C'était avec un sourire en berne que Freyda arpentait les rues et ruelles de Breidablik Gade, sa fylgia, Goldsworthy, un perroquet des montagnes, perché sur son épaule. Les deux conversaient à voix basse, sans prêter attention aux passant.e.s qui croisaient leur route. Il y avait quelque chose de relaxant à déambuler au milieu d'une foule sorcière, sans faux-semblant. Pas au point d'envoyer aux oubliettes la vague anxiété qui lui mordillait les entrailles, mais juste assez pour la rendre plus supportable.
Alors qu'elle avançait de sa démarche chaloupée, bercée par sa propre musique intérieure, Freyda avait l'impression que l'odeur de l'hôpital, au nom imprononçable pour qui n'était pas un.e autochtone, s'accrochait à son épiderme, entrainée dans son sillage. Le Sindri Sjukhus n'avait certes rien de commun avec les différents centres de soin moldus qu'elle avait visités, que ce soit en terme d'ambiance visuelle ou olfactive, mais il n'empêchait qu'elle conservait la sensation d'une marque invisible apposée sur elle. Elle devait y revenir plus tard dans la journée, le temps qu'un.e assistant.e médicomage affûte ses analyses. Voir deux enfants fusionnés à ce qui semblait être une bicyclette trafiquée, tandis qu'un.e individu.e vomissait copieusement des sabliers miniatures, lui avait remis les pieds sur terre, bien consciente qu'une éventuelle présomption de grossesse était tout en bas de la liste des priorités du personnel soignant. Mais quand c'était tout de même une part importante de son avenir qui tenait en équilibre dans l'attente du résultat, disons que sa patience avait tendance à  jouer les déserteuses.

Pour parer tant bien que mal à l'incertitude, Freyda s'était offert un petit encas, joyeusement chocolaté, glané auprès d'un artisan pâtissier qui avait bien voulu délayer son départ de quelques minutes.
Elle était en train d'en déguster les dernières miettes, lorsqu'un svouuuuch à son oreille déclencha le réflexe que tout.e jeune sorcier.ère acquérait dès son plus jeune âge : lever les yeux au ciel, guetter et tendre une main ouverte à la missive que le hibou, la chouette ou tout autre volatile postal, ne manquerait pas d'y déposer.
Au poignet de Freyda, les bracelets en argent tintèrent alors qu'elle esquissait la fin de cet enchaînement de gestes... pour échouer monumentalement à saisir au vol le courrier, qui s'échoua, dans une valse lente et gracieuse, à quelque distance d'elle. Sans réfléchir plus en avant, la jeune femme (oui, nous avons déjà vu précédemment que 40 is the new 25) s'accroupit lestement afin de s'en saisir... pour constater, lorsque sa tête s'entrechoqua avec celle d'un.e inconnu.e, qu'elle n'était pas la seule à avoir eu cette idée-là.

Il se dispute à voix basse avec Rainbow Dash, le paresseux fermement agrippé à l'épaule de son sorcier, les griffes plantées dans le rembourrage que Venceslas a spécialement fait installer sur pas mal de ses vêtements, justement pour pallier à ce genre de moment. Un sac de courses se balançant largement au bout de l'autre bras, une roulée éteinte et oubliée sur l'oreille de l'herboriste-chercheur-vendeur-autres, le duo venait tout juste de terminer de flâner à travers le marché très vivant de la Place. «Je te dis que c'est avec ces ingrédients là que ça se fait !» Agacé, Venceslas secoue la tête vivement,  « N'importe quoi, je sais bien qu'il faut six oeufs, je suis pas idiot.» Il s'est mit en tête de faire de A à Z le prochain repas de la collocation, par une subite envie de faire plaisir à ses deux adelphes. Sur le papier, c'est une bonne idée. En pratique, ça n'est pas mauvais non plus, Vence n'étant pas un mauvais cuisinier, loin de là. En réalité, ça peut s'avérer un exercice assez dangereux, notamment pour l'estomac de ceux à qui le repas est destiné. Et pour l'intégrité de la cuisine. Une sorte de quitte ou double, quoi.
RD continue de grommeler sa désapprobation mais Vence ne l'écoute plus, son attention portée vers le haut alors qu'un hibou quitte le ballet qu'il formait avec ses autres congénères. Ses sourcils se froncent légèrement alors qu'il lui semble venir dans sa direction générale. Il a l'impression de reconnaître le rapace, mais il est loin d'en être sûr. Est-ce que ça pourrait être un courrier venant d'un de ses camarades Sans-Noms ? Le hibou lâche sa missive et V se débat avec son sac de courses mais le temps de le changer de main, c'est déjà trop tard et la lettre s'échoue au sol en douceur, proche de lui. Sans prêter attention à son entourage immédiat, sans même se poser plus de questions que cela, il se penche - faisant râler le paresseux toujours bien accroché - et tend les doigts. Sauf qu'avant même de pouvoir l'atteindre, sa tête heurte une autre tête dans un Aoutch ! sonore, le poussant à se relever et à heurter par la même une autre personne visiblement dans le même espace que lui.  « Aww, désolé !» Il lâche par réflexe, ses yeux se posant d'abord sur celle avec qui il a voulu faire un remake raté d'une partie de pétanque, puis ensuite sur l'autre personne qu'il a heurté en se redressant, une femme dans la trentaine, blonde, qui ne lui dit rien de particulier. Sa main libre frotte son crâne distraitement alors qu'il les considère, ses sourcils se fronçant en constatant que le courrier se trouve pile poil entre elleux trois.  «Ah. Mmmh… Est-ce que l'une de vous a reconnu le hibou ?» Il interroge alors. Il lui semble que oui de son côté, mais n'en n'est pas sûr à 100% et est suffisamment lucide à cet instant pour savoir que sa mémoire n'est pas la plus fiable. Et aussi lucide pour savoir que si c'est bien le cas, ce courrier ne doit pas se trouver entre les mains de personnes inconnues.