« Tu vois ? Ne fais pas de bruit, il va bientôt éclore. »

Son premier souvenir remonte à ses cinq ans. Il se souvient qu’il était dans les bras de sa mère, Milly Brynjolf, et il ne pouvait pas détacher son regard de l’œuf, de l’être qui remuait à l’intérieur. Il se souvient avoir poussé un petit cri lorsque le dragonneau a percé sa coquille, par surprise. Et puis, il lui a semblé qu’il était incapable de détacher son regard de l’animal, qui s’extirpait difficilement de l’œuf, poussant des petits cris. Presque immédiatement, des membres de la famille s’approchèrent doucement pour s’occuper du petit.

« Nous avons beaucoup de chance ici, tu ne crois pas ? C’est un petit miracle auquel tu viens d’assister. Ce petit dragon avait besoin d’attention particulière avant son éclosion mais il va bientôt aller rejoindre sa mère. »

Les dragons l’ont toujours fasciné, depuis aussi loin qu’il puisse se souvenir. En même temps, ils étaient toute une ribambelle de gamins dans une réserve de dragons, qui tannaient leur parents sans arrêt pour pouvoir aller les voir. Ils étaient rares, ceux qui ne leur accordaient pas plus d’attention que ça. Certains en avaient peur, et ne voulaient pas s’en approcher, mais c’était cette crainte teintée d’admiration, une peur somme toute naturelle envers un animal si puissant qu’il pouvait vous tuer sans même s’en rendre compte. Ils n’avaient pas le droit de s’en approcher, évidemment, ni même de simplement entrer dans les lieux de vie des dragons sans être accompagnés. Ils ont de nombreuses fois essayé d’échafauder des plans pour échapper à la surveillance des Adultes, qui ne semblaient être là que pour les embêter, mais Cosme y participait par principe, sans avoir vraiment envie de mettre leurs plans à exécution. Il craignait les dragons, et ils le fascinaient.

Il se souvient avoir passé une enfance qu’il considérerait, maintenant, comme merveilleuse. Il avait tout ce qu’il pouvait vouloir, en réalité. Il était très proche de ses cousins, de sa famille. Ils refaisaient le monde depuis leur avis d’enfants de six, sept, huit, neuf ans. Les Adultes semblaient être une autre espèce étrange, qui ne comprenaient pas grand-chose à leur vie, mais leurs parents étaient spéciaux, ils se détachaient du reste des autres Adultes, alors tout allait bien.

Il se souvient d’un jour, il devait avoir cinq ou six ans, où il était collé contre ses parents sur leur canapé, d’avoir attrapé les longs cheveux blonds de sa mère, de les avoir comparé avec les siens, si sombre. Milly lui a souri, et il a ri. Il n’avait pas l’impression d’être différent, pas à son âge, pas avec ses parents, pas avec ses cousins. En grandissant, il a compris que ses parents ne l’avaient pas conçu, mais il n’y accordait aucune importance. Il ne ressemblait pas à ses cousins, mais il n’était pas le seul dans ce cas dans leur immense domaine, et il savait faire partie de la famille, et c’était ce qui était le plus important.

Beaucoup de choses ont changé, lorsqu’il est entré à Durmstrang. Il a eu beaucoup de mal à s’ajuster à l’ambiance de l’école, aux centaines d’étudiants, au bruit permanent, aux règles et aux cours. Lors de la cérémonie d’allégeance, il a prêté serment à Odin, à Brunhilde, et rejoint le rang des Styrke. En réalité, il s’est toujours senti attiré par le clan de Frigg, par les valeurs revendiquées par les Skjerme, mais il était déjà assez conscient comme ça de ses différences, et n’avait pas envie de se différencier un peu plus de sa famille, et surtout, il avait envie de rester avec Vanja, qui faisait sa rentrée en même temps que lui. Même si les Brynjolf ne prêtent pas beaucoup d’importance à ces histoires de clan, et qu’il sait que ça n’aurait absolument rien changé, il y avait quelque chose de rassurant à rester dans ce que l’on pouvait attendre de lui. Il savait déjà que toute sa vie, il marchera le long d’un chemin qui l’obligera à se battre simplement pour son droit d’exister. Il avait besoin d’être rassuré. Il avait besoin de demander à Brunhilde de lui prêter un peu de sa force pour lui permettre de surmonter les épreuves qu’il aura à affronter.

Dès sa première année, il avait du mal avec les autres élèves. Parce qu’il ne comprenait pas forcément comment ils fonctionnaient, pourquoi il se sentait différent, pourquoi ils se moquaient de lui. Certains venant de familles dites prestigieuses insultaient son statut de sang, tout le monde pensant qu’il était un né-moldu, une énième pièce rapportée des Brynjolf, et ces insultes le laissaient avec un sentiment d’injustice profond, d’incompréhension et de colère.

« Quelque chose ne va pas ? » Il croise le regard de son père, Kjell, et hausse les épaules. Ses parents pouvaient bien voir que depuis qu’il était rentré de Durmstrang, Cosme était bien plus bougon, plus renfermé. Il n’est pas très démonstratif en général, mais ses parents ont toujours été une exception. Il grommelle une réponse et secoue la tête. Puis, après une hésitation de quelques secondes, il se lance:

« Ils disent que vous êtes pas mes vrais parents. » Il hausse les épaules à nouveau, comme pour dire qu’il s’en fiche, même si ce n’est pas le cas, évidemment. Il aimerait que ce genre de remarques ne l’atteignent pas, mais bon. Il jette un regard détourné à sa mère, et il la voit soupirer. « Et qu’est-ce que tu en penses ? » Il hésite à nouveau. Il sait que c’est stupide, mais ça l’énerve quand même. Et il ne sait pas quoi faire de cette colère, il ne sait pas trop vers qui elle est dirigée. « C’est stupide, » dit-il en secouant la tête, à mi-voix. Sa mère lui répond quelque chose, qu’il n’entend pas. Il relève la tête, lui demande de répéter. Il ne le sait pas encore, mais il commence déjà à perdre l’audition. « Est-ce que tu le penses vraiment, ou tu ne fais que répéter ce que tu penses qu’on veut entendre ? » Soudainement, il se sent mal à l’aise, au milieu de cette ambiance pesante qui accompagne les conversations sérieuses. Il ne répond pas, parce qu’il en a aucune idée. Il ne sait pas trop ce qu’il en pense. Il sait que Milly et Kjell sont ses parents, et qu’ils l’aiment plus que tout, et il ne voudrait que rien ne change, mais une partie de lui est en colère.

« Je suis une née-moldu ? » Demande-t-il, en ayant marre de tourner autour du pot. Est-ce qu’avoir une réponse à cette question changera quoi que ce soit dans sa vie ? Non, mais il a besoin de poser la question quand même. Il ne peut pas juste hocher la tête et clore le sujet. Il voit ses parents échanger un regard. Ils avaient probablement attendu cette discussion. Cosme sait que quelque chose ne va pas, parce que les autres nés-moldus que les Brynjolf ont adopté, personne ne leur a jamais rien caché. Mais lui, personne ne lui a dit qui étaient ses parents, où ils étaient. « Si elle pose des questions, c’est qu’elle est prête à savoir. » Soupire Milly en direction de Kjell, qui lui lance un regard lourd de sens. Désormais, c’est trop tard pour reculer. Cosme sent son coeur s’emballer. D’un coup, il ne se sent plus vraiment prêt à avoir des réponses. Son père lui dit d’attendre, quitte la pièce et revient quelque minutes plus tard, avec quelque chose dans les mains. Il tend un médaillon à Cosme, un médaillon qui s’ouvre sur une photo. Cosme fixe les deux personnes qui s’y trouvent, un homme et une femme, qui lui sourient, lui font des signes de la main. Et il sait. Sa tête tourne, il a besoin de s’asseoir.

Au bout de quelques minutes, sans que ses parents ne le pressent, il réussit à articuler quelques mots. « Pourquoi ? Ils sont… ? » Ses parents échangent un nouveau regard, triste cette fois. « On ne sait pas. » Lui répond Milly. « Quelqu’un est venu nous trouver, et nous a dit que c’était dangereux pour toi de rester avec tes parents. Tout ce qu’on a, c’est ce médaillon. » Il fixe la photo à nouveau, traversé par des émotions contradictoires.

Pendant des mois, il a d’abord essayé d’oublier ces personnes, parce qu’il avait du mal en cours, qu’il avait d’autres problèmes et qu’au fond, il leur en voulait. Et il s’en voulait de leur en vouloir. Il leur en voulait de l’avoir abandonné, mais il ne pouvait pas regretter d’avoir grandi parmi les Brynjolf. Et se torturer l’esprit à leur sujet ne les fera pas réapparaître, de toute façon. Il aurait aimé pouvoir leur poser des questions, mais c’était tout bonnement impossible. Alors autant les oublier. Le médaillon était dans un tiroir, au fond de sa table de chevet. Lorsqu’il savait être seul, il l’ouvrait, et fixait cet homme et cette femme, parfois pendant des heures, se demandant à quoi pouvait bien avoir ressemblé leur vie. S’ils pouvaient être encore en vie, ce qu’ils pouvaient bien faire à cet instant. L’idée qu’ils puissent continuer à vivre, qu’ils poursuivaient un chemin qui ne croiserait jamais le sien, il avait énormément de mal à le concevoir. À cette époque, il n’avait pas encore réussi à répondre à cette question : est-ce que l’univers pouvait-il être aussi cruel ?

Les années suivantes, il décida que la réponse était oui. Il se sentait de plus en plus mal dans son corps, ne supportait plus que l’on parle de lui au féminin. À peu près au même moment, son audition se dégradait de plus en plus, et l’année de ses 14 ans, il était désormais clair qu’il allait devenir complètement sourd. Lui qui avait déjà du mal en cours du s’accrocher pour ne pas se laisser complètement distancé, aidé par certains de ses professeurs, même s’il détestait devoir leur demander de l’aide. L’année de ses quinze ans, il demanda à Vanja si elle pouvait l’appeler Cosme, et utiliser des pronoms masculins pour lui parler. Et même ce changement, qui pourtant lui était nécessaire et vital, lui a été difficile. Il avait l’impression d’échouer à quelque chose. Il n’arrivait pas à mettre le doigt sur ce qui n’allait pas, parce que sa famille l’acceptait, que ses amis le soutenaient. Mais il avait ce sentiment, au creux de son estomac, un sentiment de malaise qui accompagnait son existence.

À cette période, la seule chose qui semblait avoir du sens dans sa vie, c’était l’espace. Les étoiles, les astres, se mouvant lentement sans jamais se demander s’ils allaient dans la bonne direction. Il passait des heures à les observer, s’extirpant de son dortoir la nuit pour s’aventurer dans le parc tout en sachant pertinemment quelles punitions l’attendaient s’il se faisait prendre. Déjà à l’époque, les façons de faire de Durmstrang le révoltaient, et il mourrait d’envie de s’y opposer, sans jamais vraiment oser par peur des conséquences. La plupart du temps, il réussissait à rentrer dans son dortoir sans se faire prendre, mais il a atterri plusieurs fois à la salle d’isolement. Cette salle, complètement barbare, dans laquelle Romy venait le voir parfois et lui apportait de quoi tenir le coup, et Cosme allait souvent lui dire à quel point il trouvait ça complètement stupide et dépassé, et ils essayaient d’arranger un peu les choses, au moins entre eux deux, et il se sentait un peu mieux après. Mais malgré la terreur que cette salle lui inspirait, il ne pouvait pas s’en empêcher. Les étoiles l’apaisaient, il imaginait des dizaines de mondes différents, des mondes qui ressemblaient à la Terre et d’autres totalement opposés, il s’imaginait explorer cet univers si étrange. Il se perdait complètement dans ses pensées, étant à l’époque très mal dans sa peau, et persuadé que tout serait forcément mieux ailleurs, loin, loin d’ici.

Ce sentiment ne s’est pas arrangé avec la service militaire, l’année de ses dix-huit ans. Profondément anti-système et anti-militaire, Cosme était en perpétuelle opposition avec ce qu’on lui demandait de faire. Il avait aussi atteint un ras-le-bol général et avait beaucoup de mal à digérer l’autorité, surtout dans un climat martial, ce qui fait qu’il n’a pas passé une très bonne année, au contraire. Il n’hésitait pas à éteindre ses implants cochléaires quand il était trop énervé ou qu’il en avait assez des ordres stupides qu’on lui donnait, ce qui ne se finissait jamais bien pour lui. Il avait également envie, besoin de commencer sa transition physique, mais était beaucoup trop anxieux, et n’avait absolument pas envie de l’entamer avant son service militaire, par peur d’une différence de traitement de la part d’autres élèves ou même du corps enseignant, et parce qu’il savait qu’il n’aurait peut-être pas tenu l’année s’il ne l’avait pas passée littéralement collé à Vanja.

À la fin de cette année, il savait que deux mois de vacances n’auraient pas été suffisants pour se remettre du stress qu’il avait subi. Il est resté au domaine familial l’année suivante, sans vraiment savoir s’il faisait une année de césure ou bien s’il arrêtait définitivement ses études. À l’époque, il voulait encore être astromage, et abandonner son rêve lui faisait bien trop mal au coeur, même s’il doutait de ses capacités à réussir. Il a passé un an dans sa famille, à s’occuper des dragons, de la réserve. Et s’il s’est rendu compte que faire ce travail toute sa vie ne le dérangerait pas plus que ça, quelque chose lui manquait. Quelque chose l’appelait à Durmstrang à nouveau, comme s’il n’avait pas envie de laisser l’école gagner, comme s’il avait envie de prouver, à lui-même et au reste du monde, qu’il pouvait réussir. Alors il s’est inscrit dans l’institut de la nature et il a demandé, timidement, à Romy de l’aider à faire en sorte que l’école reconnaisse son prénom et son genre.

Et ça a tout changé, pour le mieux. Il avait l’impression de finalement réussir à respirer après avoir passé des années en apnée. Et si son amour pour l’espace était toujours bien présent, il sentait que son attirance pour les étoiles était désormais moins malsaine, plus apaisée. Il ne ressentait plus ce besoin total de s’en aller, ce sentiment d’être en total décalage avec le monde qui l’entoure. Évidemment, il ne rentre toujours pas dans une case précise, mais il n’a plus vraiment l’impression que le fait d’être différent l’empêche de faire quoi que ce soit. Alors il s’est demandé s’il voulait vraiment toujours être astromage ou pas. Au cours des derniers mois, ses aspirations ont changées, et il se dit que l’astronomie peut très bien rester une passion pour lui, et non plus forcément une vocation. Désormais, il se dit qu’il sera peut-être plus utile s’il se consacrait à l’éducation, s’il permettait aux nés-moldus de mieux s’intégrer dans la société sorcière. S’il pouvait aider les enfants complètement perdus, comme il l’avait été, à se faire une petite place dans ce monde.

à propos de ta fiche MON COUSIIIIIIIIN MON FIIIIIIIIIIIILS
bon ben euh après cette overdose de cutance, j'te valide et au lit hein j'vais faire plein de beaux rêves des aventures de cosme dans les étoiles

bienvenue dans le groupe Styrke Ton personnage fait officiellement partie des sujets du Royaume de Scandinavie sorcière, étudiant.e, professeur.e ou résident.e de Göteborg, il ne lui reste plus qu'à honorer sa nouvelle couleur. Tu trouveras ci-dessous des liens qui te seront utiles au cours de la suite de ton aventure sur Doomsday. Bon jeu !