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Chapitre 7 : Il vaut parfois mieux ne pas dépoussiérer la cale (Magni)
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Markus Falkenberg
Markus Falkenberg
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« Vas-y avant moi, j’dois aller pisser. » La phrase est banale, l’acte trivial, la protestation inutile. Un sourire fleurit sur le visage de Markus alors qu’il toise son meilleur ami, jusqu’à ce qu’il transplane ; comme un rideau qui tombe, le sourire s’envole au même moment.

Ses trait, rayonnant d’un bonheur mutin, perdent leurs rides joyeuses. Ses yeux, d’un vert plutôt foncé, pâlissent d’un coup, comme si leur couleur avait été retenue jusque-là. Des mèches grises viennent parsemer sa chevelure brune, alors que les commissures de ses lèvres s’abaissent. Un soupir, plus pesant que les boîtes qu’il tient dans ses bras, jaillit de sa gorge. Il repose le seul fardeau dont il peut se débarrasser, l’âme lourde de celui qu’il n’a pas demandé à porter.

Aujourd’hui, il déménage. Il s’attendait à être excité, nerveux peut-être, mais pas…Dans cet état. Il est peu attachée aux choses matérielles ; il a aimé cet appartement comme on aime de vieilles chaussures, avec affection et habitude, sans plus. Il n’avait pas prévu cette nostalgie, celle qui vient avec les souvenirs, à mesure que les pièces sont dépouillées de leur contenu. Foutue nostalgie. Foutus souvenirs. Foutu déménagement. Les problèmes ont commencé dès les premières boîtes, alors qu’il sélectionnait les objets qu’il voulait emporter et ceux qu’il allait remettre à des sorciers plus nécessiteux. Il la voyait partout. Dans ce salon, où elle a passé d’innombrables soirées à discuter avec lui. Dans cette chambre, où il lui a tressé les cheveux avant l’un de ses importants entretiens, dans cette salle où ils oubliaient le temps ensemble…Il dessinait ; elle peignait. Entre deux teintes, ils parlaient et reconstruisaient un monde plus coloré, plus doux, plus juste. Cette salle est celle qu’il a eu le plus de difficulté à vider. Il a rapetissé la plupart de ses boîtes et des meubles qu’il voulait emporter, mais n’a pas voulu lancer de sort à ses dessins et à ses toiles. Celles qui étaient terminées et qu’elle lui avait laissées, mais aussi celles qui étaient en cours. Les inachevées, pour l’éternité. Il a tout délicatement déposé dans des cartons, les derniers présents actuellement dans l’appartement, dans le but de les amener en dernier, manuellement, à la façon des moldus.

Il a fait la même chose avec son matériel. Il a rangé chaque tube de peinture, chaque pinceau, chaque bouteille de solvant. Il a remisé le soleil entre deux toiles vierges et planqué la lune entre deux croquis d’arc-en-ciel.

Il a cru qu’il parviendrait à être fort, aujourd’hui. Il a étouffé les souvenirs et les images pendant toute la semaine, en tâchant de se concentrer sur son bonheur d’enfin aménager avec son meilleur ami. De réaliser un vieux rêve, l’un de ceux qui lui tenaient le plus à cœur, jadis. Mais se convaincre du bonheur ne le crée pas ; chacun de ses sourires des dernières minutes lui ont coûté plus d’effort que des heures d’enseignement.

Drøm, sous sa forme d’ours, le regarde en silence. Il a suivi le fil de ses sentiments à travers cette journée joyeuse, sans trahir ce qu’il ressentait. Lui-même a chahuté, s’est amusé en roulant contre les murs, pour ne pas manifester son inquiétude. Dans ce court moment de solitude, les deux se regardent : le soutien qu’il perçoit dans le regard de sa fylgia n’apaise pas Markus. D’un pas trop décidé, il se dirige vers l’atelier attenante à sa chambre. À l’exception des boîtes, tout est vide. Il glisse ses doigts contre ses tempes et son front, avec une boule au fond de la gorge, qui ne veut pas partir. Qu’est-il venu faire, ici ? Pourquoi a-t-il voulu être seul, une dernière fois, dans cette pièce ? Pour la rattraper au vol, avant qu’elle ne disparaisse totalement ? Pour l’imaginer une ultime fois dans un lieu où ils ont tant été heureux, avant que le dit lieu ne lui appartienne plus ?  Elsa n’est déjà plus dans cette pièce. Les murs ne portent plus son empreinte et son fantôme paraît déjà comme un intrus, qui n’a rien à voir avec cette cargaison de cartons. Il ne peut plus voir son ombre lorsqu’elle peignait, concentrée, tachées de couleurs foncées – Elsa était incapable de peindre sans se tacher. Il ne peut plus l’imaginer se pencher vers l’avant vers lui, le coude sur son genou, la main contre son menton, dans une position bancale sur un vieux tabouret peu solide. Il ne l’a pas déménagé : il s’est brisé quelques mois avant le décès d’Elsa. Il se souvient encore de leurs éclats de rire, ce jour-là. Sa meilleure amie avait renversé sa palette en tombant, sur lequel il avait glissé, en voulant l’aider à se relever. Elle s’était moqué des nouvelles teintes de sa peau, et il l’avait attaquée à coups de pinceau.

Les yeux de l’auror glissent sur le parquet, encore piqueté de quelques cercles violet. Ils ont fait exprès de ne pas tout nettoyer, pour se rappeler de cette journée. Ils aimaient construire des souvenirs, mais aussi les conserver. À quoi bon, en final…? Il sent trop bien qu’en quittant définitivement cet appartement, plus tard aujourd’hui, il laissera encore une partie d’elle derrière lui. Une partie d’eux.

Il regagne l’endroit où il a laissé deux boîtes, qu’il reprend dans ses bras. Il ignore combien de minutes se sont écoulées, mais elles doivent se situer à la lisière de la normalité, pour l’action qu’il a invoquée pour se retrouver seul. Il soupire, encore, avant de se concentrer : ses cheveux perdent leurs mèches grises, ses yeux se font plus sombres. Il cille à plusieurs reprise, en les sentant de nouveau pâlir, se concentrant pour qu’ils conservent la teinte qu’il veut leur donner. Lorsqu’il est assuré que tout est en place, et bien en place, il transplane avec Drøm.

Quand il pénètre dans la cuisine de Magni, une minute plus tard, un large sourire s’épanouit sur ses lèvres. Des arbustes d’un vert trop tendre se détachent légèrement au fond de la forêt de son regard. Il a laissé ses boîtes non loin des escaliers, avec ses émotions. Un Falkenberg contrôle ce qu’il ressent, Markus. En permanence. Il avise un journal posé sur le comptoir, sans tout de suite l’observer, jetant plutôt un coup d’œil moqueur à son meilleur ami : « J’crois bien que c’est l’heure des bières. » Voix joyeuse, traits détendus. Sous le masque de plâtre, le cœur bat à un rythme effréné. Il aime si fort l’homme devant lui. Mais aujourd’hui, la personne qu’il voudrait serrer dans ses bras, c’est sa meilleure amie.
Magni Hammarskjöld
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Il vaut mieux parfois ne pas dépoussiérer la cale

@Markus Falkenberg  | le 15 septembre 2023



J'aurais peut-être ne pas dû le prendre au mot et attendre sagement qu'il finisse son tour aux toilettes avant de transplaner. Parce que je ne suis pas entièrement con, ou du moins pas tout à fait dupe. Derrière le ciel lumineux de ses yeux, je devine l'humidité de ce qu'il cache. Déménager ce n'est jamais une partie de plaisir, même quand tout autour semble l'être. Déménager laisse toujours un drôle de goût amer au fond de la langue, râpeux, déchirant. C'est toujours un bout de nous qui reste malgré tous les meubles et effets personnels qu'on emporte. Malgré tous les efforts fait pour tout emmener, jusqu'à la moindre miette, la moindre bouteille vide qui nous rappelle une fameuse anecdote. On ne peut pas emmener les fantômes qui s'y traînent et s'y tapissent. Ceux qui hantent les recoins et n'existe qu'attachés aux murs que l'on quitte. Et ces fantômes-là, chez Markus, sont trop plein de celui d'Elsa. C'était leur appartement en quelque sorte. Celui qu'ils avaient fait vivre quand je tentais de faire vivre mes propres logements de l'autre côté du monde. Je devine que la séparation ne peut que déchirer un peu plus les minces fils de soie que le Falkenberg tente de recoudre autour de son existence depuis sa mort. Un dernier au-revoir dans lequel je ne compte pas. Qui leur appartient, et qui me donne l'abjecte excuse de fuir m'accorder quelques minutes de solitude dans ma propre maison.
Pleine de ses propres fantômes qui m'attendent, glacés, dans les pires recoins de mon âme.

Je devrais être entièrement heureux, et je le suis profondément, pourtant cette joie ne parvient à obstruer le reste. Ces foutues miettes qui grattent, pleine de nostalgie et de douleurs, ravivant des sensations que je préfèrerais oublier. Debout au milieu des cartons je songe à mon arrivée ici. Aux conséquences, au vide intérieur. Je revis en boucle depuis une semaine l'emménagement avec Ocean dans notre maison dans les hauteurs de Bogota. La joie à jamais teintée de l'ombre du départ déchirant qu'on avait dû faire Aren et moi, sans elle, quelques années plus tard. Comme si toutes ces expériences précédentes de vie à plusieurs soldées par des échecs et des séparations douloureuses devaient nimbées celles à venir d'une fatalité similaire. L'impression d'être dans une boucle de répétition m'étouffe, me serre les entrailles et me terrifie. J'ai toujours refusé la fatalité, ces notions de destins écrits par les Dieux, malgré tout lutter contre la peur de tout faire foirer, encore une fois, est difficile. Aussi lumineux a été cet été, il n'a pas encore totalement effacé les conséquences des mois précédents. Je serre les dents tandis que Mjöll me pousse délicatement de sa large tête blanche. Il n'aime pas sentir tout le bordel d'émotions contraires qui viennent ternir cette journée supposée n'être que radieuse. Je secoue la tête avant de remettre en mouvement vers la cuisine et de m'arrêter à hauteur du meuble qui sépare la cheminée du bar dans un regard inquisiteur. Anciennement petite étagère qui servait à stocker de la poussière et quelques bibelots sans trop de valeur j'avais décidé d'en faire une première bibliothèque pour quelques uns des livres de Markus. Ceux dont il voudrait pouvoir envie d'avoir sous la main au coin du feu sur le canapé. D'un geste sec la baguette magique chuinte dans l'étui, puis fend l'air pour doubler le nombre d'étagères, ajoutant deux étages de cases aux tailles diverses. Un léger sourire traverse le brouillard de mes pensées, satisfait de l'effet rendu, puis reprend mon chemin vers la cuisine le cœur légèrement plus léger.

J'avais passé ces derniers jours à apporter quelques aménagements du genre. Laissant une large place dans la bibliothèque de l'étage, allant même jusqu'à agrandir l'ancienne petite pièce attenante pour y installer ma - notre - salle d'entraînement et libérer l'espace du bureau pour donner à celui-ci sa vraie utilité. Un troisième fauteuil avait été ajouté aux deux autres, et le secrétaire secret avait été dévoilé au grand jour au cas où Markus aurait souhaité y déposer ses propres documents confidentiels. Ce qui ne l'empêcherait pas de faire sa propre cache quelque part ailleurs s'il le voulait. Des secrets, cette maison en est la humble gardienne depuis plusieurs années après tout.
Arrivé dans la cuisine, mes yeux tombent sur le courrier arrivé plus tôt dans la matinée. Une lettre d'Aren attire mon attention, la première enveloppe ouverte contient une deuxième enveloppe cachetée au nom de Markus. Un sourire amusé s'étire, chassant entièrement les ombres qui restaient en lambeaux sur mes traits, relevant un regard plus doux vers le tas de cartons qui redessinent l'espace autour de moi. Le frisson d'adrénaline qui électrise mon épiderme réveille les émotions intenses qui font palpiter mon cœur avec une nouvelle force sous cet incroyable vérité : Markus Falkenberg vient habiter avec moi. Une main nerveuse passe dans les boucles sombres. C'est l'adolescent qui s'impatiente d'accueillir son meilleur ami chez lui pour quelques semaines quand bien même ce dernier à l'habitude de venir tous les quatre matins. C'est le jeune adulte qui s'impatiente de commencer cette colocation avec son ami d'enfance, celle dont ils rêvent depuis la séparation dans deux clans de Durmstrang différents. C'est l'homme revenu de Colombie qui se déchire de l'intérieur d'avoir dû refuser la demande du Falkenberg et qui peut enfin prendre sa revanche sur ses propres décisions. C'est l'amant découvert qui se sent grandi à l'approche d'une vie partagée, celle dans laquelle il s'épanouit le mieux. J'entends le craquement au même moment où mon âme essaie de se laisser entièrement et complètement submerger par ces sentiments de bonheur, pour ne plus s'arrêter sur les coins sombres. « J’crois bien que c’est l’heure des bières. » Un sourire, un visage calme et des yeux clairs me font face, et en réponse mon visage affiche une tendresse plus sensible. Après un hochement de tête, je lui tourne le dos pour aller vers le frigo pour en tirer deux bouteilles tout en lançant par-dessous mon épaule : « Tiens, regarde sur le comptoir, il y a une lettre d'Aren pour toi. » L'enfant en question était déçu de ne pas pouvoir être là pour l'emménagement de mon meilleur pote chez nous. A moins que ce ne soit une lettre de menace. Qui sait, Aren avait l'air assez énervé d'être mis de côté pour cette occasion, mais la directrice n'aurait jamais accepté de lui accorder son weekend si proche de la rentrée scolaire, pour un motif aussi trivial qu'un emménagement.
Revenu vers le bar, je décapsule les deux bières et en tend une vers Markus, sourire en coin et regard intense qui cherche le sien. « A toi mon cher colocataire, et à nos rêves de gamin qui se concrétisent. » D'un geste doux, ma bouteille claque contre la sienne puis trouve mes lèvres pour une première gorgée. « Et à Elsa, aussi, qui aurait trouvé toutes les meilleures idées pour arranger la maison correctement. Avec goût et efficacité. On va devoir se contenter de nos idées improbables et perdre beaucoup trop souvent nos affaires. » Le ton est légèrement narquois pour cacher le reste, ce manque d'elle dont je ne parle jamais tant le sien est plus important encore. Pour cacher aussi la nervosité qui tiraille en arrière plan, et pour tenter de lui faire comprendre que je comprends que cette bière ne soit pas juste un besoin de pause après une journée à porter des cartons. Posant la bière sur le comptoir, je fais le tour de celui-ci pour venir me coller de son côté, à quelques centimètres de lui pour satisfaire ce besoin habituel de me plonger dans son aura, près de lui, chez moi. « J'ai encore du mal à réaliser, mais par Thor, on habite ensemble Markus. » On pourrait se dire que c'est légèrement tardivement au vu de notre vie déjà écoulée, mais je ne veux considérer que ce qu'il nous reste devant pour l'instant. Et mes yeux sont ceux de l'adolescent plus que de l'adulte, ce qui suffit à effacer les années de trop qui séparent nos promesses de jeunesse de leur concrétisation.



lettre d'Aren:



Although I felt like giving up It's not the road I chose
Markus Falkenberg
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Son meilleur ami lui tourne le dos pour aller chercher des bières dans le frigo et il jette un coup d’œil à Drøm, qui s’est déjà éloigné de lui de quelques mètres, pour aller glisser sa truffe contre la fourrure de Mjöll. Un geste calculé.  Il sent que sa fylgia aurait préféré rester à proximité, collée à lui. Elle sait qu’il ne le veut pas. Il la regarde chercher auprès de l’autre ours la tendresse qu’il lui refuse en cet instant, pour ne pas que son comportement trop affectueux trahisse son état d’esprit. « Tiens, regarde sur le comptoir, il y a une lettre d'Aren pour toi. » Un véritable sourire s’étire sur les lèvres de l’auror. Ses yeux cherchent la fameuse lettre, qui l’enthousiasme, même s’il n’a aucune idée du contenu. Au cours de ce trop bref été, il a tenté d’apprendre à mieux connaître le fils de Magni. Lentement, sans brusquerie, en respectant son rythme, et avec la conscience trop nette de ses erreurs passées. Il aime bien l’adolescent. Il espère simplement ne plus le décevoir et parvenir à nouer un véritable lien avec lui, ce lien qu’il aurait aimé avoir l’occasion de créer dès sa naissance.

Il s’approche du courrier, pour s’emparer de la fameuse lettre cachetée à son nom. Magni revient au même moment et lui tend l'une des deux bières, après les avoir décapsulées. Son regard cherche le sien et il s’y fixe, luttant contre la tentation de le détourner. Il redoute des changements de couleurs inopportuns ou des émotions qui lui échapperaient, devenant trop visibles. Un Falkenberg doit pouvoir camoufler ce qu’il ressent, s’il le veut. Mais l’homme chez qui il vient habiter a toujours été le meilleur, pour lire derrière ses faux sourires. Il se concentre, ses yeux demeurant d’un vert intense. « A toi mon cher colocataire, et à nos rêves de gamin qui se concrétisent. » Il devrait se concentrer sur ces rêves, pas sur le reste. Son sourire s’étire plus largement, sincère, alors que sa bouteille claque contre celle de Magni. Sa seconde main tient toujours la lettre.  Ils ont tellement parlé de ce moment, quand ils étaient gosses. Il se souvient de leurs courriers enthousiastes, de leurs rires et de leurs plans. Après l’été où ses parents avaient tenté de limiter leurs contacts, il s’était amusé à dessiner leur future maison. Il avait fait des tonnes de croquis, souvent absurdes, parfois plus sérieux, qu’il avait envoyés à Magni pendant les longues nuits de solitude à Durmstrang. Il en avait même affichés sur les murs de sa chambre, pour emmerder son père. À l’époque, il lui avait dit que dès qu’il aurait la majorité, il quitterait la résidence des Falkenberg pour partir vivre avec son meilleur ami. Ça n’avait pas plu au patriarche. C’est au cours du même été, que lui et sa mère avaient tenté – avec trop de succès – de limiter ses contacts avec l’Hammarskjöld.

Il porte sa bouteille à ses lèvres pour avaler une gorgée, qui passe de travers lorsque Magni reprend la parole. « Et à Elsa, aussi, qui aurait trouvé toutes les meilleures idées pour arranger la maison correctement. Avec goût et efficacité. On va devoir se contenter de nos idées improbables et perdre beaucoup trop souvent nos affaires. » Il ne s’attendait pas à ce qu’il parle d’elle et ses réactions lui échappent. Ses iris pâlissent comme si le vert précédent n’était qu’une peinture trop foncée et ses cheveux, le temps d’une courte seconde, n’en font qu’à leur tête. La base des mèches brunes se teintent de nouveau de gris, alors qu’il éloigne la bouteille de sa bouche. Il fronce les sourcils et en un clignement, ses iris et sa chevelure reprennent leur couleur précédente, vert forêt et brun des jours heureux.  Alors Magni pense aussi à elle, aujourd’hui ? Égoïstement, il aurait envie de lui dire de ne pas aborder le sujet. De laisser Elsa là où elle est, dans son cœur et son âme, sans l’extirper en pleine lumière du jour. Il ne veut pas parler d’elle, il ne veut pas qu’on parle d’elle. Il a conscience de l’égocentrisme de cette pensée. Il ne songe quasi jamais à ce que Magni ressent, par rapport à leur amie rousse, alors qu’il était aussi proche d’elle. Comme si la souffrance n’était que dans un seul sens, et qu’il ne parvenait pas à l’accorder à d’autres. Un foutu nombriliste, vraiment. Et pourtant, il sait qu’il ne pourrait pas faire mieux. Il ne s’est jamais senti apte à faire verbaliser sur le sujet ; il ne se sent pas davantage en mesure de le faire aujourd’hui. Le souvenir d’Elsa est dans une boîte en fer, qu’il déverrouille rarement devant les autres. Trop de possibilités que ses émotions lui échappent.

Son ami pose sa bière sur le comptoir, se rapprochant de lui. La même proximité de leur amitié de jadis, améliorée. En cet instant, il aurait envie de se serrer contre son torse et d'enfouir sa tête contre son cou. Il se retient, prenant une seconde gorgée de bière. « J'ai encore du mal à réaliser, mais par Thor, on habite ensemble Markus. » Il a aussi du mal à le réaliser. Et il s’en veut de ne pas pouvoir se projeter avec intensité dans ce présent qu’il a tellement espéré, jadis. Il voudrait y plonger totalement, sans inquiétude, sans fantôme, sans nuages. Profiter du moment, sans soucis. Son sourire est tendre et sincère. « Enfin. » Il dépose sa bière sur le comptoir à son tour, tendant la main pour effleurer la taille de son meilleur ami. Un geste tendre, un désir de le sentir tout près. À eux deux, ils peuvent chasser tous les orages. Ou les faire naître. « J’suis sûr que ce qu’est ce qu’elle aurait dit. Qu’on a attendu trop longtemps, et qu’il était temps qu’on habite enfin ensemble. » Sa voix ne laisse pas percer la tristesse. Il s’efforce d’en parler, de laisser un espace à Magni pour qu’il en parle aussi, s’il en a besoin. Même si c’est douloureux, même si chaque mot lui râpe la gorge. Un léger ricanement jaillit de sa gorge, alors qu’il rajoute : « Ou elle nous aurait simplement conseillé de faire gaffe à ne pas faire flamber la maison. » Une option très plausible. Il la connaît si bien qu’il est capable, sans effort, d’imaginer le ton qu’elle aurait pris, pour se moquer de lui. Et d’eux. Il est persuadé depuis plusieurs mois qu’elle avait deviné avant eux que leurs sentiments dépassaient ceux de l’amitié. Elle avait déjà tenté de lui faire plusieurs allusions sur le sujet, qu’il avait écartées comme des plaisanteries.

Sa main glisse sur celle de son meilleur ami, qu’il serre avec trop de force, avant de s’en détacher. Ses doigts rejoignent ceux qui la tiennent la lettre, qu’il entreprend d’ouvrir. Il la pointe du menton, alors qu’il entreprend sa lecture : « Elle l’aurait apprécié. » Il n’en doute pas. Elle n’aurait pas fait la gueule, comme lui, lorsqu’il l’a appris. Elle n’aurait pas remis en question la confiance de Magni, elle aurait compris, tout simplement. Et elle aurait certainement voulu connaître Aren, pour lui apprendre des tas de bêtises. Ses yeux glissent sur les lettres tracées, amusés. Un sourire moqueur se peint sur ses lèvres, lorsqu’il parvient à l’avant-dernière phrase, avant le post-scriptum : Évitez de vous engueuler dès le premier jour quand-même. Vous êtes un peu trop doué pour ça. L’adolescent les connaît trop bien. Mais il voit mal comment ils pourraient parvenir à s’engueuler aujourd’hui. Pas quand quasi tous les secrets sont enfin tombés, et qu’ils peuvent enfin avancer. Il termine la missive, en sentant une douce sensation de chaleur s’instiller dans sa poitrine. Il apprécie qu’Aren ait pris le temps de lui écrire et une joie véritable éclaire ses traits, lorsqu’il reporte son attention sur Magni :   « Y’a quoi dans le placard sous l’escalier ? Oh, et je suis chargé de l’importante mission de te rappeler ta promesse sur une pièce entière en mousse. » Véritable promesse ou mythe ? Dans tous les cas, il prendra partie pour Aren. Avec beaucoup d’objectivité. Il replie la lettre, qu’il dépose sur le comptoir. Ses yeux s’arrêtent en même temps sur le journal qui y est posé, et dont la une concerne les Enfants de Völuspá et la nouvelle loi. Son sourire disparaît et son regard se durçit aussitôt, impulsivement. Les frêles étincelles de joie sont trop faciles à éteindre. « Quels cons. Quand je vois ce qu’ils sont en train d’essayer de faire, j’ai envie de… » De s’opposer définitivement et officiellement aux idéaux de ses parents. D’en cogner quelques-uns, aussi. Il ne portait déjà pas le groupe dans son cœur, avant même qu’ils n’émergent en public ; leur apparition lui paraît incroyablement louche. Ses enquêtes ne sont pas centrées sur eux, mais il est de plus en plus tenté de s’écarter de son devoir professionnel et de se permette une incartade, pour faire des recherches plus approfondies à leur sujet. Le peu qu’il sait suffit déjà à l’écoeurer. Ses yeux se relèvent vers ceux de son meilleur ami, comme pour amorcer une conversation conjointe où les deux partagent le même avis : « Les gens sont aveugles. Ça me dégoûte d’imaginer que certains peuvent vouloir les rejoindre. » Il classe tous les Enfants officiels, ceux qui ne s’en cachent pas, parmi les intolérants et les nuisibles qu’il ne veut pas côtoyer.
Magni Hammarskjöld
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Il vaut mieux parfois ne pas dépoussiérer la cale

@Markus Falkenberg  | le 15 septembre 2023


Je ne réagis pas quand ses yeux palissent. Je ne cille même pas au changement de couleur de ses racines. Pas plus quand il se reprend comme on rattrape la corde qui nous file d'un coup entre les doigts. Ce n'est pas que je ne remarque rien, c'est tout l'inverse. Je comprends chaque variation que son cœur tente de cacher. A quoi bon Markus ? J'aimerais qu'il puisse se sentir en confiance pour oser montrer l'état de son âme fracturée devant moi. Qu'il puisse sentir à quel point je le soutien, je comprends, ne juge pas, accepte et partage sa douleur de cette séparation qu'il vit à nouveau. Laisser derrière soit un appartement où on a connu l'autre. Laisser les murs qui forment sa silhouette dans le coin de l’œil distrait. Je sais la dureté de ces gestes qu'on a pourtant initié. Ces départs qui viennent toujours, quand le temps est venu de regarder la page de droite du livre sans rester bloquer sur celle de gauche. Combien de temps j'avais mis à jeter sa brosse à dent ? Un temps ridiculement long. Je crois bien que je lui avais même écris une lettre à ce sujet, à Ocean. Une de ces foutues lettres sans destinataire, sans réponse. Peut-être qu'un jour je les donnerai à Aren, peut-être pas. En matière de deuil et de charge émotionnelle je n'ai jamais été dans le juste avec lui. Je n'ai jamais su faire, mais est-ce qu'il y a de bonnes manières de faire ? Markus lui fronce les sourcils, la contrariété est-elle tournée que vers ses couleurs qui reprennent leur teinte qu'il impose ou bien est-elle aussi légèrement tournée contre moi d'avoir évoquée Elsa avec tant de simplicité ? Sans préparation préalable ? Mais avais-je vraiment besoin de préparer le terrain quand son souvenir hante ce déménagement avec autant de force ? Cette colocation on en avait tant parlé tous les deux, mais aussi tous les trois. Elle commentait nombreux de nos plans, apportait un regard parfois plus lucide que nos deux têtes trop enthousiastes pour ne pas inventer des réalités tordues et irréalisables. Elle me manque aujourd'hui. Dans tout les méandres dans lequel j'ai plongé mon deuil de cette rousse électrique, la peine remonte, peut-être plus encore de la voir si peu évoquée entre nous. De le voir garder la sienne pour lui. De le voir bloqué derrière ce défaut de confiance qui le retient de se laisser-aller, enfermé par des années d'éducation Falkenberg. Je laisse passer son trouble sans lever le moindre sourcil ni courber le moindre sourire narquois. Pourtant on s'était dit de laisser le respect de côté entre nous, pour éviter ces non-dits. Mais le cœur est trop lourd pour supporter une confrontation aujourd'hui. Lourd et léger à la fois. Les litres d'eau qui le compose pèsent de tout leur poids dans ma poitrine alors que la tête frôle les nuages. Est-ce que c'est ça ce qu'on appelle se sentir grandit ? Avoir le corps six pieds sous terre et la tête perdue dans les nuages ? Mjöll ronfle contre Drøm de cette tendresse mélancolique qu'ils expriment mieux que nous.

« Enfin. » Son sourire répond au mien, de vrais sourires malgré la pesanteur des âmes derrière. J'avale une gorgée de bière en miroir de la sienne comme pour saluer cette certitude qu'il était plus que temps de mettre nos plans à exécution. Ses doigts qui effleurent ma hanche ravive la chaleur qui semblait se faire la mal dans la baignade forcée du cœur qui déborde. « J’suis sûr que ce qu’est ce qu’elle aurait dit. Qu’on a attendu trop longtemps, et qu’il était temps qu’on habite enfin ensemble. » Je hoche la tête, entièrement convaincu par cette idée. Je peux presque l'imaginer, entendre sa voix et son soupir d'exaspération mêlé de rire. C'est douloureux de penser à elle ainsi. De revoir des moments de vie passés où elle se moquait de nous et de nos péripéties. C'est douloureux de savoir que tout cela vient trop tard. Après elle. Mes regrets sont aussi immenses que le vide qu'elle laisse dans ce trio à jamais devenu souvenir. Car je sais que c'est de ma faute si nous avons décaler une évidence qui aurait pu exister de son vivant. A cause de moi. Mes secrets, mes peurs, mes abîmes de défauts qui ont creusé des crevasses entre nous. Mes doigts se serrent imperceptiblement contre le goulot de la bière. « Ou elle nous aurait simplement conseillé de faire gaffe à ne pas faire flamber la maison. » Un léger ricanement s'échappe de mes lèvres avant de se perdre dans une nouvelle gorgée de bière qui me sert autant à faire passer les muscles tendus que l'amertume qui goutte un goût de fer contre ma langue. Ceci-dit c'est un conseil que j'aimerais moi aussi qu'on soit sûr d'avoir en tête. Mon amour des grandes flambées et du chaos ne vont pas jusqu'à la destruction de cette maison qui me tient à cœur. Malgré mon délaissement de sa chaleur pour les paysages sauvages de Scandinavie au cours de l'année.

Lorsque ses doigts trouvent les miens pour les serrer avec trop de force, les miens répliquent avec la même étreinte. Des gestes sans parole, des murmures de soutien indéfectible qu'il entend, j'espère, à travers les sous-textes de cette conversation qui pourrait sembler anodine de l'extérieure, mais qui est en réalité une épreuve de haute-voltige. Mon âme plonge pour remonter, roule dans les trous d'air, pour tenter de trouver une stabilité impossible.

Sa main relâche la mienne pour s'atteler à la lecture de la lettre d'Aren et je l'observe attentivement pendant qu'il parcourt les quelques lignes qu'il a écrit pour lui. Je ne sais pas ce que le parchemin contient, leur relation a commencé à se déployer cet été et je crois, pour le plus grand plaisir des deux protagonistes. Le mien est entier, vibrant, amer, intense, ému, perclus de trous d'acide de les avoir privé l'un de l'autre toutes ces années. Des regrets et de la culpabilité dans chaque pli de ma vie. « Elle l’aurait apprécié. » La pointe s'enfonce facilement dans les différentes blessures. Oui, je n'en doute pas une seconde moi non plus. Elle l'aurait apprécié. Et lui l'aurait apprécié tout autant. Avec sa fougue de jeune adolescent. Avec le pétillement de ses yeux d'enfant. Comment aurait-il pu en être autrement ? Mais il ne la connaîtra jamais. Peut-être un jour, à travers nos récits et nos histoires, quand parler d'elle sera moins compliqué pour Markus. Si jamais ça le devient un jour ? Est-ce que je suis capable de parler d'Ocean librement ? Avec Aren oui, mais avec les autres ? Une ombre passe dans mes yeux qui se focalisent sur le dos du parchemin pour ne pas trouver l'éclat vert de ceux de Markus. Ce trop tard là est l'un des plus difficiles à porter, aujourd'hui plus que les autres jours. Il m'étouffe, me serre les entrailles et assèche le peu de salive qu'il me restait dans la gorge. Forcé de boire une autre et longue gorgée pour tenter de chasse une nouvelle fois le goût de fer qui persiste sur mes papilles, je ne prête pas attention à la vitesse trop parlante avec laquelle je finis cette bière. Je ne prête pas attention aux émotions qui s'installent plus durablement dans les éclats sombres de mes yeux. Je reste focalisé sur ce parchemin écrit par mon fils pour notre nouveau colocataire. Je fixe mes pensées sur lui, sur ce enfin qui a du mal à exister dans la joie que j'avais toujours projetée à ce sujet. Ce enfin noyé dans le trop tard, imbibé d'une eau salé qui en détache les lettres pour rendre le mot illisible.

« Y’a quoi dans le placard sous l’escalier ? Oh, et je suis chargé de l’importante mission de te rappeler ta promesse sur une pièce entière en mousse. » Mes yeux quittent la contemplation forcée du parchemin pour sauter sur le visage de Markus qui a visiblement fini de lire la lettre et qui affiche un sourire éclatant sur les lèvres. Le placard sous l'escalier et la pièce en mousse ? Un sourcil de surprise dessine un arc circonspect avant que je ne roule des yeux au ciel. Evidemment qu'il a tenté de mettre l'auror dans sa machination pour mettre en place ses désirs d'aménagement. Cela m'aurait étonné que l'adolescent ne tente pas de passer par celui qu'il est parvenu à amadouer en quelques regards doux et compliments bien placés sur les délicieux cookies à la tomate de Markus. Quant au placard sous l'escalier...Je constate qu'Aren s'est pris au jeu également et la graine d'idée germe aussi rapidement qu'une fleur au retour du printemps dans mon esprit trop prompt à imaginer toute sorte de supercherie du genre. Mais alors que je songe, un sourire narquois sur les lèvres, à ce que je pourrais inventer comme suite d'idées pour ce placard sous l'escalier, Markus reprend la parole d'une voix défaite de tout soleil. « Quels cons. Quand je vois ce qu’ils sont en train d’essayer de faire, j’ai envie de… » Mon attention distraite revient se poser sur lui et suis son regard pour tomber sur la une du journal qui traînait sur le comptoir. Les Enfants de Völuspá. L'adjectif con me parait d'un coup plus compréhensible et mes doigts glissent sur le papier pour le tourner vers moi et me permettre de lire rapidement les quelques lignes de sous-titre. Un article sur la nouvelle loi désormais entrée en vigueur sur le service-civique obligatoire pour les mineurs nés-moldus. Mon propre visage perd ses lueurs pour sombrer dans des nuances de gris plus ternes. Un choix douteux de la part d'Oyvind d'avoir voulu impliquer les enfants dans ces volontés politiques. Même si je comprends tout l'intérêt qu'il a de le faire, je déteste l'idée avec autant de force que je déteste l'homme. « Les gens sont aveugles. Ça me dégoûte d’imaginer que certains peuvent vouloir les rejoindre. » Je relève les yeux pour croiser son regard qui cherche le même énervement que le sien. Comme s'il s'attendait à y lire la même haine et la même façon de penser. Sauf que mon avis est différent. Il l'est forcément. Les orages qui vibrent dans mes iris sont sincères et dirigés vers Oyvind et ses mesures liberticides, mais pas vers les gens qui voudraient les rejoindre. Un souffle amer s'échappe de mes narines alors que je secoue la tête. D'une dernière et longue gorgée je finis cette bière décidément trop petite avant de poser la bouteille vide sur le comptoir et de me tourner pour me retrouver le dos posé et les coudes posés dessus. « Oyvind veut endoctriner la jeunesse, c'est rageant de voir qu'il utilise les mêmes mécanismes que les connards de tyrans politiciens qu'on a déjà connu. » Ses nouvelles lignes éditoriales pour présenter les Enfants au grand public ne sont pas mieux, tout miser sur une présentation écologique de son parti pour toucher un public pour large et rallier des sorciers pourtant plus ouverts que lui sur d'autres questions est une foutue bonne façon de faire. Même si elle me désespère. Beaucoup de choses me désespère depuis ces dernières années. Ma position est d'ailleurs devenue de plus en plus électrique auprès de notre leader. L'expérience de Chao-Xing me suffit à me faire prendre mes précautions, pour autant, je ne sais pas quel serait ma capacité à rester encore acceptable à ses yeux, avant de virer à la potentielle menace. « En parlant de tyran, tu devrais te méfier d'Aren, il est en train de te soudoyer avec ses belles paroles, je te préviens que si vous essayez de monter ensemble un projet pour cette salle en mousse je serai obligé de mettre en place des conséquences à l'échelle de votre machination contre mon autorité. » Un sourire en coin fleurit à l'orée de mes lèvres tout en sachant pertinemment que si les deux se liguent contre moi, j'aurais beau darder mes meilleurs éclairs sur eux, la salle de mousse finira par exister. « Quand au placard sous l'escalier. Pour ta sécurité, considères qu'il n'y a pas de placard sous l'escalier. » Je module ma voix pour tenter de la faire passer la plus neutre possible tout en fixant le lac que l'on devine à travers la baie vitrée qui me fait face, avant de subtilement glisser un regard en coin suspicieux vers mon meilleur ami. Il me connait trop bien pour ne pas reconnaître mes attitudes typiques des prémices d'une moquerie faussement habilement tournée. Il y a bien un placard sous l'escalier, qui nous sert à ranger tout plein de petites choses qui ne trouvent leur utilité qu'à de rares occasions comme les décorations de Yule, ou plus récemment beaucoup utilisée : ma tente de camping. « Mais si tu veux quand même aller vérifier par toi-même j'imagine que ta curiosité seraient parties de bonnes intentions. Comme plusieurs sorciers qui ont voulu rejoindre les Enfants de Völuspá. Tu serais surpris de qui on peu trouver là-bas. » Réellement surpris. Ma voix redevient soudain sérieuse, presque sombre, incapable de ne pas songer à Ozymandias et les raisons pour lesquelles il s'est retrouvé embrigadé sous la coupe d'Oyvind. Ou encore Jasper et ses conneries de pensées peine de rages mal dirigées. Et moi...Un autre et vaste sujet qui pourrait amener son lot d'incompréhension de la part de Markus. Et pourtant, presque sans le vouloir, j'ouvre une porte à ses déductions. Mes phrases ne disent rien, tout en laissant supposer l'impensable : je sais, moi, qui on peut trouver là-bas. Chez les Enfants de Völuspá.




Although I felt like giving up It's not the road I chose
Markus Falkenberg
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Il ne sait pas comment interpréter son regard. Il s’attendait à une lecture simple : une colère proche de la hargne, le dégoût, bref les mêmes émotions que dans ses yeux. Mais ce qu’il voit c’est…Moins clair. Il y a des orages, mais il les aurait voulu plus explosifs. À la hauteur du volcan, devant les choses révoltantes. Il termine sa bière pendant que Markus reprend la sienne, l'observant s'adosser au comptoir. « Oyvind veut endoctriner la jeunesse, c'est rageant de voir qu'il utilise les mêmes mécanismes que les connards de tyrans politiciens qu'on a déjà connu. » Ce n’est pas la seule chose qui est rageante. L’endoctrinement, il est forcément compte, mais ce qui l’enrage le plus, c’est tout ce qui sous-tend la nouvelle loi et tout ce qu’elle peut impliquer. Obliger les nés-moldus à un service civique obligatoire, c’est les présenter comme une catégorie à part. C’est affirmer et soutenir qu’ils sont différents, qu’ils ont besoin de faire des efforts supplémentaires pour s’intégrer, comme si leur existence était problématique. Elsa, si elle était là, serait sortie à l’extérieur avec des pancartes dès la première apparition publique du groupe. « En parlant de tyran, tu devrais te méfier d'Aren, il est en train de te soudoyer avec ses belles paroles, je te préviens que si vous essayez de monter ensemble un projet pour cette salle en mousse je serai obligé de mettre en place des conséquences à l'échelle de votre machination contre mon autorité. » Il sourit, mais l’amusement ne parvient pas cette fois à effacer les nuages qui s’accumulent dans son regard. L’idée de monter un projet avec Aren n’est pas mauvaise. Ça lui permettrait peut-être de créer davantage de liens avec l’adolescent, d’apprendre à mieux le connaître. Et d’explorer aussi quel genre de conséquences Magni est capable de mettre en place, pour s’opposer à d’éventuels plans trop espiègles. Mettre deux gamins ensemble dans une même pièce, lui et Aren ça ne donne probablement pas de très bons résultats. « Quand au placard sous l'escalier. Pour ta sécurité, considères qu'il n'y a pas de placard sous l'escalier. » Son sourire s’élargit, sincère. Il a bien sûr envie d’aller vérifier le dit placard, même s’il est plutôt persuadé qu’il n’y trouvera rien. Ou une connerie, à la limite.  Est-ce qu’ils n’avaient pas piégé un de leur camarade ainsi, à une époque ? Ils avaient placé une bombe puante dans un vieux placard, qui s’activait par magie dès que la porte se rouvrait. Ils avaient ensuite bavardé à proximité d’un type qu’ils n’appréciaient pas trop, réputé pour sa gourmandise et ses intolérances. Markus avait prétendu, à voix faussement basse, qu’il avait bien caché la boîte de friandises dans le placard. Ils n’avaient pas eu besoin d’attendre très longtemps : dix minutes plus tard, une petite explosion retentissait. Est-ce que c’est ce qui l’attend dans ce placard ? Le fils tient peut-être du père, ou les deux se sont peut-être associés à distance, pour lui faire un coup.

L’idée l’amuse et le souvenir l’arrache temporairement à ses pensées plus grises. Mais elles reviennent rapidement, dès que Magni reprend la parole : « Mais si tu veux quand même aller vérifier par toi-même j'imagine que ta curiosité seraient parties de bonnes intentions. Comme plusieurs sorciers qui ont voulu rejoindre les Enfants de Völuspá. Tu serais surpris de qui on peu trouver là-bas. » Il ne capte pas immédiatement toute l’ampleur de ses mots. Ce qu’il retient en premier lieu, c’est qu’il prend presque la défense de ceux qui les ont rejoint. La surprise fronce ses sourcils, alors qu’une lueur désapprobatrice vient valser dans ses iris toujours clairs : . « De bonnes intentions ? Plutôt de l’aveuglement.  L’intolérance sous-jacente est nette. » Son ton est grinçant.  Il termine sa bière en une très longue gorgée, puis la dépose sur la comptoir. Il jette un nouveau coup d’œil au journal, avant de reporter son attention sur son meilleur ami. Pense-t-il réellement que ceux qui ont rejoint les Enfants avaient de bonnes intentions ? Un groupe qui s’annonçait malsain avant même qu’il n’émerge en plein jour ?

Il se répète ses mots, pour mieux les comprendre et les assimiler. Il a probablement mal capté, l’auror, ami d’Elsa, ami de sa sœur, qui a même fréquenté une moldue, ne peut pas avoir cette naïveté à l’égard des membres des Enfants. Surtout que d’eux deux, c’est plutôt lui, qui a généralement tendance à vouloir excuser tout le monde et voir le positif dans les pires types. Alors pourquoi…? Tu serais surpris de qui on peu trouver là-bas. Drøm, toujours proche de Mjöll, gronde doucement pour lui manifester son support, sans l’approcher. La fylgya a compris avant lui. « Magni… » Ses yeux se sont assombris. Le vert est disparu, le gris est revenu. Il doute et il espère se tromper. L’hypothèse qui commence à prendre place dans son esprit ne fait aucun sens. Non, aucun foutu sens. « Pourquoi tu sais qui se trouvent là-bas ? » Voix incertaine, teintée de l’espoir qu’il se plante, qu’il fasse fausse route dans ses déductions. Il est trop fatigué, trop secoué avec ses souvenirs liés à Elsa : ça le pousse forcément à avoir une logique défaillante, à supposer le pire en cet instant plutôt que le mieux. Et le pire n’est pas réel, forcément. « Tu fais allusion aux noms connus, qui affirment leur affiliation en public, c’est ça ? » Il espère. Il préfère être le con méfiant, qui a trop réfléchi, que le type qui a raison de douter. Il veut se tromper. Il ne veut pas avoir deviné quoi que ce soit.
Magni Hammarskjöld
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Il vaut mieux parfois ne pas dépoussiérer la cave

@Markus Falkenberg  | le 15 septembre 2023


Toujours du coin de l'œil je vois le froncement de sourcils qui ne m'étonne pas. Je ne m'attends pas à ce que Markus rit de cette phrase. Le sujet n'a jamais été abordé entre nous, à peine effleuré de temps en temps au bureau sans vraiment s'attarder dessus parce qu'Øyvind est bien trop intelligent pour placer son organisation sur les devants de la scène sans s'assurer sa totale transparence fictive. Il a réussi un tour de passe-passe assez incroyable en légitimant son action auprès des sorciers modérés tout en passant sous les radars des autorités. Ou presque. Le sujet est délicat et exécrable sous les couches de bonnes raisons sous lesquelles j'essaie de me justifier. Surtout ces dernières années. Mais tourner le dos à Øyvind aujourd'hui est risqué, trop risqué, notamment à cause d'Aren et Ozymandias. Deux raisons différentes mais qui ont les mêmes conséquences, je ne peux me résoudre à mettre l'un en danger et laisser l'autre derrière moi.  « De bonnes intentions ? Plutôt de l’aveuglement.  L’intolérance sous-jacente est nette. » Je hoche simplement la tête sans appuyer entièrement l'idée. La politique est bien plus nuancée que ça et pour certains Les Enfants de Völupsa représente une porte d'action contre un immobilisme royal qu'ils ne supportent pas. C'est triste et parfaitement rageant de voir qu'il récolte pas mal de nouveaux soutiens depuis qu'il s'est révélé au grand jour comme parti politique. C'est la réponse parfaite au mouvement contestataire et exubérant des Sans-Noms face à la répression violente du gouvernement sans apporter le moindre changement conséquent pour apaiser l'incendie. Et certains préfèrent choisir l'extrême que le modéré dans un simple esprit de colère miroir. Évidemment on peut se demander où je me situe dans tout cela. Partout et nulle part. Je n'ai jamais adhéré à ses idées spirituelles, encore moins à ses croyances de Völupsa ce qui est pourtant le fond de sa ligne de combat. Mais j'avais été attiré par les messes basses et les murmures à leur sujet. Le danger qu'ils pouvaient représenter comme un papillon sans cesse attiré par les lueurs d'un incendie. C'est presque un don échaudé par des années de pratique et de fréquentation des milieux obscurs. Un léger silence s'étire coupé par un grognement d'ours qui me fait quitter la contemplation distraite du paysage qui se déploie en face de moi. Mon regard se porte sur les deux ours et je sens la légère tension qui s'opère entre eux. Mjöll m'envoie une puissante dose de soutien aussi lourd que son poids réel. Le « Magni...» qui suit est lourd, lui aussi. Je ne lutte pas contre l'envie de croiser son regard. Mes yeux se posent sur les siens, surface perlée d'un gris défait des masques verts du bonheur. Je sais qu'il ne comprendra pas. Je sais que s'il ouvre la porte que j'ai poussée la conversation ne va pas se tourner vers une claque dans le dos joyeuse en me traitant de con. Il suffit de voir la véhémence acide avec laquelle il a rabroué ma phrase précédente. Il n'est pas prêt à entendre que certains tolérants font partis de cette organisation intolérante pour des raisons qui le dépassent.  « Pourquoi tu sais qui se trouvent là-bas ? » Sa voix hésite, marqué les sauts d'une âme qui ne peut pas se résoudre à faire les liens que j'ai initié. Je ne flanche pas, un regard calme planté dans le sien.  « Tu fais allusion aux noms connus, qui affirment leur affiliation en public, c’est ça ? » Je soutiens son regard tout en sachant qu'aucune façon d'amener les choses ne changera la réalité, pas quand il est déjà dans un état d'esprit aussi complexe. Une fraction de seconde l'idée de remettre la conversation à plus tard me traverse l'esprit mais je la repousse aussitôt.  « Non. Je parle de ceux qui oseront jamais montrer leur affiliation en public parce qu'ils ont honte de s'être laissés convaincre. » D'un mouvement de hanche je me décolle du comptoir pour revenir me placer en face de lui, avec l'air de celui qui parle du temps qu'il fait ou d'un dossier peu passionnant qui lui tient la jambe depuis trop longtemps. « Markus. Mon travail c'est de repérer les organisations potentiellement dangereuses, et il se trouve que je suis plutôt doué pour débusquer même celles qui sont bien cachées. » Une pause.  Un serrement de cœur, un saut en chute libre sans corde de sûreté. « J'ai quelques infiltrations dans des organisations qui jouent avec des magies non recommandées à mon actif. Celle-là ne fait pas exception. » Si ce n'est que je ne tiens pas officiellement de rapport auprès d'une quelconque hiérarchie et que ma surveillance est purement personnelle et non habilitée par un cachet top secret. « Mes habitudes des jeux politiques me permettent de donner le change, mais avec toutes leurs nouvelles prises de direction ça devient difficile de cacher mes pensées propres sur la question. D'ailleurs je suis surpris de t'entendre parler de ça. C'est bien la première fois que c'est toi qui parle de politique sans que l'idée ne vienne de moi. D'habitude tu marmonnes dans ton coin en faisant mine de t'endormir et tu changes de sujet, voire même de pièce. » Je ricane, je me force à garder un ton léger, dans le faible espoir qu'il se contente de ça pour passer à autre chose. Il y a peut-être pas mal de mauvaise fois, ou juste d'envie de ne pas gâcher si vite cette journée qui devait être exceptionnelle. Cette journée qu'on rêve depuis qu'on est gamin. Cette journée qui part dans tous les sens sauf le bon et ça me fou déjà des remords dans le fond du cœur. L'envie d'aller me serrer contre lui fourmille dans mes veines. L'envie de me coller contre sa chaleur pour retenir le rêve qui s'effile entre mes doigts comme un foutu cheveux de nornes. J'ai trop de souvenirs qui me tournent dans la tête. Trop de déménagement chargés de fantômes. Trop de douleurs qui pèsent sur mes épaules. Trop de honte d'un passé qui ne cesse de se faire encombrant entre nous deux. Parfois, égoïstement, j'aimerais qu'il comprenne, qu'il accepte, qu'il soutienne sans remettre en cause l'ensemble de notre amitié. Tout en sachant que je n'ai pas le droit de lui reprocher la moindre de ses réactions.



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Pendant un quart de secondes d’une naïveté qu’il n’a plus, plus avec Magni, il espère que son meilleur ami éclatera de rire et se moquera de ses suppositions implicites. Un quart de secondes d’espoir, de cet espoir dont il a incroyablement besoin aujourd’hui, et qu’il laisserait s’étirer indéfiniment. « Non. Je parle de ceux qui oseront jamais montrer leur affiliation en public parce qu'ils ont honte de s'être laissés convaincre. » Parle-t-il de lui ou d’autres personnes ? Les deux, peut-être ? Les étincelles d’illusion continuent de s’accrocher, avec un désespoir presqu’absurde. L’auror se détache du comptoir pour se placer face à lui et il sent les battements de son cœur s’accélérer, comme devant une menace imminente. Ça en est peut-être une. Il ne sait pas ce qu’il est en mesure de supporter, aujourd’hui. Il ignore si sa confiance ébréchée en leur amitié, mise à mal avec toutes les révélations retardées, pourrait se prendre un nouveau coup sans dommages. T’aurais pas fait ça, Magni ? Tu m’aurais pas camouflé encore quelque chose ? « Markus. Mon travail c'est de repérer les organisations potentiellement dangereuses, et il se trouve que je suis plutôt doué pour débusquer même celles qui sont bien cachées. » Débusquer et entrer dedans ? Débusquer et lui cacher, à lui, encore, quelque chose d’aussi important…? Il le prend pour un con ? Il se fout de sa gueule à ce point ? Non, plutôt, il se fout à ce point de ce qu’il peut ressentir, quand il apprend à retardement des choses qu’il aurait dû connaître bien avant ? Sérieusement ?

Le gris de ses yeux est devenu tempête. Sa machoîre s’est serrée, sa nuque s’est raidie. Il espère encore se tromper, mal déduire, mais n’est pas assez débile pour ne pas voir vers quelle conclusion s’acheminent toutes ces affirmations. « J'ai quelques infiltrations dans des organisations qui jouent avec des magies non recommandées à mon actif. Celle-là ne fait pas exception. » Il accuse la confirmation de ses doutes de la même façon qu’il aurait accusé la réception d’un uppercut en plein ventre. Ses lèvres ne sourient plus, ses iris ne font même pas semblant d’être heureux. Celle-là ne fait pas exception. Il en fait donc parti. Il en fait partie, et il ne lui a pas dit. Il en fait partie, et il doute que c’est sous l’ordre d’un de leurs supérieurs, qu’importe ce qu’il affirme. Sinon, pourquoi n’aurait-il pas été réquisitionné lui aussi ? Ou au moins mis dans le parfum, par sécurité pour un coéquipier ? Il n’a pas l’expérience de Magni dans des organisations criminelles, mais il a aussi fait pas mal d’infiltrations. Et les Enfants, malgré leur façon de penser, n’est pas considéré comme un groupe criminel. Alors…? Alors soit il a agi de son propre chef, et ne le mentionne pas, soit il a été envoyé par le bureau, et n’a pas jugé nécessaire de lui dire. Aucune des deux alternatives n’est douce. Aucune ne vient atténuer la douleur qui est venue s’infiltrer dans son âme et cette sensation d’être mis de côté, comme s’il n’était pas digne de la confiance de son meilleur ami.   Mes habitudes des jeux politiques me permettent de donner le change, mais avec toutes leurs nouvelles prises de direction ça devient difficile de cacher mes pensées propres sur la question. D'ailleurs je suis surpris de t'entendre parler de ça. C'est bien la première fois que c'est toi qui parle de politique sans que l'idée ne vienne de moi. D'habitude tu marmonnes dans ton coin en faisant mine de t'endormir et tu changes de sujet, voire même de pièce. » Le ricanement, le ton léger, comme si la découverte était aussi banale que le sujet, enflamme ses veines déjà à vif. Le sang monte à ses joues, et la pression à sa machoîre s’accentue. Magni en parle comme si c’était simple, comme si c’était anodin, comme s’il devait simplement hausser les épaules et ne rien dire de plus. Comme si ça n’avait pas d’importance ; ça aurait pu ne pas en avoir. Mais encore une fois, l’homme qui lui sert de meilleur ami lui camoufle quelque chose avec naturel, comme si c’était naturel. Sans intérêt. Et ça, ça a de l’importance. Une foutue importance.

Ses bras se croisent contre son torse dans un geste clair de fermeture, malgré leur envie de s’ouvrir. Dans ce genre de moment, où ses émotions prennent une ampleur démesurée, il a envie d’aller d’empoigner l’auror, de le serrer contre lui. Pour s’apaiser. « Tu as mentionné toi-même le nom d’Elsa et tu t’étonnes que je parle de ça ? » Le ton est froid, presque rancunier. C’est un autre segment du problème, un segment auquel il préfère ne pas s’attarder, parce que l’autre prend déjà une trop grande place. Mais ça ne fait pas disparaître le soucis et la problématique : infiltration ou non, à quel point son meilleur ami partage-t-il les idéaux du groupe ? Il repousse cette interrogation au loin, se concentrant sur les battements de son propre cœur, sans parvenir à les apaiser. « Combien, Magni…? » Sa voix est un grondement rauque. Il s’avance d’un pas, sans réfléchir, décroisant les bras. « Combien de secrets m’attendent avec toi ? » La main s’avance, avec la tentation d’aggriper le haut de l’auror. Il inspire, fortement, alors que son poing se referme brutalement dans le vide, retombant contre sa hanche. « Combien de trucs que tu te contentes de garder pour toi, comme si c’était sans importance, tout en sachant que ce l’est ? T’es pas con bordel. » Est-ce que ce serait mieux, s’il croyait vraiment ce genre d’informations sans importance ? Il l’ignore. Tout ce qu’il sait, c’est qu’il était déjà trop à cran aujourd’hui, lors de cette fameuse journée qui devrait être joyeuse, oui trop à cran pour supporter la reprise d’une scène qui a des allures de déjà-vu. Il reprend : « J’aurais peut-être compris si tu m’en avais parlé au tout début de ton infiltration. Mais vu que je le découvre encore une fois par moi-même, parce que tu te retrouves dans l’obligation d’en parler, j’imagine que ça date pas d’hier. » Encore un secret. Peut-être que c’est ça, être le meilleur ami de Magni. Livrer trop de détails sur sa propre vie, croire que l’autre ne cache rien de son côté, et découvrir, par petites coupures, qu’on s’est bien planté.
Magni Hammarskjöld
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Il vaut mieux parfois ne pas dépoussiérer la cave

@Markus Falkenberg  | le 15 septembre 2023


Je n'ai rien manqué des changements de ses traits. De ses yeux devenus tempêtes, de l'éclat ternis des restes d'un espoir dans la.profondeur de son âme. Avant même qu'il ne croise les bras sur sa poitrine je sais que j'ai, une fois de plus, brisé un peu plus le rameau de confiance qu'on a mis tant d'année à faire pousser entre nous. C'est précisément pour éviter d'abîmer les fibres de ce lien unique que j'ai gardé pour moi tant de choses au fil de ces vingt dernières années. Égoïstement. La peur d'y lire sa déception, son rejet, son dégoût, miroir à mes propres sentiments envers mes actes et leurs conséquences. Tout s'étire, prend des ampleurs impossibles une fois qu'on a mis le pied dans le premier trou d'air. Comment retrouver la surface dans de la terre, sa rigidité rassurante et stable, quand on a le corps qui s'est retrouvé pris au piège d'une multitude de mensonges gonflés à l'hélium. « Tu as mentionné toi-même le nom d’Elsa et tu t’étonnes que je parle de ça ? » Je m'en étonne faussement. Ce ne sont que des raisons détournées pour diluer sa colère, pour me protéger de ses yeux ternes, pour éviter de songer trop directement au gouffre qui s'est rouvert dans mon estomac. L'angoisse était sensible avant. Avant cet été, avant cette année. J'ai toujours eu peur de le perdre lui s'il venait à ouvrir toutes les portes des choses dont j'ai honte et dont je porte le poids mort au quotidien. Mais cette année à tout changé. En Colombie, quand je vivais toutes ces choses qui ont changé à jamais l'adolescent que j'étais avec lui. En Colombie, ma peur me semblait parfois stupide. Je me disais que je lui en parlerai la prochaine fois qu'on se verrait, dans ma prochaine lettre, lors de mes prochaines vacances en Scandinavie. Parfois je le faisais, vraiment. Souvent les semaines voire les mois me faisaient oublier jusqu'à l'importance même de ce que j'avais vécu, des sentiments qui m'avaient élancés vers le besoin de lui par la pensée. Et quand, de retour dans mon quotidien, le souvenir de ce qui n'avait pas été dit me revenait en pleine face, la culpabilité se cachait derrière l'idée que si j'avais oublié, alors c'est que ce n'était pas si grave. Pas si important. Je me souviens des moments où on se retrouvait lui et moi. Quand il venait me voir à Bogota, bulle d'air frais dans une vie engluée de poussières humides et sombres. Je me souviens de nos rires, de l'envie d'être Magni, simplement Magni. Et personne d'autre. Surtout pas l'auror sous infiltration, ni l'auror pris à partie dans des histoires de corruption, encore moins l'auror envoyé dans les pires situations pour lui casser son envie de se faire pistonner. Je n'avais pas envie qu'il sache tout ça. Qu'il sache à quel point je regrettais d'être parti. A quel point j'avais cette sensation étouffante d'être bloqué et d'avoir raté le bon chemin de ma vie. Quand lui paraissait de tout réussir. Sa place au sein des aurors de Göteborg, puis plus tard, sa place d'enseignant à mi-temps. Je m'en voulais de gâcher nos moments de retrouvailles avec mes histoires de gang à n'en plus finir, avec mes nouvelles sans cesse tournées vers le nombre de côtes cassées dans l'année et de tentatives d'assassinats dévouées. C'est con, parfois, l'amitié et l'envie profonde d'entrenir le bonheur de l'autre, parce que c'est la seule chose qui compte sur la longueur. Tout en ne parvenant qu'à semer les graines du poison tout autour de ce qu'on essaie de préserver.

Et puis il y a février. Et mars. Et tous les mois qui ont suivis jusqu'à juin.

Il y a cette peur soudain devenue réelle de l'amitié brisée et irrécupérables. Ces journées sans but, cette déchirure continuelle de l'âme. La terreur de se dire que j'avais eu raison, d'avoir peur des conséquences. Que malgré tout ce que mon cœur me murmurait pour me rassurer dans les nuits froides des altitudes de Bogota, il est possible de briser des liens aussi fort que les nôtres. En juillet, après le passage aux urgences d'Aren, lors d'une nuit de camping en pleine nature, au gré d'une nuit lumineuse d'été, je me suis juré de faire plus attention. Mais la réalité est là, fracassante devant mes yeux, mes belles promesses  ne servent à rien tant le mal fait est déjà trop grand.

« Combien, Magni…? Combien de secrets m’attendent avec toi ? »

L'âme frémi tout en sachant la suite inévitable.

Mon sourire s'est défait sous le grondement de sa voix rauque. Je sens la pulsion qui émane de lui sous la tension soudaine de ses muscles et l'envie de sentir ses poings sur moi résonne avec force. En mesure des coups lourd qui cognent contre ma poitrine. D'une lourdeur douloureuse. Physiquement si douloureuse que j'ai l'impression que mon corps a trouvé le moyen de me faire ressentir dans mes cellules les souffrances morales.

Mais il ne frappe pas. Ce qui est plus blessant encore que m'aurait été ses coups. « Combien de trucs que tu te contentes de garder pour toi, comme si c’était sans importance, tout en sachant que ce l’est ? T’es pas con bordel. » Mes dents se serrent, incroyablement fort, sous une pression nerveuse que je ne pensais pas avoir autant fait monter en quelques secondes. A moins que cette pression était seulement là, depuis ce matin, depuis le réveil, depuis le premier carton déménagé, depuis sa demande d'être seul sans être nommée officiellement, depuis sa réaction quand j'ai parlé d'Elsa. Ouais. Parce qu'évidemment, dans nos histoires, c'est toujours moi qui fait l'impasse sur les choses importantes. « J’aurais peut-être compris si tu m’en avais parlé au tout début de ton infiltration. Mais vu que je le découvre encore une fois par moi-même, parce que tu te retrouves dans l’obligation d’en parler, j’imagine que ça date pas d’hier. » Je m'oblige à prendre trois respirations. Trois contractions de mâchoire. Trois pensées différentes. Il n'a pas besoin que j'explose, la douleur de la perte d'Elsa ravivée par son déménagement ne doit pas être le bois pour mon propre feu, je ne peux pas continuer à me justifier derrière ses propres silences. Mjöll grogne, renâcle, secoue sa tête, de redresse avant de me fusiller du regard. L'ours n'est pas d'accord. L'ours voudrait que j'arrête de me faire passer en deuxième. Sa contestation me fait reprendre pied, une main passe sur mon visage las de toutes ces confrontations qui reviennent en boucle. Je voudrais lui dire “pas aujourd'hui, viens on va s'asseoir sur le toi et regarder l'horizon plutôt”. Mais justement, pas aujourd'hui. Je ne peux pas reculer aujourd'hui. « Non, tu n'aurais pas compris à l'époque. Pas plus que tu ne pourras comprendre aujourd'hui. » Mes doigts frottent les paupières lourdes, pressent les yeux dessous pour enlever les images qui s'y collent immédiatement, sans succès. « Ça va faire trois ans. J'avais déjà entendu quelques rumeurs via mon réseau, d'une secte étrange guidée par un gars pas que net dans ses propos de révolution. Alors quand...Quand le bateau de Durmstrang a été pris pour cible j'ai paniqué. Aren devait faire sa rentrée deux ans après, il y avait eu le drame de Walpurgis l'année d'avant, je guettais encore chaque conversation aux accents espagnol en craignant d'y voir un ancien de la Mano qui aurait retrouvé ma trace jusqu'ici et puis j'ai croisé une ancienne connaissance faite en Colombie justement, qui m'a introduit auprès d'Øyvind. J'ai pas eu de mal à ce que cette personne me fasse confiance, à l'époque de notre rencontre il y a une dizaine d'année, je donnais l'impression que mes convictions allaient plutôt dans leur sens. J'ai juste eu besoin de réutiliser mes vieux discours. » Ce ne sont pas des excuses, mais une remise en contexte. Je ne m'attends pas à ce qu'il comprenne, je ne m'attends plus à grand chose. Il pourrait même claquer la porte et repartir avec tous ses cartons, que je n'en serais pas étonné. Détruit sans doute, mais pas étonné. Mes doigts quittent enfin mes yeux qui s'ouvrent pour se poser avec tristesse dans ceux de Markus tandis que ma mémoire est assaillie par les souvenirs de terreur qui avaient envahi mon âme quand, dépêchés sur le bateau qui emmenaient les étudiants à Durmstrang cette année-là, j'avais vu le visage d'Aren dans celui de chaque enfant présent. Des cauchemars que j'avais fait inlassablement pendant des mois, le voyant mort au milieu des débris du bateau, le corps flottant dans l'eau froide. « Ça n'a rien à voir avec Elsa. Ou plutôt, si, un peu. C'était une façon d'entrer dans les confidences de ce qui semblait se faire de pire sur le moment dans le royaume. Je voulais être au plus près, pour mieux pouvoir prévoir les dangers et mettre Aren en sécurité. Et Elsa aussi, si la question s'était posée. » Ma voix vibre tout en montant légèrement en énervement que les émotions diverses font monter en orages sourds.  « Je suis pas con, non. Mais toi t'es pas si innocent non plus. Je pensais que tu serais plus à même de comprendre que j'ai du mal à sortir tous les trucs qui me donnent l'impression d'avoir foutu ma vie en l'air comme si on discutait de notre prochaine sortie camping. J'ai même pas le droit de parler d'Elsa devant toi sans que tu te refermes. C'était aussi mon amie. Moi aussi elle me m...» Je me bloque, avant d'enchaîner rapidement « Et ton don qui se de fout la malle ? Tu veux qu'on en parle aussi ? Ou c'est le genre de truc sans importance sur lequel on a plus besoin de revenir parce que ça va mieux en ce moment. Si jamais tu reperds le contrôle j'imagine que ce sera la première chose que tu viendras me dire au reveil ? » Mon regard sombre malgré moi dans la tourmente. L'orage éclate dans le cœur, mes poings se serrent, l'un contre ma hanche, l'autre sur le bar. Ça me fait chier d'en venir à lui faire des reproches par automatisme de défense. Je souffle une nouvelle fois, inspirant profondément, avant de reprendre d'une voix plus calme bien que trop basse :  « Ce sont pas des secrets Markus, ni des trucs sans importance que je veux pas te dire parce que ça me fait marrer. Ça me tue de les porter tout ces trucs. Tu as lu mon dossier de la Mano, on en a parlé, tu sais que j'ai fait des trucs que je parviens pas à me pardonner. J'ai foutrement peur qu'un jour tu ne puisse plus non plus. Je suis pas con, mais c'est plus facile de me convaincre moi-même que c'est sans importance. Et que même si tu finis par apprendre ce que j'ai pu faire, ça ne puisse pas menacer l'opinion que tu as de moi, toi aussi. C'est la seule chose qui donne du sens. Encore plus maintenant..» Ma main voudrait se tendre vers lui, effleurer sa joue, mais elle reste en poing serré contre ma hanche. Mjöll grogne toujours, le regard triste, la tête roulée contre la poitrine de l'ours noir.



Although I felt like giving up It's not the road I chose
Markus Falkenberg
Markus Falkenberg
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Les mâchoires de l'homme se contractent, mouvement qui lui est devenu coutumier et qu'il a l'habitude de voir. Ses propres mâchoires ne desserrent pas, même quand il entend Mjöll grogner et qu'il le voit fusiller du regard. Drøm, immobile, demeure silencieux, comme pour éviter de lui infliger ses émotions en plus des siennes. « Non, tu n'aurais pas compris à l'époque. Pas plus que tu ne pourras comprendre aujourd'hui. » Les mots frappent et blessent, avec une puissance désespérante. Tu ne me laisses pas la possibilité de comprendre. Est-ce ainsi qu’il décide de ce qu’il lui dira ou de ce qu’il lui cachera, selon le taux de compréhension envisagé ? Et expliquer ses motivations dès le départ, plutôt que de cacher, ça ne lui disait rien ? Lui faire confiance, faire confiance en leur amitié, faire confiance en ses capacités à essayer de capter, même si ses raisons pouvaient dépasser ses propres valeurs ? « Ça va faire trois ans. J'avais déjà entendu quelques rumeurs via mon réseau, d'une secte étrange guidée par un gars pas que net dans ses propos de révolution. Alors quand...Quand le bateau de Durmstrang a été pris pour cible j'ai paniqué. Aren devait faire sa rentrée deux ans après, il y avait eu le drame de Walpurgis l'année d'avant, je guettais encore chaque conversation aux accents espagnol en craignant d'y voir un ancien de la Mano qui aurait retrouvé ma trace jusqu'ici et puis j'ai croisé une ancienne connaissance faite en Colombie justement, qui m'a introduit auprès d'Øyvind. J'ai pas eu de mal à ce que cette personne me fasse confiance, à l'époque de notre rencontre il y a une dizaine d'année, je donnais l'impression que mes convictions allaient plutôt dans leur sens. J'ai juste eu besoin de réutiliser mes vieux discours. » Trois ans. Putain Magni, trois ans. Le corps absorbe le coup sans reculer. Les traits se durcissent davantage, les yeux achèvent de s’assombrir. C’est ça, ce qu’il n’aurait pas pu comprendre ? Que son meilleur ami a été tellement blessé dans les dernières années, qu’il a tellement souffert, qu’il a développé un instinct de protection fort et une méfiance exacerbée – et justifiée ? Forcément, ouais, sans savoir pour Aren, il aurait été dans l’incompréhension. Mais maintenant…?

Les yeux de l'auror s'ouvrent enfin, après que ses doigts aient lâché les paupières qu'ils pressaient, et Markus laisse ses iris filer vers ceux de son meilleur ami. la tristesse qu'il y lit, trop parlante, fait descendre sa colère, mais pas l’intensité de ses émotions. « Ça n'a rien à voir avec Elsa. Ou plutôt, si, un peu. C'était une façon d'entrer dans les confidences de ce qui semblait se faire de pire sur le moment dans le royaume. Je voulais être au plus près, pour mieux pouvoir prévoir les dangers et mettre Aren en sécurité. Et Elsa aussi, si la question s'était posée. » C’est si simple, expliqué ainsi. De son point de vue, ça demeure une grosse connerie, mais qui se justifie, surtout pour quelqu’un avec le passé de Magni.   « Je suis pas con, non. Mais toi t'es pas si innocent non plus. Je pensais que tu serais plus à même de comprendre que j'ai du mal à sortir tous les trucs qui me donnent l'impression d'avoir foutu ma vie en l'air comme si on discutait de notre prochaine sortie camping. J'ai même pas le droit de parler d'Elsa devant toi sans que tu te refermes. C'était aussi mon amie. Moi aussi elle me m...» Ses dents se serrent, tandis que la phrase de l’auror s’interrompt. Il la complète dans sa tête, de la même façon qu’un condamné aurait appuyé un peu plus sur la lame du bourreau, pour être certain qu’il termine bien son boulot. Elle lui manque. Bien sûr qu’elle lui manque aussi, vu à quel point ils étaient proches. Et il le sait, qu’il est un foutu égocentrique, d’éviter le sujet, de ne jamais l’aborder devant lui. Coupable de fermer sa gueule, par peur de déverser des torrents, en prononçant simplement son nom. Il comprend que son ami puisse avoir du mal à parler de certaines choses, mais il y a une différence entre ne pas aborder un sujet et nier entièrement son existence. « Et ton don qui se de fout la malle ? Tu veux qu'on en parle aussi ? Ou c'est le genre de truc sans importance sur lequel on a plus besoin de revenir parce que ça va mieux en ce moment. Si jamais tu reperds le contrôle j'imagine que ce sera la première chose que tu viendras me dire au reveil ? » Il fronce les sourcils, sans répondre immédiatement, tout en sentant son cœur s’accélérer davantage. Alors, il savait. Il s’en est rendu compte. Ça lui fait honte, forcément. Il voit bien ce qu’il est en train de faire : rétablir l’équilibre. Montrer que lui aussi, planque des choses. Il n’aura pas la mauvaise foi de le nier. Mais il y a une différence dans l’ampleur des secrets camouflés et dans les raisons derrière. « Ce sont pas des secrets Markus, ni des trucs sans importance que je veux pas te dire parce que ça me fait marrer. Ça me tue de les porter tout ces trucs. Tu as lu mon dossier de la Mano, on en a parlé, tu sais que j'ai fait des trucs que je parviens pas à me pardonner. J'ai foutrement peur qu'un jour tu ne puisse plus non plus. Je suis pas con, mais c'est plus facile de me convaincre moi-même que c'est sans importance. Et que même si tu finis par apprendre ce que j'ai pu faire, ça ne puisse pas menacer l'opinion que tu as de moi, toi aussi. C'est la seule chose qui donne du sens. Encore plus maintenant..» Il s’en convainc en gardant le silence. Sans oser lui dire, en attendant le moment où il découvrira les choses par lui-même. Comme avec la Mano, et ce dossier qu’il a lu, qui a amorcé bien plus tard une autre conversation. Il s’en convainc sans en être vraiment convaincu, au fond, parce que s’il savait qu’il peut lui faire confiance, s’il avait retenu qu’il sera toujours là, qu’importe ce qu’il peut apprendre, il n’aurait pas besoin de lui cacher quoi que ce soit. Il n'aurait pas besoin de continuer à porter ces trucs seul, encore et encore, alors qu'il n'a plus à l'être. Qu'il n'a jamais eu à l'être.

Les yeux de l'enseignant s'abaissent sur le poing serré contre la hanche et sur l'autre, sur le bar, avant de revenir se poser sur son meilleur ami. Ils sont plus efficaces, moins blessants, quand ils peuvent se taper dessus, plutôt que d’utiliser les mots. Sa voix, moins emportée dans la colère, est imprégnée de cette grisaille qui serre son cœur : « Elsa et mon don…Tu veux vraiment en parler maintenant ou tu t’en sers pour détourner la conversation sur les propres trucs que je planque et souligner mon hypocrisie ? C’est pas ton opinion que je redoute au sujet de mon don, j’sais que tu me soutiendrais. Parce que t’es mon meilleur pote, tu m'as jamais laissé tomber dans ma gestion pathétique de mes émotions. C’est pas ton opinion que je redoute, non, c’est la mienne. Et j’te cache rien, sur Elsa, ce que je ressens est assez évident. J’suis foutrement égoïste sur le sujet, de pas parvenir à en parler avec toi, je dis pas le contraire. » Ses lèvres se sont plissées en un rictus d’amertume. Égocentrique, il l’est, il le sait. Et il s’en veut. Il ne peut cesser de s’en vouloir, à chaque fois qu’il apprend quelque chose de nouveau sur le passé de son meilleur ami. Après leur discussion sur la Mano, il a passé de nombreuses soirées, seul dans son bureau à Durmstrang, à réfléchir aux questions posées et aux réponses données. À tout ce qu’il a manqué à cette époque, à ce que son ami a dû affronter seul, faire seul, souffrir seul, sans son soutien. Comme s’il l’avait abandonné, involontairement.

D’un nouveau pas, il se rapproche. Il sent presque la chaleur de son torse contre le sien et son corps, tellement habitué à la proximité de cet être qui lui est aussi nécessaire que l’air qu’il respire, se détend légèrement. « Tu dis que j’aurais pas compris à l’époque, pas plus que je ne peux comprendre aujourd’hui…Arrête de décider à ma place de ce que je peux comprendre ou non Magni. » Sa voix trahit la tristesse associée à cette phrase, la douleur des idées derrière. Il ne cherche pas à contrôler la couleur de ses iris : ils passent du gris au vert foncé, dans des oscillations sombres. « Et retiens, une fois pour toutes, que je peux tout accepter venant de toi. Tout. Tu m’annoncerais être un braconnier que je continuerais de te suivre. Je t’engueulerais, mais je te lâcherais pas. Tout comme j’aurais compris si un jour  tu m’avais dit que y’a un autre truc dont tu dois me parler, mais que tu le sens pas pour le moment. Mais de découvrir à chaque fois de nouveaux secrets, comme si j’étais pas digne de confiance, comme si tu craignais mes réactions alors que je suis supposé être ton meilleur ami…C’est blessant. Tout comme c’est blessant, que tu puisses considérer que j’peux pas comprendre et que tu crois que mon opinion de toi est si facile à faire flancher. On s'est toujours dit ce qu’on pensait de l’autre, on s’est toujours tapé sur la tête quand l’autre faisait une connerie. Ça a jamais voulu dire que d’un coup, notre perception de l’autre changeait et que c’était sans retour. » Il peut accepter ce nouvel élément, sur les Enfants, même si son jugement à leur sujet ne change pas. Son avis est toujours aussi peu nuancé sur ceux qui en font partie volontairement. Et s’ils viennent à bout de cette conversation, sans trop de marques, il manifestera probablement son désaccord. Ça n’empêche pas qu’il peut saisir les motivations de l’auror et qu’il ne l’aurait pas lâché, même si ces motivations auraient été écœurantes. Il lui aurait simplement botté, très fort, les fesses.

D’un dernier pas, minime, il achève de combler la distance entre eux. Sa main se tend pour glisser derrière l’auror, agrippant son haut dans le dos. D’une poussée, il le rapproche de lui, dans une accolade tout aussi brutale que nécessaire – du moins, pour lui. Une courte seconde, avant qu’il ne recule son visage sans reculer son corps, appuyant sa joue contre celle de l’auror :   « Ma crainte a toujours été qu’en modifiant notre relation, on perde ce qui fait son centre. Qu’on ne soit plus des meilleurs amis. T’as pas à porter ces trucs seul tous les jours. T’as jamais eu à le faire. Et si je peux pas alléger la charge sur tes épaules, si tu me laisses pas être ton meilleur ami, dans toutes les significations que ce mot avait pour nous à l’époque… Si tu me laisses même pas t’écouter dans ce que tu traverses de douloureux ou de plus difficile, si tu me laisses même pas la possibilité de t’engueuler quand tu prends des décisions douteuses, je sers à quoi Magni ? » Un murmure, attristé. Et le refus, peut-être, de le regarder. Dans ses yeux, la tempête continue de s’agiter. Elle pousse les rochers, fait mugir des bourrasques sombres. Sa main se resserre contre le tissu, dans le dos de son meilleur ami, comme pour y puiser la force nécessaire, alors que sa joue s’éloigne de la sienne, sans qu’il ne brise l’étreinte. Il cherche plutôt son front, qu’il pose contre le sien, dans cette habitude étrange qu’ils avaient parfois de prendre cette position, quand ils étaient plus jeunes : « J’veux pas être présent uniquement dans les moments joyeux. J’veux être présent dans les moments où tu contractes trop souvent ta machoîre parce que tu penses à un truc qui te dérange, j’veux être présent quand tu te foires, j’veux être présent quand tu sais pas quel chemin prendre, j’veux être présent pour te traiter de con quand c’est nécessaire et te prendre dans mes bras quand t’as pas envie de parler. Alors s’il-te-plaît, Magni, me met plus de côté sous prétexte que je peux pas comprendre ou parce que t’as peur de ma réaction. Ça, je peux plus le supporter. »Peut-être qu’il en demande trop et qu’il devrait en demander moins. Peut-être que c’est à ça que ressemble l'amitié, quand on devient des hommes.
Magni Hammarskjöld
Magni Hammarskjöld
GÖTEBORG Livet är en kamp, ​​du måste förbereda dig för striden
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Il vaut mieux parfois ne pas dépoussiérer la cave

@Markus Falkenberg  | le 15 septembre 2023


Je ne sais jamais formuler correctement l’ensemble de mes pensées avec l’exactitude qu’il faudrait. Mes mots tâtonnement et s'emmêlent souvent et je sens la frustration poindre en même temps que le reste des émotions qui me submergent face à Markus. Peut-être, sans doute, qu’à force de garder trop de choses, plus rien ne fait sens. Il a raison, évidemment, de me reprocher. Comme une première intuition, un caillou qui roule sous une chaussure qui sait qu’il est temps de se détourner du chemin pour emprunter le versant à pic qui mène vers une route moins souvent empruntée, mais qui semble se dévoiler, plus efficace. « Elsa et mon don…Tu veux vraiment en parler maintenant ou tu t’en sers pour détourner la conversation sur les propres trucs que je planque et souligner mon hypocrisie ? C’est pas ton opinion que je redoute au sujet de mon don, j’sais que tu me soutiendrais. Parce que t’es mon meilleur pote, tu m'as jamais laissé tomber dans ma gestion pathétique de mes émotions. C’est pas ton opinion que je redoute, non, c’est la mienne. Et j’te cache rien, sur Elsa, ce que je ressens est assez évident. J’suis foutrement égoïste sur le sujet, de pas parvenir à en parler avec toi, je dis pas le contraire. » Un froncement de sourcil désolé traverse mon front. Je regrette d’avoir mis en avant ce sujet en particulier et de l’avoir brandi comme un miroir pour ses propres silences sur des sujets importants et qui mériteraient qu’il s’autorise à s’y pencher un peu plus souvent avec moi. Je regrette parce que c’est d’autant plus hypocrite de ma part qui ne parle pratiquement jamais d’Ocean avec lui, sauf quand Aren est là. Lui et moi on a toujours parlé d’elle, sans gêne, c’était la moindre des choses que je pouvais lui faire, lui laisser l’entière possibilité de la faire vivre au quotidien avec nous à travers ses mots, ses questions, ses remarques, et bien souvent ses sollicitudes me concernant. Une autre chose sur laquelle je n’ai pas su être suffisamment fort et le protéger de ma propre tristesse invasive. Le geste de Markus en avant me ramène brutalement à la réalité et mes yeux s’ancrent un peu plus dans les siens. Je résiste à l’envie de combler rapidement la distance qu’il reste entre nous pour retrouver la proximité de son corps. Je note que sa colère s’est légèrement adoucie, noyée par la tristesse de ses yeux et de sa voix plus profonde. Ce n’est pourtant pas plus facile à gérer, au contraire. Sa colère je sais la recevoir et la lui rendre. La tristesse peut être plus brutale et complexe à rattraper. Une fois qu’elle a détrempée toute les fondations, il n’y a plus grand chose à faire que tout détruire. Pour espérer tout reconstruire. Je n’ai pas envie d’en arriver-là, et si mon âme frémit une nouvelle fois dans cette perspective, je me force à rester encore droit face à la suite de ce qu’il a à me dire en réponse. « Tu dis que j’aurais pas compris à l’époque, pas plus que je ne peux comprendre aujourd’hui…Arrête de décider à ma place de ce que je peux comprendre ou non Magni. » Je plonge en même temps que ses yeux virent au vert sombre. Je ne sais pas ce qui me touche le plus, cette couleur teintée d’un sentiment profond que j’ai découvert ces derniers mois et que je préfère voir brillant et doux ou le ton si triste de sa voix qui tire un constat cruel. « Et retiens, une fois pour toutes, que je peux tout accepter venant de toi. Tout. Tu m’annoncerais être un braconnier que je continuerais de te suivre. Je t’engueulerais, mais je te lâcherais pas. Tout comme j’aurais compris si un jour  tu m’avais dit que y’a un autre truc dont tu dois me parler, mais que tu le sens pas pour le moment. Mais de découvrir à chaque fois de nouveaux secrets, comme si j’étais pas digne de confiance, comme si tu craignais mes réactions alors que je suis supposé être ton meilleur ami…C’est blessant. Tout comme c’est blessant, que tu puisses considérer que j’peux pas comprendre et que tu crois que mon opinion de toi est si facile à faire flancher. On s'est toujours dit ce qu’on pensait de l’autre, on s’est toujours tapé sur la tête quand l’autre faisait une connerie. Ça a jamais voulu dire que d’un coup, notre perception de l’autre changeait et que c’était sans retour. » Je sais qu'il a raison, au fond de moi quelque chose se réveille presque, me murmurant sur je n'ai jamais douté de lui et de sa capacité à comprendre et à accepter les choses. Pourtant les vagues tanguent encore, hésitent et finissent toujours par se retirer comme effrayée de tout noyer. Je lui fais confiance, je le sais profondément depuis chaque fibre de mon être. Mais la peur est incontrôlable quand il s'agit d'affronter son regard aux couleurs d'une âme qui m'est si chère. Les voir se ternir dans un gris terne quand il prend conscience d'une de mes actions, quand il vire au noir d'encre ou que le bleu devient celui des nuits sans espoir. Je supporte difficilement l'idée de lui faire du mal, de le rendre triste, de blesser son cœur. Comme aujourd'hui. Je serre un peu plus les mâchoires. Mais quand il se rapproche, comblant la dernière distance qui nous séparait, mon âme s'apaise. Le mouvement est brusque quand il m'attire contre lui. Sa main s'agrippe dans mon dos et mon bras l'imite dans le sien. L'étreinte rude est courte mais vaut mille autres choses. Sentir sa chaleur contre mon torse, les vibrations de son cœur contre le mien. Combien de fois avons-nous répété ces gestes et ce scénario ? Très souvent, et pourtant je ne me lasse pas de cette vague de chaleur qu'il provoque, de ce calme rassurant qui remet toutes les perspectives à leurs places et dissipe les brumes de ma paranoïa. Sa joue se recule, de pose contre la mienne dans une douceur qui me fait fermer les yeux pour mieux profiter de sa voix qui roule contre ma mâchoire, terminant d'en dénouer les nœuds contractés. « Ma crainte a toujours été qu’en modifiant notre relation, on perde ce qui fait son centre. Qu’on ne soit plus des meilleurs amis. T’as pas à porter ces trucs seul tous les jours. T’as jamais eu à le faire. Et si je peux pas alléger la charge sur tes épaules, si tu me laisses pas être ton meilleur ami, dans toutes les significations que ce mot avait pour nous à l’époque… Si tu me laisses même pas t’écouter dans ce que tu traverses de douloureux ou de plus difficile, si tu me laisses même pas la possibilité de t’engueuler quand tu prends des décisions douteuses, je sers à quoi Magni ? » Malgré la tristesse de son murmure, un infime sourire tendre traverse l'orage humide de mes pensées. L'amour immense que ses phrases déversent sur moi fait resserrer l'étreinte de mon bras contre son dos. C'est con, je suis qu'un con. Il mérite tellement plus que de trembler devant mes propres failles irrationnelles. Il mérite ces claques derrière le crâne quand il fait une connerie, il mérite quelqu'un qui n'a pas peur de se confier à lui pour ne pas ombrager des jours déjà difficilement lumineux. Il mérite ce foutu meilleur ami que j'étais avant, que je voudrais être encore, mais qui ne parvient plus à l'être sur tous ces points-là. Je sais pourquoi, j'en ai pris conscience il y a plusieurs mois déjà. Je sais d'où me vient cette angoisse insidieuse qui s'est installée sans même que je m'en rende compte au fil des années. Et le savoir ne me permet de n'imaginer qu'une seule solution. C'est celle-ci que j'emprunte, posant un premier pied résolu vers l'escalade d'une flanc de falaise sans la moindre corde pour prévenir le risque de chute. Son front à présent posé contre le mien, j'inspire profondément, oubliant quel jour on est, oubliant que ce n'est pas le bon moment, me forçant à plonger à la recherche des souvenirs soigneusement enfermés dans de glaces éternelles. Il n'y a bien que son soleil capable de faire fondre les kilomètres de banquise sous lesquelles j'ai enfermé ce monstre-là. « J’veux pas être présent uniquement dans les moments joyeux. J’veux être présent dans les moments où tu contractes trop souvent ta mâchoire parce que tu penses à un truc qui te dérange, j’veux être présent quand tu te foires, j’veux être présent quand tu sais pas quel chemin prendre, j’veux être présent pour te traiter de con quand c’est nécessaire et te prendre dans mes bras quand t’as pas envie de parler. Alors s’il-te-plaît, Magni, me met plus de côté sous prétexte que je peux pas comprendre ou parce que t’as peur de ma réaction. Ça, je peux plus le supporter. » Ma deuxième main quitte le bar pour venir glisser dans son cou et remonter contre sa joue, ramenant d'un mouvement à la fois brusque et doux son visage contre le mien pour embrasser ses lèvres impulsivement. « Tu me sers à prendre conscience quand je fais trop de la merde. Et à maintenir une opinion de moi-même un poil au-dessus du niveau de l'eau. C'est moi qui ait changé, involontairement, je le sais, j'en ai conscience. J'ai confiance en toi, vraiment, je ne mens pas quand je te le répète encore et encore. Mais c'est plus fort que ma raison, je me fais des promesses de tout te dire, mais vient toujours le moment où je recommence à penser aux risques que je me trompe encore une fois, et je panique. » Le murmure coule contre ses lèvres à peine séparées des miennes. L'âme prend une profonde inspiration avant de poursuivre d'une voix profonde : « Je suis pas un braconnier non, mais j'ai été faible et foutrement égoïste une fois, ça va faire dix-huit ans en novembre. Cette fois-là a brouillé tous mes repères. Je suis responsable de sa mort. C'était de ma faute Markus. Viens. » Ma voix se durcit d'elle-même, se hache comme une arme affûtée qui coupe sans remords dans le corps déjà à l'agonie. D'un mouvement doux mais ferme je recule, attrapant sa main qui serrait mon dos pour y glisser mes doigts avec force.

Sans m’expliquer d’avantage, le coeur trop battant de la la première prise sur laquelle je viens de me hisser, je le tire derrière moi à travers le salon, ouvrant une des baies vitrées de la main libre pour gagner la terrasse, contourner la maison par la droite, descendre les marches qui mènent dans la partie arrière là où s’étend la forêt, délaissant le lac dans notre dos. Je continue de m’avancer en silence, tenant fermement sa main, je dépasse mon atelier de bois où je viens passer mes nerfs de temps en temps façon moldue à coup de hache sur des bûches sèches, marchant dans le sous-bois dépourvu de chemin accessible avant d’atteindre enfin un arbre en particulier. Je m’arrête, un sourire brillant en coin avant de relever la tête vers la cabane accrochée aux branches à plusieurs mètres de hauteur. « Je voulais te garder la surprise pour plus tard, j’ai pas fini de construire l’échelle va falloir monter à l’ancienne. » Une nouvelle fois, sans lui laisser le temps de réagir, je lâche sa main et entreprends de grimper moi-même me hissant à la force de mes bras. Je pourrais, certes, invoaquer une corde, une échelle, et même fabriquer en quelques coups de baguette un escalier en colimaçon. Mais ce serait trop simple. Pas assez nous. Et j’ai besoin de ce nous imprudent et intrépide qui se jette dans la première idée sans vérifier si elle est réalisable jusqu’au bout. J’ai besoin d’être ce Magni, le meilleur pote de Markus, qui le regarde avec espièglerie avant de me lancer dans ma propre connerie avec une lueur de défi qui murmure en silence : ”le dernier arrivé est un botruc mouillé”.

Arrivé en haut, non s’en avoir en toute légalité tenté d’écraser une main ou mettre pris un coup d’épaule à vocation amicale de me faire perdre l’équilibre, je m’installe rapidement, assis les pieds dans le vide, un éclat de rire au bord des yeux avant de tapoter la place à côté de moi. « Viens te poser là et admirer le paysage, j’ai fait exprès de l’orienter vers la forêt et la montagne plutôt que le lac. L’ambiance cabane au fond des bois me parait plus adaptée pour ce qu’il faut que je te raconte. T’as raison sur trop de choses, il est temps que j’arrête de me cacher derrière mes mensonges. Tu mérites bien mieux que ça. On finira ton installation plus tard, si t’as toujours envie de t’installer après ça. » Mjöll souffle, agacé, dans mon dos après avoir repris forme dans un son lourd qui fait craquer les planches sous son poids. « Je suis désolé d’avoir pensé à ta place sans te laisser l'opportunité de te faire ta propre idée dernièrement. Enfin, dernièrement. Ces dix-huit dernières années aussi. Mais cette dernière année plus que les autres. Ca a été une année difficile, je voulais pas te rajouter le poids de mes propres problèmes avec tout ce que tu as traversé. C’était une erreur, je voulais pas te faire sentir inutile, ou donner l’impression que tu comptais moins comme meilleur ami. » Mon regard cherche le sien, malgré l’envie, le besoin de lui dire, les mots, les vrais, restent bloqués dans ma gorge. Ma mâchoire se serre, série de trois, avant de se détourner vers l’extérieur. « Tu crois que ça lui ira comme surprise, à Aren ? Au lieu de sa pièce entière de mousse-là ? » Je laisse un court silence tendu filer à nouvea dans un frisson d’âme incapable de retrouver l’élan que j’avais eu en bas, dans le salon. Pourtant l’air ici est plus libre, le temps me semble moins oppressant, et les conséquences plus éthérées que dans les murs de cette maison que je rêve de partager avec Markus. « Pose-moi une question Markus, sur elle. J’y arriverai pas tout seul de but en blanc. » La voix se casse sur le elle, soudain, rauque, amère, pleine d’un orage qui ne dort jamais tout à fait. J'espère qu'il comprend à qui je fais référence, j'ai besoin qu'il pose des questions, qu'il secoue le reste de givre qui contraint mon âme et retient les souvenirs dans un dernier sursaut d'angoisse.




Although I felt like giving up It's not the road I chose
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