gestes médicaux qu'il continue d'enchaîner avec une précision professionnelle maîtrisée. Est-ce que le voir aussi calme et efficace me rassure ? Indéniablement. Est-ce que ça me fait chier que le seul médicomage pédiatrique compétent présent en ce moment soit un criminel ? Carrément. Un flot d'injures espagnoles se déversent dans mon cerveau, durcissant légèrement le regard qui se pose sur les doigts qui sortent des seringues. Un infime mouvement de tête vers moi me fait remonter mon attention sur son visage redevenu d'une certaine neutralité placide. Il semble demander une autorisation qu'il obtient d'un autre signe rapide. J'apprécie qu'il se donne la peine de faire sembler de demander, quand on sait tous les deux qu'il agirait sans mon accord. L'urgence palpite toujours autour de nous. Aren a été mis sous sédatif, ce n'est pas pour que je m'amuse à lui mettre des bâtons dans les roues maintenant. Mais cette infime marque de respect pour mes exigences précédentes est une pierre supplémentaire qui vient consolider la base de la confiance médicale que j'éprouve envers lui. Ca me fait doublement chier de le reconnaître, mais à cet instant, si on me demandait de changer de médicomage, je dirais non.

L'aiguille perce la peau, je ne perds aucune miette de l'opération. Je vois les lignes noires qui ondulent sous l'épiderme. Réseau mauvais d'un liquide vivant qui cherche à s'enrouler autour des forces vitales d'Aren. La tension vibre dans mes muscles quand le premier filament est extrait dans la fiole. Entrelacs sombres qui semble s'énerver contre le contenant de verre qu'on lui impose. Un instant, la vision des lignes noires me renvoient à d'autres lignes habilités à se répandre dans le réseau d'un système nerveux. Des trainées rouges aux douleurs de feu. Un éclair de dégoût traverse mes traits. J'ai l'habitude des blessures diverses et variées, mais les observer sur le corps d'un être aussi cher est une épreuve qui me tord les entrailles d'angoisses. Angoisses qui se font plus froides quand la dernière ligne résiste à son aspiration. Suivant les mouvements de Tcherkassov je tique sur les chiffres des constantes qui bondissent d'un coup. Pour palier à la terreur qui voudrait venir humidifier ma main pressée autour de celle d'Aren, la rage prend le relais. Un tourbillon brûlant qui remonte jusqu'au narine qui se dilatent légèrement. J'aurais dû m'inquiéter avant, cela ne fait aucun doute, quand aucun médicomage n'était venu prendre le relai après la potion  de cette après-midi. J'aurais dû réclamer la visite de quelqu'un plus tôt. Pour contrôler. Au lieu de vouloir jouer au gars qui accepte de prendre sur lui pour ne pas agresser encore un peu plus le personnel soignant sous tension. La culpabilité, qui n'attendait que cet instant pour jaillir hors du volcan, se répand tout autour de moi. Nuage de cendres étouffantes. C'est foutrement con de savoir que c'est en voulant faire des efforts sur mon humeur exécrable, que j'avais tout simplement remis Aren sur la ligne droite du précipice.
Le sort sec qui claque une nouvelle fois contre l'intrus cendré me replonge dans une sévérité de rocaille. Je n'ose rien imaginer de plus que ce que je vois, la lutte du soignant contre l'infection récalcitrante à délaisser son terrain conquis. Matérialisée en contours brillant d'un nacre vaporeux, la rate est entourée de fil sombre. C'est presque beau, ce réseau filandreux comme un lierre pernicieux accroché autour d'une pierre. « Tu vois Magni comment les racines se tracent un chemin même à travers le gré ? C'est fascinant. Ce sont toujours d'elles dont il faut se méfier, car ce sont les plus vivaces. Elles peuvent se frayer un chemin à travers la roche et parcourir près d'un kilomètre en une journée. » Sa voix coule un frisson glacé le long de mes vertèbres. Le souvenir claque en même temps qu'un autre sortilège qui vient courber la ligne noire sous la peau blanche. De le même façon qu'Ocean avait tiré, délicatement, avec cette même précision chirurgicale, sur la racine rouge sang de la vératre pourpre. Une plante toute aussi mortelle que sa cousine blanche, plus redoutable encore par ses propriétés magique que son pendant moldu. D'un plissement de front agacé je chasse le souvenir pour me focaliser sur la défaite du serpent noir qui se retrouve enfermé dans les mêmes conditions que les trainées précédentes. Je devrais relâcher mes mâchoires, desserrer les muscles de mes épaules, dérouler mon dos courbé vers Aren, assouplir les ombres de mon visage. Mais je ne parviens pas à défaire mon attention de ces foutues fioles où s'agitent un mal qui en avait après la vie de mon fils. Comment t'as pu laissé faire ça Magni ? Depuis combien de temps ces filets sombres rampaient sous sa peau dans l'insouciance la plus totale ? T'es qu'on con Magni, gère toi, regarde où ça te mène de vouloir mener le tonnerre dans toutes tes batailles. Tu vaux pas mieux qu'Halvor. T'es qu'un connard d'Hammarskjöld qui détruit tout autour de lui. Je m'enfonce facilement dans les reproches, conscient de ces défauts qui ne cessent d'heurter les autres malgré mes efforts pour les protéger. « J’ai besoin d’une fiole de trifaxine et d’une perfusion d’odaxyl sur la ligne périphérique, 100 ml à l’heure. Et mettez-le en 536 pour la surveillance de la sédation et des constantes. » J'entends sans écouter la voix de Tcherkassov qui continue son job de médicomage avec la même passivité efficace. Une pensée fugace traverse les nuages de cendre : il est doué. Un travail de précision et de concentration exemplaire. Deux compétences essentielles quand il s'agit de manipuler des outils chirurgicaux qui pourraient être mortels. Qui, peut-être, entre ses mains, savent l'être. Justement. Ceux qui connaissent le corps humain, ses organes et ses fonctions, sont aussi aptes à soigner qu'à être les plus redoutables criminels. Gacha me l'a trop souvent prouvé. Sa magie du sang était redoutable. Précise et mortelle, elle aussi. « Si le médicomage qui prendra ma place vous dit qu’une surveillance aussi accrue est pas nécessaire, bottez-lui le cul pour moi. » Cette fois la remarque parvient à me tirer de la lourde spirale de mes pensées et je redresse la tête vers lui dans un regard tranchant. Est-ce qu'il s'est passé avec Andersen ? Est-ce que ce dernier avait ouvertement dit qu'une surveillance accrue n'était pas nécessaire malgré les recommandations du jeune médicomage ? C'est en tout cas ce que semble insinuer ce dernier avec une froideur que me fait penser que son aversion pour son collège est sensiblement plus élevée que précédemment. Quoi qu'il en soit la dernière infirmière quitte la pièce à son tour - quand est-ce que les autres sont partis d'ailleurs ? - et le calme retombe un peu plus posément sur l'ambiance électrique de la chambre. Si Tcherkassov s'autorise à pousser un léger soupire sous la pression qui redescend d'un cran, le mien reste bloqué dans une gorge nouée. « C’est une surinfection. C’est rare, mais certains corps s’adaptent très rapidement au traitement à large spectre et développe une…J’sais pas comment vous le traduire sans utiliser le jargon médical. Disons comme une résistance, qui donne à l’infection une dimension magique ?  Ce n’est pas fréquent. Mais c’est pour cette raison qu’on préfère normalement changer pour un traitement plus ciblé, plus tard. S’il avait changé de traitement comme prévu… » Il s'arrête et mon visage se fronce plus durement. Son mépris évident pour ce manquement grave se mêle au mien. J'analyserais plus tard les conséquences de cet enchaînement de gestes manqués et de décisions ratées. Pour l'instant ma rage est trop développée pour me permettre d'entrevoir clairement contre qui elle se dirige. A part moi-même.  
A nouveau, je me concentre sur ses gestes pour éviter de plonger trop longuement dans les pensées qui tournoient comme des corbeaux dans mon crâne. Je me focalise sur sa voix qui reprend des explications laissées plus tôt en suspens. Les yeux suivent avec une intensité impossible à maîtriser les doigts qui enchaînent les fioles et les aiguilles.« Sa rate était déjà gonflée ce matin et son foie présentait des signes de faiblesse. Ça allait de pair avec la mononucléose, mais j’avais noté qu’une surveillance serait nécessaire, j’ai cru qu’il l’avait fait. Visiblement non. Le Svart hevelse est facile à détecter, il trace des chemins sous la peau jusqu’aux organes déjà sensibles. Andersen n’a raté son évolution que parce qu’il se fiait trop sur la stabilité d’Aren. Je le soupçonne d’avoir voulu évité au maximum de rentrer dans cette pièce. » Je devine l'ombre d'un rictus dans sa voix mais je reste concentré sur la potion qui est administrée à Aren pour ne pas ressentir croiser le regard de Tcherkassov. Je n'ai nullement envie d'y lire le moindre jugement de sa part envers ma capacité à faire fuir le personnel soignant de cette chambre. Encore moins quand les conséquences ont été aussi désastreuses. Les yeux rivés sur les cathéters qui relient l'enfant à ses soins, mes iris se durcissent un peu plus. Je déteste devoir reconnaître que j'ai agis comme un con. Je déteste encore plus quand c'est un autre qui me le fait remarquer. Encore plus quand il s'agit d'un criminel dans le rôle d'un gars qu'un vient de sauver la vie de mon fils. « Ça empêchera l’infection de revenir en force, d’ici à ce que le reste des potions agissent. La sédation durera quelques heures. Je sais que voir quelqu’un sous sédatif n’est pas agréable. Mais pour le moment, son corps a besoin de se reposer. » Un souffle de nez m'échappe ainsi qu'un murmure sombre, dur et contraint par un nœud d'émotions qui tord de l'intérieur. « C'est toujours plus agréable que de les voir mort. » Mjöll s'agite contre ma cheville. Je sens ses dents qui mordillent l'articulation, son souffle chaud, l'humidité de sa gueule ouverte. Je sens son agacement mêlée de peine qui tente, vainement, de recouvrir le brasier de mes émotions. Je me dégage de son attention d'un geste sec de pied qui manque de frapper son museau.« Arrête ça. » Sa voix basse gronde dans mes oreilles tandis qu'il se relève dans un geste lourd. Je sais très bien ce à quoi son ça fait référence. La culpabilité sombre qui me ronge les os et réveille une autre, plus profonde, qui m'a fait murmurer cette foutue phrase. « Callate » L'ordre siffle entre mes dents. Mon humeur est à mille lieux de vouloir me prendre une leçon de ma fylgia. J'ai trop de choses qui me tournent dans la tête, en plus de cette migraine qui se renforce un peu plus sous la pression de mes dents serrées. « T'es pas cou... » « Callate! » Le second ordre est plus fort que le premier. Plus menaçant aussi. Je vrille un regard noir sur l'ours qui me répond d'un soufflement rauque qui fait voler quelques mèches sur mon front. Hijueputa de tête de marteau. Je me détourne de l'ours polaire sans rien répliquer de plus. Tant qu'il arrête de raconter de la merde, je peux supporter les effluves de sa désapprobation envers ma propre condamnation interne.

Ma nuque est raide, et je tente de redresser mes épaules lourdes d'une journée sans nuit et de nuits dans sommeil. Mes doigts lâchent la main d'Aren pour caresser doucement son bras avant de se poser sur sa joue endormie. Quelques heures...Une nouvelle longue et inquiète veille qui s'annonce. « Je serai pas aussi conciliant avec le prochain médicomage que je l'ai été avec Andersen si je trouve qu'il tarde trop à repasser contrôler son état. » La tension est palpable dans les intonations hachés d'une voix qui marque plus durement un accent étranger sous-jacent. Tout en parlant, mes yeux glissent sur le visage faussement paisible de l'adolescent. Il est toujours trop pâle sous sa peau mate. Une infime lueur triste parvient à adoucir le tranchant de mon regard tandis que je replace les mèches défaites de ses cheveux soyeux. « J'aurais préféré que vous puissiez reprendre le dossier, mais vous avez déjà une mine affreuse. Il serait peut-être temps de rentrer chez vous. » Je me retourne vers lui, cherchant son regard pour s'y ficher avec une fermeté qui traduit la difficile crise de conscience qui agite mes nerfs. Dans les résidus de l'urgence passée, je prends le temps d'observer un peu plus longuement le médicomage qui me fait face. Les cernes sous ses yeux, une dureté de traits sensiblement au-dessus de la neutralité de ce matin, un soupçon, peut-être, de tristesse ? dans le regard. Une lueur de sentiment qui m'aurait échappé si je n'avais pas capté toute à l'heure, un éclair de souvenir étranger quand nos regards s'étaient croisés précédemment. Dans la porosité nerveuse d'un don qui avait profité de l'effervescence pour se faire la malle. Un souvenir capté illégalement et je m'interdis immédiatement de revenir dessus le laissant couler dans l'oubli. Je remarque alors la chemise à peine fermée sur un corps qui se dévoile en-dessous. Que faisait-il avant de débarquer en soutien dans cette chambre ? Mes sourcils déjà trop froncés parviennent à creuser un peu plus de rides sur mon front quand mes iris s'arrêtent sur une ligne blanche en travers de son abdomen offert aux regards. Une blessure qui avait dû être bien moche, à l'époque de sa réalisation. Sa largeur et sa longueur suppose une tentative notoire de faire le plus de dégâts possible, et si cette perspective est loin de m'émouvoir, elle confirme un peu plus les suppositions de liens intimes du Tcherkassov avec un milieu criminel peu recommandable. Mon attention reportée sur son visage, une de mes mains passe dans mes cheveux pour remettre un peu d'ordre dans les boucles sombres qui me retombent sur le front avant de lâcher un : « merci » qui vibre comme une corde tendue. Un simple mot qui regroupe l'ensemble de son action, et de ses explications et qui est largement intense pour exprimer nettement qu'il est sincèrement pensé.

Après une dernière caresse sur la joue de l'adolescent, je me détache de son visage pour aller chercher la chaise remise dans un coin plus tôt dans la soirée afin de pouvoir installer mon propre lit à quelques pas de celui d'Aren. Il est clair désormais que je ne compte pas retourner me recoucher de si tôt de toute façon, autant profiter de cet éveil pour faire des choses constructives. Sans un mot je passe tourne le dos à Tcherkassov afin de pouvoir la ramener tout contre le bord du lit médical et de m'y installer non sans être allé chercher quelques morceaux de parchemins ainsi qu'une plume dans les affaires déposées par Markus. Pris dans ma journée d'hier, les visites et les soins d'Aren, je n'ai même pas encore eu le temps de prévenir la famille élargie. Et connaissant la madre, si je tarde trop à la prévenir, elle me tombera dessus à coup de beuglante périmée dans quelques jours. Le dos calé en arrière, les jambes allongées je relève enfin le regard vers Tcherkassov toujours présent, probablement occupé à rangé son matériel ou vérifier quelques données. « J'vous fait pas plus confiance que ce matin, mais faut reconnaître que votre aptitude professionnelle est plus importante, pour le moment. Ca me fait chier, mais j'ai visiblement pas le choix parce que je compte pas faire preuve de plus d'amabilité pour vos collègues. Je lui ai rien fait pourtant à votre Andersen. Aucune menace voilée, ni de baguette sur la jugulaire. J'sais pas ce qui la rendu aussi terrifié pour que ça lui colle les neurones. A moins que ce soit un proche parent de Ulric Andersen ? » Un infime rictus mauvais s'étire sur mes lèvres à cette hypothèse qui vient juste de filtrer dans ma tête. Ce connard d'Ulric Andersen...




Although I felt like giving up It's not the road I chose
Dax Tcherkassov
Dax Tcherkassov
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
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Le souffle et le murmure, dur d'émotions nouées, font trop écho à mes pensées. Celles qui m’envahissent brièvement, avec la ténacité des souvenirs indésirables. « C'est toujours plus agréable que de les voir mort. » Mes lèvres se soulèvent en un rictus amer, sans que je n’observe la fylgia qui mordille la cheville de l’homme. Je note le pluriel et les émotions potentiellement impliquées, mais je suis foncièrement trop égoïste pour m’intéresser avec compassion à l’auror et à ce qui peut venir avec une telle phrase. Je ne suis pas en accord avec le fond, de toute façon. Quand je soigne ces gosses, ce n’est pas forcément la mort, que je cherche à chasser ; c’est surtout la souffrance. Idéalement, je préfère lorsqu’ils restent en vie et je fais tout pour qu’ils ne la perdent pas. Mais ça arrive, malgré tout. Et je ne m’apitoie pas davantage sur ces petites existences écourtées que sur celles des plus vieux. La mort est l’île vers laquelle tous se dirigent. Certains l’atteignent simplement plus rapidement que d’autres. Et quand certains de ces enfants se tordent de douleur sans être soulagés par les potions, quand j’observe les larmes qui coulent sur leurs joues et leurs illusions qui se brisent, je trouve parfois plus agréable de les voir enveloppés dans leur dernier linceul, enfin dans un monde sans cris. Du moins, en théorie. Parce qu’en pratique, je me rappelle bien de ma réaction, lorsque ma sœur a été hospitalisée. J’aurais tenu un discours similaire à l’auror et j’aurais frappé quiconque aurait insinué le contraire. Voir sa silhouette inconsciente, sans vie, me glaçait. Je m’étais fait des dizaines de scénarios, dans lesquels elle ne figurait pas. J’avais entrepris d’imaginer l’existence sans elle, comme pour me préparer à l’inéluctable. J’avais aussi tenté de me rassurer en me disant qu’au moins, elle respirait. Au moins, le sang coulait encore dans ses veines. Au moins. Mais pour quelle existence, au final ? Anastasia est retournée trop souvent à l’hôpital, par la suite.

J'achève de ranger le matériel de la trousse, alors que l'auror et la fylgia dialoguent de façon animée. Je ne capte pas les premières mots, mais j'entends le dernier, et le terme menaçant qui suit, dans une langue que je ne maîtrise pas. Je peux seulement l’identifier, sans que la donnée n’ait beaucoup d’importance pour moi dans l’immédiat. Pas cou…Coupable ? Je lève très brièvement les yeux vers lui, sans dire quoi que ce soit. Un regard neutre, presqu’indifférent, mais qui se teinte peut-être d’une lueur de sympathie. Je ne suis pas père, je ne le serai jamais. Je n’ai connu que des modèles crasses, viciés, écoeurants. Et quelques bons aussi, ici à l’hôpital. Je ne peux pas comprendre la souffrance qu’on éprouve en voyant son enfant dans une telle situation ; pour moi, paternité rime avec détachement. Mais ce type aime ce gosse, c’est nettement visible. Ce serait peut-être même touchant, si je pouvais l’être. Il caresse son bras, avant de poser sa main sur sa joue, et j'abaisse de nouveau mes yeux sur la trousse, que j'achève de rouler. Il n’est coupable de rien, non.  Mais je ne chercherai assurément pas à le rassurer, faut pas abuser. « Je serai pas aussi conciliant avec le prochain médicomage que je l'ai été avec Andersen si je trouve qu'il tarde trop à repasser contrôler son état. » La voix aux accents plus prononcés laisse entrevoir une tension inévitable. Le prochain médicomage…Il n’a pas contredit mon affirmation. Il compte donc bien me chasser de cette pièce, encore ? Mes traits demeurent neutres, mais mes doigts serrent avec un peu trop de force la corde qui noue la trousse. Je sais que je ne vaux rien, du point de vue moral, mais l’orgueilleux en moi n’aime pas se faire rappeler à quel point je suis méprisable. Ce n’est que justice, après tout. On ne peut pas, il paraît, revendiquer de sauver des vies et en détruire d’autres. « J'aurais préféré que vous puissiez reprendre le dossier, mais vous avez déjà une mine affreuse. Il serait peut-être temps de rentrer chez vous. » Un rictus moqueur étire mes lèvres. Et quelque chose de doux, d’exécrable, fait peut-être battre mon cœur un peu plus fort. L’apaisement de ne pas être entièrement rejeté pour ce que je suis, ou pour ce qu’il considère avoir deviné de moi. Ce sentiment est haïssable et je m’agace de l’éprouver. Tout ce qui fracture mon indifférence est un danger. Je soutiens son regard avec la même fermeté, plongeant dans le sien pour ignorer les émotions qui pourraient vouloir se frayer un chemin dans mon être. Un type comme moi ne doit éprouver ni remords, ni compassion, ni sympathie. C’est la règle, ma règle. Pour survivre et continuer à avancer, tout en ayant une conscience en lambeaux. Je vois ses yeux qui s'arrêtent sur mon torse, alors que ses sourcils de froncent un peu plus. Je baisse le regard, ne remarquant qu'à ce moment que je n'ai pas achevée de boutonner ma chemise et que ma peau témoigne de mon passé aussi clairement que l'étui à ma ceinture. S'il avait des doutes, il ne doit plus lui en rester beaucoup. Mais cette cicatrice ne dit rien de celles que j'ai infligées aux autres : elle ne raconte qu'une histoire, la mienne. Je boutonne ma blouse nonchalamment, alors qu’il passe une main dans ses cheveux. Mon regard se fait un peu plus insistant. Une attente muette, légèrement provocatrice, de la suite. Il regrettera probablement d’avoir dit qu’il aurait préféré que je reprenne le dossier et me foutra dehors, une seconde fois. L’orgueil en pâtira, mais la carapace est dure : ce qui importe, c’est l’enfant, rien d’autre. Je n’ai pas d’illusions. Je ne cherche pas à ce qu’on me tende la main et qu’on me remercie pour avoir fait quelque chose de bien. Je ne bosse pas à l’hôpital pour avoir une quelconque rédemption. Ce serait débile. J’ai déjà peut-être tenté à une époque, de vraiment faire un truc aimable, réellement dans le but d’aider les autres. Une idée absurde. Mon père, quand je lui avais fait part de mon intention d’aller dans des hospices pour raconter des histoires aux personnes âgées, avait ricané :  « Aider les vieux ? Ты с ума сошёл? C’est quoi la suite, te faire moine ? Tu te crois meilleur que nous, c’est ça ? Дурак! T’es rien de plus qu’une saloperie de criminel, quand on trempe ses mains là-dedans, elles redeviennent jamais blanches. » Plus rien ne le redevient, il avait raison. Et ça m’importe peu. Je me suis habitué à la couleur de mes mains et au rouge qui les teinte trop souvent. « merci » Un froncement de sourcils vient rompre ma neutralité. Je le fixe en silence, alors que le mot vibre en moi en menaçant de me faire chuter. Je ne veux ni reconnaissance ni quoi que ce soit dans le genre. Pourtant, je me surprend à hocher la tête ; le signe que le remerciement a été pris en compte, et qu’il n’y a rien de plus à dire. Les silences, de toute façon, sont souvent bien plus bavards que les phrases.

Il se détache de l'adolescent pour aller chercher une chaise, puis des parchemins, tandis que je vérifie une dernière fois le ventre de l'enfant. Il n'y a pas de saignement là où j'ai ponctionné et les filets noirâtres ne sont pas revenus. Au-dessus de sa tête, les chiffres sont normaux. La situation est redevenue stable et devrait le rester désormais, tant que les bons soins sont prodigués. Je replace le haut sur la peau fine, puis déplace légèrement la couverture, de façon à le recouvrir tout en laissant ses mains à l’air libre, de façon à ce que les fils reliés aux cathéters ne soient pas  entravés. Mes yeux glissent brièvement sur le dos dénudé de l’homme, sans que je ne m’y attarde. La conscience enregistre la forme d’un tatouage, mais la pensée est tellement ailleurs qu’aucun lien ne se fait. J’extirpe d’une petite pochette à l’avant de la trousse une minuscule fiole au contenu translucide, déjà connectée à une aiguille. J’enlève le capuchon, avant de me diriger vers la première perfusion ; une infirmière a remplacé tout à l’heure le kardefan par une potion neutre, qui sert de base à plusieurs mélanges. J’insère l’aiguille dans le site d’injection, le liquide du sac prenant aussitôt une douce teinte rose. « J'vous fait pas plus confiance que ce matin, mais faut reconnaître que votre aptitude professionnelle est plus importante, pour le moment. Ca me fait chier, mais j'ai visiblement pas le choix parce que je compte pas faire preuve de plus d'amabilité pour vos collègues. Je lui ai rien fait pourtant à votre Andersen. Aucune menace voilée, ni de baguette sur la jugulaire. J'sais pas ce qui la rendu aussi terrifié pour que ça lui colle les neurones. A moins que ce soit un proche parent de Ulric Andersen ? » Ma tête se tourne vers lui. Je vois son mince rictus mauvais, qui signale que le dit Ulric n'est probablement pas son pote, ainsi que son dos calé en arrière. Il est visiblement prêt à écrire son courrier. Cette fois, je n'en suis pas exaspéré. Il paraît que les gens ont parfois besoin de parler, quand ils vivent des situations émotionnelles intenses. Si c’est son cas, vaut mieux qu’il parle à un parchemin qu’à moi. Je lâche d’un ton neutre :   « C’est son frère. Il en parle avec admiration un peu trop souvent. » Une infime lueur espiègle brille dans mes yeux. Ils disent ce que je n’affirme pas : vous lui avez tapé dessus ? Ça me plairait. Je n’ai rencontré Ulric que deux fois et sa tronche ne m’est pas revenue. Une animosité entre lui et l’auror expliquerait qu’Andersen ait été à ce point peu enthousiaste d’aller visiter fréquemment la chambre de l’enfant. Je dispose du contenant et de l’aiguille dans le réceptable à matériels utilisés, reprenant sans sourire : « Cette mine affreuse est ma tronche naturelle. J’étais en train de dormir quand votre cri m’a réveillé. Je ne bosse officiellement qu’à trois heures. » Ou plutôt, Ødegård bosse officiellement à trois heures. Mon vrai quart de travail, sans remplacement, n’est qu’à huit heures le matin. Je gère normalement bien les horaires de nuit, mais les enchaîner à ce point a inévitablement un impact sous les cernes qui s’étirent sous mes yeux trop clairs. Je poursuis : « Je peux reprendre le dossier temporairement, si vous le voulez. Je suis de garde jusqu’à début pm, puis c’est Rønning et Klaus, jusqu’à vingt heures où je reprends le relais. Vous avez le temps de réfléchir à qui vous voulez pour le dossier. Dans tous les cas, j’suis dans les parages.» Je veux qu’il sache qu’il a des choix, des possibilités. Être coincé avec un seul professionnel, quand on doute de lui, c’est aussi contraignant que d’être ligoté.

La respiration de l’enfant est définitivement régulière, ses constantes aussi. Je lance une dernière fois le sortilège que l’homme connaîtra bientôt par cœur : un coup d’œil bref m’assure qu’aucun filament n’est revenu entourer la rate pendant les dernières minutes. Rassuré, mais pas étonné qu’aucune récidive rapide n’ait eu lieu, je me tourne vers l’auror : « Je dois aller au poste pour voir si Andersen a écrit cette nuit d’autres données importantes que j’aurais pas déjà lues, et je reviens. Je me charge de la première heure de surveillance. Normalement je placerais une infirmière, mais il en a suffisamment bavé, je préfère rester sur place pour m’assurer que tout rentre bien dans l’ordre. Je m’attends à aucune détérioration, mais je serai prévenu si c’est le cas. » Pas par un autre sorcier. Mon poignet, qui porte un bracelet turquoise similaire au rose que l’infirmier a mis à l’enfant, touche délicatement le sien. Les chiffres scintillent quelques secondes et une légère sensation de chaleur m’indique que le lien a bien été établi. Je l’utilise rarement ; le personnel infirmier reçoit des alertes lorsque le monitoring est anormal et ce sont eux qui, normalement, préviennent le médicomage de garde. Dans quelques cas, certains d’entre-nous préférons néanmoins pouvoir intervenir directement, sans intermédiaire, le plus rapidement possible. Sans rajouter quoi que ce soit, je prends la trousse n˚ 4 et je quitte la pièce, Styx emboîtant trop joyeusement mes pas.

Environ une dizaine de minutes s’est écoulée, lorsque je reviens dans la chambre. J’ai un dossier sous un bras et une tasse trop chaude dans chaque main. Je dépose la première sur l’une des petites tables, avant de remettre la seconde à l’adulte que j’ai un peu trop vu, depuis la veille : « Réserve personnelle dans la salle des employés. C’est meilleur que la lavasse de l’hôpital. Vous aussi, vous avez une mine affreuse.» Et je me doute bien qu’il ne compte pas terminer sa nuit en dormant. Il serait retourné dans le lit temporaire plutôt que de rapprocher la chaise, sinon. Je jette un coup d’œil à l’adolescent, toujours plongé dans son sommeil artificiel, et aux chiffres encore normaux. Mes yeux se posent ensuite de nouveau sur l’auror, alors que je poursuis : « Votre fylgia a raison. Vous êtes pas coupable. Mais mes paroles n’auront aucun effet, alors je vous déballerai pas un long discours sentimental pour vous convaincre. » Mon ton est neutre, mon regard ne reflète rien. Tous ceux du département savent qu’il ne faut pas compter sur moi pour rassurer des parents. Mon boulot, ce sont les gosses, pas l’état mental de ceux qui s’en occupent. D’autant plus que je suis généralement méfiants, à leur égards. Je tends pourtant à l’adulte le dossier que j’ai amené, au détriment de toutes les règles, et que j’ai ouvert à la page des notes faites par le personnel : « Tenez. » Sur un vulgaire papier autocollant, le nom d’Aren Garcia indique l’identité du patient. On ne fait jamais lire aux parents nos notes d’évolution. Ni aux patients. Sauf que je ne suis pas celui qui respecte le plus les normes et les exigences. Les notes de Rønning succèdent à celles inscrites rapidement par les infirmières : il y est fait mention du caractère du représentant légal, de son inquiétude et du diagnostic probable. Sur la page dédiée à mon court temps passé auprès d’Aren, mes observations, mes hypothèses et mes interventions sont soigneusement notées. Aucune mention du lien fait pour la paternité, ou des dispositions héréditaires. À la fin d’un paragraphe, au-dessus de ma signature, quelques phrases : Représentant légal demande nv médicomage. Raison : incompatibilité des caractères. Résultats et rapport donnés à Andersen. Quelques notes infirmières succèdent, avant que ne viennent les notes très brèves de mon collègue et que j’ai lues un peu plus tôt : Constantes stables, aucun changement majeur. Mal de ventre ; effets secondaires des potions. Anti-douleur de type 3 administré. À ces propos annonciateurs de ce qui allait arriver, une nouvelle phrase s’est greffée dans la dernière heure. Andersen était auprès d’un autre patient quand je suis passé chercher le dossier, mais il a probablement rajouté son observation pendant que j’intervenais. Pour protéger ses fesses en cas de poursuites ? Probablement. Représentant légal agressif ; attitude violente déjà relevée précédemment. M’a rudoyé ; inf. présents pour témoigner. Aucune plainte ne sera portée, mais disc. am en réunion de la possibilité de lui faire quitter la chambre en cas de récidive. Int. prise en charge par Tcherkassov, patient stable au moment de mon départ. Les notes auraient dû logiquement s’arrêter là. Sauf qu’à défaut de mettre mon poing quelque part, j’ai rajouté en dessous de la signature d’Andersen : Médicomage remplaçant un peu con : attitude nonchalante déjà relevée pendant le rapport. A failli tuer le patient par négligence : inf. présents pour témoigner. Rapport de faute sera rempli, disc. en pm sur la possibilité qu’il fasse son boulot correctement. Notes sur le patient suivront. Les gestionnaires n’apprécieront probablement pas, mais j’en ai rien à foutre. Pour le moment. Je pointe du menton les notes d’Andersen, expliquant : « Vous pouviez rien faire. Même si vous aviez sonné Andersen toutes les heures, vous êtes déjà fiché comme l’adulte paranoïaque et chiant, aux côtés de l’enfant. Les professionnels auraient dit oui, oui en faisant semblant de se soucier de vos inquiétudes, mais ne les auraient pas pris sérieusement en compte. Et le résultat aurait été similaire, en final. » Les convulsions, l’infection…J’éprouve du mépris à l’égard de mon collègue, que je croyais moins négligeant. J’espère qu’après cet épisode, il surveillera plus attentivement ses patients.
Magni Hammarskjöld
Magni Hammarskjöld
GÖTEBORG Livet är en kamp, ​​du måste förbereda dig för striden
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Cómo decir que me parte en mil cuando desvanecerse

@Dax Tcherkassov  | 17 juillet 2023 - Nuit



Ulric Andersen. Un nom qui résonne de loin, depuis l'époque de Durmstrang. Il y a plus de vingt ans. Une éternité. « C’est son frère. Il en parle avec admiration un peu trop souvent. » Avec admiration.... L'information fait danser des lueurs narquoises dans mes yeux. Un flot de souvenirs lointain déferle derrière l'écran de mes iris. Ulric Andersen, toute une histoire de longue date sur fond de coups de poings plus ou moins réglementaires et d'insultes homophones. Je veux lui accorder le bénéfice du doute. Il a pu se trouver un cerveau fonctionnel en grandissant. Admettons. Les gens sont capables de changer, pour le mieux, si on leur en donne l'occasion. Mais mon propre souvenir de l'homme restera à jamais entaché par cette rancœur amer au goût de sang qui avait succédé à mon passage à tabac dans une rue de Göteborg. Le goût terreux des pavés mêlé de sang coule encore dans ma gorge, le bruit mat de ses chaussures dans mon estomac, le craquement des os de ma pommette, la haine railleuse de ses insultes joviales crachées dans un jet de bave. Les rires de ses potes qui regardaient et surveillaient l'entrée de la ruelle. Un film de souvenir vibrant qui fait toujours flamber la même rage dans mes veines. Je glisse un regard en coin vers Aren, son visage de jeune adolescent. Comment songer que j'avais deux ans de plus que lui sans éprouver un puissant sentiment de révolte ?
Je laisse le souvenir s'éteindre dans un dernier coup de chaussures dans les côtes avant de porter mes réflexions vers ce fameux frère devenu médicomage. Un souvenir flou d'un visage enfantin. Il faut avouer que ses fréquentations et sa vie m'intéressaient peu à l'époque. Nos seules interactions se cantonnaient à des insultes de sa part, des insinuations lubriques de la mienne, de dessins explicites de celle de Markus, et de coups de poings dans la cour de Durmstrang quand la pression devenait ingérable pour tout le monde.  
Mes traits reflètent malgré moi un mélange narquois de dégoût et d'animosité contenue. Un connard ce Ulric, jusqu'au bout. Peut-être bien que son petit frère à pu retenir un sentiment peu amical à mon égard depuis cette époque-là. J'ai moi-même certain rancoeur envers ceux qui osaient s'en prendre à Andres et abuser de sa bienveillance à ses dépends. Mais ceux-là sont déjà au courant de mon existence et de notre lien fraternel. Une perspective qui fait briller un peu plus fortement les lueurs mauvaises de mes iris. Andersen premier du nom était un lâche qui se cachait derrière des ombres pour frapper ceux qu'il méprisait. Ça ne m'étonne pas tant que ça que le deuxième se montre pas plus hardi dans son approche des conflits. Ma seule satisfaction est d'imaginer la tête qu'il a dû faire quand plus tôt dans la journée il avait pris la suite de Tcherkassov pour tomber nez-à-nez avec Markus et moi dans une même pièce. « Cette mine affreuse est ma tronche naturelle. J’étais en train de dormir quand votre cri m’a réveillé. Je ne bosse officiellement qu’à trois heures. » Accaparé par mes souvenirs je relève le regard vers lui avec un froncement de sourcils. Sa présence reflète un véritable soucis professionnel quant à la santé d'Aren. Je reconnais que cette perspective entérine mon envie irrationnel de le garder comme médicomage en charge de notre dossier. Mais savoir qu'il devrait être en train de dormir avant d'enchaîner une autre journée de garde me fait le regarder avec sévérité. « Je peux reprendre le dossier temporairement, si vous le voulez. Je suis de garde jusqu’à début pm, puis c’est Rønning et Klaus, jusqu’à vingt heures où je reprends le relais. Vous avez le temps de réfléchir à qui vous voulez pour le dossier. Dans tous les cas, j’suis dans les parages. » Ma main vient gratter ma barbe dans un air pensif, inscrivant dans un coin de mes tableaux mentaux le planning décrit par Tcherkassov. La perspective d'avoir à choisir entre un nouveau médicomage et Rønning le laisse perplexe. Le côté rancunier de ma personnalité a bien envie de recroiser la route du vieux médicomage, compétent mais flemmard et négligeant, afin de pouvoir mieux analyser l'homme derrière le professionnel. Et compléter les éléments du dossier à son sujet. Mais replacer la santé d'Aren en risque pour satisfaire mes désirs de représailles. Tout en posant une fois de plus les pours et les contres, je suis les mouvements du jeune homme qui relance le sortilège destiné à repousser la surinfection magique. Si cette action renoue des noeuds dans mon estomac, mon regard reste rêveur.  « Je dois aller au poste pour voir si Andersen a écrit cette nuit d’autres données importantes que j’aurais pas déjà lues, et je reviens. Je me charge de la première heure de surveillance. Normalement je placerais une infirmière, mais il en a suffisamment bavé, je préfère rester sur place pour m’assurer que tout rentre bien dans l’ordre. Je m’attends à aucune détérioration, mais je serai prévenu si c’est le cas. » Je l'observe, silencieux, en proie à ces réflexions multiples qui se partagent tout l'espace dans ma tête. Andersen, Rønning, Tcherkassov. Un léger signe de tête souligne mon acquiescement envers tout ce qu'il vient de dire. Peut-être que les yeux parlent plus que ma langue. Je ne saurais dire s'il parviendra à y lire la reconnaissance latente qui vibre derrière les ombres fatiguées qui s'y enroulent. Il connecte son bracelet aux constantes d'Aren, attrape sa fameuse trousse numéro quatre, et sort sous mon regard lourd d'émotions.

La porte se ferme et le silence m'envahit, froid de cette solitude nouvelle. Un long soupire s'autorise enfin à quitter ma poitrine, la tête entre des mains qui frottent le visage las. Sous mes doigts la peau me semble aussi poisseuse que si un véritable nuage de cendres en avait recouvert les sommets. Les creux marqués sont des sillons rongés par l'inquiétude. Sous les tempêtes de mon crâne les pensées se fracassent, les roches craquent sous les assauts de souvenirs qui percent les cavernes où ils étaient enfermés. Sous la lumière crue qu'ils atteignent, leurs bords écharpés griffent mon âme.
Je puise encore quelques forces dans la rage amère du cœur pour rouvrir les yeux et tenter, vaguement, de lisser les émotions qui habitent les traits. De la main gauche, j'attrape celle d'Aren endormi, serrant fort cette peau si chère sans craindre de le réveiller. De l'autre, j'attrape la plume posée sur les draps pour occuper l'esprit ailleurs. Donner du concret à penser, expulser cette tristesse dans un jet d'encre léger. Feindre une confiance que je n'ai pas pour avertir sans alerter. En espérant être suffisamment efficace et finir par me convaincre moi-même.

La dernière lettre destinée à Markus manque encore quelques mots quand Tcherkassov pousse à nouveau la porte de la chambre, deux tasses fumantes dans les mains et un dossier sous le bras. L'odeur du café qui flotte autour de lui suffit à allumer une étincelle d'envie qui se répercute en une infime courbure de mes lèvres. Je prends celle qu'il me tend sans même songer à la refuser tellement chaque fibre appelle à en savourer la chaleur et le goût délicatement amer. « Réserve personnelle dans la salle des employés. C’est meilleur que la lavasse de l’hôpital. Vous aussi, vous avez une mine affreuse.» Je grogne, entre satisfaction et fausse exaspération avec un air d'ours bourru qui laisse peu de doute sur la pertinence de Mjöll à mez côtés. Je hume les chaudes odeurs de la tasse malgré tout, appréciant déjà le contact de cette douce promesse de caféine contre mon visage. Tout comme Tcherkassov, j'ai l'habitude d'enchaîner les nuits de mission, les surveillances, des semaines parfois avec quelques heures de sommeil grappillées tant bien que mal à droite, à gauche. Mais les heures de veille auprès de son enfant malade comptent comme vingt des autres. Je peux aisément imaginer la sale gueule que je donne à voir. « Votre fylgia a raison. Vous êtes pas coupable. Mais mes paroles n’auront aucun effet, alors je vous déballerai pas un long discours sentimental pour vous convaincre. » Toute trace de sourire disparaît dans un regard noir qui trouve celui de la dite fylgia qui hausse légèrement les épaules d'un air peu concerné. Je déteste savoir que Tcherkassov a entendu, et saisi, la remarque de Mjöll. Je n'ai nullement envie de trouver une quelconque pitié dans son regard. Encore moins d'entendre de jolis discours et de paroles vides de sens. Et même si le médicomage à l'air de ne pas vouloir aller vers ce type de soutien empathique, ça me fait chier qu'il le remette sur le tapis un mot d'une conversation qui ne lui était pas destinée.
Il capte cependant mon intérêt en tendant le dossier qu'il tenait sous le bras en me recommandant de le prendre. Un sourcil circonspect levé, j'attrape celui-ci, les yeux fixés dans ceux de mon interlocuteur, cherchant à démêler ses intentions, sans y parvenir. A regret je pose la tasse de café sur la petite table de chevet qui se trouve de mon côté, ce qui m'oblige à me redresser sur ma chaise et à pousser Mjöll d'un coup de bras sensiblement énervé sous le ronronnement amusé de ce dernier. Stupide tête de Mjöll. Une fois réinstallé, le dossier ouvert sur la pile de courrier non achevé, je parcours rapidement les notes diverses inscrites par différentes mains. Le détail simple et succint de Rønning, celui plus détaillé de Tcherkassov du matin avec ses préconisations, puis Andersen. Jusqu'à présent mon visage sombre était resté fermé à la lecture des informations médicales, mais aux phrases du frère d'Ulric un rictus narquois revient éclairer mes lèvres. M’a rudoyé. Je ricane presque dans un souffle acide. La suite de son observation est tout aussi risible et l'animosité revient enflammer l'écran de mes iris. Il voulait me chasser de cette chambre ? La belle affaire. Je poursuis ma lecture, appréciant la tournure des phrases employées par le soignant présent dans la chambre sur ce qu'il pense réellement de l'intervention de son collègue. Pendant ce temps Mjöll, incapable de résister à l'appel de la lecture d'un dossier professionnel, a déposé la petite fylgia endormie d'Aren avec amour et délicatesse tout contre son sorcier avant de changer de forme. L'impressionnant ours polaire laisse place à l'invisible lézard bleu qui se faufile en un éclair sur les pages manuscrites. Sa gorge palpite contre les encres utilisées, sa langue se darde comme pour en sentir chaque odeurs différentes, chaque aspérités, et chaque information retenue est stockée dans sa mémoire qu'il s'empressera de me restituer quand l'occasion se présentera. Ma lecture terminée je le laisse fureter tout autour comme à son habitude, reportant mon attention sur l'homme qui reprend la parole pour expliquer, enfin, sa pensée.  « Vous pouviez rien faire. Même si vous aviez sonné Andersen toutes les heures, vous êtes déjà fiché comme l’adulte paranoïaque et chiant, aux côtés de l’enfant. Les professionnels auraient dit oui, oui en faisant semblant de se soucier de vos inquiétudes, mais ne les auraient pas pris sérieusement en compte. Et le résultat aurait été similaire, en final. » Est-ce que cette perspective étouffe la culpabilité ? Absolument pas. Tout juste elle parvient à étendre la colère vers d'autres personnes. Mais la culpabilité sous-jacente demeure. Top ancrée et trop réelle pour être balayée d'un revers de main grâce à une note de service sur un dossier. Je fronce néanmoins le nez dans un signe de dédain et je me lève d'un geste nerveux après avoir refermé le dossier. « Faut pas avoir un esprit très ouvert pour admirer ce connard d'Ulric. » Je marmonne d'un ton sec avant de me détourner du lit. Mjöll, sa curiosité rassasiée, a repris sa forme d'ours pendant que Tcherkassov parlait et s'est réinstallé la tête sur les draps près de l'autre Fylgia, un regard intrigué et légèrement doux glissé vers la troisième. D'une large enjambée je me rapproche de la table, reprend la tasse de café et déplace une large boîte de chocolats ramenée par Ozymandias pour attraper ma paire de lunettes de soleil et les ficher sur mes yeux. La teinte sombre des verres soulage immédiatement l'irritation de mes iris, atténuant temporairement le mal de crâne qui continue de faire grésiller mes os. Tasse en main, à nouveau installé sur ma chaise, je fais rouler machinalement la plume entre mes doigts relisant sans les voir les phrases destinées au Falkenberg. « Je comprends mieux, ceci-dit, la terreur qui dégoulinait de lui toute à l'heure. Ulric et moi c'était l'amour fou à Durmstrang, son frère a dû garder quelques souvenirs émus de nos embrassades passionnées. » Je ricane ouvertement mauvais, incapable de m'empêcher de faire des blagues acides - que seules Markus aurait été capable d'apprécier à sa juste valeur - au sujet d'Andersen premier du nom. « C'est pas contre vous les lunettes, mais il m'a foutu une gonorrea de migraine avec ses conneries. Et ça vous évitera ma sale gueule ordinaire. » La plume s'arrête de rouler et je porte le café à mes lèvres en avalant une première gorgée trop chaude mais nécessaire. L'arôme, définitivement meilleur que celui servit communément, pétille sur ma langue avec une explosion de joie. Mes paupières se ferment un court instant pour mieux apprécier le breuvage avant de reprendre la parole. « Vous faites ce que vous voulez de vos heures libres et de vos heures de garde. Je suis pas votre chef, encore moins votre conscience ni responsable de vos choix. Mais faut pas que votre fatigue devienne un frein à votre professionnalisme. Prenez la charge du dossier tant que vous en êtes en capacité de le faire. Et présent. Pour la suite, pendant votre temps de pause,  vous avez l'air d'avoir des avis assez tranchés sur vos collègues et l'honnêteté de pointer leurs défauts. J'ai cru comprendre que Rønning cherchait à vous faire chier et que ça peut représenter un désavantage pour l'enfant de cette chambre. Klaus ? » Le regard interrogateur est clair, je veux son avis sur son collègue. Je veux les meilleures chances d'un suivis portant pour Aren. Je serai même apte à accepter Rønning le cas échéant. Tout en gardant un oeil fixé sur lui, je bois une deuxième gorgée de café avec le même aplomb avant de hocher la tête, convaincu : « Je comprends pas pourquoi ils refusent de changer leur café dégueulasse servi aux patients. Un bon café c'est quand même pas compliqué à faire. » . Reportant mes yeux sur ma plume, je note les derniers mots manquants sur la lettre de Markus, la replie, et l'ajoute à la pile des autres, prête à être envoyée. « Le votre est appréciable. Tout comme votre transmission de dossier. Ça explique certaines choses, ça n'excuse pas tout. J'ai pas besoin qu'on me rassure, faut pas écouter l'autre tête de marteau à côté. » Le ton est ferme et tranchant et la tête de marteau ainsi nommée renâcle avant de rouler des yeux.



Although I felt like giving up It's not the road I chose
Dax Tcherkassov
Dax Tcherkassov
TRØBBEL För att nå toppen av trädet måste du sikta mot himlen
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Mes yeux ont filé sur la fylgia qui a changé de forme, prenant celle d'un lézard bleu. Étonnant. Je n'aurais pas parié sur une telle apparence. Ce que j'en sais du fonctionnement des fylgia est néanmoins limité, malgré ma courte balade dans une brèche. Je suis encore perplexe sur la forme principale de la mienne, qui est parfois beaucoup trop tendre. « Faut pas avoir un esprit très ouvert pour admirer ce connard d'Ulric. » J’hausse les épaules, tout en ouvrant la porte d’une large armoire. J’en extirpe une chaise pliante, que je déplie, afin de l’installer à proximité d’Aren. D’un sort, je range les couvertures du lit de fortune que l’hôpital fourni aux parents qui doivent rester avec leur enfant. Elles se déposent d’elles-mêmes dans une tablette, tandis qu’un autre sortilège rapetisse le dit lit, qui rejoint les couvertures. La chambre n’est peut-être pas minuscule, mais y être plusieurs, avec deux lits, ce n’est pas commode. Styx, attentive au manège du lézard qui a repris sa forme d'ours, l'observe s'installer proche de l'autre fylgia, dont je ne me suis pas préoccupé tout à l'heure. Le meilleur moyen d'aider lors de souffrances partagées, c'est de régler le problème principal. Mes iris ne se posent sur l'auror que lorsque je replace ma baguette dans la poche de ma blouse. Son dos m'empêche pas de voir ses mouvements ; je ne m'y intéresserais pas, de toute façon. Parce que mes iris sont trop occupés à détailler ce que je n'ai pas noté, tout à l'heure : le tatouage de la Mano Mara.

Mes joues se creusent, alors que ma machoîre se contracte. Je déteste être pris au dépourvu. Je soutiens ne jamais faire confiance à personne en théorie, mais en pratique, j’en accorde trop souvent des fragments, presque malgré moi. Je ne me suis quasi pas méfié de ce type, outre lors de mon hypothèse initiale. J’ai peut-être apprécié légèrement son caractère volcanique et ses répliques. Tout ce qui peut effrayer mes collègues chez un parent me stimule : je gère sans émoi les colères des accompagnateurs. Et j’ai cru que celui-ci voulait véritablement protéger son enfant, qu’il ne poursuivait que le but d’assurer sa sécurité. Me serais-je trompé ? Ai-je été naïf et incroyablement dupe ? L’homme se réinstalle sur la chaise, m’empêchant de détailler davantage ce qui, vraisemblablement, cicatrise vachement mal. Je lève les yeux vers ses lunettes de soleil, fronçant un seul sourcil, alors que je desserre mes dents. Des lunettes, en pleine nuit ? « Je comprends mieux, ceci-dit, la terreur qui dégoulinait de lui toute à l'heure. Ulric et moi c'était l'amour fou à Durmstrang, son frère a dû garder quelques souvenirs émus de nos embrassades passionnées. » Il ricane, sans que je ne fasse la même chose. Je ne capte pas en quoi voir son frère embrasser passionnément quelqu'un d'autre pourrait provoquer une telle réaction de frayeur - outre la peur d'être le prochain - et je suis trop concentré sur ce que j'ai découvert pour m'en soucier. Où ai-je vu ce symbole pour la première fois ? Je ne m’en souviens pas, mais ce n’est pas récent. J’ai trop vu, trop entendu, au point de confondre maintenant les lieux et les dates des événements. Je songe à ce qui se disait dans le milieu, sur cette fameuse marque issue d’ailleurs. Des rumeurs sur la magie du sang, que personne n'avait pu confirmer. Je me suis toujours tenu loin d’eux lorsqu’ils fournissaient à l’international. Je ne voulais appartenir à aucune organisation, aucune bande, aucun patron. Et c’est encore vrai : personne ne m’imposera plus jamais un contrat dont je ne veux pas.

À une époque, la rumeur a couru que la Mano Mara avait été démantelée et le chef, emprisonné. L’homme y a peut-être appartenu quand il était plus jeune…? Mais pourquoi le tatouage est-il dans cet état, alors ? Je me rapproche du lit, jetant un coup d’œil désintéressé à la plume qui roule entre les doigts de l’auror. Il a écrit à un proche ou à des personnes de l’organisation… ? Les questions se pressent sous mon crâne encore trop endormi pour analyser convenablement. « C'est pas contre vous les lunettes, mais il m'a foutu une gonorrea de migraine avec ses conneries. Et ça vous évitera ma sale gueule ordinaire. » J’hoche la tête, alors que je fais le lien entre les fameuses dispositions génétiques et les migraines. La peur d’Andersen était si manifeste que même moi je l’ai captée. J’ignore comment ça se passe, pour les legilimens. Perçoivent-ils d’emblée les réflexions de leur interlocuteur ? A-t-il pénétré les miennes ? La seconde option me paraît peu probable. Rien dans ses réponses n’indique qu’il ait pu avoir connaissance de mes réflexions. Je soulève la couverture qui repose sur l’abdomen d’Aren, tant pour m’assurer que l’infection n’a pas refait une poussée rapide que pour me donner le temps de songer. Mes doigts soulèvent délicatement son haut, tandis que mes iris cherche la moindre anormalité, qui n’était pas là avant. « Vous faites ce que vous voulez de vos heures libres et de vos heures de garde. Je suis pas votre chef, encore moins votre conscience ni responsable de vos choix. Mais faut pas que votre fatigue devienne un frein à votre professionnalisme. Prenez la charge du dossier tant que vous en êtes en capacité de le faire. Et présent. Pour la suite, pendant votre temps de pause,  vous avez l'air d'avoir des avis assez tranchés sur vos collègues et l'honnêteté de pointer leurs défauts. J'ai cru comprendre que Rønning cherchait à vous faire chier et que ça peut représenter un désavantage pour l'enfant de cette chambre. Klaus ? » Un léger rictus de mépris s’est étiré à la mention de mon professionnalisme et de mon sommeil. Qu’il me dise quoi faire de façon détournée à ce niveau, tout en émettant l’idée que je pourrais être assez incompétent pour bosser sans être en état de le faire, pique mon orgueil. Je fais abstraction de cette piqûre d’amour-propre, parce que l’affirmation est sensée, et que je la sais justifiée. Après les deux incompétents avec lequel il s’est retrouvé, et ma propre réputation, il a raison d’émettre une telle affirmation. S’il est sincère. Est-ce qu’il veut savoir les défauts potentiels de Klaus par peur de tomber sur quelqu’un avec un meilleur sens déontologique que moi, qui ne serait pas aveugle à ce que j’ai peut-être raté, parce qu’une part de moi appréciait de voir un père se soucier autant de son gosse ?Je croise son regard interrogateur, alors que je replace le haut de l’enfant sur son abdomen. Je réinstalle la couverture, délicatement, tandis qu’il reprend la parole: « Je comprends pas pourquoi ils refusent de changer leur café dégueulasse servi aux patients. Un bon café c'est quand même pas compliqué à faire. » J’en ai pas grand-chose à faire de cette histoire de café, dans l’immédiat. Limite, je regrette d’en avoir amené un. Il y a cette possibilité trop grosse que j’aie merdé, que je n’aie pas été assez méfiant. Apaisé, comme un idiot, par une image familiale tendre. C’est débile. Parce que tout ça, c’est peut-être du pipeau. J’ai peut-être camouflé des informations qui devraient être exposées ; je suis peut-être en train de pousser un enfant vers une série d’années merdiques au sein d’un groupe criminel, parce que je n’aurai pas fait mon job correctement. Les gens comme moi savons trop bien que rien n’est jamais complètement éteint, et que ce qui est dissous peut très bien se reconstruire. Il suffit des bonnes personnes…Et de recrues. « Le votre est appréciable. Tout comme votre transmission de dossier. Ça explique certaines choses, ça n'excuse pas tout. J'ai pas besoin qu'on me rassure, faut pas écouter l'autre tête de marteau à côté. » Je ne réponds rien. Mon visage s’est fermé, mes traits se sont lissés. Je suis un masque neutre, sans émotions. Cette transmission de dossier aussi est peut-être une erreur.  Je jette un œil à la pile de parchemins en attente d’être envoyés, avant de fixer mes yeux sur mon interlocuteur :  «J’essayais pas de vous rassurer, je vous donnais simplement des faits. » Ce qui, peut-être, correspond à tenter de rassurer quelqu’un. J’assume ma mauvaise foi, sur ce coup. Je le regrette, de toute façon. Et mon attitude doit indiquer que quelque chose a changé ; il y a plusieurs teintes possibles, dans la neutralité. Mon regard est plus insistant, ma voix est plus distante : « Klaus est une chiffe molle. Il est trop tendre et trop influençable. Mais niveau médical... Il est doué. Plus aimable que moi. Et il a très peu de plaintes à son actif. » Des plaintes débiles, pour la plupart. Je le sais, je les ai analysées, même si on ne doit légalement pas être informés de ce qui est déposé contre nous. Je juge nécessaire d’avoir à ma portée les informations pertinentes sur mes collègues.

Et sur mes patients. Je jette un dernier regard à Aren, toujours endormi, avant de me diriger vers ma tasse. Je l’amène avec moi, m’assoyant sur la chaise que j’ai placée un peu plus tôt. Mes gestes sont lents, ne trahissent aucune de mes pensées. Je réfléchis, sans parvenir à obtenir une conclusion satisfaisante. Mes iris cherchent ceux de l’auror, sans les trouver. Ils se heurtent à la vitre des lunettes, me tirant un rictus froid : « Votre tatouage a aussi une sale gueule. Vous allez aussi lui mettre des lunettes ? » Je ne vois pas l’intérêt de prendre des gants blancs dans cette situation, pas quand nous avons été directs l’un envers l’autre depuis le début. Il n’y a pas vingt-six options, de toute façon. Son appartenance passé ou présente à un monde pas tant éloigné du mien, je m’en tape. Tout ce qui importe, c’est l’enfant. Je le pointe d’un mouvement de tête, reprenant : « J’espère qu’il grandit pas dans ce milieu ; vous avez l’air intelligent, mais je m’explique pas pourquoi vous avez cette foutue marque dans le dos. » D’autant plus qu’il est auror. Je n’exclus pas qu’il ait pu être infiltré dans l’organisation ; mais l’inverse est tout aussi possible. Ce ne serait pas la première fois qu’un criminel parvient à rejoindre les forces de l’ordre. Mes lèvres glissent contre ma tasse et une gorgée vient réchauffer ma gorge, sans avoir le moindre impact sur le reste de mon corps. La méfiance éveille l’adrénaline, qui s’infiltre doucement dans mes veines trop habituées à la côtoyer.  Je jette un bref coup d’œil vers la porte, toujours close. L’infirmière ne devrait pas passer avant quelques minutes, avec la fiole que j’ai demandée. Je ne mâche donc pas mes mots, alors que je poursuis : « J’ai été honnête, quand j’ai dit que je ménageais pas mes forces pour la santé et la sécurité de mes patients. J’me fous de votre vie privée, de si vous avez une double-vie. Chacun ses loisirs. Mais j’veux être certain que j’suis pas en train de couvrir j’utilisation d’un enfant dans la Mano Mara, simplement parce que vous avez l’air d’un bon père. J’pensais qu’elle était éteinte, d’ailleurs. » Le ton trahi une émotion qui ne devrait pas s’y trouver. Froideur, mais aussi sensibilité. Une foutue sensibilité. Je ne pourrai jamais tolérer, en étant conscient d’une telle situation, qu’un enfant soit entraîné trop tôt dans un univers qu’il ne devrait pas côtoyer. J’ai été initié jeune. Tellement jeune. Mon père m’avait un jour fait venir dans son bureau, sous prétexte d’enfin m’initier aux affaires familiales. Le gosse que j’étais, plein d’enthousiasme et de crédulité, avait bien remarqué qu’il me regardait depuis quelques semaines d’un air joyeux. J’avais cru que c’était à cause de la grossesse de ma mère et de mon statut de benjamin. C’était plutôt parce que mon père avait un nouveau contrat, qui nécessitait de petites mains habiles et une gueule d’ange ; il était ravi de m’initier au métier. J’ai donc volé pour la première fois dans une réception, où les Tcherkassov étaient invités. Plus tard, j’ai appris à frapper. Et à faire mal. Je m’étais d’abord révolté contre qui m’apparaissait amoral. Mais que sait-on vraiment de la moralité, à cet âge ? Mes scrupules de gamin se sont noyés dans un long et fructueux travail de désensibilisation. Un travail de sape contre lequel je ne pouvais rien faire. Une intoxication lente de ma conscience en éveil, dont les bourgeons n’ont jamais éclos. Mes yeux glissent sur le gamin étendu dans son lit, se plissant sous une inquiétude qui se reflète exceptionnellement dans mes yeux bleus ; ai-je exterminé le mal qui le rongeait, pour le lancer dans quelque chose de pire ?
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