Elle laisse la colère gagner, ne retenant pas l’impulsion qu’elle a de lui lancer une remarque trop acerbe, trop agressive, trop tranchante. Elle attaque là où elle sait que ça lui fera mal, agacée par son attitude, agacée par le fait qu'ill prétende ne pas comprendre, qu'il agisse comme si elle découvrait soudainement comme leurs familles fonctionnent. Il refuse de comprendre qu’elle a pu changer d’avis, que le bouleversement a été tel qu'elle a été amenée à tout remettre en question. Ce n'est pas le cas tout de suite, mais elle n'a pas eu le temps de lui en parler. Elle a pensé, un instant après la découverte de ses origines, être d’accord pour oublier. Pour ne plus en parler. Elle est prête à le faire, quand elle sent qu’elle commence à perdre Jasper. Elle est prête à le faire, pour lui. Mais il refuse, mets ses principes en premier, fait passer sa famille, sa lignée, avant leur couple, bien plus réel et tangible à ses yeux.  Il met fin à une relation qui aurait dû être éternelle pour une histoire de sang. Plus rien n’a de sens, depuis leur rupture, si la seule chose dont elle était certaine dans sa vie a pu voler en éclat aussi facilement. Cette valeur placée sur la pureté du sang la dégoûte, à présent, son entourage lui envoyant des signaux contradictoires. Jasper ne veut plus rien avoir à faire avec elle. Ses parents lui disent que la nature de son sang leur importe peu, mais iels lui implorent de ne rien dire. A côté de cela, iels ne portent pas le même jugement sur les autres né.e-moldu.es, insignifiant.es à leurs yeux. Pour Sigurd, elle est choisie, bénie, elle devrait être reconnaissante, de grandir dans une si belle famille plutôt qu’auprès de moldu.es. Elle a du mal à y croire, ne sais pas ce qu’elle a perdu, n’a aucune idée de ce qu’une enfance pareille aurait donné. Elle ne veut plus l’entendre, en a marre de l’hypocrisie de chaque personne à qui elle parle. Lorsque Sigurd se met à l’infantiliser, lui expliquant ce qu’elle a toujours su avec un ton paternaliste, elle craque. Elle veut qu’il voit, lui aussi, qu’il ne devrait pas se contenter de cette vie. Elle veut qu’il réalise qu’il n’est pas libre, qu’il ne pourra pas être heureux. Ses mots sont durs, espérant provoquer une réalisation chez lui. Mais il a un mouvement de recul, son expression offensée lui signalant qu’il l’a bien évidemment mal pris. Les mots qu’il prononce ensuite ne font que le confirmer. « Oh mais il me semble que tu étais bien partie pour être dans une relation hétéronormée et chiante, avec ton Jasper. On t’entendait pas t’en plaindre, au contraire ! Toujours à le défendre quand tes parents émettaient la moindre réserve. » Elle le regarde, ses iris virant au rouge, la colère battant contre ses tempes. Il semble oublier que cette vie lui aurait convenu, avec Jasper, tandis qu’iels savent aussi bien l’un que l’autre que Sigurd serait malheureux dans ce genre de situation. Mais elle garde sa réflexion pour elle, ne veut pas lui donner l’argument pour qu’il l’utilise contre elle : qu’elle se serait satisfaite de cette vie mais qu’elle l’a perdue. « Évidemment ça doit être très humiliant après avoir passé autant de temps à le justifier, lui et sa famille,  lui et son sang-mêlé. Ce pauvre Jasper qui n’est même pas invité aux événements des Douze… Tous ces efforts pour redorer son image, tout ça pour qu’il te rejette si facilement en apprenant que tu es née-moldue. Dire qu’il n’a même pas été foutu de te garder après toutes ces années. Je suppose que ça ne devait pas être un amour sincère finalement... Alors ne compare pas ma famille à ça. » Elle le fixe, bouche entrouverte sous le choc, les mots au bord de ses lèvres mais l’émotion l’empêchant de les prononcer. Elle se sent trahie, blessée qu’il lui parle ainsi, mais elle se rappelle qu’elle vient de faire pareil. Le cœur battant à tout rompre, elle ajuste sa position sur le canapé, s’éloigne d’avantage de lui. « Garde ma relation avec Jasper en dehors de ça, tu ne sais pas de quoi tu parles, » crache-t-elle, vexée. « Et on sait très bien tous les deux que tu aurais été malheureux, toi, à ma place, mais ce n’est pas une raison pour projeter ton mal-être sur moi. » Elle referme la bouche, inspire profondément, son rythme cardiaque ne faisant qu’augmenter à mesure qu’elle s’énerve. « Tu ne devrais pas t’en contenter. Ta famille se sert de toi, comme elle l’a fait avec moi, comme elle le fait avec Jasper. Tu ne penses pas que tu mérites mieux que ça ? » Elle essaye un instant de recentrer la conversation sur son intention, qu’elle n’a pas entièrement réalisée. Mais ses mots sur ce que Jasper penserait supposément d’elle et de leur relation lui restent en tête, résonnent dans son esprit, et encore une fois, elle se sent trop blessée pour garder la tête froide. « En soit, ça te va très bien tant que tu peux te reposer sur leur fortune et ne pas lever le petit doigt, c’est ça ? C’est vraiment ton but, d’être rentier toute ta vie et de ne jamais rien accomplir par toi-même, de ne jamais avoir ta propre valeur ? » Nouvelle provocation, nouvelle tentative. Mais elle sait déjà que c’est peine perdue, que Sigurd est trop impliqué, trop lié à leur entourage pour s’en défaire aussi facilement.