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Scars have the strange power to remind us that our past is real | Fred (fb)
2 participants
Magni Hammarskjöld
hekseri
muggler
Gif :
Âge : 40 ans (08/08/83)
Statut de sang : Pur
Statut civil : Trop attaché, pour prétendre le contraire. Le cœur baigné dans deux eaux profondes.
Occupation : Auror
Fylgia : Mjöll (Mjöllnir), lézard bleu de Gorgona fouineur et têtu. Il prend la forme d'un ours polaire quand il est auprès de son enfant. Nouvellement il prend la forme d'un chat-tigre nébuleux de façon plus quotidienne
Alignement : Enfant de Völuspá
Allégeance : Clan Styrke et allégeance profonde à Thor
Particularité : Legilimens | se déplace majoritairement à moto, affublé de lunettes de soleil
Pseudo : Artchie
Serment le : 30/11/2022
Parchemins : 1169
Noises : 3841
Gallions : 0
TW : Deuil, deuil périnatal, blessures, insultes
Double : Peter Gadiot
Crédits : (c) true north
Multi-comptes : Alfhild Mørk - Sol Yoonir
Sujets : Magmar - Ozy - Jin - Seb - Jasper - Vigga - The Big M - Helga - Oubliette - Fred - Kai
- titre
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@Fredrikke Mørk | 04 mars 2023 - Petit matin
Son signe négatif de la tête me fait souffler du nez. Il me fait songer malgré moi à Aren énervé qui refuse d'écouter un conseil qu'il sait pourtant être pertinent. Le parallèle explose dans mon crâne avec une douloureuse sensation d'os qui craque. La fracture entre mes sentiments envers le Mørk et la scène qui se déroule devant mes yeux se concrétise de plus en plus dans un décor irréel. Mais songer à mon enfant dans cette chambre d'hôpital, les associés aux traits de Fredrikke Mørk me fait l'effet d'une décharge électrique. Mon estomac se serre dans une nouvelle nausée désagréable. C'est tellement plus simple de le haïr, de lui déverser des regards chargés de rage et de placer des piques dans chacune de mes phrases qui lui sont destinées. La compassion est amères, teintée d'une culpabilité envers tous ceux que j'ai récupéré, en larmes et en sang, dans un coin de vie, après le passage du tireur d'élite. L'impression acérée de planter moi-même un couteau dans le dos d'Ozymandias me fait légèrement serrer un peu plus ma prise contre le dossier de ma chaise. Les jointures blanchissent, les muscles se tendent de plus en plus, le dos grésille sous la magie qui insiste pour mener une bataille de feu. Et moi je ne parviens plus à voir l'homme assis en face de moi qu'autrement qu'un gamin qui se sent foutrement seul et dépassé par une réalité qui le dépasse. « Je suis fatigué Magni. » A-t-il déjà prononcé mon prénom ? Je n'en suis même pas sûr. Mais cette nuit, ce matin, dans cette heure qui oscille entre hier et demain, il sonne comme un appel désespéré qui fait tressaillir mes nerfs. Sa réaction confirme ce que je viens de percevoir, ce n'était pas volontaire. Un oubli de l'âme jusque dans la familiarité la plus intime de deux sorciers qui se retrouvent à flotter l'un près de l'autre par un hasard de marée dans courant. Un aveu, un souffle qui me touche, malgré moi. Malgré mon envie de garde les idées claires bien qu'elles soient incapables de l'être en raison de la chute trop récente. J'ai vaguement conscience d'être en train de me faire avoir par sa voix, mince filet d'un cœur essoufflé. De me faire dar papaya comme on dirait à Bogota. « Incroyablement fatigué. » Il serre les lèvres et j'essaie de fermer mes pensées, de refuser l'afflux de cette fatigue qui vibre contre ma conscience. Je ne veux pas sentir, encore moins ressentir, cette fatigue qui s'étire comme un brouillard terne tout autour de nous. Je m'épuise à tenter de rester hermétique. Je n'écoute pas mes propres signaux d'alarmes. Je n'écoute pas l'inquiétude de Mjöll qui continue de surveiller l'action du baume qui semble faire plus de dégâts qu'autre chose du point de vue de mon système nerveux. Je reste concentré sur Fredrikke, son koala aux gestes trop tendres, plein d'une compassion et d'un amour pour son sorcier touchantes. Je reste concentré sur les signes physiques pour oublier la détresse mentale si intense que j'ai l'impression de pouvoir la toucher du bout de doigts. Ceux-ci restent contractés contre le dossier de bois dur. Mon front n'est plus qu'une série de vagues et de creux sombres. « T’as visé juste, avec ton sortilège. Je me maîtrise généralement bien, même si c’est difficile. Mais quand ça concerne le feu et les brûlures…L’instinct l’emporte. J’ai trouvé des potions pour calmer ce genre de réflexes, mais… Ça calme pas seulement l’instinct. » Instinctivement je note l'information sur les brûlures. pour la traiter plus tard. Quand mon cerveau sera en mesure de rouvrir mon palais mental dans toute sa complexité et son réseau logique de pièces et de conséquences. Mes sourcils déjà trop froncés ne peuvent le faire d'avantage, pourtant sa mention de potions me dérange. Est-ce à cause de celles-ci que ses réflexes étaient amoindris ce soir lors de son - énième - attaque ? Encore une information qu'il faudrait que je puisse traiter avec l'entièreté de mon cerveau et non celui plein d'écho et de lueurs dansantes et de fils coupés qui tangue contre ma boîte crânienne. C'est un fait, je déteste les commotions. Quant à la potion à laquelle il fait référence, ma propre expérience d'auror au sein d'organisations qui trafiquent ces incroyables breuvages, me suffit pour faire germer une liste de plusieurs d'entre elles qui pourraient correspondre. Et aucune ne me laisse un goût de satisfaction. Encore moins d'adhésion. Mais il n'est pas question de ma propre expérience des potions, ni de mon aversions pour celles-ci quand il s'agit de les boire moi-même, aussi je retiens les lueurs de dégoût de briller trop clairement dans mes iris, préférant me concentrer sur la première partie de sa phrase. Ce tu as visé juste qui me laisse un goût tout aussi peu ragoûtant dans le fond de l'âme. Ca me fait encore plus de mal de savoir que ce maléfice en particulier était justement trouvé. Il ne devrait jamais l'être, parce qu'il n'a rien de juste, ni de reluisant. Il est mauvais, teinté d'une magie rouge peu recommandable. Une magie faite pour la torture, la haine, les pleurs, les supplications, le pouvoir, et la menace d'une mort lente et douloureuse. Il n'y a rien de juste. Absolument rien de juste.
Je vois sa mâchoire trembler, son sanglot être ravalé dans une nouvelle phrase qui roule hors de sa gorge remplie d'un océan qui menace à tout moment de dépasser les bords de sa chaloupe. « Ça me fait chier aussi, qu'il soit parvenu à se soustraire aux conséquences de ses crimes. J'ai cherché pas mal d'options pour m'assurer qu'il paie, si jamais la mémoire revient...Enfin. Que je paie. » Je tique, évidemment. Des options pour le faire payer si sa mémoire revient ? Est-ce que sa promesse de me faire parvenir son soit-disant carnet de crimes fait partie de ces options ? Ou bien a-t-il mis en place d'autres plans plus directs ? Les questions parviennent à se frayer un chemin au milieu des brumes, pourtant je retiens les mots de sortir trop rapidement de mes lèvres. Sa voix douce n'est pas compatible avec un interrogatoires sur le futur qu'il imagine en cas de recouvrance de sa mémoire entière. Au cas où ce Mørk plein de haine et de pulsions malsaines faisait son grand retour. Une autre équation qui doit peser sur la conscience de cet homme amnésique. Ce quand insoluble. Parce que de mon point de vue il ne fait presque aucun doute qu'elle finira par se réveiller, cette mémoire éteinte. Les souvenirs dont il a parlé toute à l'heure, celui qui a refait surface quand je lui ai rappelé le genre d'agression qu'il avait pu faire avant. Ces souvenirs, s'ils sont capables de revenir remonter les fils abimés des synapses, alors rien n'empêche tous les autres de le faire également. Un jour. Et c'est bien cette temporalité incertaine qui doit être un poids de plus à traîner au quotidien pour lui. S'endort-il chaque nuit en redoutant les conséquences de son réveil ? Plus j'en apprends sur son état, sur les conséquences de cette amnésie, plus les freins à la compassion sont rongés par la visualisation de ce qu'à dû être pour lui cette dernière année. Plus la culpabilité gonfle, acide, sous le regard humide de ses victimes. Les questions surgissent avec lenteur les uns après les autres : est-ce que je devrais avertir Ozymandias de cette nouvelle donnée ? Est-ce mon rôle de le faire ? Ou bien la réalité ne risque-t-elle pas de le mettre dans une situation impossible à travailler sans confrontation ? Est-ce que Fredrikke va chercher à se confronter à lui ? Cette dernière question est terriblement angoissante et je la chasse immédiatement de ma tête au même moment où il reprend la parole : « Je n’ai jamais empêché personne de se venger. De me parler. Jamais. Je me protégeais au minimum, mais souvent quand ils me racontaient leur histoire…j’abaissais mes défenses. Et je le referai encore. Aussi souvent qu’il le faut, même si…même si… » Sa voix se noie, le sanglot déborde, un premier, qui roule dans la gorge, éteint les lumières qui gardaient encore sa frêle embarcation la tête vers la surface et mon cœur se serre. Ce foutu cœur océan qui s'émeut et s'éprend trop facilement. Ces foutus émotions trop rapides à rouler vers les autres. Même quand ce autre porte en lui un connard fini. Mais un connard fini endormi, perdu dans des limbes où il ne devrait jamais sortir. L'image me frappe comme une évidence. N'est-il pas un Mørk deux facette d'une même âme, l'une rongée par la mort, l'autre chaude d'une vie éthérée. Ironique réalité. Foutue, ironique, réalité. Je ne suis pas certain que sa technique soit la meilleure qu'il soit pour donner l'occasion à ses anciennes victimes de s'exprimer et de leur accorder un droit de vengeance. Mais je ne suis pas à sa place, et Thor sait que si je devais y être, je n'ai aucune idée de comment je tenterai, vainement, de me racheter et de venir en aide aux autres. L'idée d'aller trouver Alva ne m'a-t-elle pas déjà effleurée ? Dans mes nuits de tourmente les plus sombres ? Aller la retrouver, lui avouer tout, une deuxième fois. Tenter par tous les moyens possibles, de faire renaître ses souvenirs de l'oubli où je les avaient jetés ? Je ne suis pas assez stupide pour me croire semblable au Mørk des agressions gratuites, mais je ne peux pas nier que mes propres actions passées me laissent entrevoir un semblant de compréhension de sa façon de réagir aujourd'hui. Un foutu merdier.
Mes mains se décrochent du dossier dans une légère douleur ankylosée, avant de frotter le visage épuisé de sa soirée et de cette nuit qui n'en finit plus. J'écoute les conseils du koala qui tente à son tour de faire entendre raison à son sorcier, sans plus de succès que moi. Dommage, je reste convaincu qu'une boisson chaud et sucrée lui ferait du bien. Le jeune tireur d'élite resserre sa prise autour du corps de son koala dont la tendresse ne cesse de se manifester dans des attentions et caresses continue. Même son regard inquiet face à la blessure de la tête qui s'étend ne suffit pas à faire entendre raison à Fredrikke Mørk qui se contente de reprendre la parole d'une voix de plus en plus humide de sanglots : « Désolé. J’ai tenu un an, je veux tenir encore, pour eux. J’ai juste besoin de… » Des excuses qui n'ont pas lieu d'être. Des larmes qui roulent sur des joues lovées dans les poils doux d'une fylgia qui se serre contre son cœur. Le mien se tord, se courbe, se ratatine sous l'ampleur du désespoir qui se fracasse contre mes pensées. Les épaules secouées de sanglots me font détourner le regard, non de gêne, mais par pudeur pour l'homme qui a laissé les vagues le submerger après toutes ces minutes de lutte. Un soupir lourd soulève ma poitrine quand je me lève finalement de ma chaise. Mjöll lui aussi s'est arrêté de courir autour de la blessure et de mon réseaux de muscles endoloris à force d'être contractés pour lutter contre la douleur. L'incendie n'a pas cessé, et quand je bouge, il tire sur les fibres qui me paraissent carbonisées tant elles sont sèches et raides. Il n'y a aucune honte à céder, encore moins dans une chambre d'hôpital après des mois à subir les coups, les vengeances, et les histoires des autres. C'est même alarmant qu'il ne ce soit pas autorisé un temps de pause avant aujourd'hui pour le faire. J'espère qu'il exagère quand il dit qu'il a tenu un an comme ça. J'espère, encore plus sincèrement, qu'il n'est pas entièrement seul et qu'il a des gens pour discuter de cette amnésie et des conséquences psychologiques. Un professionnel de santé, au moins. Une oreille plus attentive et qualifiée que je ne le suis. Parce que ce n'est pas sensé être mon rôle. Je ne peux pas être l'enquêteur et celui qui réconforte en même temps. Sauf que dans cette chambre-là, il n'y a que moi. Lui et moi. Et que le voir pleurer aussi profondément, aussi défait de toute retenue, supprime toute envie de considérer cette nuit comme un temps non coupé de la réalité de nos vies. En même temps que je retourne vers mon propre lit je prends conscience que ce n'est pas à moi de faire son travail de rédemption. Que cette amnésie lui appartient, sa façon de l'annoncer au monde aussi, aux autres, à ses victimes. Peut-être que je me trompe, tant pis. Garder des secrets et faire les mauvais choix, c'est devenu une seconde nature au fil des années, non ? Comme une marque de fabrique. Un éclat narquois, presque mauvais, perce mes iris quand mes doigts se referme sur la couverture encore sagement installée sur mon lit inutilisé. Tant pis.
Mes gestes sont ceux du grand-frère qui a trop souvent bordé son cadet dans la chambre partagé de la maison familial des Hammarskjöld. Ils sont ceux aussi du parent, qui devine les besoins sans même avoir besoin de demander à son enfant. Des gestes simples, doux et présents à la fois. La couverture trouve les épaules qui tressautent encore, passe par-dessus le dos du koala enserré entre les bras de son sorcier. Ma main s'arrête sur l'épaule de ce dernier, un court instant, une présence simple, sans pression. Elle existe sans en faire trop. Et quand elle se retire après quelques instants, elle ne fait aucune caresse cette main. Elle se fait ferme, solide, comme celle d'un ami qui soutien, comprend, et se retire sans honte. Je me recule à nouveau, laissant son espace libre, avant de tirer ma baguette de son fourreau accroché à ma ceinture. La magie réchauffe le chocolat chaud qui avait cessé de fumer dans son gobelet en carton, puis je range ma baguette dans un léger hochement de tête avant de me retourner vers le jeune tireur d'élite. Je savais bien, depuis le début, que je n'étais pas la meilleure personne du royaume pour le réconforter ce soir. Ca me fou en boule de le constater, et encore plus de sentir que ça me fait chier de pas pouvoir faire grand chose plus. Je retourne chercher ma chaise d'un pas que la fatigue et la douleur rendent lourd, et l'installe un peu plus près de son lit, légèrement sur le côté cette fois, pour me permettre de poser mon regard sur le mur derrière lui, plutôt que directement sur son corps épuisé par toutes ces épreuves. A nouveau assis, les mains courent se placer derrière ma tête et tente d'étirer des muscles de plus en plus endoloris par la position inconfortable et par les souvenirs de tension de ma mission accrochée à un balai en pleine tempête océanique. « Tu as le droit de craquer. Je connais personne capable de prendre des coups, aussi justifiés soient-ils, depuis un an sans que ça finisse par lui détruire le mental. » Mes mains retrouvent le dossier de la chaise, la voix est douce, ronde, factuelle. « Je comprends que tu veuilles leur laisser l'occasion de prendre leurs revanches. Je ne cautionne pas, mais tu essaies de faire quelque chose, et ta culpabilité est légitime. Vivre avec sa conscience c'est rarement une mince affaire, vivre avec celle d'un autre entre guillemets, ça doit être encore plus difficile. Pour ça tu as le droit d'être fatigué aujourd'hui. Demain aussi. Ça ne rendra pas tes efforts pour leur faire justice inutiles. » Le rythme de parole est lent, la voix roule, apaisante malgré moi. Une habitude d'une voix destinée à rassurer, calmer, bercer. Je ne m'étale pas sur mon propre avis sur la question, je réalise en le disant que je désapprouve même entièrement cette idée de violence proposée aux victimes pour soulager leurs propres traumatismes. Je fixe le mur en face pour ne pas imposer un regard qui pourrait être vécu de façon intrusive par le sorcier, avant de répondre dans un autre soupir. « J'ai pas vécu de perte de mémoire aussi importante que toi, mais mes rares experiences de la question me font miroiter que tu as dû en baver ces derniers mois. Si ton espace de décompression c'est cette chambre, cette nuit, ok. Pas de soucis. Ton chocolat est chaud si tu veux, j'insiste, prends-le. Dors aussi, je vais aller me foutre dans un coin et te laisser te reposer. Te sens pas obligé d'engager la conversation si tu n'en n'a pas envie, ou la force. Mais si tu as besoin, ça me dérange pas d'écouter. Je dois appeler un infirmier pour me filer du parchemin, mais je le ferai que quand tu seras calmé, prends ton temps. » D'un corps toujours aussi lourd, je me relève de ma chaise après un dernier regard d'une intensité qui ne prend source dans aucun sentiment précis. A peine retourné près de mon lit, ma chaise en main, je me réinstalle après avoir fouillé dans mes poches pour en sortir un petit sac de velours que mes doigts caressent distraitement avant de le replacer à sa place. C'est la seule chose que j'ai pensé à prendre dans ma veste restée chez Andres,.clairement pas la plus utile pour passer le temps, mais un point d'ancrage unique en son genre. Il contient le miroir à double-sens qui me permet de contacter Aren en cas de besoin et l'avoir sur moi, c'est toujours un peu l'avoir lui à porter de main.
Fredrikke Mørk
hekseri
muggler
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Âge : 31 ans, selon les registres officiels.
Statut de sang : Pur
Occupation : Tireur d’élite chiant dans la Brigade des Valkyries.
Fylgia : Taïpan du désert et Phascolarctos cinereus (un koala, quoi.)
Alignement : Enfant de Völuspá
Particularité : Atteint d’amnésie rétrograde, qui n’a pas touché sa mémoire procédurale. Il a oublié qu’il était un gros con, mais il sait encore se servir de sa baguette.
Pseudo : Cappuccino
Serment le : 11/07/2022
Parchemins : 590
Noises : 3831
Gallions : 1
TW : Violence physique et psychologique
Double : Rob Raco
Crédits : Chosen one
Multi-comptes : Dax, Markus et Angelo
Faible. Le métronome est régulier. Faible. Les pensées sont chaotiques. Faible. La rengaine, éternelle, prend toute la place. Faible. Je ne devrais pas être dans une telle position, imposer une telle situation à Hammarskjöld. Faible. Je ne devrais pas craquer. Faible. Je le sais, mais c’est plus fort que moi. Faible. Je n’ai pas la force de relever la tête. Faible. Pas la force d’essuyer, dans un geste trop éloquent, la brume sur mes joues. Faible. Foutrement faible.
Je ne contrôle plus rien. Ni mes épaules qui tressautent violemment, ni mes sanglots trop bruyants. Je pleure sur la tendresse que je ne connaîtrai pas, je pleure sur mes illusions optimistes qui ne me suffisent plus pour avancer, je pleure de rage de pleurer. Peut-être que les coups à la tête ont eu un impact, finalement. J’aimerais que ce soit le cas, pour pouvoir m’excuser ma lâcheté. Les images s’enchaînent brutalement sous mes paupières closes, comme une rétrospective de la dernière année. Foutue rétrospective. Foutue faiblesse. Foutue larme. Foutu Fredrikke. Il y a le visage d’Alfhild, que j’aimerais prendre dans mes bras. Je n’ai jamais osé. Il y a nos lettres, le poids que j’ai fait peser sur elle, dans mon tâtonnement aveugle pour chercher du soutien et de l’affection là où il n’y aurait dû avoir que de l’évitement. Et puis il y a aussi ce premier type, quelques semaines après le réveil. Le premier à s’en être pris à moi, le premier auprès de qui j’ai compris que j’allais avoir un choix à faire : me défendre ou non face à ceux qui se vengeaient de Fredrikke. J’ai opté pour la première option, tant qu’elle n’impliquait aucune blessure de l’autre côté. En théorie. Parce qu’en pratique, je me prenais à la gueule à chaque fois une nouvelle histoire, d’autres horreurs, qui me donnaient moins envie de lever ma baguette, même pour un protego. Après ce premier type, il y a donc une myriade de visages. Yeux dégoûtés, hargneux, vitreux. Yeux de mépris, de peine, de tristesse. Yeux rancuniers, fuyants, tétanisés. Yeux de rancœur, d’horreur et de peur. Comment oublier de tels yeux, sans fermer les miens ? Impossible. Je me rappelle tous ceux qui m’ont fixé. Fredrikke les auraient crevés ; moi j’ai retenu, un à un, chacun de ces regards. Je leur dois. Si je ne me souviens pas de ce que je leur ai fait, je veux au moins me souvenir de leurs souffrances et des conséquences. Fredrikke mérite qu’ils les hantent. Je le mérite. Sauf que je n’ai quasi aucun regard doux à opposer à tous ces fantômes en détresse. Rien pour me consoler, me rassurer, m’aider à avancer. Alfhild. Pour elle, je devrais plutôt reculer.
Je me retiens pour ne pas frotter mes paupières, comme un gamin. J’entends le silence qui se tait. Il ne révèle rien de ses secrets ; si j’ouvrais les yeux, comment seraient ceux d’Hammarskjöld ? Écoeurés ? Exaspérés ? Hargneux ? Je ne pourrais pas les affronter. Le regard que je me jette est déjà suffisamment brutal : j’ai besoin d’un instant d’accalmie. Dans la pièce, quelqu’un bouge. Dans mon cœur, quelque chose craque. Dans mon esprit, la fissure s’élargit. Je sursaute lorsque je sens un objet toucher mes épaules. Mes paupières se serrent plus fort ; mon corps se recroqueville davantage, malgré la douleur, comme si je pouvais ainsi me protéger. Le panda se laisse reposer de tout son poids contre moi, probablement pour me calmer. Je sens une main sur mon épaule, ferme. Je connais les gestes de soutien, mais ne les ai jamais expérimentés. J’attends qu’elle me broie, comme elles l’ont toujours fait : je ne vois pas pourquoi cette main serait une exception, surtout celle-là en particulier. Mais la douleur ne vient pas. Rien ne vient, en fait. J’identifie à retardement la couverture autour de moi, à travers la douceur du tissu et la chaleur rassurante du cocon ; les doigts s’éloignent après un court instant, sans m’avoir blessé.
Deux simples détails. Sans brutalité, de ceux auxquels ont probablement droit les enfants et les amis.
Deux détails qui effleurent mon âme avec la légèreté d’une rose, dont je redoute les épines.
J’inspire, parce que je me dis que ça ne peut pas être du véritable soutien, ou un truc qui s’y apparente. Pas d’Hammarskjöld, pas avec moi. Il s’agit peut-être d’une mise en garde ; une façon de me ramener à l’ordre, pas trop brutalement, parce que j’ai abusé de sa patience. J’ai appris à mes dépends, dans les premiers mois après l’amnésie, que les rêves fleurissent vite mais sont rapides à piétiner. Je n’ai pas assez de force cette nuit pour me permettre de laisser germer une graine d’espoir, vouée peut-être à étouffer dans un coup contre ma machoîre.
Mais ça aussi, ce n’est que de la théorie. En pratique, la graine est déjà là ; l’espoir a fait son nid dès que l’auror m’a remis le chocolat chaud. Et même si je sais que tout se terminera mal, je ne peux m’empêcher de me sentir réchauffé par ses deux gestes. J’entends qu’il rapproche sa chaise, sans quitter la fourrure du koala. Les larmes, lentement, s’apaisent, mais sans s’arrêter. Elles m’échappent et roulent en toute impunité sur ma peau blême, piquetés encore de quelques gouttes de sang. Elles se foutent de toutes mes tentatives pour reprendre le contrôle. « Tu as le droit de craquer. Je connais personne capable de prendre des coups, aussi justifiés soient-ils, depuis un an sans que ça finisse par lui détruire le mental. » J’accuse les mots entendus par un nouveau sanglot, que j’étouffe contre Ashes. Tu as le droit de craquer. Aucun reproche. Aucune violence, rien pour m’obliger à me redresser tout de suite. Je serre, serre, serre fort le koala contre moi, tout autant incapable de réagir correctement à la sollicitude qu’à la cruauté. L’une n’est jamais tourné vers moi, l’autre est trop dans moi. « Je comprends que tu veuilles leur laisser l'occasion de prendre leurs revanches. Je ne cautionne pas, mais tu essaies de faire quelque chose, et ta culpabilité est légitime. Vivre avec sa conscience c'est rarement une mince affaire, vivre avec celle d'un autre entre guillemets, ça doit être encore plus difficile. Pour ça tu as le droit d'être fatigué aujourd'hui. Demain aussi. Ça ne rendra pas tes efforts pour leur faire justice inutiles. » La voix est apaisante, les mots aussi. Trop. Je redoute le piège et la souffrance comme quelqu’un qui s’est trop souvent brûlé, et refuse de s’approcher de la douce flamme d’un foyer. Est-ce une stratégie ? Comment résister à ces phrases qui me font tellement de bien à entendre ? Comment ne pas craquer face à ces mots qui me consolent ? Je n’ai plus rien, pour résister. Ni carapace ni armure, ni armes ou désir de fuir. Je me laisse bercer par ces paroles rassurantes sans parvenir à écouter ma méfiance, avec une envie immense, ardente, qu’il les pense et qu’il ne s’agisse pas d’un piège. J'ai pas vécu de perte de mémoire aussi importante que toi, mais mes rares experiences de la question me font miroiter que tu as dû en baver ces derniers mois. Si ton espace de décompression c'est cette chambre, cette nuit, ok. Pas de soucis. Ton chocolat est chaud si tu veux, j'insiste, prends-le. Dors aussi, je vais aller me foutre dans un coin et te laisser te reposer. Te sens pas obligé d'engager la conversation si tu n'en n'a pas envie, ou la force. Mais si tu as besoin, ça me dérange pas d'écouter. Je dois appeler un infirmier pour me filer du parchemin, mais je le ferai que quand tu seras calmé, prends ton temps. » Mes épaules tremblent, mon corps est recroquevillé. Sous le bandage, le cercle de rubis continue de s’agrandir et de se déformer. Un sanglot, plus incontrôlable que les autres, fait jaillir un gémissement de mes lèvres. On ne m’a jamais prévenu que la gentillesse peut faire mal. J’ai idéalisé la bienveillance ; je l’imaginais douce comme la première neige qui fond sur la peau, chaude comme un feu qui brûle l’âme, apaisante comme un onguent qui apaise les douleurs. Elle a tout ses attributs, mais elle ne vient pas toujours seule : pour moi qui n’y suis pas habituée, elle est aussi affutée qu’une lame, qui glisse entre les écailles, pour exposer à nu le cœur gonflé d’espérances ; vois ce que tu n’auras plus jamais. Ça fait plus mal que les coups, plus mal que les mots, plus mal que les sorts et les regards hargneux. Plus mal que cent soirs de solitude à maudire le passé, plus mal que cent jours de lutte acharnée.
J’entends à peine l’auror qui se déplace de nouveau. C’est donc à ça que ça ressemble, être pris en considération ? C’est ce qu’on ressent, quand quelqu’un nous console ? La reconnaissance, la tendresse et le désir de prolonger le moment me submergent avec violence. Mes épaules, incontrôlables, tressaillent. Ma tête s’enfouie plus profondément contre le pelage du koala, que je serre toujours avec force contre moi. Je savais qu'il me manquait quelque chose. On m’avait parlé d’amour, d’amitié, de gentillesse, de tendresse, d’inquiétude. J’ai même lu sur le sujet et j’ai développé quelques relations, bien que minimes, avec certaines personnes. Sauf qu’elles sont rares et basée sur une identité plus ou moins réelle : pour ces rares individus, je suis Fredrikke Mörk. Il y a ma sœur, mais c’est aussi un cas à part : il n’a jamais été question entre nous, jusqu’à maintenant, de câlins ou de réconfort. Ce type de réconfort qu'on peut aller chercher dans les bras d'un ami, lors d'un mauvais moment. Un réconfort qui réchauffe l'âme, apaise l'esprit. Pendant quelques secondes, dans cet chambre d'hôpital avec un type que je dégoûte, je vaux quelque chose. Quasi rien. Mais quasi rien, ça me suffit. Un chocolat chaud, ça me comble. Une main sur l'épaule, pour autre chose que la serrer durement, ça remet en place un morceau de mon âme fractionné. Quelqu'un ose me toucher, sans me vouloir du mal. Quelqu’un se soucie assez de mon bien-être, même brièvement, pour poser une couverture sur moi. Jai fait ce geste un nombre incalculable de fois, avec mes aînés au bénévolat. Toujours avec douceur, en espérant leur faire du bien. L’auror peut-il avoir été guidé par les mêmes motivations, même s’il me hait ? Il ne me veut pas de mal, pas vrai ? Et si c’est le cas ? Et si c’est faux ? S’il a cerné mon besoin de tendresse, de contact, et en profite pour me faire souffrir, comme Fredrikke l’a fait si souvent ? Ce serait mérité. Tout est mérité, quand il est question de ce type. « Merci. » Ma voix est étouffée contre la fourrure d’Ashes. C’est peut-être une illusion, un mirage, un piège. Si c’est le cas, je veux bien foncer à pieds joints dedans ; même de fausses attentions valent mieux que cet univers froid dans lequel j’évolue. Je me fous d’être berné. Tout mon être hurle trop vers cette bienveillance que je ne touche jamais du doigt, vers tous ces gestes qui me font incroyablement du bien.
Je ne me détache pas du koala. Je relève à peine la tête ; ma bouche s’éloigne simplement du corps chaud de ma fylgia, pour formuler des phrases plus claires. « Personne ne m’a jamais… » Déposé une couverture sur les épaules. Amené un chocolat chaud. Donné l’impression que je n’étais pas qu’une pourriture. Mes bras desserrent leur étreinte ; Ashes s’en échappe doucement et si j’ouvrais les yeux, je la verrais jeter un coup d’œil plein de reconnaissance à l’auror. « On m’a demandé d’agir comme Fredrikke. On m’a dit quel genre d’homme il était…Mais même ces descriptions étaient à des lieux de la réalité. » Je ne sais pas ce que je suis en train d’expliquer ; je ne suis pas même certain qu’il y ait un lien avec la phrase précédente. Mes pensées, trop proches de mes émotions, sont confuses et difficiles à trier. « J’veux pas être ce type. Je l’ai jamais voulu. Je rêve de faire du bien autour de moi, de faire sourire les gens. Je m’inquiète pour tout le monde, j’veux juste aider, ne provoquer aucune émotion négative… Mais j’suis lui. » Il n’y a pas deux Fredrikke. Il n’y en a qu’un, que je le veuille ou non. Je ne peux pas punir le premier sans me punir moi-même. Je glisse mes mains contre mes paupières pour les frotter ; lorsque je les rouvre, mes yeux sont striés de lignes rouges. Je ne les pose pas immédiatement sur l’homme. Je fixe plutôt le mur de l’autre côté, tandis que ma fylgia faufile sa tête dans mon cou. Elle donne des coups de nez à la base de ma mâchoire, ses larges oreilles essuyant mes joues mouillées. Le geste, encore trop doux, me relance presque dans une nouvelle effusion de larmes ; je serre les dents et je déglutis, avec cette impression vague d’avoir perdu toute crédibilité en tant qu’adulte. « On sait tous les deux ce que je devrais faire. » Ma voix tremble. Je ne parviens pas à faire mieux. Pas aujourd’hui, pas maintenant, pas sur ce sujet. J’ai demandé à ce qu’il ne soit pas abordé ; mais il est tellement en suspens, tellement incrusté dans ma tête depuis quelques semaines, que je ne parviens pas à faire comme s’il n’existait pas. J’inspire. Expire. Ashes enfoui de nouveau sa tête contre mon cou, comme pour me donner du courage, avant de se déplacer. La couverture glisse de son corps duveteux alors qu’elle s’éloigne pour s’arrêter à la hauteur de mon bassin, se nichant confortablement à côté. Je me redresse légèrement, donnant plus d’ampleur à un corps entassé sur lui-même. Ma tête se tourne vers l’homme qui est aussi à l’hôpital, qui doit souffrir, et ne devrait pas se taper une telle conversation avec moi. Surtout avec moi. « Aucun ne m’a dénoncé. Si ça arrivait…Je n’invaliderais pas leur parole. Mais me livrer moi-même… » Le ton est doux, hésitant. C’est celui d’un type qui sait ce qu’il devrait faire, mais n’en a pas trop l’énergie. J’ai trop le mal de l’âme, après tant de mois dans la peau de Fredrikke, pour pouvoir imaginer, sans trembler, un quotidien en prison. La simple idée, désormais, me file la nausée. Je reprends : « Je suis lâche. Fredrikke l’a toujours été, je le suis aussi. Aller en prison c’est perdre tout espoir de … » Je cherche mes mots, sans les trouver. Ils n’existent pas. Aucune phrase ne peut faire suffisamment de sens, dans un tel contexte. Mes illusions, mes déceptions, ne sont pas celles d’un homme normal. Ce sont celles d’un amnésique, qui est en train d’échouer. Je retiens l’océan qui m’effleure, cillant à plusieurs reprises, avant de poursuivre : « Je lis beaucoup de livres. Dedans ça parle d’amitié. De moments joyeux, où les gens sont complices, heureux. Pas de douleur, pas de coups, pas de dégoût. » Malgré moi, ma voix s’anime. Elle trahi la joie que ces scénarios provoquent en moi ; elle s’associe aux étoiles filantes qui traversent brièvement mes yeux. « J’peux tenir à chaque jour parce que je me dis que peut-être, à un moment, je connaîtrai ça. Peut-être que même rêver à ça, c’est manquer de respect à ses victimes, mais si je m’autorisais pas à rêver… » Je ne complète pas ma phrase. Ma gorge, de nouveau, se noue. Il ne me reste que les rêves. Sans eux, il n’y a plus de soleil, plus de raisons d’avancer. L’espoir me pousse vers l’avant ; je ne veux pas reculer. Je jette un regard vers le chocolat chaud, hésitant, avant de me pencher dans sa direction ; ma nouvelle position, après toutes celles prises par mon corps, expose davantage mon dos. Je n’y prends pas garde, entourant le gobelet de mes doigts. Je me redresse, sans le porter à mes lèvres, jetant un nouveau regard à l’auror, en réitérant des mots déjà prononcés : « J’suis désolé, vraiment. J’agis comme lui, en foutu égoïste, en étant pas foutu de conserver tout ça pour moi. J’ai terminé de brailler comme un gosse, j’peux fermer ma gueule et te laisser te reposer. » Je suis rarement vulgaire, je n’en vois pas l’intérêt. Mais je me dis que j’ai sûrement abusé de la bienveillance d’Hammarskjöld, à ce stade ; si je me brutalise moi-même, il n’aura pas besoin de me faire taire. Il laissera peut-être intact ces quelques minutes d’accalmie, de douceur, qui m’ont fait du bien, et auxquelles je veux encore m’accrocher. Quelque part en moi, un petit Fredrikke, sans malice, récolte la graine de douceur et d’espoir, pour la planter dans le jardin des souvenirs consolateurs.
Magni Hammarskjöld
hekseri
muggler
Gif :
Âge : 40 ans (08/08/83)
Statut de sang : Pur
Statut civil : Trop attaché, pour prétendre le contraire. Le cœur baigné dans deux eaux profondes.
Occupation : Auror
Fylgia : Mjöll (Mjöllnir), lézard bleu de Gorgona fouineur et têtu. Il prend la forme d'un ours polaire quand il est auprès de son enfant. Nouvellement il prend la forme d'un chat-tigre nébuleux de façon plus quotidienne
Alignement : Enfant de Völuspá
Allégeance : Clan Styrke et allégeance profonde à Thor
Particularité : Legilimens | se déplace majoritairement à moto, affublé de lunettes de soleil
Pseudo : Artchie
Serment le : 30/11/2022
Parchemins : 1169
Noises : 3841
Gallions : 0
TW : Deuil, deuil périnatal, blessures, insultes
Double : Peter Gadiot
Crédits : (c) true north
Multi-comptes : Alfhild Mørk - Sol Yoonir
Sujets : Magmar - Ozy - Jin - Seb - Jasper - Vigga - The Big M - Helga - Oubliette - Fred - Kai
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@Fredrikke Mørk | 04 mars 2023 - Petit matin
Installé parallèle à mon lit, je fixe le mur en face de moi sans le voir. J'entends les sanglots et songe l'espace d'un instant tirer le rideau entre nous deux pour lui donner toute l'intimité que cet instant de fragilité peut nécessiter. Mais je crains de le couper de cette infime marque de soutien que Fredrikke a besoin à cet instant. Une crainte stupide, aussi improbable que les gestes que je viens d'avoir pour lui. Aussi improbable que la réalité et cette amnésie complète qui met sur pause toute mes dernières années d'enquête à son sujet. Je songe à Markus, une nouvelle fois. Comment éviter mes pensées de revenir irrémédiablement vers le point central de ma vie depuis mon enfance ? Cette enquête est autant la mienne que la sienne, c'est la nôtre. L'union de nos forces, de nos recherches, de nos excessives et pointilleuses investigations. Un travail commun de longue haleine sublimé par une habitude de travailler ensemble depuis des années. Deux cerveaux qui se complètent, se heurtent et s'affrontent pour se tirer en avant, vers le mieux. Si avertir les victimes de Fredrikke Mørk n'est pas de mon ressort, il en est tout autrement pour le professionnel qui doit avoir connaissance de cet élément central. Surtout après sa propre descente musclée dans l'appartement du tireur d'élite il y a deux semaines de cela. Il doit savoir. Enfermé dans le silence de mes pensées, je me réfugie dans ce que je sais faire le mieux, relire mes notes mentales du dossier Mørk. Cela m'évite de prêter trop d'attention aux sons qui s'échappent du cocon de couvertures, et de penser trop intimement à l'auror qui occupe toutes la place dans mon crâne. La seule chose que cet exercice n'efface pas ce sont les rideaux de brume qui entourent encore quelques fils de pensée, et la douleur lancinante du dos. Colmater toutes les brèches en même temps est impossible. Ma propre fatigue commence à devenir top pesante et l'envie de partir revient gonfler ma poitrine d'un orage sombre. Chaque éclair qui gronde à l'intérieur sont tant de besoin d'aller trouver le réconfort qui me manque auprès de mon meilleur ami. Ce manque qui grossit de plus en plus depuis deux semaines. Ce manque impossible à combler.
Le front se plisse, les paupières se ferment et les muscles se tendent pour tenter de refermer la chappe de plomb au-dessus de la tempête. Le cerveau tire les souvenirs des rapports en avant pour se concentrer sur le volet professionnel de l'histoire. Je tente de retracer le fil de la conversation que l'on avait eu entre deux coups de poings et sortilèges d'entraves. Je cherche les bribes non corrompus de l'enregistreur dans ma mémoire. Je saisis mieux sa méfiance envers moi quand j'avais évincé Aren de ses bras. Il ne me connaissait plus. Il n'avait que mes regards chargés de haine et notre étonnante participation commune aux réunions des Enfants comme marqueur. Sa méfiance devient doucement plus légitime. Foutue ironie du sort.
« Merci. » Dans le silence de la chambre, perdu dans le tumulte de mes notes, j'entends à peine le murmure étouffé qu'il prononce. Je devine plus que ne comprends le remerciement qui grésille de l'autre côté de la pièce. Un simple mot, trop court pour avoir le temps de raconter toutes les pensées qui agitent encore ses cils. Mais un mot incongru entre Fredrikke et moi, qui suffit à dire bien plus qu'il n'y paraît. A-t-il vraiment besoin de me remercier alors que mes gestes sont incapables de lui apporter plus de soutien qu'une couverture sur des épaules tremblantes ? Alors que ma gorge ne contient que des phrases dénuée d'empathie profonde ? Non, il ne devrait pas, je n'attends rien de lui en retour cette nuit. Si ce n'est qu'il prenne un minimum soin de lui, avale ce foutu chocolat chaud, et fasse venir un infirmier pour sa foutue blessure à la tête qui ne cesse de s'élargir. Le son d'un froissement de tissu déchire une fois de plus le silence qui s'était reformé derrière son murmure. Quand il reprend la parole, sa voix n'est qu'une succession de pauses et d'idées mangées par des mots qui lui échappent. « Personne ne m’a jamais… On m’a demandé d’agir comme Fredrikke. On m’a dit quel genre d’homme il était…Mais même ces descriptions étaient à des lieux de la réalité. » Toujours tourné vers le mur opposé à son lit, les paupières fermées se froncent. Je suis incapable de l'écouter parler du degré de connard que l'homme dont il parle est, était, et sera peut-être à nouveau un jour, sans éprouver une profonde montée de haine et de dégoût. Et peut-être d'amertume aussi, de devoir remettre à plus tard le plaisir de l'arrêter en bonne et du forme, avec une condamnation exemplaire à la clé. « J’veux pas être ce type. Je l’ai jamais voulu. Je rêve de faire du bien autour de moi, de faire sourire les gens. Je m’inquiète pour tout le monde, j’veux juste aider, ne provoquer aucune émotion négative… Mais j’suis lui. » Les yeux luisent sous les paupières mi-closent qui se sont entrouvertes à l'évocation de ses rêves et espoirs d'un amnésique en fracture trop complète avec l'homme qu'il est aux yeux des autres. Faire du bien autour de moi. C'est louable, mais presque aussi naïf qu'il pouvait être vicieux. Malgré tout, je ne peux pas le lui reprocher, ce serait stupide de ma part de le faire. J'en viens même à craindre pour lui la désillusion à laquelle il pourrait faire face plus tard si ses souvenirs lui revenaient. Garderait-il une trace de ce dont il aspire aujourd'hui ? Ou bien la mémoire ferait revenir l'entièreté de la personnalité qui existait avant ? Est-ce que cet interlude est voué à être effacé, n'être qu'une parenthèse sans conséquence ? Ce serait presque souhaitable pour le jeune homme qui sanglotait sous la couverture derrière moi. « On sait tous les deux ce que je devrais faire. » Un infime mouvement de tête confirme la pensée qui n'est pas nommée. On sait tous les deux oui, mais. J'attends la suite tellement elle est implicite dans le début de cette phrase aussi bancale que mes envies de rester toute la journée dans cette chambre. La suspension s'étire et je l'entends inspirer plus profondément comme pour rassembler ses forces, ou chercher ses mots. Je ne le connais pas tellement, mais j'imagine que se confier comme il le fait devant moi, ne doit pas être un exercice dont il a l'habitude. Et il a fallut que ça tombe sur moi, évidemment. Par Thor, parfois j'ai l'impression que celui-ci se moque bien de ma tête dès qu'il en a l'occasion. « Aucun ne m’a dénoncé. Si ça arrivait…Je n’invaliderais pas leur parole. Mais me livrer moi-même… » Le fameux mais laisse place à une nouvelle hésitation. Même si je la comprends, elle me fatigue tout autant. Ce serait si simple pourtant, qu'il accepte ce simple élément de justice pour faire le bien autour de lui, et en premier lieu, pour ses victimes. Ce serait simple, et utopiste de lui demander un tel sacrifice, j'en conviens. Malheureusement. « Je suis lâche. Fredrikke l’a toujours été, je le suis aussi. Aller en prison c’est perdre tout espoir de … » L'ombre d'un rictus mauvais effleure mes lèvres avant de disparaître. C'est un fait avéré, le Mork est d'une lâcheté rageante. Cette même lâcheté qui l'avait poussé à me dénoncer auprès de ses supérieurs pour me faire passer en conseil de discipline. Un ramassis de coups bas, déguisés, de préférence dans le dos et sous toutes les formes possibles que sa propre tête. Aussi lâche que pouvait l'être Gacha. Des connards de la même espèce. Des connards qui refusent de lâcher prise même des années après. Et qui me font la joie de me retrouver ici, le dos en feu sous les coups d'un sortilège mal réalisé, à développer une hijueputa d'empathie pour Fredrikke Mork.
Le visage plonge dans le noir des mains qui frottent la peau lasse. Je voudrais pouvoir retirer toute cette fatigue latente qui alourdit mes pensées et tire mon humeur vers cette nervosité orageuse qui infiltre des insultes entre deux lambeaux de pensées embrumées. Pendant ce temps la voix de mon colocataire résonne toujours, augmentant à chaque nouvelle introspection, un peu plus de douceur dans la haine que son nom m'inspire. « Je lis beaucoup de livres. Dedans ça parle d’amitié. De moments joyeux, où les gens sont complices, heureux. Pas de douleur, pas de coups, pas de dégoût. J’peux tenir à chaque jour parce que je me dis que peut-être, à un moment, je connaîtrai ça. Peut-être que même rêver à ça, c’est manquer de respect à ses victimes, mais si je m’autorisais pas à rêver…» Est-ce que je peux lui en vouloir de rêver ? Pour la première fois depuis le début de cette conversation, sa voix est douce, ferme, complète. Aucun sanglot refoulé, mais l'éclat doux des lueurs d'un arc-en-ciel au fond de l'orage. Il croit en ce rêve, je le sens dans cette chaleur soudaine qui émerge des premiers mots. C'est touchant, beaucoup trop touchant. C'est le rêve de l'enfant qui perce à travers l'amoncellement d'immondices qu'on lui a jeter sur la tête. Je pourrais lui dire que, oui, en effet, c'est manquer de respect pour ses victimes. Que de tels rêves sont déplacés pour tous ceux qui tremblent encore en passant la porte de chez eux, qui ont pris l'habitude de changer leurs habitudes de sorties nocturnes, qui ont adapté toutes leurs vies autour de ce traumatisme qu'il leur a fait subir. Je lui dirais peut-être, demain. Un autre jour, dans un autre contexte. A cet instant mon cœur n'a pas l'âme à écraser d'une main rageuse les frêles ailes de ces rêves illusoires. « J’suis désolé, vraiment. J’agis comme lui, en foutu égoïste, en étant pas foutu de conserver tout ça pour moi. J’ai terminé de brailler comme un gosse, j’peux fermer ma gueule et te laisser te reposer. » Ma tête se redresse, délaissant l'enveloppe chaude des mains pour revenir fixer le mur et la porte en face de moi. « T'excuse pas. » Ma voix roule plus orageuse que je ne le souhaitais, rendue lourde de fatigue et de toutes les pensées qui s'entremêlent dans mon crâne qui recommence à tambouriner sa pression sanguine un peu trop fortement dans mes tempes. « Je t'ai dis que j'étais disposé à t'écouter si tu avais besoin de parler. » Ce qui semble être le cas. Dans une succession de mouvements toujours aussi lourds et tendus je me redresse pour me diriger vers la tête de mon lit et appuyer ma baguette sur le système d'appel des infirmiers. Même si le tireur d'élite n'est pas encore au mieux de sa forme, j'estime que sa dernière phrase est un signe acceptable de mon affirmation précédente sur ma capacité à attendre qu'il se soit repris pour appeler un membre du personnel soignant dans la chambre. Puis je me tourne de trois quart vers son lit pour poser mon regard légèrement luisant d'une douleur physique qui refuse de laisser place à quelconque repos. Je remarque alors qu'il s'est redressé, son verre de chocolat chaud entre les mains. Une bonne chose, une première étape vers son absorption, j'espère. Je reprends, les bras croisés sur le torse dans une légère grimace de douleur causée par l'étirement de la peau blessée. « Je vais pas te faire la morale aujourd'hui Fredrikke. Encore moins te dire ce que je pense de ce que tu devrais faire, tu en as suffisamment conscience ça n'ajouterait rien de productif à ta situation du moment. Peut-être que si tu avais laissé plus de gens te mettre des couvertures sur le dos tu en serai pas là aujourd'hui. Mais malheureusement ni toi, ni moi, ne pouvons refaire le passé. » Personne ne le peux, pas sans risquer des conséquences dans le présent bien plus dramatiques. Je ne tique même pas en utilisant son prénom plutôt que son nom de famille habituel à mon tour. Comme si cette permission tacite avait été accordée précédemment dans un changement d'ambiance qui avait perturbé les lignes de notre relation. Et aussi parce que c'est plus à la personne assise en face de moi, qu'à ce qu'il représente. « Crois-moi, je préfère avoir à faire à un gamin qui craque et qui me parles de ses remords qu'avoir à gérer un gamin arrogant qui croit tout connaître de la vie et de la souffrance. » Un éclat narquois embrase mes iris un court instant avant d'être à nouveau englouti par les nuages d'orage. Toujours incapable de rester en place, mes jambes se remettent en mouvement pour m'amener à proximité de la porte d'entrée dans l'espoir que l'infirmier ne tarde pas à venir toquer. Ce n'est plus tant mon parchemin que j'attends, que le professionnel de santé pour s'occuper de la tête de moins en moins rassurante de mon voisin de chambrée. Je m'arrête dans un soupir, ressassant les phrases qu'il avait prononcé au sujet de lui, de sa lâcheté à se dénoncer lui-même. Ma tête se secoue légèrement dans un signe négatif tant toute cette histoire me donne le tournis. Un court silence s'installe dans un froncement de sourcils alors que j'hésite à prononcer les mots qui me viennent en tête. Quand je me décide enfin, mon regard s'est fait plus clair, mais plus dur aussi. D'un ciel noir sans mouvement. « Te dénoncer maintenant servirait à rien. » Ca me coûte de le lui dire si frontalement, mais c'est la vérité. Et si celle-ci peut apaiser quelque temps son âme torturée par tous les questionnements et les culpabilités qui semblent grignoter ses rêves nimbés d'amnésie, alors autant la lui donner. « J'ai aucun intérêt à ce que tu t'accroches trop à cette idée, ou que tu en fasses ton arme de défense principale, mais c'est pas tellement mon genre de profiter des autres dans leurs moments de faiblesse. Donc, te dénoncer maintenant ne servirait pas à grand chose. Les expertises des médicomages te placeraient immédiatement dans la ligne d'un jugement amoindri en raison de ton amnésie. J'ai déjà vécu des procès du genre, crois-moi, ça peut faire plus de dégât auprès des victimes que de bien. Voir leurs tortionnaires s'en tirer avec une peine réduite à peine à la hauteur de leurs crimes, c'est encore plus rageant et humiliant pour elles. » Je vais pour ajouter autre chose quand des coups rapides contre le battant de la porte derrière moi m'arrêtent dans ma lancée. Je fais volte-face pour accueillir l'infirmier qui apparait devant moi. Celui-là même qui m'avait si gentillement accompagné jusqu'ici précédemment. Le regard inquisiteur qu'il m'adresse avant de sauter vers la silhouette de Fredrikke derrière moi suffit à me faire comprendre qu'il tente d'évaluer la température de la pièce entre ses deux patients. En échange j'arque un sourcil faussement surpris, à la limite de l'insolence. « M. Hammarskjöld, j'espère que vous n'avez pas appelé juste pour votre demande de parchemin ? » Son ton reteint à peine l'exaspération qu'il témoigne envers moi et je suis vaguement tenté de lui renvoyer son amabilité à la tête. Mais l'embrasement des inquiétudes de Mjöll retourner surveiller l'évolution de ma blessure et de son baume brûlant suffit à me faire passer l'envie de le voir décamper avant d'avoir eu l'occasion de lui parler sérieusement. « J'avais peur que vous ayez oublié, mais je constate que ce n'est pas le cas. Mais c'est pas pour ça que j'ai appelé, non. Le baume que le médicomage à mis est en train de faire fondre le peu de chair qu'il me restait à cet endroit-là. Je serai pas contre un contrôle de son efficacité. » Alliant le geste à la parole, je me tourne vers l'homme pour lui présenter mon dos dont la sensation de brûlure ne s'estompe toujours pas. Au contraire, la magie rouge réagit de plus en plus, traçant de mince filets de plus en plus marqués, marbrant mon dos d'une étrange cartographie sanguine. « Et si vous pouviez jeter un coup d'oeil à mon collègue à côté, ce serait pas mal. Peut-être que si c'est vous il acceptera de boire son foutu chocolat et que vous vous occupiez de sa tête. » La voix grogne dans ma gorge, les yeux se dardent, ardent, dans ceux de Fredrikke et les mâchoires se serrent sous la décharge de douleur que les doigts qui effleurent le dos provoquent. « Je ne dirai pas que ça réagit parfaitement bien, en effet. Mais votre plaie se referme malgré tout. Je vais consulter l'équipe médicale pour faire le point et vous donner une autre potion pour la douleur en attendant d'avoir plus d'éléments. Je suis étonné de votre sollicitude pour votre collègue, on devrait peut-être vous mettre plus souvent en chambre double M. Hammarskjöld, ça à l'air de vous détendre. » Le ton professionnel du début s'estompe sur la fin de sa tirade, virant complètement à la moquerie douce auquel je réponds par un grognement significatif, accompagné d'un rapide : « J'aimerais juste éviter qu'il meurt dans ma chambre. » qui ne convaincra probablement personne tant il sonne faux et qui fait naître un rapide trait lumineux sur les lèvres de l'infirmier qui n'en demande pas plus avant de s'approcher du lit de Fredrikke.
Fredrikke Mørk
hekseri
muggler
Gif :
Âge : 31 ans, selon les registres officiels.
Statut de sang : Pur
Occupation : Tireur d’élite chiant dans la Brigade des Valkyries.
Fylgia : Taïpan du désert et Phascolarctos cinereus (un koala, quoi.)
Alignement : Enfant de Völuspá
Particularité : Atteint d’amnésie rétrograde, qui n’a pas touché sa mémoire procédurale. Il a oublié qu’il était un gros con, mais il sait encore se servir de sa baguette.
Pseudo : Cappuccino
Serment le : 11/07/2022
Parchemins : 590
Noises : 3831
Gallions : 1
TW : Violence physique et psychologique
Double : Rob Raco
Crédits : Chosen one
Multi-comptes : Dax, Markus et Angelo
« T'excuse pas. » Je le fais trop souvent, tout en sachant que je ne devrais pas le faire. Les excuses de Fredrikke Mørk ne valent rien. Elles ont trop trempé dans le sang, les larmes et les cris. Dans ce cas-ci, pour une rare fois, mon désolé ne concernait pas le passé. Il était sincèrement, complètement sincère. Me confier ainsi à lui, un ennemi, un homme blessé dans une chambre d’hôpital, est inapproprié. Pleurer devant lui est indécent. Récolter ses gestes doux, comme des fleurs de soleil, est ridicule. Sa voix me semble plus orageuse, ses yeux fixent en face de lui et je me demande si c’est déjà la fin de ce drôle d’intermède. Va-t-on retomber dans les répliques plus glaciales, dans le mépris, le dégoût ? Ai-je abusé de sa bonté ? Probablement. Je suis beaucoup plus habitué à gérer la violence. J’ai peur de dire la phrase de trop, qui fera retomber les éclairs, alors que je suis encore allongé sur le champ de bataille, démuni. « Je t'ai dis que j'étais disposé à t'écouter si tu avais besoin de parler. » J’ai pris cette invitation au sens trop large, malgré moi. Je ne comptais pas m’épancher autant, pas devant lui. Mais depuis hier soir, je ne contrôle plus rien. Les digues que j’ai mis des mois à tenter de construire, pour avancer sans me décourager, ont flanché.
Je l'observe se redresser, puis appuyer sa baguette sur le système d'alarme. Je tressaille, une lueur d'inquiétude traversant mon regard. J’avais oublié qu’il m’avait mentionné devoir appeler un infirmier pour avoir du parchemin. Ce parchemin, est-ce pour demander à un collègue de venir…? Il avait demandé à ne pas recevoir de visite, mais peut-être que mon attitude l’a fait changer d’idée ? Peut-être qu’il voulait simplement obtenir des confidences plus détaillées, plus explicites et pathétiques, pour s’en servir ensuite contre moi ? Et si c’est la brigade des aurors, qu’il compte faire venir…? S’il veut appeler son collègue, maintenant qu’il m’a bien apaisé, pour me corriger comme il se doit ? Je n’ai plus la candeur de ne pas envisager ses options. Mes dents s’emparent nerveusement de ma lèvre inférieure, alors que mon torse se soulève plus souvent, au rythme d’une respirations chaotique. Dans les derniers mois, j’ai toujours bien géré la possibilité d’une douleur à venir. Pas aujourd’hui. Aujourd’hui, je voudrais que mon quotidien soit seulement constitué de couverture chaude et de chocolats chauds. Je détourne les yeux alors qu’il pose les siens sur mon lit, les fixant sur le breuvage que je tiens toujours. « Je vais pas te faire la morale aujourd'hui Fredrikke. Encore moins te dire ce que je pense de ce que tu devrais faire, tu en as suffisamment conscience ça n'ajouterait rien de productif à ta situation du moment. Peut-être que si tu avais laissé plus de gens te mettre des couvertures sur le dos tu en serai pas là aujourd'hui. Mais malheureusement ni toi, ni moi, ne pouvons refaire le passé. » Je note l’utilisation de mon prénom, le sien, qui m’arrache un rictus, à mi-chemin entre une joie mutine et l’écoeurement. Drôle de mélange. Fredrikke, c’est lui. Son prénom est imprégné de ses vices, de ses fautes, de ses crimes. Le mien, Fred, n’est pas vierge, mais il est un peu moins lourd. Sauf que l’auror m’appelle habituellement par mon nom ; comme moi précédemment, il semble avoir naturellement glissé vers l’autre, dans cette ambiance étrange qui se distingue de celle de notre dernière rencontre. « Crois-moi, je préfère avoir à faire à un gamin qui craque et qui me parles de ses remords qu'avoir à gérer un gamin arrogant qui croit tout connaître de la vie et de la souffrance. » Mes yeux, relevés au même instant, captent l’éclat narquois qui embrase brièvement son regard. Je ne souris pas. Fredrikke, j’en suis certain, aurait qualifié mon attitude de pitoyable. Et moi, je me demande ce qui est vraiment le plus difficile à gérer, entre un ennemi amnésique, qui pleure comme un gosse, et un ennemi qu’on peut simplement détester, qui fait ses gestes normaux, sans déstabiliser l’ordre établi de la hargne mutuelle.
Je ne réponds rien. Je le vois se déplacer à proximité de la porte d'entrée et je profite de l'accalmie pour récupérer un semblant de maturité : j’achève d’essuyer mes joues, dans l’espoir qu’aucune trace ne subsiste. Mon interlocuteur secoue la tête dans un geste négatif, et je fige, sans parvenir à maîtriser l'anxiété qui croît avec tout le reste de ces insupportables émotions. Son regard, à la fois plus clair et plus dur, me fait appréhender la fin de cette période de calme. « Te dénoncer maintenant servirait à rien. » Je fronce les sourcils, attendant la suite. Ashes, incapable de rester en place, bouge de nouveau. Elle quitte mon bassin pour se faufiler jusqu’à mes pieds, sur lesquels elle se pose, nonchalamment. « J'ai aucun intérêt à ce que tu t'accroches trop à cette idée, ou que tu en fasses ton arme de défense principale, mais c'est pas tellement mon genre de profiter des autres dans leurs moments de faiblesse. Donc, te dénoncer maintenant ne servirait pas à grand-chose. Les expertises des médicomages te placeraient immédiatement dans la ligne d'un jugement amoindri en raison de ton amnésie. J'ai déjà vécu des procès du genre, crois-moi, ça peut faire plus de dégât auprès des victimes que de bien. Voir leurs tortionnaires s'en tirer avec une peine réduite à peine à la hauteur de leurs crimes, c'est encore plus rageant et humiliant pour elles. » Un rictus d’amertume déchire mes traits. Avant que l’auror ne puisse poursuive, si telle était son intention, des coups se font entendre contre le battant de la porte. L’infirmier pénètre dans la pièce, alors que je songe aux paroles prononcées. J'ai aucun intérêt à ce que tu t'accroches trop à cette idée, ou que tu en fasses ton arme de défense principale. Croit-il que c’est ce que je cherche à faire ? Me trouver une arme de défense ou m’accrocher à une excuse ? Je ne veux même pas d’un foutu bouclier. J’ignore s’il a raison ou s’il a tort. Peut-être que le jugement serait effectivement amoindri ; mais si ma mémoire revient, Fredrikke ne se dénoncera jamais. Et je suis certain qu’il serait capable de s’en sortir, encore, comme il l’a fait si souvent, parce que les pourris semblent s’en tirer bien plus que les bons, qu’ils entraînent vers le fond.
L'auror parle de son dos, se tournant vers l’infirmier pour lui montrer : sans réfléchir, je laisse mon regard glisser sur la peau abîmée. Ma machoîre se serre et mes lèvres se pincent. Le tireur d’élite en moi ne peut pas s’empêcher de se questionner sur le type de magie qui peut infliger une telle chose. Rien que je connais. Ce doit être horriblement souffrant. Et il supporte mes bavardages, pendant tout ce temps…? Ne suis-je pas aussi monstrueux que Fredrikke, d’égoïstement m’épancher en sa présence, alors qu’il doit tolérer sa propre blessure ?
Il parle ensuite de moi, ses yeux se dardant dans les miens. C’est plus fort que toute ma bonne volonté pour me contrôler ; une lueur reconnaissante vient valser dans mes iris bleutés. J’en suis à ce stade, lamentable, où tout geste qui n’est pas hargneux, qui est moindrement bienfaisant, me fait du bien. L'infirmier évalue la blessure de mon partenaire temporaire de chambre, avant de terminer sur une boutade, à lequel répond l'auror. Le rapide trait lumineux qui passe sur les lèvres du professionnel vient aussi sur les miennes ; un éclair bref, moins d'une seconde, que je regrette aussitôt. L’infirmier s’approche de moi et lève la main pour toucher à mon bandage. Par réflexe, j’ai un mouvement de recul, qui m’arrache une grimace et me fait presque renverser mon gobelet. Il me jette un regard plein de sollicitude, mettant probablement mon geste sur le compte de ce qui m’a conduit dans cette chambre. Ses doigts attentifs dénouent le tissu enroulé autour de mon crâne et je le vois froncer les sourcils : « Vous auriez dû nous appeler avant. » J’hausse les épaules, en m’efforçant de prendre un ton plus neutre, plus en contrôle que précédemment – même si je suis loin d’avoir le dit contrôle, actuellement : « C’est rien d’urgent. Vous pouvez même aller vous occuper de la potion pour la douleur de mon voisin avant de vous charger du pansement. » Je le pense. Je ne vois pas l’état de ma tête, mais elle m’est secondaire. L’autre semble souffrir bien plus que moi. Je soupçonne les médicomages de m’avoir donné un bonne dose d’anti-douleur, lorsque je suis arrivé. La souffrance est ténue ; j’ai un peu froid, c’est tout. L’infirmier ne semble pas de mon avis : « Je ne crois pas, non. Votre plaie s’est rouverte. D’ailleurs, vous ne voulez toujours pas porter plainte contre…? » « Non. » La réplique a fusé, sans même que j’aie besoin de réfléchir. L’homme qui s’occupe de mon crâne semble désapprouver ma réponse, mais ne dit rien. Je le laisse à ses soins, fermant les yeux, les doigts toujours fermement serrés autour de mon gobelet, comme s’il s’agissait de l’objet le plus précieux au monde. J’ignore ce que l’homme fait, mais ce n’est pas agréable : ma mâchoire se serre et un frisson m’échappe. Au bout d’un moment, je le sens enrouler un nouveau bandage, probablement propre, autour de ma tête. Je n’ouvre pas immédiatement les yeux. À chaque fois que je dois les rouvrir, la même crainte revient : que les minutes précédentes n’aient été qu’une illusion réconfortante et que l’auror me fixe désormais avec dégoût. « Prévenez-nous, réellement, si les saignements reprennent. Si oui, il faudra essayer une autre intervention. » J’hoche la tête, tout en sachant que je ne le ferai pas. Je ne dérangerai pas un membre de l’équipe médicale pour ma propre personne, hors de question. Les autres patients sont plus prioritaires. J’entends le professionnel s’éloigner, puis s’adresser à l’autre blessé de cette pièce : « Je reviens. Vous pouvez continuer d’éviter qu’il meurt dans cette chambre, ça vous rend presque plus agréable. » La réplique m’arrache un sourire. Mes paupières se soulèvent et mes iris glissent sur la porte qui se referme. Il reviendra bientôt, j’imagine, avec des potions, des nouvelles, et peut-être un parchemin.
La dernière option ne m’enthousiasme pas. Je jette un coup d’œil en coin à l’auror, sans prendre immédiatement la parole. J’essaie de ravaler toutes mes émotions précédentes, de reconstruire en vitesse des barrages, pour ne plus rien lui imposer. Je n’y parviens que partiellement. Je suis trop à fleur de peau, tous les nerfs à vif. « C’est plus facile de gérer un gamin arrogant qui croit tout connaître de la vie et des souffrances qu’un gamin qui craque. Le premier, au moins, ne perturbe rien. » Sauf que moi, je suis loin de tout savoir de la vie. Je ne sais même rien de la mienne. Mes yeux s’abaissent vers le chocolat chaud, qui a encore refroidi. J’essaie, plutôt vainement, de raffermir ma voix : « Cette vérité sur l’amnésie, tu devrais pas la connaître. Tu devrais pas avoir à la gérer. Tu devrais pouvoir m’haïr librement, sans que…» Sans que ça n’entre en ligne de compte. Je ne sais pas ce que cette annonce a provoqué dans sa tête, mais je suis persuadé que ce n’est pas agréable. Je relève mes yeux, d’un bleu qui se noie, vers lui : « Je l’ai dit à personne, jusqu’à maintenant. Je voulais leur éviter ça. Qu’ils puissent me détester autant que je le mérite, sans que l’amnésie me serve d’excuse, sans qu’ils aient à se questionner sur comment agir, alors qu’ils ont déjà tellement souffert. » C’est ma principale raison, maintenant. Mais au début, je conservais principalement le silence par respect pour Oda. Parce qu’on me l’avait demandé, parce qu’on s’attendait à ce que je sois lui. Et puis, il y a eu le carnet. Les victimes. Les attaques. Les regrets et la culpabilité, étouffante, accaparante. Mes lèvres se plissent, mon regard glisse sur mon torse en suivant le cours de mes réflexions, tandis que je rajoute : « Sauf que ça crée des situations…particulières. Et c’est pas terminé.» Ne rien dire à personne n’était peut-être pas la meilleure solution, vu certaines scènes, mais je doute encore que la vérité aurait été bien mieux. J’ai voulu être optimiste, mais j’y parviens bien moins facilement. Je sais trop ce qui m’attend. Lorsque je quitterai cette chambre d’hôpital, je reprendrai le travail. Je sortirai encore le soir, parfois, avec cet espoir acharné de pouvoir, par fragments, faire du bien, de connaître des instants de lumière. Je refuse d’abandonner. Même si ça fait mal, même si je suis parvenu à mon point de rupture, même si je sais très bien que mon rêve est voué à l’échec et que ce qui m’attend, de mes énièmes promenades nocturnes et sorties, ce ne sont pas des sourires. Je refuse d’abandonner, oui, vraiment…sauf aujourd’hui. Aujourd’hui, je baisse les bras. Aujourd’hui, je ne peux pas m’imaginer, même une seule seconde, quitter cette pièce et croiser encore des regards hargneux.
Un nouveau frisson me traverse et je remonte d’une main la couverture jusqu’à mes pectoraux, avant de lentement glisser le chocolat à mes lèvres. Je ne sais pas si le breuvage est bon ou non, mais pour moi qui n'a pas l'habitude de recevoir quoi que ce soit - outre d'Alfhild, comme avec son amulette - , c'est le meilleur au monde. Mes yeux s’éclairent d’une lueur enfantine de satisfaction, tandis que je reprends une seconde gorgée. Toujours sur mes pieds, Ashes me regarde avec bonté. Gêné de m’être trop enthousiasmé, je dépose de nouveau le gobelet sur mon genou, sans le relâcher. Mes iris se posent presque timidement sur l’auror alors que je demande : « Tu as dit ne pas vouloir recevoir de visite de personne, mais le parchemin…Est-ce que c’est pour ton collègue ? Je comprendrais, si tu voulais le faire venir, c’est seulement que…» C’est seulement que j’ai peur. Je ne le dit pas, mais mon corps, traître au bout depuis le début de cette rencontre, le dit à ma place. Ma main libre s’est resserrée sur ma couverture, ma machoîre s’est tendue et mes yeux luttent pour ne pas se détourner : « Je me sens pas en état de me prendre d’autres coups. Pas avant quelques jours. » J’ai l’impression d’être en train d’avouer une énième lâcheté. Une de plus.
Magni Hammarskjöld
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Âge : 40 ans (08/08/83)
Statut de sang : Pur
Statut civil : Trop attaché, pour prétendre le contraire. Le cœur baigné dans deux eaux profondes.
Occupation : Auror
Fylgia : Mjöll (Mjöllnir), lézard bleu de Gorgona fouineur et têtu. Il prend la forme d'un ours polaire quand il est auprès de son enfant. Nouvellement il prend la forme d'un chat-tigre nébuleux de façon plus quotidienne
Alignement : Enfant de Völuspá
Allégeance : Clan Styrke et allégeance profonde à Thor
Particularité : Legilimens | se déplace majoritairement à moto, affublé de lunettes de soleil
Pseudo : Artchie
Serment le : 30/11/2022
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TW : Deuil, deuil périnatal, blessures, insultes
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@Fredrikke Mørk | 04 mars 2023 - Petit matin
Pendant que l'infirmier change de patient, je me concentre sur moi et ma gestion de la douleur. Je ne suis pas de ceux qui hurlent à la moindre coupure, je suis même plutôt résistant et peu soigneux de mes propres blessures. Au grand damn de mes collègues et d'Andres. Heureusement que ce dernier n'a pas connaissance du tiers de mes déboires physiques sinon je suis certain qu'il trouverait le moyen de me coller des visites médicales toutes les semaines dans les pattes. Pourtant je dois reconnaître que les radiations qui tirent mon dos cette nuit sont particulièrement intenses au point de m'avoir poussé à prendre les devants et rappeler l'infirmier pour faire un nouvel état des lieux de la blessure. J'entends sans volonté d'écouter les deux hommes qui parlent à côté de moi. L'obstination de Fredrikke à vouloir délayer ses soins commencent à devenir exaspérante. Je peux comprendre qu'il n'apprécie pas les attentions, ou qu'il ne se sente pas légitime peut-être, au vu de qui il est. Mais quitte à être à l'hôpital, je considère qu'il vaut mieux accepter de se faire soigner rapidement pour fuir au plus vite ce lieu déplaisant. A moins que le tireur d'élite souhaite profiter de son séjour ici pour n'être qu'un patient, traité au même titre que n'importe qui d'autre. Traité en victime, entouré de sollicitude et d'attentions précautionneuses.
« Mjöllnir ? » Le murmure ténu filtre à peine entre mes lèvres serrées. Le lézard arrête sa course dans mon dos pour venir se poser sur le doigt que je tiens levé au niveau de mes yeux luisants. « J'ai pas encore débloqué la faculté de voir dans mon dos, alors fait un effort et dis-moi. Ça ressemble à quoi derrière ? Est-ce que ça fait comme des filaments rouges qui s'étirent de plus en plus ? » Ma voix précipitée profite des voix des autres pour ne pas être trop saisissables. La langue de ma fylgia tâtonne doucement ma joue, toujours murée dans son silence profond. Seules ses inquiétudes confirment mes doutes et je soupire, las, avant de passer une main nerveuse dans mes cheveux. « Que Gonorrea ! Hijueputa de Gacha. Hijueputa de Javier. Hijueputas a todos. » Les insultes crissent entre mes dents serrées dans un murmure lourd d'une rage qui ne cesse jamais de brûler. Le lézard disparait une nouvelle fois pour s'étirer dans le nuage de particules fines. Le mélange de douleurs et d'émotion le rend particulièrement instable, les formes s'étirent sans se fixer réellement sur un animal quelconque. Le spectacle m'exaspère, et pour éviter de replonger dans une humeur exécrable, je délaisse celui-ci pour poser un regard acerbe sur l'infirmier qui termine de bander la tête de Fredrikke. Nos regards se croisent, ses sourcils se froncent légèrement, j'imagine face à la disparition de l'once d'amélioration qu'il avait senti en entrant dans la chambre. Ou pour d'autre raison, je ne sais pas, et j'ai nullement envie de me lancer dans une étude poussée de ses déductions et ni de ses pensées. J'ai déjà assez à faire à garder les miennes dans ma tête et éviter de récupérer les bribes d'émotions qui grésillent tout autour de moi.
Après une dernière recommandation adressée au Mørk, le soignant revient vers moi sans que je ne le quitte des yeux. « Je reviens. Vous pouvez continuer d’éviter qu’il meurt dans cette chambre, ça vous rend presque plus agréable. » Il marque un infime temps d'arrêt en prononçant sa réplique qui fait éclater un éclair sombre entre nous. Quand la porte se referme sur lui, j'observe cette dernière comme si je pouvais encore suivre ses mouvements dans le couloir et faire peser sur lui le poids de mon regard noir. Je la fixe cette porte tandis que Mjöll parvient enfin à reprendre forme et à aller se lover sur ma poitrine dans son cercle bleu habituel. Celui du soutien. Sa façon à lui, sous cette forme, de se lover au plus près de nous. Comme si avait l'espoir, parfois, de pouvoir se fondre à nouveau dans mon être, ne faire plus qu'un, et calquer nos rythmes cardiaques l'un sur l'autre. Je pourrais facilement accepter que me soucier des autres me rende plus agréable, même auprès du personnel soignant et malgré ma situation étouffante d'auror bloqué dans une chambre d'hôpital. Mais je ne devrais pas me soucier de Fredrikke Mørk. Sa présence à lui particulièrement ne devrait pas me rendre plus agréable. Les mêmes pensées tournent en boucle dans ma tête brumeuse, les mêmes réflexions qui se défont et se reconstruisent un peu plus loin. La nausée n'est que masquée par les potions et non totalement annihilée. Fixer cette porte comme dans l'attente fébrile du retour de l'infirmier me donner la stabilité pour éviter de tituber jusqu'à mon lit. Peut-être qu'une part de moi attend aussi cette potion anti-douleur promise et le retour de sa discussion avec les autres professionnels du service. « C’est plus facile de gérer un gamin arrogant qui croit tout connaître de la vie et des souffrances qu’un gamin qui craque. Le premier, au moins, ne perturbe rien. » Sa voix manque de me faire sursauter dans le silence qui s'était réinstallé. Le cerveau tente de reconstituer notre discussion et les mots que je lui avais lancé avant l'arrivée de l'infirmier. Oui, il me semble bien avoir évoqué l'idée que je préférais avoir à faire à un gamin qui craque qu'à un gamin arrogant. C'est toujours le cas. Même si la dernière précision qu'il apporte me laisse un goût acide dans le fond de la gorge. Dans une rotation lente, je me détourne de la porte pour l'observer lui à son tour. Le regard est redevenu sombre, luisant, brûlant. J'ai vaguement conscience d'avoir chaud, plus que d'habitude, mais mes pensées sont trop embrumée pour avoir la présence d'esprit de s'inquiéter de la fièvre qui pourrait être à l'origine de cette chaleur plutôt que le chauffage excessif de la chambre. « Cette vérité sur l’amnésie, tu devrais pas la connaître. Tu devrais pas avoir à la gérer. Tu devrais pouvoir m’haïr librement, sans que…» L'ombre d'un rictus fait frémir mes lèvres avant qu'il ne relève son regard d'un bleu de rivière qui déborde vers l'océan tumultueux du mien. « Je l’ai dit à personne, jusqu’à maintenant. Je voulais leur éviter ça. Qu’ils puissent me détester autant que je le mérite, sans que l’amnésie me serve d’excuse, sans qu’ils aient à se questionner sur comment agir, alors qu’ils ont déjà tellement souffert. » Une fois de plus je comprends l'intention derrière, mais ne partage pas entièrement le choix fait. Parce que j'imagine que certaines personnes découvrant son amnésie après avoir profité de l'opportunité qu'il leur laisse de se venger physiquement, pourrait en ressortir encore plus mal. La culpabilité est un foutu monstre terrible qui détruit parfois bien plus que la dualité morale à laquelle je fais face actuellement le concernant. Peut-être que j'idéalise certains rapports humains, mais tous les sorciers de Goteborg ne sont pas des connards sans compassion et le risque qu'il oblige d'autres à passer par la réalisation qu'ils ont cogné sur un pauvre type amnésique est assez vil, en finalité. De mon point vue. Mon seul et unique point de vue qui n'est pas celui d'un gamin qui s'est réveillé un matin en découvrant qu'il était un connard de psychopathe qui aime torturer les autres pour prendre son pied. C'est pourquoi je ne dis rien de tout cela, et laisse l'autre exprimer le torrent de remords et regrets qui le noient au quotidien. « Sauf que ça crée des situations…particulières. Et c’est pas terminé.» Ma tête acquiesce légèrement, j'imagine que les situations doivent être complexe et à nouveau je songe à Ozymandias en priorité. Je ne parviens pas à savoir si ça me paraît être une bonne chose que les deux Mørk aient l'occasion de s'expliquer dans un tel contexte. L'idée qu'Ozymandias se retrouve en difficulté face à cette révélation m'inquiète, si je pouvais être sûr que cela ne le fragilise pas ce serait peut-être intéressant. Mais les dégâts fait par l'agression de Fredrikke ont ébréché son âme sur certains points et les risques qu'il prenne mal la nouvelle sont assez élevés. Et à juste titre. Sous la nervosité de ces pensées mes mâchoires se contractent, trois fois, et je me laisse tomber en arrière une épaule contre le mur de la chambre. Un regain de silence s'installe que je ne cherche pas à rompre dans l'immédiat, mes propres pensées chaotiques cherchent des réponses impossibles. Je l'observe avaler - enfin - sa première gorgée de chocolat avec un léger soulagement. La joie enfantine qui éclaire ses traits suffit à me faire comprendre que j'avais eu raison d'insister, au delà de l'effet bénéfique du chocolat et du sucre sur son organisme. Satisfait de le voir se laisser aller à cette dégustation, ma tête se pose à son tour lourdement contre le mur. L'envie d'en finir au plus vite avec ces histoires d'onguents et de potions revient chatouiller mes fibres afin de pouvoir m'accorder le luxe de comater dans mes draps et retrouver le simulacre de vie normale dans lequel j'évolue depuis deux semaines. « Tu as dit ne pas vouloir recevoir de visite de personne, mais le parchemin…Est-ce que c’est pour ton collègue ? Je comprendrais, si tu voulais le faire venir, c’est seulement que…» Sans avoir eu conscience d'avoir fermé les yeux, mes paupières cillent en se rouvrant sur le visage inquiet de Fredrikke. Mes sourcils se sont froncés d'orage sous le sens de ses paroles. « Je me sens pas en état de me prendre d’autres coups. Pas avant quelques jours. » Plusieurs choses me chiffonnent, et notamment qu'il puisse encore considérer que je sois un potentiel danger pour lui cette nuit malgré toutes mes tentatives pour le rassurer sur la question. Soit il ne croit pas un traître mot que je prononce depuis le début - ce qui expliquerait aussi sa réticence à avaler la boisson que je lui avait ramenée - soit il est lui-même trop habitué à mentir à tout va et à profiter de ce genre de situation pour être capable d'accepter que je puisse ne pas vouloir en profiter pour le corriger à mon tour. Les deux propositions loin d'être antagonistes trouvent même des points de concordances. Amères et effrayantes perspectives. « T'es foutrement con, ou ton audition en a pris un coup ce soir Mørk, pour pas capter quand je dis que je suis pas du genre à profiter des situations comme celles-ci pour assouvir mes propres vengeances personnelles. » D'un geste douloureux d'épaule je me redresse, quittant l'appui du mur visiblement trop confortable pour mon corps épuisé, avant de faire quelques pas vers son lit et me planter face à lui. « Je veux pas de visites parce que les collègues seraient pas tellement ravis de voir que je partage ma chambre avec toi et j'ai pas envie de gérer la situation. J'ai demandé du parchemin pour envoyer un hibou à ces dits collègues en effet. J'étais en mission ce soir, l'arrestation s'est relativement bien déroulée mais j'ai été attaqué en traitre juste avant de quitter les lieux. De là c'est flou, je suis pas retournée par le bureau comme prévu, je crois pas. Il me semble avoir fait un message toute à l'heure, mais j'en suis qu'à cinquante pour cent sûr. Je préfère prendre le risque de les prévenir une deuxième fois que je suis en vie, que de pas le faire. » Blumenthal m'en tiendrait profondément rigueur, Markus aussi, et tous les autres. A juste titre. Il n'y a rien de plus angoissant que de perdre la trace d'un collègue en pleine mission et de ne pas avoir de ses nouvelles pendant plusieurs heures. « Je peux pas te demander de me croire sur parole, ça servira visiblement à rien. Je vais quand même le redire une dernière fois : je compte pas te cogner dessus aujourd'hui, ni demain. Pas tant que tu auras pas retrouvé la mémoire. Sauf si tu fais de la merde entre temps, en ta nouvelle âme et conscience. » Une lueur cynique roule dans mes iris à cette idée. Je ne nommerai toujours personne face à lui, mais je songe évidemment à Ozymandias, Ina et Sebastian, entre autre. S'il s'avise d'agir de la mauvaise façon avec eux, je pourrais avoir envie de lui remettre les idées en place. On ne sait jamais après tout jusqu'où le pousse les situations particulières qu'il rencontre avec ses anciennes victimes. « M'oblige pas à le répéter encore une fois, sauf si tu as encore envie de te faire insulter. » J'ai vaguement conscience que mes menaces ne sont rien d'autre que des avertissements d'ours fatigué qui grogne plus qu'il n'a l'intention de sortir les crocs. Les prémices d'un rictus creuse même ma joue dans une fossette marquée. Rire de ma propre bonne humeur légendaire, un grand classique. « T'en fais pas non plus pour moi. Ma haine envers le Fredrikke des années précédentes est bien tenace et elle risque pas de faiblir de si tôt. T'es révélations d'aujourd'hui ne m'empêcheront pas de trouver le sommeil. Au contraire ça m'aide à y voir plus clair et à pas commettre d'erreurs pour la suite. Le reste, ma conscience et comment je gère mes sentiments, j'en fais mon affaire. » J'ai l'habitude des cas de conscience, des fractures mentales entre mes actions sur un instant donné, et l'ensemble de la personne que je suis. Je sais pourquoi j'agis comme je le fais avec lui. Parce que l'homme assis sous les couvertures est un foutu gamin amnésique qui se fait taper dessus tous les jours dans une quête de rédemption impossible. Les gens sont ce qu'ils sont dans le présent, leurs actions témoignent pour eux, et s'arrêter à ce qu'ils étaient dans le passé c'est empêcher les autres de s'améliorer.
Fredrikke Mørk
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Âge : 31 ans, selon les registres officiels.
Statut de sang : Pur
Occupation : Tireur d’élite chiant dans la Brigade des Valkyries.
Fylgia : Taïpan du désert et Phascolarctos cinereus (un koala, quoi.)
Alignement : Enfant de Völuspá
Particularité : Atteint d’amnésie rétrograde, qui n’a pas touché sa mémoire procédurale. Il a oublié qu’il était un gros con, mais il sait encore se servir de sa baguette.
Pseudo : Cappuccino
Serment le : 11/07/2022
Parchemins : 590
Noises : 3831
Gallions : 1
TW : Violence physique et psychologique
Double : Rob Raco
Crédits : Chosen one
Multi-comptes : Dax, Markus et Angelo
« T'es foutrement con, ou ton audition en a pris un coup ce soir Mørk, pour pas capter quand je dis que je suis pas du genre à profiter des situations comme celles-ci pour assouvir mes propres vengeances personnelles. » Je craignais la phrase de trop, qui me ramènerait vers ce que j’ai toujours connu, depuis mon réveil. L’écoeurement. Les insultes. L’agressivité. Et il me semble, au vu de sa réaction, que j’ai finalement prononcé cette phrase. Je révise celles que j’ai prononcées en vitesse, les traits blêmes, en essayant de comprendre d’où vient la méprise. À quel endroit ai-je merdé. Est-ce en lui demandant s’il écrivait à son collègue pour l’inviter ? Probablement. Il a dû interpréter ma phrase comme la crainte qu’il ait finalement changé d’avis et qu’il ait décidé d’inviter des gens pour profiter de la situation. Je sens mes traits blêmir, alors que je regrette ma formulation maladroite. Je m’exprime normalement plutôt bien : pas ce soir. Ce soir, je n’ai rien du charisme naturel de Fredrikke, je n’ai rien de sa facilité à évoluer dans le monde. Je n’ai que mes peurs, mes regrets et mes déceptions. L'homme se redresse en quittant le mur sur lequel il était appuyé, se plantant face à moi. Je m'efforce de ne pas détourner le regard alors que mes mains, échappant à tout contrôle, se mettent à trembler. « Je veux pas de visites parce que les collègues seraient pas tellement ravis de voir que je partage ma chambre avec toi et j'ai pas envie de gérer la situation. J'ai demandé du parchemin pour envoyer un hibou à ces dits collègues en effet. J'étais en mission ce soir, l'arrestation s'est relativement bien déroulée mais j'ai été attaqué en traitre juste avant de quitter les lieux. De là c'est flou, je suis pas retournée par le bureau comme prévu, je crois pas. Il me semble avoir fait un message toute à l'heure, mais j'en suis qu'à cinquante pour cent sûr. Je préfère prendre le risque de les prévenir une deuxième fois que je suis en vie, que de pas le faire. » J’assimile les informations données en hochant la tête, dans l’espoir que les phrases s’arrêtent là, qu’elles ne soient jointes à aucune réplique hargneuse. Je veux préserver le moment de réconfort précédent, même s’il est gris, même s’il est voué à s’arrêter brutalement. Et en même temps, je réfléchis à ses affirmations. Une mission, une arrestation, une attaque en traître…Largement en traître, vu l’état de son dos. Il a passé une soirée bien plus exécrable que la mienne. « Je peux pas te demander de me croire sur parole, ça servira visiblement à rien. Je vais quand même le redire une dernière fois : je compte pas te cogner dessus aujourd'hui, ni demain. Pas tant que tu auras pas retrouvé la mémoire. Sauf si tu fais de la merde entre temps, en ta nouvelle âme et conscience. » Je l’avais compris, du moins, pour aujourd’hui. Et même si une partie de mon crâne, et de mon corps, ne peut s’empêcher de se méfier, je me suis laissé aller, dans les dernières minutes, à croire qu’il ne comptait effectivement pas me cogner dessus. Lui. Mais pour les autres…? Ce serait différent, forcément. Et ce sont ces autres qui m’inquiètent actuellement.
Quant au fait de faire de la merde…c’est toujours possible. Je n’ai pas confiance en moi. Je n’ai pas confiance en Fredrikke. Je redoute mes pulsions. Même quand j’essaie de bien faire, je parviens à tout faire foirer ; jamais le bon geste, rarement les bonnes paroles. Approcher Ina, une amie, faisait partie des choses que je pensais raisonnables et sans risques ; la découverte partielle des plans de Fredrikke m’a fait comprendre que je me plantais. « M'oblige pas à le répéter encore une fois, sauf si tu as encore envie de te faire insulter. » Je ne remarque pas que je me suis davantage enfoncé dans mon matelas. Le tremblement de mes mains sur le gobelet s’est accentué ; je le serre plus fort pour le camoufler. Je ne sais pas comment interpréter les prémices de son rictus, trop effrayé. Faible. Un foutu faible. C’est presque la voix de Fredrikke qui résonne sous mon crâne, alors que j’essaie vainement de reprendre contenance. J’ai réussi à tenir et à acter pendant tellement de mois : pourquoi pas aujourd’hui ? Je ne parviens même pas à imprimer un soupçon de neutralité sur mes traits. Ils trahissent tous mon désarroi, ma crainte et ce bordel d’émotions qui ne cessent de m’agiter. « T'en fais pas non plus pour moi. Ma haine envers le Fredrikke des années précédentes est bien tenace et elle risque pas de faiblir de si tôt. T'es révélations d'aujourd'hui ne m'empêcheront pas de trouver le sommeil. Au contraire ça m'aide à y voir plus clair et à pas commettre d'erreurs pour la suite. Le reste, ma conscience et comment je gère mes sentiments, j'en fais mon affaire. » Je note de nouveau le fait qu’il me distingue du Fredrikke d’avant, tout en ne sachant pas quoi faire des informations qu’il me donne. À ne pas commettre d’erreurs pour la suite…? Je n’ai pas envie de connaître la suite, dont j’ai une vague idée, pas maintenant. Et même s’il me dit de ne pas m’en faire pour lui, je ne peux m’empêcher de m’inquiéter. C’est immédiat, auprès de tous ceux qui ont côtoyé Fredrikke. J’ai le réflexe de m’inquiéter de l’impact de mes actions et de mes paroles sur eux, même si je n’ai aucun contrôle là-dessus. Et dans cette situation, je n’ai clairement aucun contrôle sur rien.
J’inspire, à la recherche d’un équilibre qui me file entre les doigts. Heureusement que je n’étais pas aussi misérable, lors de notre duel. Il aurait capté en moins de cinq secondes. Mais ce rôle que je suis accoutumé de jouer, je ne parviens pas à le reprendre. Tout mon être s’y oppose, avec un écoeurement qui me surpasse. Mes yeux ne veulent pas se durcir. Ils s’entêtent à conserver cette tempête agitée, qui les fait briller trop fort. Mes traits ne veulent pas redevenir neutres. Ils persistent à exposer à nu toutes mes émotions, crûment, sans filtres. Mes mains ne souhaitent pas se calmer. Elles s’agitent seules, comme si elles laissaient enfin éclater toutes les peurs, toutes les appréhensions des derniers mois. Des traîtres. La seule chose que je parviens à faire, c’est fixer mon regard sur l’homme, désireux de ne pas fuir : « Je faisais pas allusion à…à toi. J’avais bien compris, je parlais de… » Visiblement, ma langue aussi a décidé de se foutre de ma gueule. Je la mords, comme si je pouvais ainsi la maîtriser, maudissant ce corps et cette tête qui me lâchent, sans pouvoir en supporter davantage. Je reprends : « Toi, tu veux peut-être pas me cogner, actuellement. Mais… » J’inspire. Mes paupières se ferment et Ashes, pour la énième fois, se déplace. Elle revient proche de mes bras, donnant un léger coup de tête pour dégager le gauche. Je le glisse sur son corps duveteux, sans remarquer le regard plus dur qu’elle lance à l’auror. J’expire, sans parvenir à expirer le mépris que je m’inspire en cet instant, avant de rouvrir mes paupières : «…ton collègue…celui qui est venu l’autre fois chez moi, s’il me voyait ici… » Lui cognerait. Je ne le précise pas. Je ne suis pas en mesure d’aller plus loin, dans mes explications. Et j’ai peur qu’elle ne fasse que provoquer les dites insultes de l’autre homme. L’autre est son pote, je les ai déjà vus ensemble dans le passé, lors des rares moments où j’allais du côté des aurors. J’en suis à ce stade pitoyable où toute menace éventuelle me donne envie de me rouler sous une couverture, pour devenir petit, tout petit, et y disparaître. Je suis méprisable. Et je me maudis, dix fois, cent fois, de ne pas réussir à être plus fort. Mon regard se détourne, alors que je poursuis : « Mais c’est pas nécessaire de te répéter, j’entends ce que tu me dis, vraiment. Je te laisse te reposer.» J’ai déjà trop abusé de sa compréhension et je ne veux pas risquer, par un mot de trop, de provoquer sa colère.
Magni Hammarskjöld
hekseri
muggler
Gif :
Âge : 40 ans (08/08/83)
Statut de sang : Pur
Statut civil : Trop attaché, pour prétendre le contraire. Le cœur baigné dans deux eaux profondes.
Occupation : Auror
Fylgia : Mjöll (Mjöllnir), lézard bleu de Gorgona fouineur et têtu. Il prend la forme d'un ours polaire quand il est auprès de son enfant. Nouvellement il prend la forme d'un chat-tigre nébuleux de façon plus quotidienne
Alignement : Enfant de Völuspá
Allégeance : Clan Styrke et allégeance profonde à Thor
Particularité : Legilimens | se déplace majoritairement à moto, affublé de lunettes de soleil
Pseudo : Artchie
Serment le : 30/11/2022
Parchemins : 1169
Noises : 3841
Gallions : 0
TW : Deuil, deuil périnatal, blessures, insultes
Double : Peter Gadiot
Crédits : (c) true north
Multi-comptes : Alfhild Mørk - Sol Yoonir
Sujets : Magmar - Ozy - Jin - Seb - Jasper - Vigga - The Big M - Helga - Oubliette - Fred - Kai
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@Fredrikke Mørk | 04 mars 2023 - Petit matin
Je suis habituée à mes variations d'humeurs, aux éclats qu'elles prennent parfois, leurs grondements d'orage et leurs exagérations contre lesquelles je ne lutte pas vraiment. Avec le temps, et l'âge, j'assume que les gens me connaissent et y son habitués de force. Ce n'est pas quelque chose que je porte avec fierté, mais c'est ma réalité de caractère. J'ai beau lutter contre, ce tumulte fait partie de moi. Trop prompt à sortir la voix qui roule et les regards chargés. Trop intense. Trop impressionnant, dans certaines occasions. J'oublie que tout le monde ne me connait pas, que tout le monde n'est pas habitué, et qu'un homme blessé qui vient de craquer dans une chambre d'hôpital est tout sauf en état de supporter ces variations-là. Je le vois flancher et blêmir trop tardivement. Aveuglé par mes propres douleurs, mes propres fatigues, mes propres pensées qui tournent comme des vautours pour se partager les dernières miettes de mes forces, je ne prête pas immédiatement attention aux tremblements de ses mains. Son visage a repris la pâleur de ses draps, toute émotion positive s'est figée dans le désespoir de ses traits. Ses mains tremblent quand j'arrête de parler, si fort qu'il a beau tenter de les serrer contre le gobelet de chocolat, je vois nettement les ridules qui en troublent la surface. Aussi rapide que mon humeur s'était assombrie, la culpabilité jaillit. Fontaine de feu dans un océan de ténèbre. Marica Magni, t'énerver sur un gamin ? Sérieusement ? Seul Mjöll réfute, lutte contre la lave qui se déverse dans mes entrailles. Sa désapprobation face à mes sentiments envers Fredrikke est aussi palpable que son silence est éloquent ces derniers temps. Mais je ne prête pas attention à lui, je supporte le poids des iris du gars d'en face qui menacent de sombrer à nouveau. Je tente d'adoucir mon regard, de chasser les ombres et les nuages, mais au même moment un violent frisson de douleur déchire mon dos me forçant à serrer les dents sous le tintement d'alarme qui tambourinent dans mes tempes. « Je faisais pas allusion à…à toi. J’avais bien compris, je parlais de… » Sa voix brise un peu plus la roche, fait fondre les sédiments et enfonce la culpabilité un peu plus loin. Je lui avais pourtant dit, que je n'étais pas la meilleure personne pour le rassurer ce soir, ni pour lui remonter le moral. Je le suis rarement. Bien souvent tout juste capable d'empirer les situations, comme avec Markus. Peut-être pas, peut-être que je mélange tout, mais bordel, c'est l'impression qui domine toute ma vie en ce moment, ces derniers années. L'impression de tout foirer aussi lamentablement que cette nuit, incapable de juste fermer ma grande gueule face à un gars mal-en-point qui cherchait juste un point de neutralité acceptable pour passer la nuit jusqu'à pouvoir retrouver la force de se relever demain. « Toi, tu veux peut-être pas me cogner, actuellement. Mais… » Je devine ce qu'il tente de dire, de me faire comprendre, et une légère flambée de rage gonfle mon coeur malgré moi. Je réfrène l'envie de grogner qui menace de faire rouler d'autres orages contre ses oreilles. Il me fait chier, à ce moment précis, avec sa paranoïa à deux sous qui voudrait sous-entendre que j'ai joué avec les mots face à lui, dans mes discours. Que si moi je ne veux pas cogner, j'aurais fait appel à quelqu'un d'autre pour le faire à ma place ? Est-ce qu'il me prend vraiment pour ce type de personne ? Avec aussi peu d'honneur qu'un fond de caisse à poissons ? «…ton collègue…celui qui est venu l’autre fois chez moi, s’il me voyait ici… » Il le dit, a demi-mot, entre deux respirations hachées et je secoue la tête avec une lueur qui a regagné en intensité sourde. Je ne sais pas quoi faire toute cette inquiétude qui tire le moindre de mes gestes vers une crainte d'attaque cachée. Plus le temps passe dans cette chambre, plus je comprends qu'il réagit comme cela parce qu'il est habitué à imaginer le pire. Toujours. Peut-être bien que Fredrikke aurait imaginé quinze scénarios du genre pour trouver le meilleur moyen de faire du mal à la personne laissée à sa merci. Et que si le jeune tireur d'élite n'a plus les souvenirs d'hier, il garde la mémoire physique, imprimée dans ses nerfs, de ces réflexes mécaniques là. D'imaginer toutes les situations possibles. Encore une fois c'est terrifiant de le supposer. « Mais c’est pas nécessaire de te répéter, j’entends ce que tu me dis, vraiment. Je te laisse te reposer. » Je soupire, une expiration sèche et rugueuse digne des plus beaux renâclement de Mjöll, quand il prenait encore sa forme d'ours polaire. En quelques enjambées supplémentaires, je mange la distance qui me sépare du lit du Mørk. Il suffit de peu de choses, parfois, pour faire basculer les pensées d'une personne vers son contraire. La détresse mentale de l'homme au koala suffit à baisser les dernières barrières, brisant le mur de pierre qui retenait encore mes états d'âme de dissoudre ma conscience. « Marica arrête ça. Si Markus passait réellement cette porte en dépit de mes recommandations, je le laisserais pas te cogner non plus. Je laisserais personne te cogner dans cette chambre ce soir, à part ton médicomage si c'est pour te faire entrer dans le crâne que cette nuit, tu es dans un endroit en sécurité et que ton seul danger, c'est toi-même. C'est pour ça que je veux pas que les collègues viennent, j'ai pas la force de m'expliquer avec eux, ni maintenant ni plus tard. J'ai assez de merde à gérer en ce moment. » Mais de toute façon, Markus ne viendra pas. Je le redoute, autant que j'en suis certain. Je voudrais qu'il vienne, qu'il ressente ce besoin irrationnel de me retrouver après une blessure, comme toujours. Mais trop de choses clochent ces derniers temps entre nous pour que je puisse espérer qu'il se permette un tel élan de soutien. Tout en parlant, mes mains s'activent, replacent les couvertures sur ses épaules, en prenant soin de ne pas toucher sa peau directement. Avec la même attention, j'effleure du bout de la pulpe des doigts le pansement pour vérifier qu'il est encore totalement blanc, avant de m'appuyer légèrement sur le bord de son lit, une main à nouveau sur son épaule, en signe d'apaisement. « J'ai un caractère de merde faut pas le prendre pour toi personnellement. La douleur n'arrange rien, c'est pas contre toi que je suis en colère mais contre les hijueputas qui m'ont attaqués dans le dos. » Je me retiens de parler plus clairement du tatouage, de la magie réveillée par le sortilège, du feu qui brûle mes veines. Ce serait lui donner bien trop d'informations personnelles auxquelles Fredrikke Mørk pourrait avoir l'utilité dans le futur. « Je le répète, je suis pas la meilleure personne pour te remonter le morale, mais je cherche pas à le faire empirer non plus. Tu as besoin de repos, je peux tirer le rideau et baisser la lumière si tu veux finir ta nuit. Moi j'attends ma potion et mes parchemins, et je vais me taire aussi. Si tu as besoin de quelque chose d'autre, n'hésite pas. » Je me redresse, délaissant son épaule, observant une nouvelle fois son bandage, avant de reprendre la direction de ma partie de chambre.
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